Des services secrets, nous ne savons que les échecs et rarement les succès. Si l'échec provoque l'anathème, l'ingratitude est fille de la victoire. Quand à la gloire, il faut l'oublier, elle est pour les autres...

samedi 5 octobre 2024

L’industrie de l’armement russe et « l’opération spéciale » : adaptabilité, forces et faiblesses

 

Avec le déclenchement du conflit en Ukraine et le glissement de celui-ci vers une guerre d’attrition dès l’automne 2022, le complexe militaro-industriel (CMI) russe a connu de profonds changements.

Abreuvés de fonds, le CMI a recruté massivement et s’est réorganisé en vue de répondre aux exigences d’un champ de bataille très consommateur en artillerie, drones et munitions. Le niveau de sa production reste cependant difficile à estimer pour le chercheur en raison de l’embargo informationnel sur les données à caractère militaire en vigueur en Russie. S’en remettre aux chiffres officiels russes comme ukrainiens sur les pertes pose un problème méthodologique. Il en va de même pour les volumes de production avancés par les autorités russes. Frappée par les sanctions occidentales, la base industrielle et technologique de défense (BITD) russe s’est néanmoins adaptée. Disposant d’impressionnants stocks en réserve, elle ne s’est toutefois toujours pas sevrée des composants étrangers et redoute déjà le « jour d’après », quand les budgets se resserreront.

Le CMI russe à la veille de « l’opération spéciale » : un secteur sous perfusion de l’État

Le déclenchement de « l’opération spéciale » le 24 février 2022 est intervenu alors que le CMI russe — ou OPK pour Oboronno-promychlenyi kompleks — se trouvait à mi-parcours de la réalisation du plan d’armement 2018-2026. Revitalisé par le précédent plan — le 2011-2020 élaboré par l’ancien ministre de la Défense Anatoli Serdioukov —, le CMI n’en demeure pas moins grevé par une série de problèmes systémiques quasi insurmontables. Son organisation autour de grands conglomérats d’État — ODK pour les systèmes de propulsion, les moteurs et les turbines ; OAK pour le secteur aéronautique, tous deux appartenant à Rostec ; ou encore OSK, pour les constructions navales — ou de grandes sociétés publiques (dont la principale est Almaz-Antey pour la défense antiaérienne), irriguée par les commandes publiques ou d’export, mais peu tournée vers le secteur civil, l’a rendu peu compétitif.

En dépit de la mise en œuvre d’une politique de substitution aux importations volontariste survenue en 2014 après l’introduction des premières sanctions occidentales dans le contexte de l’annexion de la Crimée, le CMI russe est resté fortement dépendant de technologies et solutions industrielles étrangères (machines-outils, optronique, logiciels, semi-conducteurs…), alors même que les militaires russes ne souhaitaient plus acheter de matériel étranger sur étagère depuis le début des années 2010 (1). Les budgets attribués à la recherche et au développement restent par ailleurs insuffisants pour permettre d’innover, ce qui a conduit les entreprises de l’OPK à capitaliser sur la rente des projets ex-soviétiques.

Enfin, le secteur de l’industrie de défense a accumulé des dettes en raison de son manque de rentabilité. À l’été 2019, l’endettement du CMI est estimé à 2 000 milliards de roubles (environ 35 milliards de dollars) de créances auprès des établissements bancaires russes. Fin 2019, Vladimir Poutine aurait signé un oukase secret effaçant environ un tiers de cette somme, le reste devant faire l’objet d’une restructuration (2). Plus récemment, dans le contexte d’afflux massifs de fonds vers le CMI russe, la situation dans le secteur des constructions navales est jugée suffisamment critique pour que Poutine décide en octobre 2023 de placer OSK sous la tutelle de la banque VTB pour cinq années (3).

Le matériel à l’épreuve du champ de bataille

L’essentiel des affrontements se déroule le long d’une « ligne de contact » d’un peu plus de 1 000 kilomètres, qui s’étend de la région de Kharkiv aux rives pontiques de la région de Kherson, avec pour épicentre le Donbass. Ces combats sont relativement statiques depuis l’automne 2022, et demeurent caractérisés par l’emploi massif de l’artillerie et des drones. Les systèmes russes d’artillerie parmi les plus sollicités sont les systèmes de lance-roquettes multiples (LRM) comme le Tornado-S, et à munitions thermobariques TOS-1 et TOS-2. Les canons lourds autotractés Pion (203 mm) et les obusiers automoteurs Msta-S sont régulièrement aperçus dans les vidéos diffusées par les blogueurs de guerre. Ces systèmes sont utilisés en « tandem » avec les radars de contre-batterie Zoopark et Pénicilline. L’armée russe a commencé à recevoir depuis début 2024 des obusiers automoteurs Koalitsiya-SV qui peuvent mettre en œuvre des obus guidés de 152 mm Krasnopol, déjà tirés par d’autres pièces d’artillerie. Enfin, courant juin, le canon automoteur Malva (152 mm) — le « Caesar russe » —, fraichement livré par Rostec, aurait fait son apparition sur le front, dans la région de Kharkiv (4). À défaut de servir pour de grandes manœuvres, les blindés remplissent la fonction d’artillerie mobile. Sont régulièrement observés sur le champ de bataille les tanks de types T-72B3M, T-80BVM, et plus sporadiquement T-90M. Pour ce dernier tank, onéreux, la production était de 40 unités par an avant le déclenchement du conflit. Elle serait passée à 60-70 par an depuis février 2022 (5).

Les belligérants utilisent aussi des missiles et des drones pour frapper des cibles dans la profondeur du dispositif ennemi. Véritable « trou dans la raquette » de l’armée russe au début du conflit, les drones ont connu depuis une brusque expansion de leur développement et leur production par le CMI russe. Le groupe Zala Aero joue à cet égard un rôle de premier plan avec son drone kamikaze Lancet massivement employé par l’armée russe pour démolir aussi bien des positions ukrainiennes que pour mettre hors service des pièces d’artillerie (comme le canon M777 américain par exemple). Néanmoins, une solution de tuilage a dû être trouvée afin de compenser l’épuisement des stocks russes après les premiers mois du conflit, et avant l’entrée en production plateau des munitions rodeuses de Zala Aero. Ce tuilage a été assuré par les drones kamikazes iraniens de type Shahed qui ont commencé à être livrés par Téhéran dès l’automne 2022 (6). Rebaptisés Gueran-2 par l’armée russe, leur production a été localisée en Russie, au Tatarstan, et massifiée. Selon le Wall Street Journal, 4 000 unités auraient été produites depuis 2022 sur le site d’Elabouga, dont les capacités doivent permettre de produire à terme 6 000 drones kamikazes par an (7). Selon le commandement des forces aériennes ukrainiennes, la Russie aurait envoyé 2 277 Gueran contre des cibles en Ukraine rien que sur le premier semestre 2024, dont 1 953 auraient été interceptés (8). Les Gueran sont utilisés en essaim quasi quotidiennement dans les frappes contre les objectifs militaires et les infrastructures critiques (centrales thermiques, nœuds ferroviaires, usines…) avec les missiles de croisière Kalibr et, plus sporadiquement, les missiles hypersoniques Kinzhal emportés par le MiG-31K. À cette panoplie s’ajoutent les missiles sol-sol Iskander et ceux de l’aviation à long rayon d’action Kh-55 et Kh-101.

Le théâtre naval reste peu sollicité : les Ukrainiens font planer une menace diffuse et permanente avec leurs drones de surface et leurs batteries côtières sur les unités et infrastructures de la flotte russe de la mer Noire. De son côté, la marine russe utilise ses bâtiments comme des plates-formes de tir de missiles de croisière. Enfin, l’arme aérienne reste sous-employée même si les chasseurs multirôles Su-34 causent d’énormes destructions aux positions ukrainiennes avec leurs bombes planantes (FAB-500, FAB-1500 et, depuis le mois de juin, FAB-3000) équipées du kit UPMK (9), et présentées par Kyiv comme très difficiles à intercepter. La défense antiaérienne est en effet fortement sollicitée de part et d’autre pour l’interception des drones et missiles. La Russie met en avant le système Tor-M2 (défense aérienne de courte portée) qui semble présenter une certaine efficacité contre les drones. Les systèmes antiaériens Buk, Pantsir et S-350 Vityaz semblent quant à eux plus adaptés à l’interception de roquettes tirées depuis les LRM Vampire ou HIMARS, ou des missiles ATACMS. Enfin, bien que peu visible, la guerre électronique fait rage en vue notamment de brouiller et de détraquer les drones qui sont massivement employés sur le champ de bataille.

Résilience et adaptabilité : la mobilisation de la BITD russe

Contrairement à une idée largement répandue en Occident, la Russie n’est pas entrée dans une économie de guerre. Il n’y a ni mobilisation générale ni réquisition, et le gouvernement russe fait tout son possible pour que coexistent deux réalités : celle des combats et de « l’opération spéciale » d’un côté, et de l’autre la vie « normale » que continuent de vivre des dizaines de millions de personnes à travers le pays, exception faites de celles établies dans les régions frontalières de l’Ukraine (10). Si l’économie russe s’est contractée de 2,1 % en 2022 (11), elle a connu une croissance de 3,6 % en 2023, et les estimations pour 2024 placent la croissance dans une fourchette située entre 2,2 % (BERD) et 3,2 % (FMI). Les investissements publics en capital fixe consentis par le gouvernement russe (+3,3 % en 2022, +9,8 % en 2023) (12) sont à l’origine de ces rebonds, et la production industrielle, liée directement au CMI, joue le rôle de moteur de la croissance russe. Sur les cinq premiers mois de l’année 2024, elle connait une croissance de 5,2 %, et l’industrie de transformation 8,8 % (13). En 2023, le secteur de la construction — lié aussi aux activités militaires — a également contribué à la croissance économique avec une progression de 6,6 % (14). Les régions qui tirent le plus profit de cette nouvelle réalité économique sont celles où sont implantées les entreprises de l’OPK : les régions de Toula, Riazan, Iaroslavl, Tver, Penza, Omsk, Sverdlovsk, et de l’Oudmourtie notamment. Dans ces sujets, le niveau de croissance de l’industrie atteint souvent deux chiffres (15).

En visite à Toula en février dernier dans une des entreprises du CMI, le président russe a déclaré que les 6 000 entreprises de l’OPK employaient 3,5 millions de personnes, tandis que 10 000 entreprises travaillaient indirectement pour le complexe militaro-industriel (16). L’explosion des dépenses de défense — 3,9 % du PIB en 2022, 6,7 % en 2023 et 8,7 % en 2024 — a conduit à des recrutements massifs : 520 000 emplois créés au cours des deux premières années du conflit, selon le ministère russe de l’Industrie et du Commerce (17). Toutefois, les entreprises de l’OPK sont confrontées à un déficit de main-d’œuvre : 160 000 postes resteraient à pourvoir selon le vice-Premier ministre Denis Mantourov, qui occupait le poste de ministre de l’Industrie et du Commerce jusqu’au mois de mai dernier, avant de prendre du galon (18). La hausse substantielle des salaires — entre 20 % et 60 % selon les spécialités — ne suffit pas à attirer les profils. Le salaire moyen dans le CMI de la république du Tatarstan — un haut lieu de l’industrie de défense — s’élevait à 54 000 roubles avant le conflit (environ 600 euros) ; il est aujourd’hui de 100 000 roubles (1 000 euros). Un opérateur de machine-outil à commande numérique peut toucher jusqu’à 250 000 roubles par mois (2 500 euros), ce qui est un salaire très élevé (19). Au niveau fédéral, le salaire moyen dans le CMI est de 80 000 roubles, ce qui le place juste au-dessus du salaire moyen (73 700 roubles) (20). Autre frein : en tant que client unique, l’État impose ses tarifs, et l’OPK ne peut guère plus compter sur l’export pour « mousser » son chiffre d’affaires. Selon Sergueï Tchemezov, la rentabilité moyenne des entreprises du CMI s’élève à 2,3 % (21).

Souvent présentées comme ayant basculé en « 3 x 8 », la plupart des entreprises du CMI ont pu compter sur des capacités de production qu’elles étaient tenues d’avoir en sommeil, en cas de conflit. Les recrutements massifs, l’abondance des fonds ainsi que les stocks pléthoriques ont rapidement permis à l’OPK de répondre à la demande du champ de bataille. Le ministère russe de la Défense a ainsi affirmé que 1 500 chars et 3 000 véhicules de combat blindés avaient été produits en 2023. Selon certaines analyses, 85 % de ce parc seraient en réalité constitués de véhicules sortis des stocks et remis à niveau (22). Les véhicules de combat blindés (BMP, BMD, BTR…) ont manifestement été produits à un rythme de 30 à 50 unités par mois, ce qui a permis à l’armée russe de recevoir entre 2 500 et 2 600 unités neuves ou refitées. Dans le cas des blindés comme dans celui des véhicules de combat, la disponibilité des tubes, des chenilles et des moteurs semble constituer un goulet d’étranglement, même en cannibalisant les stocks. Par ailleurs, l’analyse des débris de munitions et autres matériels récupérés sur le champ de bataille par les Ukrainiens montre que le CMI russe continue de recevoir des microprocesseurs et semi-conducteurs à l’étranger, y compris de la part de fournisseurs occidentaux (23). L’artillerie étant extrêmement sollicitée sur le front, la production d’obus reste une donnée essentielle. Elle serait de 250 000 obus par mois en Russie pour un cout unitaire de 1 000 dollars (cinq fois moins cher qu’en Occident, en moyenne), avec une utilisation moyenne quotidienne de 10 000 unités (24). Le différentiel serait couvert en puisant dans les stocks et par les livraisons nord-coréennes.

Enfin, le profil de la nouvelle équipe dirigeante arrivée à la tête du ministère de la Défense au mois de mai 2024 traduit la préoccupation du Kremlin d’optimisation du budget colossal de la défense (10 300 milliards de roubles en 2024, soit un peu plus de 100 milliards d’euros) (25). Les arrestations de hauts responsables militaires accusés de corruption intervenues au printemps dans le contexte de la nomination d’Andreï Belooussov au poste de ministre de la Défense ont envoyé le signal que les mauvaises habitudes doivent cesser. Le nouveau ministre — un économiste technocrate — s’est retrouvé flanqué d’une équipe de nouveaux vice-ministres de la Défense qui sont des civils, comme lui, et qui seront en charge de l’intendance. À travers ces remaniements, le Kremlin souhaite se donner les moyens de tenir dans la durée en mettant aux commandes du ministère de la Défense une équipe d’auditeurs chargés de maintenir voire d’augmenter la production du CMI avec autant voire moins de budget. Car en 2025, il est en effet prévu que la défense reçoive 8 400 milliards de roubles, soit 84 milliards d’euros au taux moyen actuel du change, puis 7 400 milliards de roubles en 2026 (74 milliards d’euros), soit respectivement 6-7 % et 5-6 % du PIB (26).

Pour les entreprises du CMI russe, le problème n’est désormais plus l’accès aux crédits car les fonds abondent. Sa cadence de production reste à ce stade tributaire de l’existence de stocks pléthoriques, mais pas inépuisables, du manque de main-d’œuvre et de la pression exercée par les sanctions. Celles-ci ont probablement un effet sur la qualité et le prix du matériel que se procure le CMI russe à l’étranger. Enfin, l’export a été mis en veille par le CMI, sans que les industriels russes y renoncent comme l’atteste leur présence lors de rendez-vous mondiaux de l’armement dans le Golfe ou en Asie.

Notes

(1) Le contrat « Mistral » signé fin 2011 devait, à cet égard, figurer parmi les derniers du genre.

(2) Kommersant, [« Kostine, sur l’oukase secret de Poutine concernant l’effacement de la dette des entreprises de défense »], 23 janvier 2020 (https://​www​.kommersant​.ru/​d​o​c​/​4​2​2​7​714).

(3) L’oukase afférent a été signé le 9 octobre 2023.

(4) Anatoly Matviychuk, [« Une nouvelle installation d’artillerie russe “Malva” a été repérée dans la zone SVO [opération militaire spéciale]. Quelle est sa particularité ? »], Lenta, 10 juin 2024 (https://​digital​.areion24​.news/​8id).

(5) Michael Gjerstad, « Russian T-90M production : less than meets the eye », Military Balance Blog, IISS, 11 juin 2024 (https://​digital​.areion24​.news/​hf7).

(6) Defense Intelligence Agency, « Iranian UAVs in Ukraine : A Visual Comparison », aout 2023 (https://​digital​.areion24​.news/​z9m).

(7) Benoit Faucon, Nicholas Bariyo, Matthew Luxmoore, « The Russian Drone Plant That Could Shape the War in Ukraine », The Wall Street Journal, 28 mai 2024 (https://​digital​.areion24​.news/​2jt).

(8) AlArabiya News, « Ukraine says Russia launched 2,277 Iranian Shahed drones in 2024 », 25 juin 2024 (https://​digital​.areion24​.news/​hte).

(9) En russe, « Унифицированный модуль планирования и коррекции » [« module unifié de planeur et de correction »]. Il s’agit d’un kit de guidage développé par l’industriel Bazalt qui a permis de faire des bombes à gravité ex-soviétiques dont la Russie dispose d’importants stocks et des munitions de précision guidées grâce au système GLONASS (le GPS russe).

(10) La région de Belgorod en particulier.

(11) Pour rappel, en 2020, le PIB de la Russie s’est contracté de 2,7 %. Le décrochage de 2022, sous l’effet des sanctions, est donc moindre que celui enregistré pendant la pandémie de Covid-19.

(12) Source : Rosstat.

(13) Ibid.

(14) Source : Banque mondiale.

(15) Lire l’excellente analyse de Natalia Zoubarevitch, [« Géographie économique à l’ère de la SVO : comment l’économie russe a changé par région »], RE : Russia, 13 juin 2023 (https://​re​-russia​.net/​e​x​p​e​r​t​i​s​e​/​0​80/).

(16) Elena Mukhametshina, [« Les discussions de Vladimir Poutine avec les employés des entreprises de défense et les volontaires »], Vedomosti, 2 février 2024 (https://​digital​.areion24​.news/​82x).

(17) Tass, [« Plus de 500 00 personnes ont été employées par les entreprises de l’industrie de la défense russe depuis le début de la SSO »], 1er février 2024 (https://​tass​.ru/​e​k​o​n​o​m​i​k​a​/​1​9​8​7​4​813).

(18) Yulia Ovchinnikova, [« Manturov indique le nombre d’employés manquant aux entreprises de défense »], RBC, 7 juin 2024 (https://​digital​.areion24​.news/​6hs).

(19) Timur Latypov, [« “Quand j’ai appris qu’un économiste venait, je me suis pris la tête” : souhaits des travailleurs de la défense de RT à Andreï Belooussov »], Business Online, 24 mai 2024 (https://​digital​.areion24​.news/​1ap).

(20) Chiffres cités par Isabelle Facon, « Quel état de l’industrie d’armement russe ? : le brouillard de la guerre », Défense & Industries, n°18, juin 2024, p. 13 (https://​digital​.areion24​.news/​ntu).

(21) Ibid.

(22) Jack Watling, Gary Somerville, « A Methodology for Degrading the Arms of the Russian Federation », Occasional Paper, RUSI, 26 juin 2024, p. 9 (https://​digital​.areion24​.news/​vlx).

(23) Isabelle Facon, op. cit., p. 13-14.

(24) Katie Bo Lillis, Natasha Bertrand, Oren Liebermann, Haley Britzky, « Exclusive : Russia producing three times more artillery shells than US and Europe for Ukraine », CNN, 11 mars 2024 (https://​digital​.areion24​.news/​czn).

(25) The Bell, « Russian military spending to rise & rise », 21 juin 2024 (https://​digital​.areion24​.news/​s1o).

(26) Ibid.

  Igor Delanoë 

areion24.news