Peshmerga (en kurde : Pêşmerge) est un terme utilisé par les Kurdes pour qualifier généralement les combattants kurdes. C'est aussi le terme officiel du Gouvernement régional du Kurdistan pour qualifier les forces armées du Kurdistan irakien.
Le mot Peshmerga persan : pīs āz merga, پس از مرگ, face à la mort ; kurde : pêş (devant, au devant) + merg (mort) + a (suffix. 3e personne), پێشمەرگە , qui est au devant de la mort désigne un combattant qui se battra jusqu'à la mort.
Les forces armées du Kurdistan irakien, les peshmerga, combattent là où l’armée irakienne a été tenue en échec par l’État islamique en Irak et au Levant. Qui sont-ils ? Quelles sont leurs revendications ? Éléments de réponse.
Les peshmerga, rempart ultime contre l’État islamique en Irak et au Levant (EIIL) ? Depuis le début de l’offensive djihadiste en Irak, ces combattants kurdes parviennent à maintenir l’EIIL à distance, alors que l’armée irakienne, elle, s’est effondrée dans le nord du pays.
Désormais massivement déployés dans les territoires disputés entre le gouvernement autonome kurde, basé à Erbil, et le pouvoir central de Bagdad, ils sont parvenus à reprendre la ville stratégique de Kirkouk, le 12 juin dernier. Une victoire qui place le Kurdistan irakien en position de force vis-à-vis du gouvernement national. "Maliki [le Premier ministre irakien, NDLR] sait qu’il aura du mal à se passer de l’aide kurde. Sans les peshmerga, qui sont des soldats aguerris, l’armée irakienne peinera à reconquérir seule les villes aux mains des djihadistes", explique Karim Pakzad, spécialiste de l’Irak à l’Institut des relations internationales et stratégiques (Iris).
Qui sont les peshmerga ?
Les peshmerga, littéralement “ceux qui affrontent la mort”, sont les combattants des forces armées du Kurdistan irakien, région autonome située dans le nord du pays. Aussi bien opposés à Bagdad qu’aux islamistes, ils ont toujours su repousser les attaques de l’EIIL, même par le passé. "Depuis 1992, cette armée a préservé la sécurité intérieure du Kurdistan et a souvent servi de fer de lance aux actions de contre-guérilla, lors de la période de présence américaine", explique Michel Goya, historien militaire, dans une tribune publiée par le Huffington Post.
Ces succès militaires ont permis aux Kurdes “de reprendre pied dans les régions dont ils avaient été chassés sous Saddam Hussein”, affirme-t-il.
Artillerie lourde, hélicoptères, chars mais aussi deux divisions d'infanterie inscrites dans l'ordre de bataille de l'armée irakienne… La force militaire du Kurdistan irakien est particulièrement importante proportionnellement à l’étendue de son territoire. Les peshmerga seraient également forts de quelque 200 000 à 250 000 hommes, longtemps entraînés et équipés par l'armée américaine. Autant d’éléments qui en font la force militaire “la plus puissante” du territoire irakien, devant l’armée régulière, selon Michel Goya.
Pour autant, “les capacités offensives de l'armée kurde sont également limitées”, nuance le spécialiste. “Elle peut, au mieux - mais ce serait déjà considérable-, réoccuper Mossoul et contrôler la frontière avec la Syrie, en liaison avec la guérilla kurde syrienne sur place [...] Elle peut même, en conjonction avec les forces de Bagdad, réoccuper le Tigre mais ce serait sans doute pour s'y engager dans une contre-guérilla permanente.”
Quelles sont les revendications des combattants kurdes ?
L’actuelle position de force des peshmerga est l’occasion de passer leurs revendications au premier plan parmi lesquelles :
Kirkouk
Considérée comme capitale historique du Kurdistan aux yeux des peshmerga, Kirkouk est l'une des plus grandes villes pétrolières d'Irak. Depuis l’intervention américaine de 2003, ils réclament que la ville revienne dans leur giron par le biais d’un référendum, ce qui leur permettrait de bénéficier directement des revenus de l’or noir et d’atteindre une indépendance économique totale. Mais Bagdad s’y refuse farouchement et a déjà repoussé à maintes reprises l’organisation d'un scrutin.
Indépendance
En Irak, le Kurdistan bénéficie d’un statut particulier de province autonome depuis 2005, avec comme capitale officielle la ville d’Erbil. Mais le gouvernement kurde ne cache pas son ambition de se désolidariser de l’Irak pour fonder son propre état indépendant. Actuellement, Bagdad est l’un des seuls gouvernements, avec celui de Téhéran, à reconnaître le Kurdistan en tant qu’entité politique régionale. En Turquie et en Syrie, les Kurdes ne sont pas considérés comme étant établis dans une même région. Au vu de l’efficacité des peshmerga sur le terrain, Bagdad pourrait bien être contrainte de concéder l’indépendance au Kurdistan en échange d’une aide militaire des combattants kurdes pour débarrasser l’Irak des djihadistes de l’EIIL.
Les peshmerga sont très populaires chez les Kurdes qui se disent globalement confiants en la capacité de ces combattants à protéger leur territoire. Ils parviennent également à créer un consensus plus large, jusque dans la région voisine de Ninive et même dans les villages chrétiens où ces combattants n’hésitent pas à prendre les armes pour défendre la population locale.
Preuve de leur popularité, parmi les centaines de milliers de personnes fuyant actuellement les combats, la plupart afflue vers le Kurdistan pour trouver refuge. Selon le gouvernement kurde, au moins 150 000 personnes ont franchi les frontières de la région. Des chiffres qui pourraient rapidement augmenter au vu de l’exode massif que les affrontements entraînent : pour la seule ville de Mossoul, 500 000 habitants ont fui lorsque les djihadistes ont pris le contrôle.
En d’autres termes, le Kurdistan - qui a été relativement épargné par les attentats ces dernières années - apparaît aux yeux de la population comme une zone sécurisée et encadrée par une armée puissante qui n’a perdu “que” sept soldats depuis les début de l’offensive des islamistes. Il faut dire que, pour l’heure, les djihadistes ont essentiellement concentré leurs attaques sur l’armée irakienne, peut-être pour éviter de se mettre totalement à dos les Kurdes, à majorité sunnites.