Des services secrets, nous ne savons que les échecs et rarement les succès. Si l'échec provoque l'anathème, l'ingratitude est fille de la victoire. Quand à la gloire, il faut l'oublier, elle est pour les autres...

lundi 7 octobre 2024

Faits et mensonges sur le 7 octobre

 

Pourquoi les renseignements israéliens n'ont rien fait pour empêcher l'attaque du Hamas du 7 octobre ?




Un an après les massacres du 7 octobre 2023 en Israël, nous avons enquêté sur les failles de sécurité qui ont conduit à cette journée meurtrière. Car plusieurs semaines avant l'assaut des groupes armés palestiniens, il y avait des signes, pourtant ignorés par les autorités : mouvements suspects le long de la frontière avec la bande de Gaza, préparatifs à ciel ouvert dans l'enclave sous blocus… Comment la menace du Hamas a-t-elle pu être sous-estimée au plus haut niveau de l'armée et de l'État ? 

4 octobre 2023. Le Jihad islamique organise un vaste défilé militaire à Gaza. Il exhibe fièrement ses nouvelles armes : des drones et des roquettes de longue portée, capables d'atteindre le cœur d'Israël… Quelques femmes, autorisées à assister à la parade par les autorités locales, crient des slogans d'encouragement aux combattants. Depuis des mois, les militants organisent l'assaut contre Israël, prévu trois jours plus tard. Ce défilé revêt des allures d’adieu à Gaza. Aucun des responsables du Jihad islamique ou du Hamas n’accepte de nous répondre face caméra.

Le 7 octobre, les miliciens du Hamas, leurs alliés du Jihad islamique et plusieurs centaines de civils parfois armés franchissent à divers endroits et sans difficulté la clôture de sécurité entourant Gaza. Pour Dany Tirza, ancien colonel de l'armée israélienne aujourd'hui consultant en sécurité, ce mur n’était pas adapté pour stopper un tel assaut. Il pouvait faire barrage à "de petits groupes du Hamas, comme ceux qu'on avait déjà eus dans le passé, pas à une armée entière, à des centaines ou des milliers de personnes", déplore-t-il. "Le problème c'est que nous connaissions le plan, il était entre nos mains, mais nous avons été aveugles."

Quête de vérité

Un lieu en Israël incarne cet aveuglement plus qu'aucun autre. La base militaire de Nahal Oz, où travaillait une unité de jeunes soldates chargées de scruter la frontière sept jours sur sept. Le 7 octobre, seize observatrices de Nahal Oz ont été tuées dans l'assaut conjoint des unités d'élite du Hamas et du Jihad islamique. Cinq autres ont été prises en otage.

Un an plus tard, sur les lieux du massacre, Eyal Eshel inspecte les restes du matériel de surveillance qu'utilisait sa fille Roni, 19 ans, morte brûlée vive le 7 octobre. La zone est encore noire de suie : les restes carbonisés des ordinateurs sont surplombés de bougies et de photos commémorant les victimes. "Une chose est claire, les évènements du shabbat du 7 octobre auraient pu être évités", estime-t-il. "Les observatrices avaient alerté pendant des mois. Si seulement quelqu'un avait prêté attention à ces informations et avait compris le scénario stratégique, nous ne serions pas ici aujourd'hui." Eyal a fait du combat pour la vérité sa raison de vivre.

Tant que la guerre est en cours, l'État israélien refuse la formation de toute commission d'enquête officielle. Alors, pour marquer leur désaccord et pour chercher des réponses à leurs questions, plusieurs familles de victimes ont décidé d'ouvrir une enquête parallèle. Elle aura un jour vocation à partager ses conclusions au grand public, selon les organisateurs. 

Mi-septembre, une journée entière a ainsi été dédiée aux témoignages d'anciennes observatrices et aux familles de celles qui ont été tuées. C'est la première fois que Roni Lifschitz, 21 ans, témoigne publiquement de ce qu'elle a vu, avant de finir son service militaire quelques semaines avant le 7 octobre. "La plupart des caméras tombaient en panne relativement souvent", raconte-t-elle au micro des cinq enquêteurs civils. "Dans ce cas-là, elles étaient réparées, mais pas très rapidement. Il fallait qu'un technicien soit disponible et qu'il réussisse à la remettre en marche..."

Un an après le massacre, Israël est empêtré dans une guerre dans la bande de Gaza, qui a fait plus de 41 000 morts, selon le ministère de la santé du Hamas. 

Israël est désormais parti en guerre sur d’autres fronts, contre le Hezbollah au Liban, au Yémen ou en Irak, où des frappes localisées sont régulières. En toile de fond, le spectre d'un affrontement direct avec le plus grand ennemi d'Israël : l'Iran. L’enquête officielle sur les failles du renseignement qui ont permis le 7 octobre attendra.

Les plans du Hamas étaient connus depuis un an

L'attaque du 7 octobre était-elle prévisible ? C'est ce que laisse penser un article du New York Times, paru le jeudi 30 novembre 2023. Se basant sur des documents secrets, le journal américain affirme que plusieurs responsables israéliens connaissaient très précisément les projets du groupe terroriste Hamas contre Israël depuis au moins un an. Les autorités n'auraient toutefois pas jugé ce scénario réaliste, consigné sur une quarantaine de pages.

Ce document, qui circulait dans des sphères du renseignement sous le nom de code « Jericho Wall » (« Le mur de Jéricho ), ne donnait pas de date pour une éventuelle attaque mais en définissant des points précis pour saturer le dispositif sécuritaire israélien puis attaquer des villes et des bases militaires.

Plus précisément, le document fait état d'un barrage de roquettes, de drones détruisant des caméras de sécurité et de systèmes de défense automatisés, puis de combattants traversant du côté israélien en parapente, en voiture et à pied, des éléments au cœur de l'attaque du 7 octobre.

Mais il n'était « pas possible de déterminer » si ce plan avait été approuvé « complètement » par la direction des terroristes du Hamas et comment il pourrait se traduire dans la réalité, souligne un document interne de l'armée israélienne obtenu par le Times.

Netanyahou était-il au courant ?

Or, en juillet, une analyste de l'unité d'élite du renseignement 8200 avait averti qu'un exercice militaire que venaient de conduire les combattants du Hamas ressemblait en plusieurs points au plan de l'attaque prévu dans le document « Jericho Wall ». Mais un colonel de la division militaire en charge de Gaza avait écarté ce scénario, le qualifiant de « totalement imaginaire ».

« Je réfute catégoriquement l'idée que ce scénario soit imaginaire […], il s'agit d'un plan pour une guerre » pas simplement pour une attaque « contre un village », écrit cette analyste dans des mails cryptés consultés par le journal.

« Nous avons déjà eu une expérience similaire il y a 50 ans sur le front sud à propos d'un scénario qui semblait imaginaire. L'histoire pourrait se répéter si nous ne sommes pas prudents », a écrit l'analyste de manière quasi prophétique à ses collègues, en référence à la guerre du Kippour en 1973. D'après le Times, si le document « Jericho Wall » a circulé au sein de la hiérarchie militaire israélienne, on ignore si le Premier ministre Benyamin Netanyahou et son cabinet l'ont consulté.

Les mensonges d'Israël sur l'incursion

Israël a utilisé l’incursion du «déluge d’Al-Aqsa» le 7 octobre comme légitime défense pour lancer une attaque génocidaire contre Gaza. Le récit officiel du Premier ministre Benjamin Netanyahu, fidèlement répété par ses bailleurs de fonds impérialistes, est que le Hamas a mené une attaque barbare inattendue et sans précédent et doit à présent être anéanti à tout prix.

C’est la réalité à l’envers. Le World Socialist Web Site a averti de façon répétée que depuis sa prise de fonctions fin 2022, le gouvernement Netanyahou avait multiplié les provocations contre les Palestiniens dans le but d’inciter aux représailles, comme cela s’est finalement produit le 7 octobre. Le ‘déluge d’Al-Aqsa’ a fourni le casus belli pour une campagne planifiée d’avance, d'assassinats de masse et de nettoyage ethnique des Palestiniens, à commencer par Gaza et devant se poursuivre en Cisjordanie, puis s’étendre aux 2 millions de citoyens arabes d'Israël.

La campagne génocidaire d'Israël a déjà coûté la vie à plus de 41 000 personnes (le 7 octobre a fait 364 morts côté israéliens), pour la plupart des enfants, des femmes et des personnes âgées. Elle a détruit hôpitaux, écoles et immeubles d'habitation, tandis que le refus d'Israël de permettre l’approvisionnement en nourriture, carburant, électricité et même en eau à Gaza signifie que de nombreux Palestiniens sans défense mourront d'une mort terrible dû à la faim, à la soif et à la maladie.

Mais tout le récit israélien autour des événements du 7 octobre commence à s'effondrer. Les preuves sont de plus en plus nombreuses que le gouvernement Netanyahou, l'armée et les services de sécurité israéliens savaient qu'une incursion militaire était sur le point de se produire et ensuite qu'une fois qu'elle s’est produite, il y a eu un grand nombre de victimes israéliennes comme conséquence d’une opération militaire massive menée par l’armée israélienne.

Ces révélations ont été largement ignorées par les médias du monde entier, qui ont consciencieusement et continuellement répété les affirmations d’Israël selon lesquelles les combattants du Hamas auraient commis d’horribles atrocités – notamment des enlèvements brutaux, des bébés décapités et brûlés et des femmes violées – qui avaient coûté la vie à 1 400 personnes. Les hommes armés, ont-ils affirmé, avaient délibérément pris pour cible le festival de musique Supernova, tuant des centaines de jeunes et massacrant également les habitants des kibboutzim.

De nombreuses familles israéliennes des personnes tuées, blessées et prises en otage le 7 octobre – reflétant une opinion largement répandue que Netanyahou était responsable de la catastrophe et n'avait rien fait pour l'empêcher – ont demandé une enquête indépendante et internationale, ce que le gouvernement a refusé. Ils ont exigé des réponses à deux questions déterminantes:

Que savait à l’avance l’appareil militaire et de renseignement israélien de ce que préparait le Hamas? Et que s’est-il passé le week-end du 7 et 8 octobre ?

Que savait Israël de l’attaque en préparation?

La ligne officielle du 7 octobre, sans cesse répétée, était que le tristement célèbre réseau d'espionnage israélien du Mossad n'avait aucune idée qu'une attaque d'une telle ampleur, nécessitant des mois de planification, d'entraînement et de coordination entre plusieurs groupes palestiniens, dont le Hamas, le Jihad islamique et des groupes palestiniens non affiliés était sur le point de se produire.

La base secrète du renseignement militaire américain située dans le désert israélien du Néguev, à seulement 32 kilomètres de Gaza, le «Site 512», avait elle aussi été prise au dépourvu.

Les autorités n'ont pas non plus expliqué comment l'immense barrière électronique de la frontière avait pu être franchie grâce à de seuls outils rudimentaires et sans qu'aucune sirène ne retentisse ni que les bases militaires ne soient alertées – ce qui signifie que l'armée la plus sophistiquée du Moyen-Orient a soi-disant mis des heures à arriver sur les lieux dans un pays pas plus grand que l’État américain du New Jersey.

Les commentaires des médias ont largement attribué l'échec d'Israël en fait de sécurité à sa focalisation sur la Cisjordanie. Le gouvernement Netanyahou avait encouragé la violence des colons contre les Palestiniens et les provocations ultra-orthodoxes à la mosquée Al-Aqsa, ce qui avait accaparé l’attention de l’armée israélienne et du Mossad.

Historiquement, loin de considérer le Hamas comme une menace, Netanyahou l’avait soutenu comme contrepoids à l’Autorité palestinienne (AP) dominée par le Fatah. Israël s'était efforcé de cimenter les divisions entre les deux factions palestiniennes rivales et d'empêcher la création d'un mini-État palestinien composé de la Cisjordanie et de Gaza.

Comme l’a déclaré un officier, resté anonyme, du renseignement israélien au Washington Post le mois dernier : «C'est ce qui arrive quand on oublie que toutes les lignes de défense peuvent éventuellement être franchies et qu'elles l'ont été historiquement. C'est ce qui arrive quand vous sous-estimez l’ennemi. »

Netanyahou a nié plusieurs fois avoir reçu des renseignements militaires sur une éventuelle attaque. Le 29 octobre, il a tweeté qu’«en aucune circonstance et à aucun moment le Premier ministre Netanyahou n’a été averti de l’intention du Hamas d’entrer en guerre».

Ses mensonges ont été mis à nu par la publication dans le journal Ha'aretz de lettres écrites en mars puis en juillet par le chef de la division recherche du renseignement militaire, avertissant personnellement Netanyahou que la crise sociopolitique qui secouait le pays encourageait l’Iran, le Hezbollah et le Hamas à risquer une action contre le pays, même simultanément.

En mars, le général de brigade Amit Sa’ar a écrit: «Nous assistons à des délibérations sur la question de savoir s'il faut rester indécis et laisser Israël continuer à s'affaiblir, ou prendre des initiatives et aggraver sa situation» et il a joint les rapports des services de renseignement qui étayaient ses avertissements.

Il a ajouté: «À notre avis, cette idée est la base de la forte motivation du Hamas à exécuter des attaques depuis le nord en ce moment et elle incite également l’Iran à accroître les efforts de ses mandataires pour faire avancer des attaques contre Israël. »

Lorsque le ministre de la Défense Yoav Gallant a attiré l’attention sur ce fait, Netanyahou l’a immédiatement limogé, le réintégrant à la suite de protestations massives.

Sa'ar a envoyé une autre lettre à Netanyahou en juillet, juste avant que la Knesset n'approuve une loi accordant au gouvernement le pouvoir de passer outre la Cour suprême. La lettre disait: « L'aggravation de la crise intensifie l'érosion de l'image d'Israël, aggravant les dégâts causés à la dissuasion israélienne et augmentant la probabilité d’une escalade.» Le chef d’état-major des FDI, Herzl Halevi, a tenté d’informer Netanyahou de la situation sécuritaire, mais s’est vu refuser une audience.

Ce ne sont là que les dernières révélations réfutant les affirmations de Netanyahou selon lesquelles il n’avait pas connaissance d’une attaque planifiée par le Hamas.

Deux jours seulement après l'attaque, le lundi 9 octobre, l'Égypte a démasqué les protestations de Netanyahou selon lesquelles il n'avait eu aucune information préalable. Un responsable des renseignements égyptiens a déclaré à Associated Press que Le Caire avait averti à plusieurs reprises les autorités israéliennes que «quelque chose de grand» se préparait à partir de Gaza. Il a déclaré: «Nous les avons prévenus qu’il allait y avoir une explosion de la situation, et très bientôt, et qu’elle serait grande. Mais ils ont sous-estimé ces avertissements ». Il a ajouté que les responsables israéliens avaient minimisé la menace venant de Gaza, se concentrant plutôt sur la Cisjordanie. Netanyahou a nié avoir reçu un tel avertissement, qualifiant cette histoire de «fake news».

Même les soldats israéliens auraient également tiré la sonnette d'alarme. Mais ils ont été ignorés et menacés. Le 18 novembre, dans un journal télévisé de Channel 12, au moins deux femmes soldats ont décrit comment elles avaient fait part de leurs inquiétudes des semaines auparavant sur ce qu'elles considéraient comme une activité suspecte le long de la frontière avec Gaza. Elles ont parlé à leurs commandants d’«entraînements, d’anomalies et de préparatifs» près du mur frontalier, déclarant à Channel 12 qu’elles avaient vu «de nouvelles personnes visiter des fermes autour de la frontière».

Non seulement leurs informations ont-elles été balayées, mais les soldates ont affirmé qu’on les avait menacées de la cour martiale pour avoir soulevé ces inquiétudes. « On nous a dit que si nous continuions à insister là-dessus, nous serions inculpées.» Un officier leur a dit, « Hamas ce n’est qu’une bande de punk, ils ne feront rien.»

De telles menaces suggèrent que, même si l'ampleur réelle de l'incursion préparée par le Hamas n’était pas claire, les autorités israéliennes étaient au courant d’une attaque planifiée et ont permis qu'elle se produise. Pour parler plus crûment, ils voulaient une atrocité et ont donc mis en veilleuse leurs services de défense et de secours. En outre, le soutien sans réserve de l’administration Biden à Israël – y compris le déploiement de navires de guerre dans la région dès le lendemain – indique que l’armée et les services de renseignement américains se sont emparé du 7 octobre pour activer des plans de guerre préparés longtemps à l’avance.

Que s'est-il passé le 7 octobre ?

Le 7 octobre, sous le couvert de milliers de roquettes lancées pour faire diversion, au moins 1 500 Palestiniens ont entrepris ce qui ne peut être décrit que comme une mission suicide, franchissant le point de passage fortifié d’Erez et plusieurs points de la barrière électronique entre Gaza et Israël. Leur intention déclarée était de détruire la division militaire israélienne à la frontière de Gaza et de prendre des otages qui pourraient être échangés contre les quelque 5 300 prisonniers palestiniens détenus dans les prisons israéliennes, dont environ 1 500 étaient en détention administrative sans inculpation ni procès, pour une durée indéterminée.

Ils ont attaqué la base militaire près du passage d'Erez et plusieurs avant-postes militaires, détruisant leur équipement technique et désactivant leurs systèmes de communication, empêchant les soldats de signaler les attaques. Dans les combats qui ont suivi, les combattants palestiniens ont tué de nombreux soldats, en prenant certains en otages, avant de se diriger vers les villes, villages et kibboutzim du sud et vers le festival de musique Supernova prolongé d'un jour jusqu'au 7 octobre cinq jours plus tôt.

Selon des informations parues dans la presse israélienne, les FDI, «prises au dépourvu», ont tardé à répondre aux appels à l'aide désespérés des personnes prises dans les attaques, permettant aux combattants du Hamas et aux autres groupes palestiniens de tuer environ 1 400 personnes et de prendre 240 otages, dont des soldats, des civils, des ressortissants étrangers et un citoyen palestinien d'Israël.

Il a fallu deux semaines pour que cette histoire s’effondre.

Le 20 octobre, Ha'aretz a publié les noms et lieux de 683 Israéliens tués pendant l'insurrection palestinienne, soit environ la moitié des 1 400 morts signalés. Parmi eux, 331 étaient des soldats et des policiers, dont un grand nombre de femmes, ainsi que 13 autres membres des services de secours. (Ce nombre est depuis passé à 377 militaires et policiers et 845 civils, pour un total révisé à la baisse de 1 222. Le total initial incluait certains des Palestiniens morts). Aucune des personnes répertoriées n'était des enfants de moins de trois ans, ce qui répudiait toutes les allégations sinistres et mensongères de massacre, décapitation et, dans un cas, même de cuisson dans un four, de bébés. Sept victimes auraient entre 4 et 7 ans et neuf entre 10 et 17 ans.

Le fait qu’un si grand nombre (48 %) de la liste incomplète soient des combattants israéliens signifie que de féroces combats armés ont eu lieu entre les forces de sécurité israéliennes et les Palestiniens. Quelque 1 500 Palestiniens auraient été tués, mais aucun n'aurait été capturé vivant. Il a fallu trois jours avant que les combats ne s'arrêtent et que les FDI reprennent le contrôle.

De nombreuses sources témoignent qu'un nombre important de civils israéliens ont perdu la vie dans des tirs croisés, ou plus probablement à cause de la tristement célèbre directive Hannibal formulée lors de l'occupation du sud-Liban par Israël en 1986. La directive vise à empêcher la capture d'Israéliens par les forces ennemies, même au prix de leur vie et implique que les FDI devraient tuer des Israéliens plutôt que de les laisser tomber entre les mains du Hamas.

Le correspondant militaire de Ha'aretz, Amos Harel, a détaillé comment l'immense base militaire et les installations de coordination des activités gouvernementales dans les territoires [occupés] (COGAT) au terminal d'Erez, qui fonctionne comme le centre névralgique du siège israélien de Gaza, avaient été attaquées par des combattants palestiniens. Le commandant adjoint de l'unité a décrit comment lui et son unité de chars «se sont battus à l'intérieur du kibboutz, de maison en maison, avec les chars». « Nous n'avions pas le choix », a-t-il conclu. Ce qu'il n'a pas dit, c'est que jusqu'à récemment, lorsqu'ils ont été redéployés en Cisjordanie, des soldats FDI étaient stationnés dans tous les kibboutzim.

De nombreux soldats ayant été tués ou blessés, le commandant de l'unité avait été «contraint d'appeler à une frappe aérienne contre la base elle-même afin de repousser les terroristes». Les hélicoptères Apache des FDI ont été utilisés de façon répétée dans les jours suivants, tuant non seulement des combattants palestiniens mais aussi des militaires et des civils israéliens. Les frappes d'hélicoptères expliquent les dégâts importants causés aux bâtiments, dont beaucoup ont été incendiés, et le grand nombre de voitures incendiées, ainsi que plusieurs corps brûlés, que le gouvernement avait imputé aux Palestiniens armés de fusils et de grenades à main, des armes incapables de causer ce degré ou ce type de dommage.

Yediot Aharonoth, un média israélien, a noté dans un reportage sur les escadrons d’hélicoptères Apache que «les pilotes se sont rendu compte qu'il était extrêmement difficile de distinguer dans les avant-postes et les colonies occupées qui était un terroriste et qui était un soldat ou un civil […] La cadence de tir contre des milliers de terroristes a été intense au début, et ce n’est qu’à un certain moment que les pilotes ont commencé à ralentir les attaques et à sélectionner soigneusement les cibles.»

Yasmin Porat, 44 ans, mère de trois enfants dont le compagnon a été tué, explique dans une longue interview accordée à la chaîne publique Kan, publiée sur Electronic Intifada, comment, après avoir fui le festival Supernova, elle a été capturée et retenue en otage par des militants palestiniens au kibboutz Be'eri. Elle a déclaré qu'elle avait été bien traitée, réfutant les allégations d'Israël faisant état de mauvais traitements et d'abus délibérés de la part des combattants palestiniens, ajoutant que les ravisseurs l'avaient traitée, ainsi que les autres otages, «humainement», dans la conviction qu'ils pourraient retourner à Gaza en toute sécurité car ils seraient accompagnés de leurs captifs israéliens.

Mais en l’occurrence, les soldats des FDI ont tiré non seulement sur les Palestiniens mais aussi sur les otages. Ce témoin a déclaré: «Ils ont éliminé tout le monde, y compris les otages. Il y a eu des tirs croisés très, très intenses. Elle a ajouté: «Après des tirs croisés insensés, deux obus de char ont été tirés sur la maison. C'est une petite maison de kibboutz, rien de grand. »

Dans The Guardian, Quique Kierszenbaum, rapporte que pendant sa visite du kibboutz Be'eri sous les auspices de l'unité de propagande de l'armée israélienne, il a constaté: «Les bâtiments ont été détruits les uns après les autres, que ce soit lors de l'assaut du Hamas ou des combats qui ont suivi, les arbres voisins ont volé en éclats, et les murs réduits à des décombres de béton, là où les chars israéliens ont bombardé les militants du Hamas dans leurs cachettes. Les étages se sont effondrés sur les étages de dessous et ainsi de suite. Les poutres des toits étaient enchevêtrées et exposées comme des cages thoraciques.»

Des témoins ont également raconté aux journalistes du New York Times et de The Economist ce qui s'est passé au kibboutz Be’eri et au kibboutz Nir Am. Essentiellement créés comme postes de défense il y a des années, tous les kibboutzim disposent de leurs propres forces armées. Tout en se concentrant sur ce que les Palestiniens avaient fait, leurs récits décrivaient également les premiers combats entre Palestiniens armés et Israéliens armés au cours desquels des civils ont été tués et d'autres civils faits prisonniers.

Des vidéos montrent des Palestiniens lors de fusillades avec les forces de sécurité israéliennes armées, tandis que des Israéliens non armés se mettent à l’abri entre les deux. D’autres vidéos montrent des combattants tirant vers des maisons et lançant des grenades sur des zones fortifiées. Des témoins oculaires ont déclaré que des grenades avaient été lancées dans des abris anti-bombes, mais on ne sait pas qui les avait lancées. Il y a eu plusieurs articles de presse faisant état d'Israéliens tués par des tirs amis, tandis que plusieurs Israéliens ont affirmé avoir été la cible de tirs de l'armée et de la police israéliennes.

Le journaliste d’Ha'aretz Nir Hasson, a rapporté le 20 octobre sur le contenu de son entretien avec un habitant local de Be’eri, nommé Tuval, qui était absent du kibboutz au moment de l'attaque mais dont la partenaire a été tuée. Il écrit: «Selon lui, ce n’est que lundi soir et seulement après que les commandants sur le terrain ont pris des décisions difficiles – notamment le bombardement de maisons avec tous leurs occupants à l’intérieur afin d’éliminer les terroristes ainsi que les otages – que les FDI ont achevé la prise de contrôle du kibboutz. Le prix à payer fut terrible: au moins 112 personnes de Be'eri furent tuées. D'autres ont été kidnappées. Hier, 11 jours après le massacre, les corps d'une mère et de son fils ont été découverts dans l'une des maisons détruites. On pense que d’autres corps gisent encore sous les décombres. »

Ces derniers jours, le rapport de la police israélienne sur l'attaque contre le festival de musique Supernova, où le plus grand nombre de morts a eu lieu – 364 personnes, dont 17 policiers – et où 40 personnes ont été prises en otage, a constaté que contrairement aux affirmations du gouvernement israélien, le festival ne figurait pas sur la liste des cibles du Hamas. Le Hamas n'aurait pas pu prévoir de l'attaquer, car les organisateurs du festival avaient déménagé sur le site situé dans le désert du Néguev occidental seulement deux jours auparavant, après que le site d'origine, dans le sud d'Israël, eut été annulé. Les combattants palestiniens n’en ont eu connaissance que par hasard, après que le festival ait été prolongé d’une journée dans un délai très court. La plupart des 4 400 participants ont réussi à s'échapper avant que l'attaque n'ait lieu.

Ha'aretz a rapporté que les enquêteurs de la police ont découvert qu'un hélicoptère des FDI avait ouvert le feu sur les assaillants, touchant certains de ceux assistant au festival. ABC News avait rapporté plus tôt qu'un char israélien s'était dirigé vers le site du festival, et que des vidéos semblaient montrer les forces des FDI ouvrant le feu sur des combattants palestiniens au milieu d'une foule de civils non armés.

Ces témoignages oculaires réduisent en miettes la version officielle israélienne. Ils montrent que :

De nombreux prisonniers israéliens étaient encore en vie lundi, deux jours après les événements du 7 octobre.

Les otages n’ont pas seulement été tués dans les tirs croisés qui ont eu lieu le 7 octobre entre les FDI et la milice palestinienne. Beaucoup ont été tués suite à la décision délibérée des FDI d'attaquer le kibboutz avec des obus de char et d'autres armes lourdes en des lieux confinés, sachant parfaitement que les otages et leurs ravisseurs s'y trouvaient.

C'est l’armée israélienne et non les Palestiniens qui a causé la plupart des morts civiles israéliennes qu’on a utilisées pour justifier la guerre génocidaire menée contre Gaza et le déploiement de navires de guerre américains au Moyen-Orient. Leur nombre ne pourra être confirmé qu’en publiant les résultats des autopsies qui révéleraient le type de munitions utilisées.

Enfin, cela explique pourquoi le porte-parole de l’armée, Daniel Hagari, a estimé qu’un nombre «substantiel» d’otages pris par le Hamas étaient des militaires.

Loin de protéger les civils israéliens, le gouvernement Netanyahou et les FDI les ont utilisés comme chair à canon dans la poursuite d’une politique d’expansionnisme israélien et de suprématie juive.

Netanyahou a en partie accepté une «pause opérationnelle» temporaire dans son attaque génocidaire de Gaza, en échange de la libération de 50 otages par le Hamas, pour tenter de contenir la colère grandissante en Israël concernant sa responsabilité dans les attentats du 7 octobre. Mais il n’y a aucune raison de croire que cela marchera.

Les mensonges utilisés pour sanctionner les meurtres de masse et le nettoyage ethnique des Palestiniens sont répétés par Washington, Londres, Paris et Berlin dans la poursuite de leurs propres plans visant à contrôler un Moyen-Orient riche en ressources. 

Face à cet effroyable bilan, pourquoi donc inventer en plus des crimes qui n’ont pas été perpétrés? «Ces histoires ont un but très clair. Quand vous pouvez déshumaniser un groupe, le réduire au rang de ‘sauvages’ ou d’‘animaux humains’ – certains responsables israéliens ont utilisé ce langage – et donc les exclure de la famille humaine, il est beaucoup plus facile de les massacrer et d’obtenir le consentement pour cela.. Une tactique ancienne utilisée avant chaque génocide.