Le Sénégal a vivement réagi, vendredi 3 août 2024, par le biais de son ministre de l’Intégration africaine et des Affaires étrangères à la publication de l’ambassadeur d’Ukraine à Dakar, Yurii Pyvovarov, suggérant son soutien aux groupes terroristes qui ont attaqué, du 25 au 27 juillet, l’armée malienne à Tinzaouatène, dans le nord du Mali.
Les forces armées maliennes et leurs alliés russes du groupe Wagner avaient été pris à partie par des centaines de rebelles du Cadre stratégique permanent pour la défense du peuple de l’Azawad (CSP-PDS) et par des groupes jihadistes de soutien à l’Islam et aux musulmans (GSIM). Plusieurs soldats maliens ainsi que leurs instructeurs russes ont péri dans cette bataille documentée par plusieurs vidéos qui sont devenues virales dès leur publication sur les réseaux sociaux.
Suite à cela, l’ambassade ukrainienne a posté une vidéo sur ses pages facebook dans laquelle le porte-parole du renseignement ukrainien assure se vante d’avoir fourni des informations aux rebelles touaregs du CSP avant leurs affrontements avec les Forces armées maliennes, ce que Dakar condamne fermement. Les autorités sénégalaises s’indignent également des propos de l’ambassadeur ukrainien qui a réitéré le « soutien sans équivoque et sans nuance (de son pays, ndlr) à l’attaque terroriste perpétrée, entre les 25 et 27 juillet 2024, dans le Nord Mali, par des rebelles Touaregs et des membres du Groupe de soutien à l’islam et aux musulmans (JNIM) contre les Forces Armées du Mali (FAMa) », dénonce le communiqué du ministre des affaires étrangères sénégalais.
Le Sénégal y réaffirme d’ailleurs sa position de « neutralité » à l’égard du conflit russo-ukrainien et menace de ne plus « tolérer une quelconque tentative de transférer sur son territoire la propagande médiatique en cours dans ce conflit ». Le communiqué rejette aussi toute apologie du terrorisme sur son sol « surtout lorsque ce dernier vise à déstabiliser un pays frère comme le Mali », assure Dakar.
En raison de la gravité de la situation, les autorités sénégalaises ont convoqué l’ambassadeur d’Ukraine au Ministère de l’Intégration africaine et des Affaires étrangères où « il lui a été rappelé les obligations de discrétion, de retenue et de non-ingérence qui doivent accompagner la gravité et la solennité de sa mission », précise le même communiqué.
Le Sénégal en a profité pour condamner fermement « l’attaque commise par ces groupes terroristes en terre malienne », renouvelant « au Gouvernement et au peuple du Mali sa solidarité sans faille » et « ses sincères condoléances aux familles des victimes », et souhaite « un prompt rétablissement aux blessés ».
Outre le gouvernement sénégalais, 9 organisations de la société civile ont condamné l’intervention de l’ambassadeur ukrainien ainsi que les propos du porte-parole du renseignement ukrainien qui ont circulé sur Internet affirmant qu’il existait un soutien de Kiev aux groupes terroristes.
« Nous, organisations de la société civile sénégalaise dénonçons le soutien de l’Ukraine aux groupes terroristes et invitons les autorités sénégalaises à prendre leurs responsabilités. Il est inconcevable que la diplomatie ukrainienne établie à Dakar mène une campagne de propagande contre l’État malien ou un quelconque État africain », indiquent-elles dans un communiqué.
Au début de la guerre russo-ukrainienne, l’ambassadeur de l’Ukraine au Sénégal avait également tenté d’impliquer Dakar dans le conflit en lançant sur les pages facebook de l’ambassade une campagne de recrutement de mercenaires depuis la capitale sénégalaise. Trente-six personnes avaient été enrôlées avant que le gouvernement de Macky Sall jugeant cette situation inconcevable exprime sa surprise et son mécontentement à l’ambassadeur ukrainien qui n’est donc pas à son premier coup d’essai.
Bati Abouè