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lundi 23 septembre 2024

Un missile russe RS-28 « Sarmat » a probablement explosé dans son silo

 

Depuis le début de la guerre en Ukraine, la Russie pratique une sorte d’intimidation stratégique en rappelant, régulièrement, son statut de puissance dotée de l’arme nucléaire. Ce qui s’est notamment traduit, outre les sous-entendus du Kremlin, par la suspension de sa participation au traité de désarmement New Start et son retrait du traité d’interdiction complète des essais nucléaires [TICEN].

Par ailleurs, en juin, le chef du Kremlin, Vladimir Poutine, a déclaré qu’il envisageait de modifier la doctrine nucléaire russe, dont la dernière mouture avait été publiée en 2020. Enfin, la semaine passée, le contre-amiral Andreï Sinitsine, directeur du site d’essais nucléaires de Nouvelle-Zemble, a affirmé qu’une reprise des tests « à grande échelle » pourrait avoir lieu rapidement s’il en recevait l’ordre.

Mais, au-delà de ces déclarations, cette « intimidation stratégique » passe également par la tenue d’exercices nucléaires ainsi que par des essais de missiles balistiques intercontinentaux à capacité nucléaire.

Un tel tir était-il prévu entre les 19 et 23 septembre ? C’est, en tout cas, ce qu’a récemment suggéré des notices aux aviateurs [NOTAM – NOtice To AirMen], celles-ci ayant imposé des interdictions de vol pour des régions susceptibles d’être concernées par tel essai. A priori, ces NOTAM étaient similaires à celles qui avaient été émises en novembre 2023 et en avril 2024, c’est-à-dire avant des essais planifiés du missile RS-28 Sarmat [ou Satan II]. Essais qui n’eurent finalement pas lieu.

Qu’en a-t-il été cette fois-ci? D’après l’imagerie satellitaire, le cosmodrome de Plessetsk a visiblement subi de graves dommages entre les 20 et 21 septembre. Un cratère d’une largeur d’au moins 60 mètres est visible, au niveau du silo de lancement « Yubileynaya », déjà utilisé pour lancer le RS-28 Sarmat [SS-X-30]. Les installations environnantes ont également subi des dégâts importants, ce qui suggère que le missile a explosé peu de temps après son lancement ou à l’allumage.

Il est possible qu’un incident soit survenu au moment du remplissage des réservoirs, le RS-28 Sarmat utilisant un ergol à base de diméthylhydrazine asymétrique [UDMH], un susbstance très volatile [et donc dangereuse].



Pour le moment, l’explosion du cosmodrome de Plessetsk n’a été évoquée que par le journal « Moskovski Komsomolets ». Et encore, à demi-mots. En effet, il a cité un expert militaire pour qui il faudrait « multiplier » les essais du Sarmat, après avoir rappelé que le missile R-36M2 qu’il est censé remplacer avait fait l’objet de 26 lancements, dont 20 furent réussis.

Ce n’est pas la première fois qu’un incident de cette nature a eu lieu au cosmodrome de Plessetzk. Le 18 mars 1980, plusieurs dizaines de personnes avaient été tuées [ou gravement blessées] lors de l’explosion survenue lors de la préparation du lancement d’une fusée Vostok-2M.



Pour rappel, le RS-28 Sarmat est un missile d’une masse de 200 tonnes, pouvant emporter jusqu’à 15 ogives nucléaires mirvées. Il est possible qu’il fasse partie d’un système de bombardement orbital fractionné [OGCh pour Orbital’noi Golovnoi Chasti], qui vise à faire voler une arme nucléaire sur une orbite basse afin de déjouer la surveillance des radars, notamment nord-américains.

Le dernier tir d’essai réussi d’un RS-28 Sarmat remonte à avril 2022. Depuis, les autorités russes ont indiqué qu’il avait été officiellement mis en service

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