vendredi 20 juin 2014
Comment l’Otan a organisé l’invasion de l’Irak
Certains commentateurs attribuent l’accueil des jihadistes en Irak à Ezzat Ibrahim al-Duri, une très haute personnalité baasiste.
Sur le fond, dans la culture irakienne, il n’est pas improbable qu’un dirigeant bassiste (donc laïque) décide de se venger en soutenant objectivement un groupe religieux sectaire.
Problème : on avait annoncé la mort d’al-Duri d’une leucémie, en 2005, et on ne dispose d’aucune photographie de lui depuis. Il aurait aujourd’hui 72 ans.
• Le gouverneur de la province de Ninive, Assir al-Noujaïfi, a accueilli les jihadistes, donné l’ordre à l’armée de se disperser et appelé la population à se soumettre.
Au début du mois, Assir al-Noujaïfi se trouvait en Turquie. Il y a été reçu personnellement par le Premier ministre, Recep Tayyip Erdoğan, et par le chef du MIT (services secrets), Hakan Fidan.
• La presse atlantiste et du Golfe commence à présenter les événements en Irak comme une révolte contre le gouvernement al-Maliki. Dans cette perspective, elle présente l’ÉIIL comme une composante parmi d’autres d’un vaste mouvement populaire sunnite (ce qui est absolument faux). Dès lors, il est prévisible qu’elle devrait prochainement présenter les quelques responsables administratifs corrompus qui ont accueilli les jihadistes comme formant une « opposition modérée ». On retrouverait là, le modèle de communication déjà appliqué en Syrie où les membres rémunérés de la Coalition nationale sont présenté comme formant une « opposition modérée » bien qu’ils soutiennent les jihadistes.
• Bien qu’étant entré en conflit avec Ayman al-Zawahiri et rompu avec Al-Qaïda, l’Émirat islamique en Irak et au Levant (ÉIIL) a obéi aux ordres du leader d’Al-Qaïda du 2 mai 2014 en attaquant l’Irak. Cette armée privée pourrait donc revenir au sein de l’internationale terroriste.
• Le déplacement des principales troupes de l’ÉIIL de la Syrie vers l’Irak a affaibli ses positions au pays de Cham. Aussi l’armée arabe syrienne lance-t-elle une offensive sur Rakka, occupée par les jihadistes depuis mars 2013.
• Les États-Unis ont retiré leur soutien sur le web à l’ÉIIL, le 19 juin 2014. Google a retiré de sa plateforme GooglePlay l’application « L’Aube des victoires » qui permettait de recevoir en direct les communiqués des jihadistes. YouTube a fermé la chaîne de télévision « À la conquête de Jérusalem ». Tandis que Twitter a fermé plusieurs comptes proches de l’ÉIIL.
jeudi 19 juin 2014
Les peshmerga kurdes, "première armée d'Irak"
Peshmerga (en kurde : Pêşmerge) est un terme utilisé par les Kurdes pour qualifier généralement les combattants kurdes. C'est aussi le terme officiel du Gouvernement régional du Kurdistan pour qualifier les forces armées du Kurdistan irakien.
Le mot Peshmerga persan : pīs āz merga, پس از مرگ, face à la mort ; kurde : pêş (devant, au devant) + merg (mort) + a (suffix. 3e personne), پێشمەرگە , qui est au devant de la mort désigne un combattant qui se battra jusqu'à la mort.
Les forces armées du Kurdistan irakien, les peshmerga, combattent là où l’armée irakienne a été tenue en échec par l’État islamique en Irak et au Levant. Qui sont-ils ? Quelles sont leurs revendications ? Éléments de réponse.
Les peshmerga, rempart ultime contre l’État islamique en Irak et au Levant (EIIL) ? Depuis le début de l’offensive djihadiste en Irak, ces combattants kurdes parviennent à maintenir l’EIIL à distance, alors que l’armée irakienne, elle, s’est effondrée dans le nord du pays.
Désormais massivement déployés dans les territoires disputés entre le gouvernement autonome kurde, basé à Erbil, et le pouvoir central de Bagdad, ils sont parvenus à reprendre la ville stratégique de Kirkouk, le 12 juin dernier. Une victoire qui place le Kurdistan irakien en position de force vis-à-vis du gouvernement national. "Maliki [le Premier ministre irakien, NDLR] sait qu’il aura du mal à se passer de l’aide kurde. Sans les peshmerga, qui sont des soldats aguerris, l’armée irakienne peinera à reconquérir seule les villes aux mains des djihadistes", explique Karim Pakzad, spécialiste de l’Irak à l’Institut des relations internationales et stratégiques (Iris).
Qui sont les peshmerga ?
Les peshmerga, littéralement “ceux qui affrontent la mort”, sont les combattants des forces armées du Kurdistan irakien, région autonome située dans le nord du pays. Aussi bien opposés à Bagdad qu’aux islamistes, ils ont toujours su repousser les attaques de l’EIIL, même par le passé. "Depuis 1992, cette armée a préservé la sécurité intérieure du Kurdistan et a souvent servi de fer de lance aux actions de contre-guérilla, lors de la période de présence américaine", explique Michel Goya, historien militaire, dans une tribune publiée par le Huffington Post.
Ces succès militaires ont permis aux Kurdes “de reprendre pied dans les régions dont ils avaient été chassés sous Saddam Hussein”, affirme-t-il.
Artillerie lourde, hélicoptères, chars mais aussi deux divisions d'infanterie inscrites dans l'ordre de bataille de l'armée irakienne… La force militaire du Kurdistan irakien est particulièrement importante proportionnellement à l’étendue de son territoire. Les peshmerga seraient également forts de quelque 200 000 à 250 000 hommes, longtemps entraînés et équipés par l'armée américaine. Autant d’éléments qui en font la force militaire “la plus puissante” du territoire irakien, devant l’armée régulière, selon Michel Goya.
Pour autant, “les capacités offensives de l'armée kurde sont également limitées”, nuance le spécialiste. “Elle peut, au mieux - mais ce serait déjà considérable-, réoccuper Mossoul et contrôler la frontière avec la Syrie, en liaison avec la guérilla kurde syrienne sur place [...] Elle peut même, en conjonction avec les forces de Bagdad, réoccuper le Tigre mais ce serait sans doute pour s'y engager dans une contre-guérilla permanente.”
Quelles sont les revendications des combattants kurdes ?
L’actuelle position de force des peshmerga est l’occasion de passer leurs revendications au premier plan parmi lesquelles :
Kirkouk
Considérée comme capitale historique du Kurdistan aux yeux des peshmerga, Kirkouk est l'une des plus grandes villes pétrolières d'Irak. Depuis l’intervention américaine de 2003, ils réclament que la ville revienne dans leur giron par le biais d’un référendum, ce qui leur permettrait de bénéficier directement des revenus de l’or noir et d’atteindre une indépendance économique totale. Mais Bagdad s’y refuse farouchement et a déjà repoussé à maintes reprises l’organisation d'un scrutin.
Indépendance
En Irak, le Kurdistan bénéficie d’un statut particulier de province autonome depuis 2005, avec comme capitale officielle la ville d’Erbil. Mais le gouvernement kurde ne cache pas son ambition de se désolidariser de l’Irak pour fonder son propre état indépendant. Actuellement, Bagdad est l’un des seuls gouvernements, avec celui de Téhéran, à reconnaître le Kurdistan en tant qu’entité politique régionale. En Turquie et en Syrie, les Kurdes ne sont pas considérés comme étant établis dans une même région. Au vu de l’efficacité des peshmerga sur le terrain, Bagdad pourrait bien être contrainte de concéder l’indépendance au Kurdistan en échange d’une aide militaire des combattants kurdes pour débarrasser l’Irak des djihadistes de l’EIIL.
Les peshmerga sont très populaires chez les Kurdes qui se disent globalement confiants en la capacité de ces combattants à protéger leur territoire. Ils parviennent également à créer un consensus plus large, jusque dans la région voisine de Ninive et même dans les villages chrétiens où ces combattants n’hésitent pas à prendre les armes pour défendre la population locale.
Preuve de leur popularité, parmi les centaines de milliers de personnes fuyant actuellement les combats, la plupart afflue vers le Kurdistan pour trouver refuge. Selon le gouvernement kurde, au moins 150 000 personnes ont franchi les frontières de la région. Des chiffres qui pourraient rapidement augmenter au vu de l’exode massif que les affrontements entraînent : pour la seule ville de Mossoul, 500 000 habitants ont fui lorsque les djihadistes ont pris le contrôle.
En d’autres termes, le Kurdistan - qui a été relativement épargné par les attentats ces dernières années - apparaît aux yeux de la population comme une zone sécurisée et encadrée par une armée puissante qui n’a perdu “que” sept soldats depuis les début de l’offensive des islamistes. Il faut dire que, pour l’heure, les djihadistes ont essentiellement concentré leurs attaques sur l’armée irakienne, peut-être pour éviter de se mettre totalement à dos les Kurdes, à majorité sunnites.
Les Etats-Unis ont formé l'EIIL dans une base secrète de Jordanie
Les membres de l'Etat islamique d'Irak et du Levant, ou EIIL, ont été formés en 2012 par des instructeurs états-uniens travaillant dans une base secrète en Jordanie, selon des responsables jordaniens bien informés.
Les fonctionnaires ont déclaré que des dizaines de membres de l'EIIL ont été formés dans le cadre de l'aide secrète aux insurgés visant le régime du président syrien Bachar al-Assad. Les fonctionnaires ont déclaré que cette formation n'a pas été conçue pour servir à une future campagne en Irak.
Les autorités jordaniennes ont déclaré que tous les membres de l'EIIL qui ont reçu une formation US pour combattre en Syrie ont d'abord été sélectionnés en raison de l'absence de liens avec des groupes extrémistes comme al-Qaida.
En Février 2012, WND a été le premier à révéler que les Etats-Unis, la Turquie et la Jordanie ont constitué une base d'entraînement pour les rebelles syriens dans la ville jordanienne de Safawi dans la région désertique au nord du pays.
Ce rapport a depuis été corroboré par de nombreux autres compte-rendus dans les médias.
En mars dernier, l'hebdomadaire allemand Der Spiegel a rapporté que les Etats-Unis entraînaient des rebelles syriens en Jordanie.
Der Spiegel a rapporté que des participants et des organisateurs s'entrainaient, mais qu'il n'était pas clair si les Etats-uniens travaillaient pour des entreprises privées ou émanaient de l'armée US, le magazine a toutefois déclaré que certains organisateurs portaient des uniformes. La formation en Jordanie aurait porté sur l'utilisation des armes antichars.
Le magazine allemand a rapporté que quelque 200 hommes ont reçu cette formation au cours des trois mois précédents dans le cadre d'un plan états-unien visant à former un total de 1 200 membres de l'Armée syrienne libre dans deux camps dans le sud et l'est de la Jordanie.
Le journal britannique The Guardian a également signalé qu'en mars dernier, les formateurs US aidaient les rebelles syriens en Jordanie en compagnie d'instructeurs britanniques et français.
Selon Reuters, le porte-parole du Département de la Défense des États-Unis a refusé de commenter immédiatement le rapport du magazine allemand. Le ministère français des Affaires étrangères et de la défense de la Grande-Bretagne ont également déclaré qu'ils se refusaient également à faire tous commentaires à Reuters.
Les autorités jordaniennes ont contacté WND devant les craintes que les violences sectaires en Irak se répercutent dans leur propre pays ainsi qu'en Syrie.
L'EIIL a déjà posté une vidéo sur YouTube menaçant de se déplacer en Jordanie et de «massacrer» le roi Abdallah, qu'ils considèrent comme un ennemi de l'Islam.
WND a rapporté la semaine dernière que, selon des sources du régime jordanien et syrien, l'Arabie saoudite a armé l'EIIL et que les Saoudiens sont une force motricedans le soutien de ce groupe lié à al-Qaïda.
WND a en outre indiqué que, selon une source chiite en contact avec un hautfonctionnaire du gouvernement du Premier ministre irakien Nouri al-Maliki, l'administration Obama avait eu connaissance depuis deux mois que le groupe lié à al-Qaida qui a pris plus de deux villes irakiennes et maintenant menace Bagdad a également entraîné des combattants en Turquie.
La source a déclaré à WND qu'au moins l'un des camps d'entraînement du groupe de l'Etat islamique d'Irak et du Levant et en Syrie, l'EIIL, se situe dans les environs de base aérienne d'Incirlik près d'Adana, en Turquie, où se trouvent du personnel et du matériel états-uniens.
Il a déclaré Obama "complice" dans les attaques qui menacent le gouvernement Maliki que les Etats-Unis ont pourtant contribué à installer lors de la guerre en Irak.
La source a déclaré que, après la formation en Turquie, des milliers de combattants de l'EIIL ont été en Irak par le biais de la Syrie pour se joindre à l'effort d'établir un califat islamique soumis à la loi islamique stricte, ou Charia.
Bagdad a demandé aux Etats-Unis de mener des frappes aériennes contre les jihadistes
Depuis leur avancée fulgurante de ces derniers jours, les jihadistes de l’Etat islamique en Irak et au Levant (EIIL) se heurtent à une résistance plus forte de l’armée irakienne, qui semble avoir relevé un peu la tête ces dernières heures. Ainsi, elles auraient repris le contrôle de deux villes située sur la route de Bagdad le week-end dernier.
Toutefois, rien ne dit qu’elles pourront continuer à s’opposer à l’offensive de l’EIIL, laquelle a permis aux jihadistes d’obtenir des gains territoriaux relativement importants en quelques jours. Aussi, le ministre irakien des Affaires étrangères, Hoshyar Zebari, a indiqué, ce 18 juin, que son pays a « officiellement demandé l’aide de Washington en vertu de l’accord de sécurité (avec les Etats-Unis) pour mener des frappes aériennes contre les groupes terroristes ».
Le 14 juin, le Pentagone a annoncé l’envoi du porte-avions USS George H.W Bush dans les eaux du golfe arabo-persique afin de permettre au « commandement en chef de disposer de plus de flexibilité si une opération militaire américaine devait être déclenchée pour protéger des vies américaines, des citoyens ou nos intérêts en Irak ». Le bâtiment dispose notamment des F/A-18 du Carrier Air Wing Eight. Le navire de transport amphibie USS Mesa Verda, avec 550 Marines à bord ainsi que des V-22 Ospreys, a également rejoint la région, dans le cas où il faudrait évacuer le personnel diplomatique de l’ambassade américaine à Bagdad.
De son côté, l’Iran, via Mohammad Nahavandian, le chef de cabinet du président Rohani, a fait savoir son hostilité une « une intervention étrangère non concertée en Irak comme dans tout autre pays ». Mais ce responsable iranien a aussi précisé qu’ »une aide de l’extérieur ne devrait intervenir qu’à la demande et en appui des autorités irakiennes ». Mais, a-t-il cependant estimé, « la population et le gouvernement irakiens ont assez de ressources et de détermination pour se défendre ».
Par ailleurs, M. Nahavandian a lié toute éventuelle coopération en Irak avec les Etats-Unis aux progrès des négocations portant sur le dossier du nucléaire iranien… Mais face à la menace des jihadistes – qui sont tous sunnites, faut-il le rappeler), l’Iran (chiite) pourrait toutefois intervenir chez son voisin, lequel abrite la plupart des lieux saints du chiisme.
« À propos des lieux saints des imams chiites (en Irak), nous prévenons les grandes puissances, leurs laquais, les tueurs et les terroristes, que le grand peuple iranien fera tout pour les protéger, a ainsi déclaré le président Rohani, lors d’un discours prononcé à Khoram-Abad. Et de citer 4 villes irakiennes (Kerbala, Najaf, Kazimiyah et Samarra) où des centaines de milliers de pélerins iraniens se rendent chaque année pour se recueillir sur les mausolées d’imams chiites.
Il ne s’agit que d’une éventualité. Car pour le moment, le président Rohani estime qu’il y a « il y a suffisamment de volontaires chiites, sunnites et kurdes en Irak (pour) combattre les terroristes en Irak ». Cependant, des sources occidentales ont indiqué que Ghassem Souleinami, le chef de la Force Qods des Gardiens de la Révolution, chargée des opérations militaires extérieures secrètes, a récemment fait un déplacement à Bagdad pour y rencontrer Nouri al-Maliki, le Premier ministre irakien.
Enfin, le chef d’état-major des forces armées iraniennes, le général Hassan Firouzabadi, a écarté tout idée d’intervention… directe. » Il n’y a pas besoin de forces militaires iraniennes en Irak », a-t-il dit. Quant à une éventuelle coopération avec les Etats-Unis, l’officier ne veut pas en entendre parler. « Il n’y aura jamais de coopération (…), cela n’a aucun sens », a-t-il affirmé.
mercredi 18 juin 2014
Irak : Al-Baghdadi menace l'Amérique
Ibrahim Awad Ibrahim Ali al-Badri, dit Abou Bakr al-Baghdadi al-Husseini al-Qurashi, Dr. Ibrahim Awad Ibrahim Ali al-Samarrai ou Abou Du'a, est un islamiste irakien, chef de l'État islamique en Irak et au Levant.
Il est le successeur présumé de Hamid Daoud Muhammad Khalil al-Zawi à la tête de l'État islamique d'Irak.
À partir d'octobre 2011, il figure parmi les trois terroristes les plus recherchés par le gouvernement américain qui offre une prime de 10 millions de dollars pour sa capture.
Abou Bakr al-Baghdadi, de son véritable nom Ibrahim Ali al-Badri, est le leader des djihadistes en Irak. © HO - / HO / AFP
Ce n'est pas seulement parce que l'avancée des militants islamistes de l'EIIL l'oblige à prendre quelques mesures de précaution que Barack Obama a envoyé en urgence 275 marines protéger l'ambassade des États-Unis à Bagdad. C'est aussi parce qu'il peut craindre, si par malheur les djihadistes poursuivent leur avantage et s'emparent de la capitale irakienne, que la sauvagerie déjà manifestée dans les villes qu'ils ont prises, comme en témoignent les photos d'exécution de masse diffusées par eux-mêmes, ne s'exerce sur les diplomates américains présents. À défaut de pouvoir frapper l'Amérique.
Pour le moment, l'offensive des fanatiques de la charia semble avoir été enrayée par l'appel à la mobilisation du cheikh al-Sistani, le leader religieux charismatique des chiites d'Irak. Plus que par les discours du Premier ministre al-Maliki demandant à l'armée de se ressaisir. Mais les Américains ont été tellement estomaqués par la débandade presque sans résistance d'une armée largement supérieure en nombre et en matériel, qu'ils croyaient avoir formée pour qu'elle résiste à ce genre d'assaut, qu'ils ne veulent prendre aucun risque pour leurs ressortissants.
C'est que les services américains connaissent plutôt bien le nouveau leader des djihadistes qui se fait appeler Abou Bakr al-Baghdadi. Son véritable nom est Ibrahim Ali al-Badri et il a été prisonnier des Américains entre 2004 et 2009 au camp Bucca, en Irak, après avoir été pris lors de combats contre les militants d'al-Qaida. Lorsqu'il a été relâché, dans le cadre des mesures d'apaisement décidées par Obama, un de ceux qui étaient chargés de sa détention, le colonel Kenneth King, se souvient parfaitement qu'il a dit à ceux qui le gardaient : "Vous verrez, on se reverra bientôt à New York."
Menace terroriste
Simple forfanterie d'un homme délivré de ses geôliers, diront les optimistes. Peut-être. Mais les Américains ont parfois raison de prendre ce genre de promesse au pied de la lettre. D'autant qu'al-Bagdadi savait en disant cela, pas tout à fait par hasard, qu'il s'adressait à des hommes qui, dans le civil, étaient pour la plupart des policiers ou des gardiens de prison de New York. Et depuis le 11 Septembre et l'attaque des avions détournés par les hommes de Ben Laden sur les tours du World Trade Center, symbole de la puissance américaine, au coeur de la ville emblématique de leur influence, les présidents américains ne prennent aucun risque.
Même si la menace militaire directe que font peser les combattants de l'État islamique en Irak et au Levant était rapidement enrayée, avec la mobilisation de la communauté chiite irakienne et du Hezbollah, allié de l'Iran voisin, la menace terroriste, elle, demeurera. Au moins tant que les djihadistes disposeront d'un territoire sanctuarisé et donc de possibles camps d'entraînement pour des apprentis kamikazes venus d'Europe ou d'ailleurs brûlant de frapper les "croisés", comme ils disent.
Le mystérieux leader de l’Etat islamique en Irak et au Levant s’est peu à peu érigé en porte-drapeau de la guerre sainte livrée par les extrémistes sunnites, allant jusqu’à éclipser la nébuleuse Al-Qaeda, avec laquelle la rupture est consommée.
Il est le portrait inversé d’Oussama ben Laden : sur les vidéos, le Saoudien apparaissait soigné, bien mis et, même traqué, au fin fond des âpres vallées de l’Hindu Kush, entre Afghanistan et Pakistan, il n’était jamais sans élégance. Face à la caméra, volontiers complaisant avec elle, il cultivait une image d’aristocrate du jihad international.
Celui qui prétend le remplacer, Abou Bakr al-Baghdadi ne joue pas, lui, sur le registre de la séduction. Au contraire, il fuit les regards, ne se montre jamais, ne dévoile même pas le bout d’une oreille. Il n’existe d’ailleurs que deux photos de lui - mais est-ce bien lui ? - l’une du FBI, l’autre du ministère irakien de l’Intérieur (ci-dessus). La première nous montre un homme au visage un peu bouffi, mal rasé, le cheveu court, avec des yeux inexpressifs, où ne flambe aucune lueur, aucune passion, pas même la haine, et qui évoque davantage un camionneur turc au bout d’un long périple qu’un religieux et chef islamiste de haut vol. La seconde n’est pas moins mystérieuse : il porte veste et cravate, d’où cette impression de notable aisé, renforcée par une barbe bien taillée.
Extrême cruauté. En fait, Abou Bakr al-Baghdadi est un homme invisible, qui existe sans exister et dont on ne sait quasiment rien. Mais c’est lui que veulent désormais suivre les jihadistes du monde entier, y compris des centaines de jeunes musulmans des banlieues françaises.
Cette énigme contribue d’ailleurs à faire la force d’Abou Bakr al-Baghdadi, tout autant que son extrême cruauté. A Bagdad, tout le monde a entendu parler de lui, mais personne ne sait vraiment comment il a brutalement émergé sur la scène du jihad mondial, comment, en quelques mois, il est devenu l’homme par qui la terreur arrive, comment il a relégué l’actuel chef d’Al-Qaeda, Ayman al-Zawahiri, dans les greniers du jihad.
L’armée d’Abou Bakr al-Baghdadi, c’est l’Etat islamique en Irak et au Levant, une organisation que l’on désigne surtout par ses acronymes français (EIIL), anglais (Isis) ou arabe (Daech). Ses forces combattantes sont autrement plus importantes que celles dont disposait Oussama ben Laden lorsqu’il était au sommet de sa gloire, en 2001. Sur le front irakien, où elles sont le fer de lance de la coalition sunnite contre le gouvernement de Nouri al-Maliki, elles sont estimées à entre 5 000 et 6 000 combattants. Sur le front syrien, où elles se battent à la fois contre le régime de Bachar al-Assad et les autres composantes de la rébellion, elles atteindraient 12 000 hommes - Charles Lister, un expert du Brookings Center à Doha (Qatar), donne une évaluation moindre : de 6 000 à 7 000 combattants.
En Irak, Daech, après s’être emparé jeudi de la province pétrolière de Ninive et de son chef-lieu, Mossoul, une ville de 2 millions d’habitants, règne désormais sur le tiers du pays (lire page 4). En janvier, il s’était déjà emparé de la grande ville de Fallouja (320 000 habitants), située à 60 km de Bagdad, et de certains quartiers de Ramadi, le chef-lieu de la province d’Al-Anbar, berceau de l’insurrection. Depuis quelques mois, il a aussi atteint les faubourgs sunnites du nord de la capitale, obligeant le gouvernement à évacuer les centaines de détenus de la sinistre prison d’Abou Ghraib. «Rampez vers Bagdad», a ordonné Abou Bakr al-Baghdadi à ses hommes depuis son QG secret. Avant l’attaque, ses commandos ont fait sauter un pont sur le Tigre, tout près de la capitale, pour empêcher l’armée irakienne de gagner le Nord.
Noble famille. Pour autant, Abou Bakr al-Baghdadi demeure l’homme qui n’existe pas. Son nom est un nom de guerre qui fait référence à Abou Bakr, le premier calife successeur de Mahomet, personnage mythique pour les sunnites, dont l’empire comprenait la péninsule Arabique, l’actuelle Jordanie, une partie de l’Irak et de la Syrie. Son nom, Al-Baghdadi témoigne simplement du fait qu’il est irakien. «Je connais son véritable nom : Ibrahim al-Badri al-Samaraï. Donc, lui ou sa famille sont originaires de Samarra. Mais c’est à peu près tout», confesse Ihsan al-Shemari, professeur de relations internationales à l’université de Bagdad et président du Centre de réflexion politique.
Effectivement, Al-Baghdadi est bien né à Samarra, célèbre ville sainte chiite mais majoritairement habitée par des sunnites, où les deux communautés se sont violemment affrontées. Il a étudié à l’Université islamique de Bagdad, où il a obtenu masters et PHD en sciences islamiques, en droit et jurisprudence islamiques. Sur les sites jihadistes, on apprend qu’il appartient à des tribus liées à l’histoire sainte musulmane, les Hosseinieh et les Qureishi, et descend d’une noble et pieuse famille, avec des frères et des oncles prêcheurs ou professeurs d’arabe classique.
Pour comprendre qui est le jihadiste invisible, il faut revenir à l’invasion américaine de 2003. A cette époque s’est créé l’Etat islamique d’Irak, un groupe qui multiplie les attentats à la fois contre l’US Army et contre les quartiers chiites de Bagdad, faisant des milliers de victimes. Son chef militaire est un Jordanien, Abou Moussab al-Zarqaoui. Il laissera l’image d’un homme extrêmement cruel : sur une vidéo, on le verra encagoulé en train d’égorger un jeune juif américain, Nicholas Berg. Ce double jihad, antiaméricain et antichiite, vaut à Al-Zarqaoui d’être adoubé par Oussama ben Laden. Sa campagne sera à proprement parler terrifiante : les Etats-Unis lui imputent 700 actes de terrorisme et offrent 25 millions de dollars pour sa capture - la même somme que pour Ben Laden. Le 8 juin 2006, il est finalement tué par un missile américain. Sa mort va affaiblir l’organisation, de même que la technique de contre-insurrection élaborée par le général américain David Petraeus.
Pieux shebab. Dès octobre de la même année, il est remplacé par un nouvel émir : Abou Omar al-Baghdadi, qui prend le titre de «prince de la foi». En 2007, Ben Laden invitera tous les musulmans irakiens à se rallier à lui. Le 19 avril 2010, Abou Omar al-Baghdadi est à son tour éliminé lors d’une opération menée par les forces américano-irakiennes. Entre-temps, il avait fait la connaissance de ce jeune homme très croyant qu’était Abou Bakr al-Baghdadi. Avant la chute de Saddam Hussein, celui-ci était un pieux shebab, que l’on voyait souvent à la mosquée, à peine connu comme salafiste (de salaf, les «pieux devanciers», les premiers califes qui succèdent à Mahomet). Au terme de ses études, il a enseigné la théologie et il est devenu le mufti de Fallouja, la ville qui a résisté à deux sièges des marines, qui y ont subi leurs plus fortes pertes depuis le Vietnam. Il a été arrêté, le 6 juin 2004, par l’armée américaine et détenu un temps. C’est semble-t-il après cette détention qu’il s’est radicalisé et qu’il a formé un groupe armé qui a intégré l’Etat islamique d’Irak. A la surprise générale, il en devient le chef à la mort d’Abou Omar al-Baghdadi.
La clé du mystère de cette ascension phénoménale dans la galaxie islamiste, c’est Isham Hachemi, un jeune chercheur irakien qui travaille exclusivement sur les groupes islamistes, qui la détient : «C’est un ancien colonel de l’armée de Saddam Hussein, du nom de Hadji Samir, alias Hadji Bakr, qui a fait se rencontrer les deux Baghdadi. C’est lui encore qui va permettre au nouveau venu de prendre la tête de Daech.» Sur des photos, on peut effectivement voir cet Hadji Samir, visage émacié et allure de derviche, en uniforme d’officier. Il a depuis été tué.
L’ex-colonel a-t-il flairé le potentiel du jeune homme ? Très vite, ce dernier va se révéler un stratège redoutable. Prenant en compte que la rébellion en Irak est moribonde alors que celle en Syrie contre Bachar al-Assad se développe, il y envoie des proches fonder le Front al-Nusra. En janvier 2013, c’est chose faite. En avril, Al-Baghdadi annonce que l’Etat islamique d’Irak et Al-Nusra vont fusionner pour devenir l’Etat islamique en Irak et au Levant. Mais, entre-temps, Al-Nusra s’est syrianisé. Et va refuser d’adhérer à cette nouvelle entité. Les deux groupes commencent alors à opérer de façon séparée jusqu’à ce qu’une guerre généralisée les oppose à partir de janvier 2014. Elle va faire des milliers de morts et se poursuit actuellement.
Volonté hégémonique. Au départ, Daech a été bien accueilli par la plupart des rebelles syriens, qui se réjouissaient d’avoir le soutien d’un groupe bien formé et équipé face à la machine de guerre du régime syrien. C’est sa volonté hégémonique et les atrocités qu’il commet, dont l’enlèvement et l’exécution de civils et de combattants de mouvements rivaux, qui ont poussé l’ensemble de ces derniers à retourner leurs armes contre lui. D’emblée, il avait montré sa vraie nature en faisant fouetter devant ses parents puis exécuter un petit vendeur de 15 ans qui avait mentionné le nom de Mahomet d’une manière jugée inconvenante. En avril, le groupe a revendiqué la crucifixion de deux opposants. Il est aussi accusé de détenir des centaines de personnes simplement pour avoir fumé une cigarette ou ouvert une page Facebook.
Daech et Al-Nusra veulent tous deux la création d’un émirat islamique qui abolirait les frontières issues de la colonisation. Et le premier vient de marquer un point, fût-il symbolique. Dès la prise de Mossoul, les insurgés ont envoyé un bulldozer pour détruire la frontière issue des accords Sykes-Picot (1). En revanche, Daech apparaît beaucoup plus comme une organisation paranoïaque. «Il a tiré les leçons de son échec en Irak et cherche à écraser toutes les autres composantes de la rébellion, convaincu que celles-ci auront tôt ou tard la même intention à son égard», souligne un expert occidental travaillant sur la Syrie. C’est en effet la création de milices sunnites, à l’initiative du général américain Petraeus, qui ont permis en 2008 de mater la rébellion sunnite.
Autre différence : si le Front al-Nusra bénéficie du soutien du Qatar et de la Turquie, Daech ne semble pas bénéficier de l’aide ouverte d’un Etat et dépend de donateurs individuels, la plupart dans le Golfe, notamment au Koweït. En Irak, le groupe est soutenu par de riches personnalités tribales. Ce mouvement a de plus un agenda beaucoup plus internationaliste que le Front al-Nusra. C’est pourquoi il attire la grande majorité des jeunes Européens venus faire le jihad et un certain nombre de volontaires qui jusqu’alors allaient se battre en Afghanistan ou au Pakistan, aux côtés des talibans.
Les conséquences ne se sont pas fait attendre : l’EIIL va entrer en concurrence avec Al-Qaeda central, dont il rejette bientôt le leadership de son chef, le successeur d’Oussama ben Laden, l’Egyptien Ayman al-Zawahiri, vieille barbe chevrotante, sans doute caché dans un recoin obscur, qui marmonne des diatribes interminables et ne fait pas rêver les jeunes jihadistes.
Il défie Al-Zawahiri, il lui demande de prêter allégeance
Abou Bakr al-Baghdadi va même aller plus loin : défiant Al-Zawahiri, il lui demande de prêter allégeance. C’est donc le monde islamique à l’envers. De son côté, l’idéologue d’Al-Qaeda, qui a trouvé encore plus radical que lui, exige de son rival qu’il quitte la Syrie, au prétexte qu’il affaiblit la rébellion par son extrémisme. Il lui demande de concentrer ses forces dans la guerre en Irak. Et, pour bien enfoncer le clou, il désigne Al-Nusra comme la branche officielle d’Al-Qaeda en Syrie. Pour la première fois, les successeurs de Ben Laden se font vraiment la guerre.
Prise d’otages. La principale menace d’Al-Qaeda central n’est donc plus les attaques de drones ou les raids américains mais la fitna («discorde») au sein de la communauté jihadiste, ce qui était déjà considéré comme l’un des pires maux du temps de Mahomet.
Cette guerre, c’est d’abord celle des baya’a, les serments d’allégeance que les différents groupes vont désormais devoir faire soit à Al-Zawahiri, soit à Al-Baghdadi. Aujourd’hui, c’est vers le second que convergent la plupart des jihadistes du monde entier.
Dès le début, en Irak comme en Syrie, l’Etat islamique s’est lancé dans la prise d’otages occidentaux - il en a compté jusqu’à 27 ensemble, journalistes, humanitaires et un père jésuite italien - qui lui permettent de se faire connaître, témoignent de sa puissance (il a négocié avec la France, soit un pays membre du Conseil de sécurité) et de négocier de très juteuses rançons. A l’évidence, ces prises d’otages sont gérées minutieusement par les responsables de Daech, selon des méthodes qui doivent beaucoup aux pratiques des services secrets de la région. C’est par elles que l’on peut mesurer la dimension transnationale du groupe jihadiste. Ainsi, c’est le groupe du Koweïtien Abou Lokman al-Kuweiti, alias Abou Youssef, qui a capturé près d’Alep les deux premiers journalistes français (Didier François et Edouard Elias), et celui d’un Palestinien vivant en Irak, Abou Aziz al-Qatari, qui a kidnappé les deux autres (Nicolas Hénin et Pierre Torres), à Raqqa. Al-Qatari, ceinture noire de kung-fu, n’est autre que l’ancien garde du corps de… Abdullah Azzam, l’un des fondateurs d’Al-Qaeda et l’inspirateur d’Oussama ben Laden. On le voit : même des proches de la direction centrale d’Al-Qaeda ont commencé à se rallier à Abou Bakr al-Baghdadi. A Raqqa, le lieu de détention des otages, le responsable était un religieux irakien, ses trois adjoints étaient probablement des Britanniques originaires d’Irak ou du golfe Persique et les gardes-chiourmes des Français avec des accents du Maghreb.
Milieux baasistes. L’intelligence politique d’Al-Baghdadi a aussi été de se servir de la Syrie comme base pour reconstituer ses forces et repartir à la conquête de l’Irak, désormais gouvernée par Nouri al-Maliki, un chiite peu à même de vouloir partager le pouvoir avec les sunnites. Pour Daech, la marginalisation des sunnites tombe à pic. Elle va lui permettre de recruter plus largement en Irak, notamment dans les milieux baasistes et chez les anciens partisans de Saddam Hussein. D’où le ralliement, aux côtés d’islamistes convaincus, d’anciens officiers du défunt raïs, qui en forment aujourd’hui l’ossature.
Ainsi, Abou Abdou Rahman al-Bidawi, l’homme qui dirige les opérations militaires de l’EIIL, était un officier de Saddam Hussein, tout comme son assistant, Abou Ali al-Anbari. Abou Ahmed al-Alwani, le wali (gouverneur) nommé par les insurgés pour la province d’Al-Anbar, est un ancien colonel. Abou Muslim al-Turkmani, autre commandant des insurgés, fut aussi un baasiste notoire. Même en Syrie, d’anciens baasistes irakiens sont au cœur du système, comme Saddam al-Jamal, le wali de la province de Deir el-Zor. «En fait, souligne un expert de la scène proche-orientale, le succès de Daech est le point de rencontre de deux folies. Celle des jihadistes et celle d’un service secret.»
(1) Accords secrets signés le 16 mai 1916, entre la France et la Grande-Bretagne (avec l’aval des Russes), prévoyant le partage du Moyen-Orient à la fin de la guerre en zones d’influence entre ces puissances, dans le but de contrer des revendications ottomanes. Ils ont donné à la région ses frontières actuelles.
Jean-Pierre PERRIN
Ahmed Abu Khattala a été capturé
Les Etats-Unis ont arrêté un suspect clé lié à l'attaque contre le consulat américain de Benghazi en Libye le 11 septembre 2012, qui avait coûté la vie à l'ambassadeur en Libye et à trois autres Américains, a indiqué mardi le Pentagone.
"Je peux confirmer que dimanche 15 juin, des soldats américains, en coopération avec la police, ont capturé Ahmed Abu Khattala, figure clé des attaques contre les bâtiments américains à Benghazi en septembre 2012", a précisé le porte-parole du Pentagone, le contre-amiral John Kirby. Le suspect a été arrêté dimanche en Libye lors d'un raid des forces américaines et est actuellement détenu "dans un endroit sûr en dehors de la Libye", a-t-il ajouté dans un communiqué, précisant que le raid n'avait fait aucune victime.
Ebola: 337 morts dans 3 pays africains depuis janvier
La fièvre hémorragique Ebola a tué 337 personnes dans 3 pays africains (Guinée, Sierra Leone, Liberia), depuis début janvier, a annoncé mercredi l'OMS (Organisation mondiale de la santé), une agence de l'ONU basée à Genève.
Ce chiffre montre une hausse de plus de 60% en quinze jours par rapport au dernier bilan de l'OMS qui faisait état de 208 morts, datant du 4 juin.
Moscou poursuit le ministre de l'Intérieur ukrainien pour meurtre intentionnel de civils
Le Comité d'enquête russe a annoncé mercredi lancer des poursuites contre le ministre ukrainien de l'Intérieur Arsen Avakov et d'autres responsables pour une opération armée organisée dans l'est du pays "visant intentionnellement au meurtre de civils".
Le ministre et le gouverneur de la région ukrainienne de Dnipropetrovsk, Igor Kolomoïski, sont soupçonnés d'"organisation de meurtres, recours à des moyens et méthodes de guerre illégaux, enlèvement, entrave au travail des journalistes", indique également dans un communiqué le Comité d'enquête, qui ajoute avoir l'intention de lancer prochainement un mandat d'arrêt international contre ces deux responsables.
mardi 17 juin 2014
Irak : L’offensive des jihadistes est aussi une bataille pour le contrôle de l’eau
Photo : Vue satellite du barrage de Falloujah
Le territoire irakien est traversé par deux fleuves, à savoir le Tigre et l’Euphrate. Ces derniers représentent près de 80% des 106 milliards de mètres cubes d’eaux de surface. Or, déjà, il se trouve que ce niveau est insuffisant pour répondre aux besoins de la population, de l’agriculture et de l’industrie.
Avant d’arriver en Irak, les deux fleuves traversent la Turquie et la Syrie, ce qui n’est pas sans provoquer de discordes entre ces trois pays. Cela est notamment avec le projet « Anatolie du Sud-Est », lancé par et visant à construire 22 barrages sur les bassins versants du Tigre et de l’Euphrate. Pour Damas et Bagdad, la crainte est de se retrouver avec des débits insuffisants de ces cours d’eau pour couvrir leurs propres besoins.
Par le passé, cette situation, héritée de l’accord Sykes-Picot et de la chute de l’empire Ottoman à la fin de la Première Guerre Mondiale, a failli dégénérer en guerre. Dans les années 1970, l’Irak voyait d’un très mauvais oeil la construction de barrages sur l’Euphrate par le régime syrien.
En 1990, la Syrie dût faire face à la fermeture des vannes décidée par Ankara afin de remplir le lac du barrage Atatürk. Plus tard, les autorités turques agitèrent la menace de recommencer à nouveau pour contraindre Damas à cesser d’apporter son soutien au chef kurde Abdullah Ocalan.
Pour ce qui concerne plus précisément l’Irak, l’offensive jihadiste lancée la semaine passée, fait peser un grand danger sur la distribution de l’eau dans le pays, en particulier vers les provinces du sud, à majorité chiite.
Ainsi, au début de cette année, l’Etat islamique d’Irak et du Levant (EIIL) s’est emparé de Falloujah, ville près de laquelle a été construit un barrage sur l’Euphrate, qui sert à l’irrigation des terres alentour et à l’adduction d’eau. En avril, les jihadistes ont fermé 8 des 10 vannes de l’ouvrage et inondé les terres avoisinantes, provoquant une chute du débit. Les régions situées en aval n’ont pratiquement plus été alimentée. Outre la consommation de la population, cela a affecté les exploitations agricoles et la production d’électricité.
« Se servir de l’eau comme d’une arme et assoiffer les populations constitue un crime abominable », avait dénoncé, à l’époque, Oun Dhiyab, un conseiller au ministère irakien de l’Eau. Finalement, les jihadistes, voyant qu’ils risquaient d’engloutir sous les eaux leurs propres bastions, ont décidé de rouvrir partiellement les vannes.
Seulement, avec la prise de Mossoul et la province de Ninive, la semaine dernière, l’EIIL est en mesure de mettre la main sur un autre barrage, le plus important du pays, cette fois construit sur le Tigre, et connu autrefois sous le nom de « barrage Saddam ». Outre le risque de voir ses vannes fermées, il présente un autre danger, lequel inquiétait déjà les ingénieurs des travaux publics américains en 2007.
« En terme d’érosion interne potentielle des fondations, le barrage de Mossoul est le plus dangereux barrage au monde (…). Si un petit problème survient au barrage de Mossoul, un effondrement est probable », avançait un rapport du corps des ingénieurs de l’armée américaine (ACE). Et qu’il soit désormais aux mains des jihadistes est un « gros » problème…
À la même période, un article du Washington Post indiquait, en citant le directeur du barrage, Abdulkhalik Thanoon Ayoub, qu’en cas de rupture, une vague de 5 mètres de haut pourrait submerger certaines parties de Bagdad.
D’autres barrages ont été construits dans le nord de l’Irak, comme à Ramadi (sur l’Euphrate) et Samarra (sur le Tigre), deux autres villes menacées par l’avancée des jihadistes. Entre les deux se trouve le lac réservoir de Tharthar.
La Suisse se situe au 6e rang mondial parmi les pays exportateurs d'armes légères
En 2011, l'année analysée dans cette enquête du «Small Arms Survey», Washington a livré à l'étranger pour 917 millions de dollars d'armes. En comparaison, Berne a fourni à d'autres pays au moins 191 millions de dollars d'armes légères et munitions.
La Suisse se positionne dans ce classement derrière les Etats-Unis, l'Italie, l'Allemagne, le Brésil et l'Autriche. Elle devance Israël, la Russie et la Corée du Sud.
D'après les auteurs de l'étude, le commerce d'armes légères a progressé de manière significative au cours de la dernière décennie. De 2001 à 2011, le volume des échanges est passé de 2,3 milliards à 4,5 milliards de dollars.
Eurosatory 2014
Eurosatory, le plus grand salon International de Défense et de sécurité terrestres et aéroterrestres - Parc des Expositions de Villepinte, du 16 au 20 juin 2014. Cette plateforme internationale d'échanges dédiée à tous les experts accueillera plus de 1 500 exposants dont le ministère de la Défense.
SAFER, pour franchit des zones piégées
SAFER conçoit et distribue de nouveaux équipements de sécurité contre les mines et pièges destinés à des personnels civils et militaires. Avec les SAFER-Shoes, au cours de ces déplacements, lorsque l’utilisateur approche le pied ou la jambe d’un objet potentiellement dangereux (mine, engin explosif improvisé, fil piège…), son geste est immédiatement et automatiquement déporté. Ainsi prévenu, l’utilisateur peut se déplacer vers une zone « neutre ». Un équipement pour des missions aussi diverses que : reconnaissance, assistance médicale, infiltration & exfiltration, reconstruction zones piégées, military search, C-IED…
L’équipement met en oeuvre la technique d’électro-stimulation (largement utilisée en médecine et pour l’entrainement sportif). Cette technique consiste en l’application d’impulsions électriques sur un ou plusieurs muscle(s) afin d’obtenir des contractions spécifiques immédiates : Dans le cas de l’application contre les mines antipersonnel et autres pièges, il s’agit de dévier le mouvement de la jambe lorsqu’un danger potentiel est détecté.
PEARL révolutionne la détection de tir
Le groupe METRAVIB propose une offre globale de monitoring intelligent, de diagnostic et de solutions s’appuyant sur une maîtrise unique des phénomènes vibratoires et acoustiques. Ainsi, PEARL (Personal Equipment Add-on for Reactive Localization), est un système de détection et de localisation de tirs. Déjà en dotation au sein des Forces Armées, il améliore l’autoprotection des fantassins et leur connaissance de la situation tactique. Une fois monté sur l’arme, le temps de réaction est significativement réduit et les chances de survie augmentent d’autant ! PEARL s’utilise dans de nombreuses missions et applications : missions de reconnaissance, protection des installations et du personnel, surveillance des frontières, opérations de riposte, protection des convois, patrouilles et manœuvres classiques. METRAVIB est une marque ACOEM.
lundi 16 juin 2014
13 avions ont disparu pendant 25 minutes des écrans radar... au cœur de l'Europe
Récemment, lors de deux incidents exceptionnels les 5 et 10 juin 2014 dans l'espace aérien autrichien, 13 avions au total ont disparu complètement pendant environ 25 minutes des écrans radar. C'est ce qu'a fait savoirl'autorité aérienne autrichienne Austro Control.
A chaque fois, ont disparu des écrans des contrôleurs du ciel la position, l'altitude et l'identité des avions concernés. Dans des pays voisins, l'Allemagne et le Tchéquie, on a signalé également des problèmes de ce genre. La cause du problème n'a pas pu être trouvée. Austro Control a demandé à l'Union européenne d’ouvrir une enquête sur ce phénomène.
Marcus Pohanka, porte-parole d'Austro Control, affirme n'avoir jamais encore été confronté à ce phénomène. Austro Control a donné des informations complémentaires sur l'identité des avions et des compagnies concernés par ces incidents. Il n'est pas exclu que des avions transportant des passagers, qui volent à haute altitude, aient été aussi touchés par ces problèmes.
Pohanka a souligné que dans aucun cas, les avions n'ont été en danger. Il signale qu'immédiatement des contrôleurs supplémentaires ont été employés pour accompagner les avions et que des mesures d'urgence ont été prises comme une communication verbale avec les pilotes et l'élargissement des couloirs aériens.
Des contrôleurs aériens à Munich, Karlsruhe et Prague auraient aussi constaté le phénomène. Les incidents ont été examinés par Eurocontrol et l'European Aviation Safety Agency (EASA). Selon certains experts, le phénomène doit peut-être s'expliquer par des interférences entre les transpondeurs des avions et les infrastructuresau sol.
Les transpondeurs des avions émettent des signaux qui permettent de déterminer l'identité et la localisation de l'appareil. Lors du premier incident, on n'a pas exclu un lien possible avec un exercice de l'Otan en Hongrie, mais cela n'a pas pu fournir une explication pour le deuxième dysfonctionnement.
Des exercices de guerre électronique de l'OTAN menés en Hongrie ont été évoqués comme la cause probable de ces ennuis, mais selon les communiqués officiels, ils n'ont eu lieu dans cette zone que du 2 au 6 juin, soit avant la deuxième vague de disparition. Ensuite l'OTAN indique explicitement ne pas avoir mené de brouillagepour la journée du 5 juin. De plus, le ministre hongrois de la Défense a également réfuté l'hypothèse du brouillage en indiquant que la technologie utilisée pour interférer avec les fréquences ennemies dans ce genre d'exercice a une portée de seulement 4 000 mètres, soit bien au-dessous de l'altitude des avions qui ont posé problème.
Un article de l'Usine Nouvelle issue de l'agence Reuters, indique lui par contre carrément qu'« un exercice militaire programmé s'est déroulé en diverses régions d'Europe les 5 et 10 juin dont l'objectif était l'interruption des fréquences de radiocommunication » et que « selon l'autorité slovaque, dès que le problème a été identifié, la partie organisant cet exercice a été contactée et l'exercice a été stoppé ».
L’ÉIIL massacre 1'700 soldats irakiens de confession chiite
La progression de l’Émirat islamique en Irak (ÉIIL) et au Levant a cessé en Irak à l’issue d’une semaine de combats.
L’ÉIIL (« Daesh » en arabe) a exécuté au moins 1 700 soldats irakiens de confession chiite, a confirmé le département d’État états-unien. L’armée privée a diffusé des images de ce massacre.
L’ÉIIL est dirigé par le prince Abdul Rahman et commandé par Abu Bakr el-Bagdadi. Il est encadré par des officiers états-uniens, français et saoudiens. Grâce à de nouveaux armements et à la corruption d’officiers et de parlementaires irakiens, il a pu conquérir en une semaine la partie à majorité sunnite de l’Irak [1].
[1] « Washington relance son projet de partition de l’Irak », par Thierry Meyssan, Al-Watan (Syrie), Réseau Voltaire, 16 juin 2014.
Fukushima : la radioactivité en tritium du sous-sol profond dépasse le record absolu : 4,7 millions de Bq/m³
Une radioactivité extrêmement importante de tritium a été relevée dans les eaux souterraines de la couche profonde.
Tepco a commencé la construction du mur congelé souterrain. Pour examiner la contamination des eaux souterraines en dehors de l’enceinte de ce mur, Tepco a pris un échantillon à 25 m de profondeur.
Au final, ils ont relevé 3 100 000 Bq/m³ de tritium dans un échantillon pris près du réacteur 2. L’échantillon est du 28 mai 2014. Selon les recherches du Fukushima Diary, c’est le record depuis qu’ils ont commencé leurs mesures.En novembre dernier ils avaient relevé du strontium 90 dans cette même couche profonde à côté du réacteur 4.Il est probable que ces eaux extrêmement radioactives s’écoulent sous le fond marin du port de la centrale de Fukushima pour ressurgir au large.
Selon le rapport de suivi de Tepco du 13 juin 2014, la radioactivité en tritium a encore augmenté et elle a atteint 4 700 000 Bq/m³ dans le même trou de forage (position sur le plan ci-dessus).
Tepco n’a donné aucune explication à cette augmentation de la radioactivité en tritium. C’est le record absolu relevé depuis que Tepco a commencé à surveiller les eaux souterraines à 25 m de profondeur. Il est possible que le mur souterrain d’eau congelée fasse diffuser la radioactivité dans le sous-sol.
Obama se cherche des raisons de ne pas agir contre les djihadistes qui menacent l'unité de l'Irak
Il l'a promis aux Américains : le président Obama ne renverra aucun boy en Irak pour aider l'armée flageolante du pouvoir en place à empêcher les djihadistes fanatiques de l'EIIL de prendre Bagdad. Et s'il a, depuis son discours de vendredi, donné l'ordre au porte-avions George HW Bush de faire mouvement dans le Golfe persique pour que ses avions soient à portée de frappe des insurgés, il essaie de gagner du temps. En espérant qu'un sursaut des forces chiites fidèles à al-Maliki, le Premier ministre irakien, lui évitera d'avoir à donner le feu vert aux aviateurs et à ceux qui pilotent à distance les drones.
Il faut reconnaître que la situation d'Obama est inconfortable : il vient tout juste, devant les cadets de West Point, de définir le souvenir qu'il veut laisser dans les livres d'histoire, celui d'un président qui aura mis fin à toutes les guerres dans lesquelles l'Amérique était engagée outre-mer. Pas de chance. Deux semaines après, le voilà contraint de trancher dans l'une de ces situations auxquelles une superpuissance comme les États-Unis, avec un système complexe d'alliances et un passé chargé d'interventions militaires, se trouve régulièrement confrontée : celle d'aider un de ses obligés.
Gagner du temps
Alors, pour le moment, il gagne du temps et traîne des pieds. Même lorsqu'il s'agit de pratiquer une de ces frappes ciblées à l'aide des drones Predator pourtant largement utilisés sous sa présidence pour mettre hors d'état de nuire les ennemis de l'Amérique au Pakistan ou au Yémen.
Et puis, il invoque la morale pour dire, comme lors de son intervention de vendredi : "Il ne peut être question que l'Amérique soit entraînée dans une opération militaire tant que les autorités de Bagdad n'auront pas réformé un système politique qui a laissé le champ libre à l'insurrection islamique." C'est un peu la réaction du pompier qui n'accepterait pas de faire monter les victimes d'un incendie sur son échelle tant qu'elles n'ont pas vérifié si leur prise de courant ne pourrait pas être à l'origine du court-circuit.
Machiavélisme
Al-Maliki est une créature remise en selle par les Américains quand ils ont chassé Saddam Hussein et déstabilisé toute l'administration du pays parce qu'elle avait collaboré avec le dictateur. Le choix de l'homme était mauvais puisqu'il a pratiqué l'exercice du pouvoir sans penser une seconde à la réconciliation nationale, mais seulement à une vengeance de la communauté chiite sur les sunnites évincés de tous les niveaux de responsabilité. Mais cela, Obama le sait depuis longtemps. Il n'avait pas besoin d'attendre que les sunnites se révoltent en profitant de l'aide qu'étaient prêts à leur apporter les mercenaires islamisés qui font la guerre dans la Syrie voisine contre Bachar el-Assad. Il devait exiger de Bagdad depuis des mois les changements qu'il réclame aujourd'hui. Et s'il l'a fait, il a manqué de conviction et d'arguments.
Maintenant, la guerre est en train de déstabiliser toute la région et d'inquiéter au plus haut point les Iraniens qui ont déjà envoyé trois bataillons de Gardiens de la révolution au secours de leurs frères en religion. Il faut d'ailleurs se demander si Obama n'est pas en train d'attendre tranquillement que Téhéran fasse le travail pour lui. Et rétablisse l'ordre et les frontières en Irak. Certains verront dans cette attitude un habile machiavélisme. D'autres jugeront qu'il s'agit d'une belle reculade de l'Amérique dans son rôle traditionnel de superpuissance. "Cela ressemble à de l'alcool, cela a le goût de l'alcool, mais ce n'est pas de l'alcool"... C'est peut-être cela, la doctrine Obama. Celle d'un président américain Canada Dry.
dimanche 15 juin 2014
Irak: 279 insurgés neutralisés en 24 heures
Les forces de sécurité irakiennes ont tué 279 "terroristes" au cours des dernières 24 heures, alors qu'elles se préparent à lancer une contre-offensive pour stopper l'avancée fulgurante des jihadistes, a annoncé dimanche un responsable de sécurité.
Cette annonce a été faite par le porte-parole chargé de la sécurité auprès du Premier ministre Nouri al-Maliki, le lieutenant-général Qassem Atta, lors d'une conférence de presse retransmise à la télévision.
La Pologne dirige les opérations militaires en Ukraine
Alors que Derek Chollet, le secrétaire adjoint à la Défense des États-Unis s’est installé à Kiev pour y coordonner la répression militaire, il apparaît que les opérations y sont dirigées par la Pologne. La circulation d’une photographie sur Internet ne laisse plus aucun doute sur la responsabilité de Varsovie.
Leader étudiant de la révolte anti-soviétique de Bydgoszcz, Radosław Sikorski s’enfuit en 1981 au Royaume-Uni où il termine ses études, puis poursuit une carrière de journaliste. En 1987 il devient sujet de la Couronne britannique, mais abandonnera ultérieurement cette nationalité pour entrer au gouvernement polonais. De 1988 à 1992, il devient conseiller du magnat néo-conservateur Rupert Murdoch. En 1992, il entre au gouvernement et négocie l’adhésion à l’Otan. De 2002 à 2005, il est chercheur aux États-Unis à American Enterprise Institute et directeur de la New Atlantic Initiative. Il est marié à la journaliste états-unienne Anne Applebaum.
Les preuves de la participation active de la Pologne au conflit ukrainien s’accumulent tandis que la guerre continue d’embraser les régions du sud-est de l’(ex-)Ukraine. Jusqu’à présent, l’intervention de Varsovie s’est faite indirectement. Elle n’en est pas moins porteuse de mort et de destruction même si aucune unité militaire polonaise n’a été déployée sur le terrain. La Pologne n’a pas seulement apporté son concours à l’entraînement des terroristes de l’Euromaidan en prélude au déclenchement du chaos orchestré en Ukraine, elle a envoyé sur place des convois de mercenaires pour réprimer brutalement ceux qui s’opposent au coup d’État et se dressent contre la junte de Kiev. On voit maintenant circuler des photos qui mettent en évidence l’implication de la Pologne dans la spirale démente des évènements qui ensanglantent l’Ukraine.
La semaine dernière, Jerzy Dziewulski, le conseiller-sécurité de l’ancien président polonais Aleksander Kwaśniewski [1], a été photographié à Slaviansk en compagnie d’Oleksandr Tourtchynov, le président intérimaire de l’Ukraine [2]. Dziewulski est un expert notoire du contre-terrorisme. Il a été entraîné aux États-Unis, en Israël, en France et en Allemagne. Il possède, et dirige, sa propre entreprise de sécurité privée [3]. Le ministre des Affaires étrangères de la Pologne, Radosław Sikorski, a beau déclarer ne rien savoir de la présence de mercenaires polonais en Ukraine, se bornant à indiquer qu’il transmettra au bureau du procureur les informations circulant à ce propos, la photo montrant Dziewulski en compagnie de Tourtchynov prouve qu’il ment. La vérité, c’est que Sikorski et Dziewulski se sont vu confier la prise en charge des décisions stratégiques et tactiques de la politique d’ingérence de Varsovie dans le conflit ukrainien. Ils agissent de concert et l’un ne va plus sans l’autre.
Photo prise début juin près de Slaviansk. On reconnaît à gauche Jerzy Dziewulski, et au centre le président intérimaire Oleksandr Tourtchynov en train de commander les opérations de répression militaire.
C’est juste avant l’opération punitive déclenchée en avril par la junte de Kiev qu’ont commencé à filtrer des informations sur les équipes de mercenaires opérant à l’intérieur des frontières de l’(ex-)Ukraine. Mais les preuves de l’envoi par Varsovie de contingents de mercenaires polonais en Ukraine n’ont fait surface que très récemment [4]. Radosław Sikorski s’est empressé de contester la véracité des révélations diffusées fin mai, alors même que le ministre délégué des Affaires étrangères de la Russie soulignait, de son côté, que des mercenaires étrangers, en particulier des Polonais, étaient engagés sur le terrain et participaient aux opérations. De façon tout aussi désinvolte, Sikorski a déclaré ne pas accorder le moindre crédit à l’annonce de la capture de ces mercenaires et de leurs officiers d’encadrement polonais. Pour le ministère des Affaires étrangères, ces informations sont mensongères et malveillantes, c’est de la « pure propagande ». On s’étonnera d’autant moins des propos de Sikorski qu‘à peine une semaine plus tôt, il dénonçait l’illégalité du principe même du mercenariat. Il ne faut donc pas s’attendre à ce qu’il confirme l’existence de ces mercenaires polonais. Maintenant que circule, sur le réseau internet, la photo de Dziewulski en tenue de combat avec casque, treillis, et pistolet en bandoulière, en compagnie de Tourtchynov, il est devenu impossible de nier la présence de forces polonaises dans la zone des combats.
Jerzy Dziewulski
Il est utile de consulter le curriculum vitae de Dziewulski pour comprendre à quel point cette photo est révélatrice des turpitudes du gouvernement polonais, surpris en pleine forfaiture au beau milieu de ses manigances. Comme l’indique son site internet, Dziewulski est un expert de l’antiterrorisme et c’est lui qui a créé la Commission des Services spéciaux polonais (les Forces spéciales). Il a été formé à l’utilisation des mines explosives, aux techniques de mise en œuvre des explosifs de toutes natures, et à la pratique du tir embusqué. Il a suivi des stages de formation pratique en Israël, aux États-Unis, en Allemagne et en France, passant même par le département d’État et le Bureau des alcools, du tabac, des armes à feu et des explosifs (l’ATF : Bureau of Alcohol, Tobacco & firearms) durant son séjour en Amérique. Il se vante d’être le meilleur expert au monde en matière de sécurité, y compris pour le recours à des entreprises spécialisées (lire : des sociétés assurant la formation et la mise à disposition de mercenaires), et pour l’organisation et la mise en œuvre de plans de sécurité personnalisés (lire : la conduite d’actions offensives par des groupes de mercenaires). Vu les liens très étroits qu’il a entretenus avec Aleksander Kwaśniewski (l’ancien président polonais), il est très vraisemblablement un rouage important de l’appareil complexe des services de la sécurité nationale de l’État polonais. Partant de là, on ne voit pas comment le ministre des Affaires étrangères, Radosław Sikorski, pourrait ignorer tout de l’implication directe, dans le conflit qui s’envenime de jour en jour chez son voisin ukrainien, d’un personnage aussi proche des plus hautes autorités du gouvernement, par ailleurs titulaire de tels états de service.
Ce qui ressort de tout cela, c’est que Sikorski et Dziewulski ont pris le contrôle de la politique étrangère de la Pologne chez son voisin ukrainien. Ce sont eux qui conduisent conjointement, et sur deux fronts, l’offensive en cours contre les populations du Donbass. Sikorski, qui manœuvre pour succéder à la baronne Catherine Ashton comme Haut-Représentant de l’Union européenne pour les Affaires étrangères, a pratiquement éclipsé le Premier ministre lui-même. 69 % des Européens avouent ne pas connaître Donald Tusk, le chef du gouvernement polonais. Sikorski veut incarner la haute stratégie mise en œuvre par la Pologne pour faire prévaloir ses intérêts dans les territoires de l’ancienne République des Deux Nations. C’est à l’ambition de faire revivre cet empire perdu que le chef des services de sécurité ukrainiens de l’administration de l’ère Ianoukovytch attribue la participation de la Pologne au coup d’État de février dernier. Pour sa part, Dziewulski n’occupe pas le devant de la scène. Jusqu’à la publication de la photo évoquée plus haut, ses agissements à l’est des frontières de la Pologne étaient, pour l’essentiel, restés dans l’ombre. Avec les forces qu’il contrôle, il assure la mise en œuvre, sur le terrain, de la stratégie définie par Sikorski, en opérant les choix tactiques appropriés. Le champ des compétences qu’il a développées antérieurement donne à penser qu’il pourrait bien être celui qui supervise l’action des légions de mercenaires écumant le Donbass (et donc le responsable direct de tous les crimes de guerre qui y sont perpétrés). Après tout, il est peu probable que Tourtchynov perde son temps à se faire photographier en compagnie d’un personnage de troisième ordre (ce que n’est pas Dziewulski), à proximité des lignes de front de l’offensive qu’il a déclenchée. Ensemble, Sikorski et Dziewulski constituent le cerveau et les bras de la machine de guerre que Varsovie déploie au delà de sa frontière orientale dans l’espoir de reconstituer la défunte République des Deux Nations, oublieuse du fait qu’elle-même n’est guère, en Ukraine, que le « Turc de service » des États-Unis et de l’Otan [5].
Andrew Korybko
[1] Aleksander Kwaśniewski a été élu à la présidence de la république polonaise le 9 octobre 1995, battant Lech Walesa, le président sortant. Il s’est vu confier un deuxième mandat par les électeurs le 8 octobre 2000. C’est durant son premier mandat qu’’est intervenue, en 1999, l’adhésion de la Pologne à l’Otan. C’est en 2004, au cours de son deuxième mandat, que Varsovie est devenue membre de l’Union Européenne.
[2] Oleksandr Tourtchynov est par ailleurs l’ancien chef des services secrets ukrainiens.
[3] Voir son site internet Jerzy Dziewulski.
[4] La mise en garde de Moscou : “Moscow warns Kiev against using military, mercenaries in southeastern Ukraine”, RT, 8 avril 2014 ; Notre article : « Ukraine : la Pologne avait formé les putschistes deux mois à l’avance », par Thierry Meyssan, Réseau Voltaire ; Et la réponse officielle du ministre : « Poland denies training mercenaries for Maidan protests — foreign minister », Itar-Tass, 10 juin 2014
[5] « La Pologne, nouvelle tête de pont d’un plan de déstabilisation de l’Otan », par Andrew Korybko, Traduction Gérard Jeannesson, Oriental Review, Réseau Voltaire, 26 février 2014.
[2] Oleksandr Tourtchynov est par ailleurs l’ancien chef des services secrets ukrainiens.
[3] Voir son site internet Jerzy Dziewulski.
[4] La mise en garde de Moscou : “Moscow warns Kiev against using military, mercenaries in southeastern Ukraine”, RT, 8 avril 2014 ; Notre article : « Ukraine : la Pologne avait formé les putschistes deux mois à l’avance », par Thierry Meyssan, Réseau Voltaire ; Et la réponse officielle du ministre : « Poland denies training mercenaries for Maidan protests — foreign minister », Itar-Tass, 10 juin 2014
[5] « La Pologne, nouvelle tête de pont d’un plan de déstabilisation de l’Otan », par Andrew Korybko, Traduction Gérard Jeannesson, Oriental Review, Réseau Voltaire, 26 février 2014.
Le « feu ami » du bombardier nucléaire
Même si cette affaire en souligne la difficulté, le drame qui a coûté la vie à cinq soldats états-uniens en Afghanistan révèle l’usage de bombardiers nucléaires à des fins conventionnelles. Manlio Dinucci revient sur cette technique et ses conséquences.
La nouvelle selon laquelle cinq soldats étasuniens ont été tués par un « feu ami » en Afghanistan est beaucoup plus significative qu’il n’y paraît dans les médias. On a de fait évité de dire que les cinq —non pas simples soldats, mais membres des forces spéciales (celles qui opèrent aujourd’hui dans la guerre secrète en Afghanistan)— ont été tués par erreur par un bombardier B-1 qu’ils avaient eux-mêmes appelé afin de détruire une position ennemie.
Le B-1 Lancer, produit dans les années 80 à cent exemplaires, est un bombardier furtif d’attaque nucléaire, capable de voler sans approvisionnement sur plus de 12 000 km. Avec la fin de la Guerre froide, 68 appareils ont été convertis pour transporter aussi des armes non-nucléaires, en particulier des bombes à fragmentation, des bombes à guidage GPS et des missiles de croisière. Utilisé pour bombarder l’Irak en 1998 et la Yougoslavie en 1999, le B-1 a été massivement employé en Afghanistan depuis 2001 et en Irak depuis 2003. Dans cette vidéo, on peut le voir pendant qu’il largue des bombes à fragmentation sur un village afghan :
Étant donné que les B-1B Lancer peuvent transporter aussi des bombes et missiles nucléaires, leur utilisation dans une action guerrière réelle permet d’en améliorer l’efficience y compris pour un éventuel emploi dans une attaque nucléaire. La même chose se passe pour les bombardiers stratégiques étasuniens B-2 Spirit conçus pour l’attaque nucléaire : ils ont été utilisés avec des armes non-nucléaires dans les guerres contre la Yougoslavie, l’Irak et la Libye. Deux B-2 Spirit sont arrivés dimanche des USA à la base anglaise de Fairford, se joignant à trois forteresses volantes B-52. « Le positionnement en Europe de bombardiers stratégiques étasuniens —a déclaré l’amiral Haney, chef du Commandement stratégique— renforcera l’interopérabilité avec nos alliés ».
Italie comprise, gardienne diligente de bombes nucléaires étasuniennes.
Manlio Dinucci
Les mouvements proches d’al-Qaïda reviennent en Afghanistan
D’après une dépêche de l’AFP datée du 13 juin, les jihadistes des mouvements proches d’al-Qaïda ont quitté massivement ces dernières semaines le Nord-Waziristan, la région tribale pakistanaise où ils avaient trouvé refuge suite à l’intervention de l’Otan en Afghanistan. Selon des sources sécuritaires à Islamabad, la tendance serait lourde puisqu’il est question du départ de 60.000 personnes environ.
« Plus de 80% des combattants jihadistes locaux et étrangers ont quitté le Waziristan du Nord », a même assuré un habitan de Miransah, le chef-lieu de cette région, où l’aviation pakistanaise a mené plusieurs raids récemment.
L’une des raisons avancées pour expliquer ce phénomène serait l’imminence d’une offensive de grande ampleur planifiée par les forces pakistanaises dans cette région, qui est aussi le fief du Tehreek-e-Taliban Pakistan (TTP), le mouvement taleb local responsable d’une vague d’attaques sanglantes dans le pays depuis 2007.
« Islamabad a nourri les rumeurs d’offensive imminente pour pousser les rebelles à se réfugier de l’autre côté de la frontière et passer la patate chaude aux autorités afghanes », a expliqué, à l’AFP, Azimut Nul, un spécialiste pakistanais des questions de sécurité. Et c’est bien ce qui semble se passer, à mesure que les troupes de l’Otan se retirent d’Afghanistan…
Ainsi, un rapport du comité des sanctions contre al-Qaïda et les taliban mis en place par les Nations unies indique que les mouvements proches de l’organisation fondée par Oussama Ben Laden prennent pied dans l’est et le sud de l’Afghanistan et qu’ils sont désormais susceptible de « poser un problème de sécurité à long terme » dans ce pays, voire même de « menacer la région entière ».
Le document indique que des jihadistes du TTP, mais aussi du Lashkar-e-Taïba (LeT), du Lashkar-e-Jhangvi ou bien encore le Mouvement islamique d’Ouzbékistan sont désormais présents en Afghanistan, où ils prennent « régluièrement » à partie les forces de sécurités locales, notamment dans le sud, l’est et le nord du pays. « Ils représentent ainsi une menace inquiétante à long terme en provenance de l’Afghanistan, pour la région et au-delà, notamment en Asie centrale et du sud », souligne le rapport.
En outre, les taliban afghans attendent que leur heure vienne. Le document note qu’ils utilisent, depuis la fin 2013, d’explosifs plus perfectionnés, logés dans un blouson en cuir, quasiment indetectables aux contrôles. Plus généralement, le rapport souligne qu’ils estiment que les forces afghanes seront moins efficaces qu’actuellement après le départ des troupes occidentales et parient sur l’affaiblissement du régime en place.
Qui plus est, ont relevé les rapporteurs, le mouvement dirigé par le mollah Omar n’a jamais été aussi riche que depuis l’an passé, grâce notamment aux revenus tirés du trafic d’opium, de l’exploitation illégale de matières premières (onyx) ou encore de l’extorsion de fonds.
Le scénario catastrophe serait que l’Afghanistan passe à nouveau sous la coupe des taliban, ce qui offrirait une base de repli pour leurs homologues pakistanais qui ont leur propre agenda, et qu’un Etat jihadiste se constitue sur un territoire situé au milieu de la Syrie et de l’Irak…
L'USS George H. W. Bush est déployé dans le Golfe
L'ordre de déploiement "permettra au commandement en chef de disposer de plus de flexibilité si une opération militaire américaine devait être déclenchée pour protéger des vies américaines, des citoyens ou nos intérêts en Irak", a indiqué le porte-parole du Pentagone.
L'USS George H. W. Bush dans l'océan Atlantique (Wikimedia - CC - Demetrius L. Patton, U.S. Navy )
Les forces de sécurité préparaient samedi une contre-offensive dans le nord de l'Irak où de larges portions de territoire ont été conquis cette semaine par les insurgés, les Etats-Unis annonçant pour leur part le déploiement d'un porte-avions dans le Golfe.
L'Iran a, lui, affirmé ne pas exclure une coopération avec Washington pour stopper les jihadistes sunnites qui ambitionnent de créer leur Etat islamique à la frontière irako-syrienne.
Rues désertes et commerces fermés à Bagdad
Le Pentagone a annoncé samedi que le secrétaire à la Défense Chuck Hagel avait donné l'ordre de déploiement du porte-avions USS George H.W. Bush dans le Golfe qui "permettra au commandement en chef de disposer de plus de flexibilité si une opération militaire américaine devait être déclenchée pour protéger des vies américaines, des citoyens ou nos intérêts en Irak".
En l'espace de trois jours, les jihadistes de l'Etat islamique en Irak et au Levant (EIIL) ont pris la deuxième ville d'Irak, Mossoul, et sa province Ninive (nord), Tikrit et d'autres régions de la province de Salaheddine, ainsi que des secteurs des provinces de Diyala (est) et de Kirkouk (nord), rencontrant très peu de résistance.
Leur objectif est à présent la capitale, où les rues étaient samedi quasi-désertes et les commerces fermés.
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