«Le Canard enchaîné» et «Atlantico» publient mercredi plusieurs extraits d'échanges privés entre Nicolas Sarkozy et ses conseillers, enregistrés à leur insu par le très contesté Patrick Buisson.
Nicolas Sarkozy et son conseiller controversé Patrick Buisson, qui a procédé aux enregistrements. (photo: AFP)
Dans son édition de mercredi, «Le Canard enchaîné» publie le verbatim de l'enregistrement d'une réunion à l'Elysée, le 27 février 2011, autour de Nicolas Sarkozy à quelques heures du remaniement qu'il va annoncer. L'hebdomadaire moque le «fayot» Patrick Buisson, qui se répand en encouragements et en félicitations auprès du chef de l'Etat.
Selon «Le Canard», par exemple, après l'enregistrement de l'allocution dans laquelle il annonce le remaniement, l'ex-président revient: «On n'a pas entendu ces connards de chiens qui aboyaient?» (dans les jardins élyséens.) L'hebdomadaire satirique poursuit: «Buisson spirituel: «Tu parlais des journalistes?» Puis courtisan: «C'était très bien! Tu avais les bonnes intonations. Tu as bien détaché les phrases importantes. Faut pas y toucher.»
«C'est dur, hein?»
De son côté le site atlantico.fr met en ligne les enregistrements sonores et les verbatim d'au moins quatre enregistrements, dans le contexte d'une réunion de Nicolas Sarkozy et de ses conseillers le 26 février 2011 à la Lanterne, à Versailles, consacrée au remaniement. Brice Hortefeux devait ensuite être remplacé par Claude Guéant à l'Intérieur et Michèle Alliot-Marie par Alain Juppé au Quai d'Orsay. «Remplacer (ndlr: le Premier ministre François) Fillon par (Jean-Louis) Borloo, c'est grotesque», déclare Sarkozy lors de la réunion. «Y a qu'une seule personne qui pourrait remplacer Fillon aujourd'hui, c'est Juppé. Je m'entends très bien avec Alain... Même si Fillon n'est pas décevant, il est comme on le sait.»
Dans la voiture qui les ramène de Versailles, Buisson et le publicitaire Jean-Michel Goudard, conseiller en communication ne se privent pas de commentaires acerbes. «C'est dur, hein?», lâche notamment Buisson à propos de la présence de Carla Sarkozy à Versailles. «Ah t'es amusant. Si je la connaissais pas un peu mieux depuis la télé j'aurais trouvé ça… lamentable… interventions percutantes quand même hein», lui répond Goudard. Les deux hommes s'inquiètent ensuite du changement de fonction de Claude Guéant, qui passe du secrétariat de l’Elysée à l'Intérieur.
Plainte envisagée contre «Le Point»
«Tu vois l'avantage de Guéant, là depuis trois mois, c'est qu'il connaissait un petit peu les dossiers, notamment pour les affaires auprès du parquet. Il se mouillait un petit peu», dit Buisson, mis en cause dans l'affaire des marchés des sondages de l’Elysée. «Ben ça l'intéresse quand même directement parce que… l’Elysée, c'était lui, à cette époque-là», lui rétorque Goudard. Buisson, ancien journaliste de l'hebdomadaire d'extrême droite «Minute», se plaint aussi à propos du remaniement de ne pas avoir «réussi à entraîner la tête» du ministre de la Justice Michel Mercier, qu'il qualifie de «totalement calamiteux». «Il y a plus calamiteux encore», assène Goudard, en nommant la ministre de la Santé Roselyne Bachelot qui, selon lui, «ne dit que des conneries».
Dans un communiqué, Patrick Buisson se défend: «En tant qu'intervenant essentiel de ces réunions» il «ne pouvait prendre des notes écrites et utilisait ces enregistrements pour préparer la réunion suivante». Ces derniers «étaient détruits au fur et à mesure sauf manifestement quelques-uns qui lui ont été dérobés et dont il est fait présentement un usage extravagant et pervers», affirme-t-il. Patrick Buisson, accusé mi-février par «Le Point» d'avoir enregistré certaines de ses conversations avec l'ancien président, avait alors indiqué qu'il comptait porter plainte.
Patrick Buisson, qui a joué un rôle central dans la campagne présidentielle de Nicolas Sarkozy en 2012, a été accusé d'infuser dans la politique française des thèses de sa famille d'origine, l'extrême droite. Dans l'un des enregistrements, il se présente comme «royaliste». M. Buisson est aussi au cœur de l'affaire des sondages, dans laquelle un juge enquête sur la régularité des contrats conclus sous la présidence Sarkozy, sans appel d'offres, entre l'Elysée et neuf instituts de sondage, dont la société de conseil Publifact.