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vendredi 19 février 2021

Le « deepfake » russe inquiète particulièrement le renseignement estonien

 

Dans le cyberespace, la Russie constitue la « principale menace » pour l’UE. Selon un nouveau rapport des services de renseignement estoniens, l’espionnage en ligne, les cyberattaques, mais aussi, dans un avenir proche, le recours aux technologies de deepfake représenteront un danger croissant.

Publiée mercredi (17 février), l’évaluation annuelle de la sécurité du service de renseignement extérieur estonien a noté que la Russie continue d’appliquer certaines tactiques de « style KGB » dans le cyberespace pour semer la discorde entre les sociétés occidentales.

Le rapport fait suite aux révélations en décembre que des agents de l’État russe étaient très probablement à l’origine du tristement célèbre piratage "Solar Winds" , dans lequel des acteurs malveillants ont réussi à accéder à des courriels internes du gouvernement américain et d’autres institutions occidentales, dont le Parlement européen.

Les recherches de l’Estonie indiquent que, selon toute probabilité, les services spéciaux russes tenteront désormais d’accélérer le développement de technologies dites de « deepfake » dans le domaine de la cyberguerre.

La technologie deepfake implique la création de supports synthétiques, généralement de matériel vidéo, en utilisant l’intelligence artificielle et des outils d’apprentissage automatique qui permettent de trafiquer les expressions faciales et la parole d’un individu jusqu’à ce qu’elles paraissent réelles.

« À l’avenir, les services russes sont susceptibles d’exploiter la technologie deepfake », indique le document des renseignement estoniens. « Cette menace sera particulièrement élevée, lorsque le développement technologique permettra aux deepfake d’être suffisamment convaincants pour être méconnaissables à l’œil nu », ajoute le rapport, notant également que cette situation présentera à l’avenir des défis au grand public pour distinguer entre les vraies des fausses informations.

Avertissement d’Europol

La menace de deepfake est depuis longtemps sous le radar des services de police de l’UE.

En novembre, un rapport de l’agence européenne de police criminelle, Europol, a recommandé aux pays de l’Union européenne de développer des technologies de filtrage pour mieux détecter les contrefaçons.

Un certain nombre de politiciens ont déjà subi les conséquences de ces technologies. Des vidéos falsifiées de la chancelière allemande Angela Merkel, de l’ancien président américain Obama et de l’ancien premier ministre italien Matteo Renzi ont été réalisées.

Ces deepfake politiques ont généralement pour objectif d’alimenter l’agitation sociale et la polarisation politique entre les utilisateurs en ligne, par la diffusion de messages falsifiés de dirigeants connus.

Menace russe

Globalement, ce rapport estonien met en lumière la menace générale que représente la Russie dans la région de la mer Baltique, en citant l’exercice « Zapad 2021 » du pays.

Le Zapad est apparu pour la première fois en 2009 sous la forme d’une série de « manœuvres » militaires menées aux frontières orientales de l’Otan, dans le district militaire occidental de la Russie, et conçues pour simuler la réponse de Moscou à une éventuelle offensive de l’Otan contre la Biélorussie. Des exercices similaires ont été menés régulièrement pendant la guerre froide, et plus récemment, en 2009, 2013 et 2017.

Les exercices Zapad de cette année, indiquent les Estoniens, « ne peuvent pas être ignorés » par l’OTAN, car « la Russie va déployer des dizaines de milliers de troupes le long des frontières des États baltes ». En attendant, les répétitions de 2021 s’annoncent sans précédent pour un certain nombre de raisons, y compris la possible participation accrue des forces armées biélorusses.

En outre, des inquiétudes persistent quant à la possibilité que les autorités chinoises décident de participer aux exercices Zapad de cette année, ce qui serait une première. « Si la Chine confirme également sa participation au Zapad 2021, il sera intéressant de voir comment les forces armées chinoises définissent leur rôle dans une opération militaire contre l’Otan en Europe », indique le rapport.

En 2019, les dirigeants de l’OTAN ont convenu de se concentrer davantage sur le défi que représente  l’« influence internationale croissante » de la Chine et sa puissance militaire. Ils envisagent d’inclure la menace de la montée en puissance de Pékin dans la prochaine mise à jour du « Concept stratégique », ce document officiel qui décrit la nature et l’objectif de l’OTAN.

euractiv.fr