Des services secrets, nous ne savons que les échecs et rarement les succès. Si l'échec provoque l'anathème, l'ingratitude est fille de la victoire. Quand à la gloire, il faut l'oublier, elle est pour les autres...

dimanche 20 septembre 2020

Dov Alfon, ancien membre de l’unité d’élite 8200, nouveau rédacteur en chef de Libération

 

Le journaliste franco-israélien Dov Alfon, ancien correspondant du quotidien Haaretz à Paris, devient le directeur de la rédaction de Libération en remplacement de Laurent Joffrin, annonce le journal.

« Il est de notoriété publique que le journaliste, éditeur et auteur Dov Alfon, 59 ans, a participé à la collecte de renseignements en vue de l’opération israélienne "Opéra", un raid aérien surprise mené au mois de juin 1981 qui avait détruit un réacteur nucléaire iranien situé aux abords de Bagdad.

Mais lorsqu’on lui demande de citer des exemples spécifiques d’opérations auxquelles il a participé quand, jeune homme, il appartenait à l’unité 8200 de l’armée israélienne, Dov Alfon fait une pause, marquant une hésitation.

« Je ne peux pas parler des choses que j’ai pu faire ou ne pas faire dans les rangs de l’unité 8200 », explique-t-il au Times of Israël avec un détachement que ne renierait pas James Bond, lors d’une interview réalisée à Paris, dans un lieu qui ne sera pas divulgué. »

Dov Alfon, 59 ans, était pressenti pour ce poste depuis le départ mi-juillet de Laurent Joffrin pour se lancer en politique. Il avait d'ailleurs intégré Libé en juin en tant que responsable de la stratégie numérique. Sa nomination a été approuvée mercredi par une large majorité (90%) des journalistes de Libération, selon un communiqué. Il devient en même temps directeur de la publication et co-gérant du journal. Au sein du quotidien israélien de gauche, Dov Alfon a notamment dirigé et rénové le supplément du week-end avant de diriger le titre de 2008 à 2011, où il s'est chargé de doper les abonnements numériques.

Romancier primé, spécialiste du numérique, Dov Alfon a également été consultant pour des séries télévisées. "Je suis heureux et fier de cette extraordinaire confiance qui m'honore. Libération c'est un titre fort, unique, avec des valeurs d'indépendance et d'humanisme auxquelles je suis profondément attaché", a réagi le nouveau dirigeant, cité dans un communiqué.

"Constitution du Fonds de dotation qui garantit l'indépendance du journal, achat de la plateforme Arc Publishing au Washington Post qui dote le quotidien d'un outil numérique puissant, élection de Dov à la direction de la rédaction: les planètes sont en train de s'aligner pour que Libération atteigne l'audience de sa notoriété", a commenté pour sa part Denis Olivennes, le directeur général. Le journal a été transféré en début de mois par son ancien propriétaire Altice dans un fonds de dotation, une structure censée garantir l'indépendance du titre mais qui suscite depuis le début des interrogations chez les salariés. Ils réclament notamment que ce fonds soit davantage doté et que la rédaction puisse participer à la gouvernance, des demandes étayées la semaine dernière dans une tribune de soutien publiée dans le Monde et signée par une centaine de personnalités issues du monde politique, intellectuel, universitaire et artistique.

Dov Alfon a fait son service militaire au sein de la 8200, il y restera deux ou trois ans suivant les sources. Ensuite l’ami Dov s’est fait une virginité du côté de l’édition, a effectué un long parcours au quotidien israélien progressiste Haaretz à différentes fonctions, de responsable des suppléments (avec succès) jusqu’à la rédaction en chef pendant trois ans où il développera le digital sa spécialité. Dans ce dernier poste il sera accusé d’une véritable chasse aux sorcières contre les journalistes classés trop à droite.

« L’unité 8200 – ou unité Shmoneh-Matayim en hébreu – est considérée par la majorité des analystes des renseignements comme l’une des unités d’espionnage les plus sophistiquées – et quelque peu controversées – de toute la planète. Une enquête parue en 2014 dans le Guardian avait par exemple révélé qu’elle était chargée d’espionner les civils palestiniens en Cisjordanie. »

Né sous le protectorat français en Tunisie il bénéficie de la nationalité française mais sa mère ayant émigré, il choisira de faire son service militaire en Israël où il sera remarqué pour ses talents en devenant chef de section de la célèbre unité 8200 (voir supra) dont il tirera un livre Unité 8200 (Liana Levi) qui recevra le prix Marianne. Après ses missions au sein d’Haaretz, il deviendra ensuite correspondant en France pour le quotidien tout en collaborant épisodiquement avec Fabrice Arfi à Médiapart. Il deviendra vice-président de l’Association de la presse étrangère en France.

Il aurait été remarqué par Denis Olivennes, le nouvel homme fort d’Altice média et de la fondation qui chapeaute Libération. Au départ chargé d’une simple mission sur le numérique par Olivennes celui-ci aurait vu dans sa promotion l’occasion de mettre fin à l’ère Joffrin avec lequel ses relations sont notoirement fraîches.

Le nouveau rédacteur en chef s’est fendu d’une déclaration digne du Tour de France (je suis heureux d’avoir gagné l’étape et j’espère faire mieux la prochaine fois)

jeanmarcmorandini.com