Des services secrets, nous ne savons que les échecs et rarement les succès. Si l'échec provoque l'anathème, l'ingratitude est fille de la victoire. Quand à la gloire, il faut l'oublier, elle est pour les autres...

jeudi 13 février 2020

Ils enquêtaient sur le virus... et ont disparu


Deux «journalistes citoyens» qui enquêtaient sur la crise sanitaire provoquée par le coronavirus sont introuvables depuis plusieurs jours. Il s'agit de Fang Bin, un ex-homme d'affaires devenu activiste, et de Chen Qiushi, blogueur bien connu en Chine. Le premier, qui informait régulièrement la communauté internationale sur la situation à Wuhan, aurait été arrêté le 9 février par la police. Depuis lundi, sa chaîne YouTube est inactive.

À partir du 25 janvier dernier, Fang Bin avait publié plusieurs vidéos sur Twitter. L'une d'entre elles, particulièrement partagée, montrait huit cadavres de victimes du coronavirus entassés dans un hôpital de Wuhan, en attente d'être emmenés au crématoire. Après la diffusion de ces images, le lanceur d'alerte avait été arrêté une première fois début février, avant d'être relâché avec un avertissement, écrit VICE.

Selon des médias locaux et plusieurs témoignages postés sur les réseaux sociaux, l'activiste a été arrêté alors qu'il tentait de diffuser une autre vidéo. Comme Fang Bin refusait de sortir de chez lui, des pompiers ont fini par forcer l'entrée, permettant ainsi aux forces de l'ordre de l'arrêter. Pour rassurer ses abonnés, l'activiste avait annoncé qu'il publierait une vidéo chaque matin. Depuis lundi, il n'a rien posté du tout et les internautes sont très inquiets.

Chen Qiushi, lui, n'a pas donné signe de vie depuis le 6 février, écrit BFM TV. Ancien avocat des droits de l'homme, ce «journaliste citoyen» sillonnait la ville de Wuhan pour rendre compte de la manière dont les autorités chinoises géraient la crise sanitaire. Lui aussi dégainait régulièrement sa caméra pour filmer des cadavres et des patients dans des hôpitaux surpeuplés, alors qu'il n'avait pas de papier officiel pour œuvrer en tant que journaliste.

Le 2 février, l'ex-avocat publiait sur YouTube une vidéo dans laquelle il apparaissait extrêmement marqué. Il y expliquait que les autorités l'avaient dans le collimateur et qu'il était inquiet pour sa sécurité. Le 6 février, il devait réaliser un reportage dans l'un des hôpitaux nouvellement construits à Wuhan. Selon sa mère, il n'a plus donné de nouvelles depuis. Après avoir lancé un appel à l'aide sur les réseaux sociaux, celle-ci a été contactée par les autorités, qui lui ont annoncé que son fils avait été mis «en quarantaine».

Depuis le début de la semaine, plusieurs grandes organisations internationales, dont l'ONG Human Rights Watch et le Comité pour la Protection des Journalistes (CPJ). «Les autorités de Wuhan doivent révéler si elles détiennent le journaliste Chen Qiushi. Si c'est le cas, il doit être libéré immédiatement. La Chine ne semble pas avoir appris la leçon claire que le fait de cacher la vérité sur une maladie en expansion ne fera qu'empirer les choses», a déclaré pour sa part Steven Butler, coordinateur du programme Asie au Comité de protection des journalistes à Washington.