Des services secrets, nous ne savons que les échecs et rarement les succès. Si l'échec provoque l'anathème, l'ingratitude est fille de la victoire. Quand à la gloire, il faut l'oublier, elle est pour les autres...

samedi 28 septembre 2024

Comment Israël a éliminé tous les chefs du Hezbollah

 

Sans l'aide des Etats-Unis, rien n'aurait été possible...

La campagne de bombardements ciblant les principales figures du mouvement du Hezbollah a commencé en janvier dernier, avec la mort de Wissam Tawil, commandant de l’unité d’élite al-Radwan. Elle s’est poursuivie en juillet avec la mort de Fouad Chokr, le chef militaire du Hezbollah, et s’est accélérée en septembre, dans la foulée des explosions de bipeurs et de talkie-walkie qui ont, sans doute, totalement désorganisé le mouvement chiite.

Le 20 septembre, un bombardement a fait 15 morts parmi les membres d’al-Radwan, dont le chef de l’unité Ibrahim Aqil. Le 23 septembre, Ali Karaké, considéré comme le numéro 3 du mouvement, a été visé.

Éliminer les commandants du Hezbollah les uns après les autres

Le lendemain, il s'agissait d'Ibrahim Koubaissi, responsable notamment des tirs de missiles et de roquette. Il serait fastidieux de faire la liste de tous les responsables tués par Israël ces dernières semaines, mais il est certain que l’État hébreu avait pénétré l’organigramme du Hezbollah et était en mesure de localiser les principaux commandants du mouvement pour les attaquer.

La stratégie était donc d’éliminer les uns après les autres ces commandants. Toute une génération, celle qui a fondé le Hezbollah au début des années 1980, est décapitée. Une fois localisés, ce sont des bombardements massifs qui ont visé à chaque fois les lieux de résidence ou de refuge des commandants – sans tenir compte des victimes collatérales, des nombreux civils tués ou blessés lors de ces frappes. Ces bombardements avaient comme objectif ultime, et désormais atteint, la mort du chef du Hezbollah Hassan Nasrallah.

Et le Liban ?

La République islamique voit se déliter sous ses yeux une grande partie de ce qu’elle a construit pendant plus de quatre décennies. Le 7 octobre et ses suites devaient lui offrir une victoire stratégique sans précédent. Mais elle semble ne pas avoir pris conscience de la détermination d’Israël à l’affaiblir avec le feu vert, à peine dissimulé, de l’administration Biden. Sa priorité est peut-être désormais de préserver son programme nucléaire, perçu comme la dernière assurance-vie du régime.

Et le Liban dans tout cela ? Israël agit sans la moindre retenue ou considération pour les pertes civiles. La frappe visant Hassan Nasrallah, vendredi soir, a fait des centaines de morts selon les estimations de l’armée israélienne auxquels il faut ajouter ceux qui ont dû périr au cours de la nuit, faute d’avoir pu fuir leurs maisons à temps. Tout cela sans la moindre condamnation internationale ! Si l’escalade se poursuit, le bilan atteindra rapidement des milliers de morts et une grande partie des infrastructures du Sud, de la Békaa et de la banlieue sud de Beyrouth sera détruite.

Si un cessez-le-feu est conclu, le pays ouvrira un nouveau chapitre de son histoire, dominée depuis maintenant plus de deux décennies par l’ombre du Hezbollah et le doigt de Hassan Nasrallah. Le secrétaire général du Hezbollah est la personnalité la plus adulée et la plus détestée du pays du Cèdre. Sa mort est une onde de choc sans précédent et sans comparaison, au moins depuis celle de Rafic Hariri. Hassan Nasrallah est le visage et la voix de « l’axe de la Résistance ». Il sera bien sûr remplacé, mais il paraît par bien des aspects irremplaçable. 

Quelle que soit l’issue de la guerre, le Hezbollah en sortira très affaibli. Il lui faudra des années pour reconstruire sa crédibilité vis-à-vis de sa base populaire, de l’ensemble des Libanais et des pays de la région. Mais il ne va pas disparaître pour autant. La formation pro-iranienne va évoluer, muter, mais va rester la plus forte sur la scène libanaise. Va-t-elle redevenir une milice à l’état pur ? Va t-elle tenter au contraire de devenir un parti « comme les autres » ? Il est trop tôt pour le savoir. On peut toutefois imaginer que le Hezbollah va être encore plus paranoïaque, moins enclin à faire la moindre concession, et plus déterminé que jamais à ré-imposer, par tous les moyens possibles, un rapport de force qui lui soit favorable avec les autres parties.

Tous les scénarios sont sur la table. Celui d’une guerre totale, d’une défaite que le parti chiite fera payer au Liban, et d’une opportunité, tellement fragile, d’enfin tirer les leçons de tout ce qui a conduit le Liban, au-delà du Hezbollah, à se retrouver une nouvelle fois dans cette situation.

La « perceuse de bunker » GBU-72 

Un message à l’Iran ? Il s’agit d’une bombe dite « perceuse de bunker » avec guidage GPS et système de navigation inertielle. « Le GBU-72 a été développé pour surmonter les défis posés par les cibles robustes qui sont en profondeur, conçues pour les avions de chasse et les bombardiers »

« Sa létalité devrait être considérablement plus élevée par rapport à une arme de génération similaire comme le GBU-28. » Bien qu’aucune donnée n’ait été publiée, l’U.S. Air Force rapporte que sa capacité de pénétration est plus profonde que celle du GBU-28 qui est connu pour transpercer  environ 1, 80m (6 pieds) de béton armé. A Beyrouth, un cratère de 40 mètres de profond a été observé à la place des 6 immeubles détruits le 27 septembre 2024.

On a également rapporté que ses systèmes de guidage, sa structure de bombe et son rythme de croisière permettent des lancers à plus longue portée, ce qui améliore les taux de survie de l’avion dans les zones menacées.

Au fil des ans, un certain nombre de « transperceuses de bunkers » ont été développées aux États-Unis, leur cible principale étant l’Iran et la Corée du Nord, où une bonne partie de leur infrastructure stratégique, de leur projet nucléaire et plus, est très profondément sous terre, sous une épaisse couche de béton.

La plus célèbre des perceuses de bunkers est le MOP (« Massive Armor Penetration »), une bombe intelligente de 13 tonnes et demie fabriquée par Boeing qui peut pénétrer dans les bunkers souterrains à une profondeur de 60 mètres. En raison de son poids, il ne peut être transporté que sur des bombardiers stratégiques ou sur des avions de transport « vulnérables » dans des zones protégées par de nombreux systèmes anti-aériens.

Avions israéliens et bombardier américain. Un vol commun dans le ciel d’Israël



On a déjà signalé que les États-Unis envisageaient de fournir cette bombe à l’armée de l’air israélienne. Cependant, le seul avion qui peut la transporter est le Hercules C-130.

Il est probable que si la GBU-72\B passe avec succès toutes les phases des expérimentations, elle sera également à l’ordre du jour de l’armée de l’air israélienne, qui rappelle être en train de reconstruire ses capacités d’attaque contre le projet nucléaire iranien.

lorientlejour.com