Des services secrets, nous ne savons que les échecs et rarement les succès. Si l'échec provoque l'anathème, l'ingratitude est fille de la victoire. Quand à la gloire, il faut l'oublier, elle est pour les autres...

mercredi 12 juin 2013

Système de surveillance: Obama accusé de poursuivre la politique de Bush




Depuis le scandale lié aux révélations sur le système américain de surveillance, une partie de la société civile américaine accuse le président, Barack Obama, de se livrer à une politique liberticide dans la continuité de celle de son prédécesseur, George W. Bush...

Barack Obama avait promis de rompre avec l’ère Bush, devenue synonyme d’abus en tous genres au nom de la «guerre contre le terrorisme». Mais les révélations sur le système américain de surveillance ont concrétisé les pires craintes des défenseurs des libertés individuelles. Ces derniers tentaient depuis des années de faire la lumière sur l’utilisation par le gouvernement d’une clause du «Patriot Act», la loi antiterroriste emblématique des dérives des années Bush, votée juste après les attentats du 11 septembre 2001. Le scandale a confirmé ce qu’ils redoutaient. Aujourd'hui, une partie de la société civile américaine accuse le président de se livrer à une politique liberticide dans la continuité de celle de son prédécesseur. Qu’en est-il?

«L’administration Obama n’a rien à voir avec celle de Bush, qui reposait sur la manipulation de l’information, assure d’emblée Jacques Portes, professeur d'histoire nord-américaine à l'Université Paris VIII. L’exemple le plus flagrant, c’est la décision de W. Bush d’intervenir en Irak [en 2003] à cause des armes de destruction massive, alors que c’était un mensonge monté de toutes pièces.» Selon lui, Obama n’est pas «liberticide», mais avant tout un «centriste». «Il n’a jamais été un grand révolutionnaire et ne veut pas le devenir», explique-t-il.

Obama avait voté pour la reconduction du Patriot Act

Le président américain ne s’est pas opposé au Patriot Act, à l’origine de tout le système de surveillance aujourd’hui mis en lumière. Promulguée par George W. Bush le 26 octobre 2001, cette loi élargit les pouvoirs de surveillance du gouvernement et permet des écoutes de toutes les communications «utilisées par les terroristes, y compris les emails, l'Internet et les téléphones cellulaires», comme l’avait proclamé Bush à l’époque. Une loi controversée (modifiée depuis à la marge mais pas sur le fond) dont Barack Obama a pourtant voté la reconduction en 2005.

La position de Barack Obama s’explique aussi par le fait qu’il est pris en étau entre les Républicains -majoritaires au Congrès- qui l’accusent d’être trop faible face au terrorisme, et les défenseurs des libertés individuelles, qui revendiquent la protection et la confidentialité des données privées. Face au scandale, le président s’est justifié en mettant en avant la nécessité de faire des «compromis» entre la protection de la vie privée et les exigences de la lutte antiterroriste. «En théorie, on peut se plaindre de Big Brother et de la façon dont ce programme pourrait potentiellement dégénérer, mais quand on regarde vraiment les détails, je pense que nous avons trouvé le bon équilibre», a-t-il assuré. Pour Jacques Portes, ce système de surveillance n’en reste pas moins «inquiétant et malsain, surtout dans un pays démocratique».

les géants du web nient tout en bloc

Les informations révélées par le Washington Post et The Guardian sont une bombe à retardement dont l’onde de choc risque d’être mondiale. Les géants du web nient avoir été au courant des méthodes du FBI et de la NSA.

Les révélations du Washington Post et du Guardian ont lancé un énorme pavé dans la Silicon Valley en révélant le programme PRISM qui est au web ce qu’Echelon et aux télécommunications.
Selon les journaux, les services de renseignements américains piochent dans les informations personnelles des serveurs des géants du web comme bon leur semble sans en référer à qui que ce soit. L'Agence nationale de sécurité américaine (NSA) et le FBI airaient accès aux serveurs de neuf géants américains de l'internet, dont Microsoft, Yahoo!, Google et Facebook, pour y surveiller les activités d'étrangers. Et pour finir, ce projet secret qui piétine les libertés fondamentales des citoyens a été validé par Barack Obama.
Leur méthode est simple. Ils utilisent des accès cachés dans les logiciels fabriqués par les principales entreprises informatiques américaines pour surveiller les internautes. Questions : ces accès ont-ils été délibérément ouverts aux autorités ou les services de renseignements ont-ils hackés les serveurs de Google, Facebook, Yahoo, Apple, Twitter, Skype, Dropbox...

Craignant des réactions de leurs clients, mais aussi – et peut-être surtout – des autorités des autres pays où ils se développent, ces grandes entreprises nient tour à tour leur implication dans ce projet dont ils disent tout ignorer.
Pourtant, le Washington Post a été contacté par un ancien employé du renseignement qui a fourni des documents, dont une présentation PowerPoint de formation décrivant le partenariat entre l'agence d'espionnage NSA et les sociétés internet.
Habituellement discret, Apple a réagi rapidement. Steve Dowling, son porte parole affirme que l’entreprise n’a « jamais entendu parler de PRISM. ». Il dément notamment les relations particulières avec les services secrets. « Nous ne fournissons aucun accès direct à nos serveurs à des agences gouvernementales, et toute agence de ce type recherchant des données sur un client doit obtenir un mandat judiciaire ».


Pour Google, il n'y a pas de "porte cachée"

Le discours est identique chez Facebook, le réseau social sur lequel on peut tout dire. Contactés par l'AFP, ses responsables ont également démenti ces accusations. « Nous ne fournissons à aucune organisation gouvernementale un accès direct aux serveurs Facebook », a affirmé Joe Sullivan, responsable de la sécurité du groupe.
La société confirme des échangent d’information, mais précise qu’elles se déroulent dans un cadre légal. : « Nous regardons de près la conformité au droit de telles requêtes, et ne fournissons des informations que dans les cadres requis par la loi », affirme Joe Sullivan.
Chez Google, c’est également la surprise. Dans un communiqué publié dans les deux quotidiens, la société de Mountain View affirme qu’il n’existe « pas de porte d'entrée cachée » à ses serveurs pour les services fédéraux. Quant à Microsoft, elle refuserait de participer à un tel programme », s’il en avait eu connaissance.
Toutes ces dénégations vont certainement être vérifiées de près par les autorités de toute la planète, Chine et Europe en tête. En effet, si la loi américaine protège les Américains d'une surveillance sans mandat de justice, les personnes situées hors du territoire ne bénéficient pas de cette protection et peuvent être espionnées en toute légalité.
Si l’affaire va créer un scandale aux États-Unis, l’onde de choc va dépasser ses frontières. De là à imaginer que les Cnil européennes vont demander des précisions sur ces agissements il n’y a qu’un pas que ne devrait pas tarder à être franchi.

Un accord secret permet à la police fédérale américaine d’accéder directement aux serveurs de neufs géants de l’Internet

Agence nationale de sécurité américaine (NSA) et le FBI ont accès aux serveurs de neuf géants américains de l'internet, dont Microsoft, Yahoo!, Google et Facebook, pour y surveiller les activités d'étrangers, ont révélé le Washington Post et le Guardian jeudi. Le quotidien américain Washington Post a été contacté par un ancien employé du renseignement qui a fourni des documents, dont une présentation PowerPoint de formation décrivant le partenariat entre l'agence d'espionnage NSA et les sociétés internet.
Le programme secret, au nom de code « PRISM », est en place depuis 2007 et permet à la NSA de se connecter aux serveurs des entreprises, via un portail, pour consulter des informations sur des utilisateurs dont il existerait des éléments permettant de penser « raisonnablement » qu'ils sont à l'étranger, le tout sans ordonnance de justice. La loi américaine protège ses citoyens d'une surveillance faite sans ordonnance, mais les personnes hors du territoire ne bénéficient pas de cette protection et peuvent être espionnés en toute légalité.

Skype, une véritable mine d’or d’informations

Selon le journal, « les analystes qui utilisent le système sur un portail internet à Fort Meade (une base militaire près de Washington, ndlr) doivent entrer des sélecteurs, ou mots-clés de recherche, de façon à ce que la probabilité que la cible soit étrangère dépasse 51% ». Skype, AOL, YouTube, Apple et PalTalk participeraient également au système, et la plateforme d'hébergement de fichiers Dropbox devrait être ajoutée prochainement. Selon le Guardian, la NSA peut consulter « les courriers électroniques, les chats vidéo et audio, les vidéos, les photos, les chats comme Skype, les transferts de fichiers, les détails des réseaux sociaux, et plus ». Les communications par Skype peuvent être espionnées en direct. Il s'agit de « l'un des accès les plus riches (...) pour la NSA », est-il écrit sur le document PowerPoint, selon le Guardian. Plus de 77.000 rapports de renseignements ont ainsi cité PRISM.
Google a déclaré dans un communiqué aux deux quotidiens qu'il faisait « très attention à la sécurité des données de (ses) utilisateurs ». « Nous ne divulguons de données à l'Etat fédéral qu'en accord avec la loi, et nous examinons ces demandes avec attention », dit-il. « Des personnes affirment que nous avons créé une porte d'entrée cachée pour l'Etat dans nos systèmes, mais Google n'a pas de porte d'entrée cachée pour que l'Etat accède à des données privées d'utilisateurs », poursuit-il.

Procédure légale

Cet espionnage a été permis par une loi votée pendant le mandat de George W. Bush, et renouvelée et promulguée par Barack Obama en décembre 2012, malgré l'inquiétude d'élus face à cette carte blanche donnée à la NSA. « Une expérience directe de ces systèmes, et un sentiment d'horreur face à ses possibilités, a poussé un officier de renseignement à fournir la présentation PowerPoint sur PRISM et d'autres documents au Washington Post pour révéler ce qu'il estime être une intrusion choquante dans la vie privée », écrit le Washington Post. « Ils peuvent vraiment voir vos idées se former au fur et à mesure que vous les tapez », a confié cet officier au journal.
Ces révélations suivent celle du quotidien britannique sur un autre programme conduit par la NSA, grâce auquel l'agence d'espionnage recueille la totalité des relevés téléphoniques des abonnés de l'opérateur Verizon.

Snowden a probablement abusé de ses droits

Le large éventail d'informations révélées par Edward Snowden, concernant différents programmes de la NSA, laisse penser qu'il pourrait avoir outrepassé ses droits d'accès pour mettre la main sur des dossiers classifiés, selon d'anciens responsables américains.

«Il est hautement probable qu'il a outrepassé ses limites», déclare Cedric Leighton, ancien directeur adjoint de la formation à la NSA et colonel retraité de l'armée de l'air.

«Il lui a juste suffi d'aider un haut responsable avec un problème d'informatique pour avoir accès, probablement, au mot de passe de cette personne. Dès lors, tout devient possible», dit-il.

Le cas d'Edward Snowden diffère de celui de Bradley Manning, le soldat américain aujourd'hui jugé notamment pour «collusion avec l'ennemi» après avoir publié des milliers de dossiers classifiés.

Cet analyste pour le renseignement en Irak avait l'autorisation de naviguer dans un océan de télégrammes diplomatiques top secrets et de rapports du renseignement militaire, qu'il a ensuite livrés au site internet WikiLeaks.

Il devait assurer la maintenance

Pourtant Snowden n'était pas un analyste du renseignement et «était censé assurer la maintenance du réseau. Mais il regardait probablement aussi (les documents) qui circulaient», selon James Lewis, un ancien responsable américain spécialisé dans la cyber-sécurité.

Les services de renseignement sont continuellement tiraillés entre la nécessaire protection de leurs informations et les demandes de transparence.
Surveillance après le 11 septembre

Après les attentats du 11 septembre 2001, les parlementaires avaient ouvertement critiqué les services d'espionnage pour avoir échoué à «faire les liens» qui auraient permis d'empêcher la catastrophe.

Et l'affaire Snowden pourrait une fois de plus pousser le renseignement américain à revoir la manière dont il gère la confidentialité de ses documents, selon M. Deitz.

Les dernières révélations entraîneront inévitablement une révision globale de la cyber-sécurité au sein des services de renseignement et du contrôle des employés, et notamment des sous-traitants, assure pour sa part M. Leighton.

«Ils devront se pencher sur les systèmes d'authentification. Et trouver autre chose pour vraiment assurer une protection supplémentaire à toutes sortes de documents», dit-il.

Profil inhabituel

Edward Snowden avait un profil inhabituel pour la NSA, notamment en raison de son manque de formation, remarque M. Leighton. L'agence embauche généralement des techniciens hautement qualifiés et ne choisit que les meilleurs candidats issus de l'armée.

L'ampleur de ces révélations est sans doute largement exagérée par leur auteur lui-même, qui affirmait au journal britannique The Guardian que tout analyste de la NSA «peut, à tout moment et n'importe où, s'attaquer à qui que soit».

«Moi-même, assis à mon bureau, je pouvais mettre sur écoute n'importe qui, que ce soit vous, votre comptable, un juge fédéral ou même le président des Etats-Unis, si tant est que j'avais son adresse électronique personnelle», ajoutait-il.

Pour M. Deitz, de telles affirmations sont «ridicules. C'est du grand n'importe quoi».

Selon lui, Edward Snowden ignore les procédures et les autorisations légales nécessaires pour mettre quelqu'un sur écoute, et ses propos trahissent une vision «hollywoodienne» de la façon dont fonctionnent les services de renseignement.

Egger Ph.