Des services secrets, nous ne savons que les échecs et rarement les succès. Si l'échec provoque l'anathème, l'ingratitude est fille de la victoire. Quand à la gloire, il faut l'oublier, elle est pour les autres...

mercredi 27 février 2013

Tuerie de Chevaline : l'enquête piétine toujours


Six mois après le triple meurtre des Alpes, les enquêteurs continuent de passer "au peigne fin" la vie de Saad al-Hilli.

Près de six mois après la tuerie de Chevaline, les enquêteurs continuent de passer "au peigne fin" la vie de Saad al-Hilli, tué avec deux membres de sa famille dans les Alpes, et tentent notamment de récupérer des données informatiques enregistrées à l'étranger par le père. Saad al-Hilli, ingénieur aéronautique, "enregistrait presque toute sa vie sur des serveurs du monde entier" et "nous essayons de récupérer ces données, mais cela prend du temps", a expliqué mercredi à l'AFP le procureur de la République d'Annecy Éric Maillaud.

La justice française enquête notamment sur des données comptables enregistrées par Saad al-Hilli sur des serveurs informatiques américains. Des commissions rogatoires ont été adressées aux États-Unis, a précisé la même source. Le 5 septembre dernier, Saad al-Hilli, Britannique d'origine irakienne de 50 ans, sa femme Iqbal, 47 ans, et sa belle-mère Suhaila al-Allaf, 74 ans, de nationalité suédoise, ont été tués par balle à Chevaline, près d'Annecy, où ils passaient des vacances. Leurs corps ainsi que celui d'un cycliste français, victime collatérale, avaient été découverts sur le parking forestier de la combe d'Ire. Les deux fillettes du couple avaient survécu à la fusillade, mais l'aînée, Zainab, avait été grièvement blessée.

Piste d'un tueur fou

Près de six mois après le quadruple meurtre, le mystère demeure alors que l'enquête s'avère particulièrement difficile en raison de son "caractère international" et du "choc des cultures judiciaires", a reconnu le procureur. "Les juges américains refusent de nous transmettre les données informatiques si nous ne montrons pas de lien direct entre ces données et les meurtres, ce qui est presque impossible", a expliqué M. Maillaud, avant d'ajouter que chaque commission rogatoire devait en outre être "minutieusement traduite, ce qui prenait beaucoup de temps".

"Aujourd'hui nous n'avons aucune idée de qui a fait ça et pourquoi", a reconnu le magistrat, précisant qu'aucune des pistes envisagées depuis le début de l'enquête n'avait été écartée et qu'il était impossible de les "hiérarchiser". Trois axes de recherches avaient été évoqués après le drame : la piste du litige familial entre Saad al-Hilli et son frère Zaid à propos de l'héritage de leur père, celle du métier de Saad al-Hilli, qui a travaillé pour une société leader mondial des micro-satellites, ainsi que celle de son pays d'origine, l'Irak. L'idée d'un tueur fou a également émergé. Seule la piste du cycliste français en tant que cible principale du meurtrier a été écartée, a indiqué le procureur.

Si la querelle familiale est toujours explorée après la découverte d'un compte en Suisse au nom du père de Saad al-Hilli, créditeur de près d'un million d'euros, en revanche aucun élément nouveau n'est parvenu d'Irak depuis l'envoi d'une commission rogatoire internationale destinée à mieux cerner le profil et le patrimoine des principales victimes d'origine irakienne. "Le déplacement des juges d'instruction sur place n'est pas envisagé pour l'instant pour des raisons de sécurité", a précisé M. Maillaud.

À la recherche d'une moto

Selon lui, "l'enquête avance, mais extrêmement lentement, et il est difficile de rendre tangible la quantité de travail effectué". Près de 800 personnes ont été entendues, mais sans que cela permette d'obtenir "d'élément crucial", a-t-il poursuivi. Les enquêteurs sont ainsi toujours à la recherche d'une moto qui s'était aventurée le jour des meurtres sur des sentiers forestiers et qui avait été reconduite dans le chemin de la combe d'Ire par des agents de l'ONF (Office national des forêts). "Il est certain qu'on voudrait parler au conducteur de cette moto, même si cela ne veut pas dire que c'est le tueur", a indiqué M. Maillaud.

Unique témoin direct du drame, Zainab, 7 ans, avait été brièvement entendue par les enquêteurs à qui elle avait simplement dit avoir vu "un méchant". Depuis le décès de leurs parents, Zainab et sa soeur de 4 ans ont été placées dans une famille d'accueil, mais leur tante Fadwa al-Saffar doit déposer une demande d'adoption.