Des services secrets, nous ne savons que les échecs et rarement les succès. Si l'échec provoque l'anathème, l'ingratitude est fille de la victoire. Quand à la gloire, il faut l'oublier, elle est pour les autres...

mardi 17 mars 2015

De nouveaux droits pour les renseignements suisses et français


SUISSE

Les attributions et les ressources du Service de renseignement de la Confédération (SRC) seront accrues avec la nouvelle loi. Mais le contrôle des activités du SRC sera également renforcé.

Malgré de fréquents rappels au scandale des fiches, Ueli Maurer n'a pas tremblé au Conseil national avec la nouvelle loi sur le renseignement.
Image: Keystone


Les services secrets devraient avoir davantage de moyens pour lutter contre le terrorisme et l'espionnage. Par 154 voix contre 33, le National est entré lundi en matière sur la nouvelle loi sur le renseignement. Seule une partie de la gauche, Verts en tête, s'y est opposée.

Les libertés personnelles sont en danger, a affirmé Daniel Vischer (Verts/ZH), dénonçant une volonté de surveillance généralisée notamment en s'introduisant dans des systèmes informatiques. Selon lui, le seuil du tolérable sera franchi en matière d'observation préventive.

Actuellement, les actes préparatoires au terrorisme peuvent être surveillés par le Ministère public de la Confédération. A l'avenir, le Service de renseignement de la Confédération (SRC) pourra agir sans qu'il y ait soupçon de délit pénal, a affirmé le Zurichois.

Répondre aux menaces

Tout en regrettant que l'UDC, qui avait contribué à l'échec d'un projet semblable en 2009, ait changé d'avis. Les appels écologistes n'ont pas convaincu, à part dans une partie des rangs socialistes. La plupart du groupe PS, comme les Vert'libéraux, préfère corriger le projet afin d'éviter les excès, et refusera la loi si ses amendements ne sont pas suivis.

Les évènements liés à l'Etat islamique et les récentes attaques sanglantes à Paris et à Copenhague en tête, la majorité des députés ont estimé nécessaire d'offrir davantage de moyens au SRC pour faire face aux menaces actuelles. A défaut, on dépendra des informations des services secrets étrangers, selon Corina Eichenberger (PLR/AG).

Il s'agit de savoir si l'on veut une Suisse qui puisse empêcher les attentats et arrêter les terroristes, ou alors une Suisse qui devienne une plaque tournante pour ces personnes, a lancé Ida Glanzmann (PDC/LU). Et de s'étonner du nombre d'experts qui ont dénoncé la loi à la dernière minute dans les médias.

Pas de pleins pouvoirs

Une vingtaine de nouveaux postes seront créés. Les services secrets n'auront pas pour autant les pleins pouvoirs, a assuré Roland Borer (UDC/SO) au nom de la commission préparatoire, écartant le danger d'une nouvelle affaire des fiches. Les mesures les plus intrusives concerneraient une dizaine de cas par an.

Ces nouveaux moyens seront utilisés de manière très ciblée et feront l'objet de nombreux contrôles. Pour de nombreux orateurs de droite, le projet fait un juste équilibre entre la sauvegarde des droits fondamentaux et le maintien de sécurité de la Suisse.

Recherches spéciales

A l'avenir, et moyennant une autorisation limitée dans le temps, les agents fédéraux pourraient surveiller des communications (courrier, téléphone, courriel), observer des faits dans des lieux privés, si nécessaire en installant des micros, ou perquisitionner secrètement des systèmes informatiques.

Ces «recherches spéciales» ne seraient décidées qu'en dernier recours. L'aval du Tribunal administratif fédéral (TAF) puis du chef du Département fédéral de la défense, qui devra consulter ses collègues de justice et police et des affaires étrangères (délégation de sécurité) seraient également requis.

Ces mesures serviront à lutter contre le terrorisme, la prolifération d'armes et l'espionnage. Pas question en revanche de s'attaquer à l'extrémisme violent via cet arsenal. Pour distinguer l'extrémisme violent du terrorisme, le Conseil fédéral dressera chaque année une liste.

Big Brother

Le SRC pourra faire enregistrer les signaux transmis par réseau filaire. D'aucuns craignent l'oeil de Big Brother sur Internet. La loi interdit toutefois de toucher à ces données si tant l'émetteur que le récepteur se trouvent en Suisse ou d'utiliser des indications concernant des personnes et entreprises helvétiques comme mots-clés de recherche.

Le contrôle des activités du SRC sera renforcé. Le projet prévoit une surveillance quadruple: Délégation des commissions de gestion du Parlement, Délégation des finances, Département fédéral de la défense (DDPS) et Conseil fédéral. Une cinquième instance autonome s'ajoutera pour examiner l'exploration radio.

FRANCE

Les services pourront, selon le projet de loi, infiltrer et surveiller les terroristes potentiels sans passer par la case judiciaire.
Image: AFP

Un projet de loi, qui sera présenté jeudi 19 mars en Conseil des ministres donnera de nouveaux droits aux services de renseignement, notamment en matière d'écoute de conversations téléphoniques et d'interception des courriels dans la lutte contre le terrorisme, révèle Le Figaro mardi.

Selon le projet de loi, dont Le Figaro dévoile le contenu, les services pourront désormais infiltrer et surveiller les terroristes potentiels grâce à des autorisations administratives, sans passer par la case judiciaire.

Ils pourront effectuer en toute légalité des «interceptions de sécurité» portant sur les contenus électroniques des mails et des conversations téléphoniques, dès lors qu'ils seront en lien direct avec l'enquête.

Micros et des caméras espions

Par ailleurs, le projet de loi prévoit aussi le «recours à des appareils enregistrant les paroles et les images de personnes ou à des logiciels captant les données informatiques». Ce qui permettra aux agents de renseignement de poser des micros et des caméras espions, précise Le Figaro.

Le projet de loi prévoit également l'emploi de balises «permettant de localiser en temps réel un véhicule ou un objet» et permet «l'utilisation de dispositifs mobiles de proximité», à savoir des appareils espions. Ils ne pourront en aucun cas, cependant, capter le contenu des conversations et des métadonnées.

Offrir un cadre légal général 

D'autre part, les agents des services spécialisés ne devraient plus être exposés à des risques pénaux injustifiés puisque pour la première fois en France, le projet vise à «offrir un cadre légal général à des activités (...) susceptibles de porter atteinte à la vie privée et au secret des correspondances», selon le quotidien.

Pour la première fois aussi, le législateur dresse la liste «limitative» des motifs pour lesquels les services peuvent avoir l'autorisation de recourir aux «techniques spéciales» de recueil du renseignement.

Outre la «défense nationale, les intérêts de politiques étrangères, les intérêts économiques ou scientifiques majeurs», figurent aussi «la prévention du terrorisme, de la prolifération des armes de destruction massive ainsi que des violences collectives pouvant porter gravement atteinte à la paix publique».