Lors du sommet de Panmunjom, en avril 2018, Séoul et Pyongyang amorcèrent un rapprochement qualifié d' »historique » par les plus enthousiastes, lesquels avaient sans doute oublié qu’il y en avait déjà eu deux au cours des vingts dernières années. D’ailleurs, la Corée du Nord ne tarda pas à renouer avec sa rhétorique martiale à l’égard de son voisin du Sud. Et le canal de communication qui avait été rétabli entre les forces armées des deux pays fut de nouveau suspendu en 2020.
Depuis, soutenue par la Chine, la Corée du Nord a développé de nouveaux missiles [notamment à propulsion solide] et scellé un partenariat stratégique avec la Russie. En outre, elle avait précédemment fait savoir qu’elle n’excluait pas de procéder à des frappes nucléaires « préventives » pouvant être déclenchées « automatiquement » et « immédiatement » pour « anéantir des forces hostiles » en cas de menaces imminentes.
En outre, ces derniers mois, les relations inter-coréennes se sont passablement dégradées. Le chef du régime nord-coréen, Kim Jong-un, avait donné le ton dès janvier, en affirmant qu’il n’hésiterait pas à « anéantir » la Corée du Sud, qualifiée de « principale ennemie ».
La Corée du Nord ne déclenchera pas « unilatéralement un conflit mais elle n’a pas non plus l’intention d’éviter une guerre », avait dit M. Kim. « Le moment historique est enfin venu où nous devrions définir [la Corée du Sud] comme l’État le plus hostile à la [Corée du Nord] », avait-il ensuite martelé.
En avril, lors d’une visite de l’université militaire et politique « Kim Jong Il », M. Kim précisa son propos. La Corée du Nord « portera sans hésitation un coup fatal à l’ennemi en mobilisant tous les moyens en sa possession » en cas de provocation. Et d’ajouter : « Le moment est venu de se préparer plus que jamais à une guerre. Nous devons être plus fermement et parfaitement préparés à une guerre, qui devrait être gagnée sans faute, et pas seulement à une guerre éventuelle ».
Visiblement, la Corée du Nord s’en est donnée les moyens. Du moins, c’est ce qu’elle prétend. En effet, ce 5 août, l’agence d’État KCNA a annoncé que 250 tracteurs-érecteurs-lanceurs [TEL], dotés chacun de 4 missiles balistiques tactiques Hwasong-11D, venaient d’être déployés près du 38e parallèle, qui marque la frontière avec la Corée du Sud.
Lors d’un discours prononcé à cette occasion, Kim Jong-un a assuré que ces lanceurs de missiles avaient été « construits grâce à la technologie nord-coréenne ».
Ayant une portée opérationnelle comprise entre 100 et 180 kilomètres et pouvant porter une charge militaire de 4,5 tonnes et/ou une ogive nucléaire, le Hwasong-11D est une variante du KN-23, un missile présentant des similitudes avec l’Iskander russe et le Hyunmoo-2A sud-coréen. Aussi, il pourrait avoir une trajectoire dite « semi-balistique » et donc avoir la capacité de manœuvrer une fois rentré dans les couches basses de l’atmosphère.
Cependant, il n’est pas certain que les 250 TEL soient tous dotés de 4 missiles Hwasong-11. Analyste militaire et chercheur associé à l’International Institute for Strategic Studies, Joseph Dempsey en doute.
« En supposant que les 250 lanceurs soient tous opérationnels, il n’est pas certain que la Corée du Nord ait produit la capacité correspondante de 1000 missiles [et plus] », a-t-il estimé, auprès de CNN. En outre, a-t-il ajouté, « il est au moins hautement improbable que la Corée du Nord dispose d’un nombre d’ogives nucléaires tactiques aussi important ».
Quoi qu’il en soit, lors de son discours. M. Kim s’en est surtout pris aux États-Unis.
« Nous aurons le choix entre le dialogue et la confrontation, mais la leçon et la conclusion que nous avons tirées des trente dernières années est que c’est à la confrontation que nous devons nous préparer le plus soigneusement », a dit le chef du régime nord-coréen. « Les États-Unis auxquels nous sommes confrontés ne sont pas seulement une administration qui vient et repart après quelques années, mais une nation hostile à laquelle nos enfants et petits-enfants devront faire face pendant des générations à venir et qui illustre également la nécessité d’améliorer continuellement nos capacités d’autodéfense », a-t-il ajouté.