Malgré des centaines de tests, les risques provoqués par un coup de feu en l'air sont toujours aussi difficiles à déterminer.
Tout le monde, de l’armée américaine à Cecil Adams du site The Straight Dope ont tenté de connaître la dangerosité des balles qui retombent. On compte dans les rangs des experts en criminologie, des chirurgiens cardio-thoraciques et les animateurs de l’émission Mythbuster de Discovery Channel – qui ont dédié la quasi-intégralité d’une émission à ce sujet. Pourtant, personne n’est parvenu à donner une réponse claire. Le consensus général est qu’une balle tiré droit vers le ciel à un angle précis de 90° par rapport au sol n’a que peu de chance de tuer un adulte quand elle retombe. Cela est dû au fait que, lors de sa descente, la résistance de l’air empêche la balle de regagner la vitesse initiale. La balle peut donc vous flanquer une beigne un peu violente, mais ne peut vous tuer que par un coup direct dans l’œil, l’oreille ou la bouche.
Les choses n’ont que peu de chance d’empirer pour les tirs effectués à des angles légèrement différents de la verticale. Ceci posé, les balles tirés à un angle de 45° vers le ciel, ou moins, peuvent être bien plus létales, car elles risquent de toucher quelqu’un sur le sol à une vitesse bien plus importante. Dans ce cas, la gravité ne n’oppose pas directement au déplacement de la balle, le projectile conserve donc une plus grande vélocité tout le long de sa trajectoire. Elle a également plus de chance de maintenir une orientation aérodynamique favorable. Les balles tirées verticalement tendent à retomber de côté ou la pointe vers le haut, ce qui augmente énormément la résistance de l’air.
Pourquoi cette question a-t-elle autant résisté à de nombreux chercheurs au fil des années? (Les soldats allemands et britanniques ont fait des essais de tirs verticaux dès 1909 et les soldats américains en ont effectué durant la Première guerre mondiale.) Pour partie, en raison du fait qu’il est impossible de calculer précisément la vélocité nécessaire minimum pour qu’une balle pénètre la peau.
Après des centaines d’années de tests de tirs effectués sur des porcs, des bœufs et des cadavres humains sans évoquer les gels balistiques et autres objets les experts en munitions estiment qu’une balle doit parcourir environ 60 m par seconde (soit 220 km/h) pour transpercer la peau, bien qu’une balle se déplaçant à 100 mètres par seconde (360 km/h) puisse ricocher sur votre corps dans certaines circonstances. Tout dépend en fait de plusieurs facteurs, comme le profil de la balle ou la partie du corps qui est touchée. L’épaisseur de la peau varie de manière significative d’une personne à une autre et en fonction de la partie du corps touchée, chez chaque individu également. La peau de la lèvre supérieure est, à titre indicatif, 50% plus épaisse que celle de la joue. La peau des nourrissons est très fine et la peau des personnes âgées a une élasticité moindre, ce qui la rend plus facile à percer.
L'orientation de la balle est déterminante
Même si vous disposez d’une idée correcte de la vélocité létale minimum d’un projectile, il est toutefois assez malaisé de régler la vitesse d’un projectile tiré en l’air. Une balle tirée par un fusil peut ainsi s’élever jusqu’à 3 kilomètres et le vent peut l’emporter n’importe où. Julian Sommerville Hatcher, expert en munitions de l’armée américaine dont les travaux sur ce sujet sont régulièrement cités n’est parvenu à faire retomber que quatre des 500 projectiles tirés verticalement à portée de sa cible. L’équipe de Mythbuster n’a pas retrouvé un seul de ses projectiles de fusil.
Au vu de ces obstacles, les résultats des expériences sont par conséquent assez variés. Hatcher a calculé que ses balles de fusil de calibre 30 atteignaient leur vélocité terminale la vitesse à laquelle la résistance de l’air contrebalance la force d’accélération de la gravité à 90m/s. Vous pouvez être tué par une balle arrivant à une telle vitesse, mais la probabilité est faible. Les balles plus légères, comme celles tirées d’un pistolet 9mm atteignent des vitesses bien moindres, entre 45 et 75m/s, selon les modélisations informatiques.
Tout dépend en fait de l’orientation de la balle durant sa chute. Dans les rares cas où la balle descend la pointe vers le bas, elle prend naturellement plus de vitesse. Lors d’une expérience conduite en 1923, où les soldats avaient chargé les projectiles avec la tête à l’intérieur de l’étui, la durée du tir diminua de 80%. La résistance de l’air diminue également avec l’altitude et les balles qui retombent sont donc plus létales à La Paz qu’à Amsterdam.
Voilà donc la bonne nouvelle: une balle tirée verticalement passe au moins 15 secondes dans les airs et beaucoup mettent plus d’une minute à retomber. Alors la prochaine fois que vous allez à une soirée et qu’un de vos copains bourrés se prend pour Sam le Pirate, vous avez largement le temps de récupérer votre verre et de vous mettre à couvert.
Brian Palmer