Forest Frederick Edward Yeo-Thomas, l'un des plus grands agents secrets britanniques du SOE, évita au résistant d'être exécuté en 1944 à Buchenwald.
Forest Frederick Edward Yeo-Thomas © DR
En 2012, pour un livre réalisé à partir des archives britanniques de 1940 à 1981 (1), Stéphane Hessel, qui a perdu la vie mercredi matin, avait accepté d'évoquer sa déportation à Buchenwald en 1944 et comment il y était passé très près de la mort. Il avait alors parlé de celui qui l'avait sauvé de l'exécution, un des plus grands agents secrets britanniques du Special Operations Executive (SOE), Forest Frederick Edward Yeo-Thomas. Celui-ci, capturé et torturé par la Gestapo quand il était retourné en mission en France pour tenter de sauver son compagnon Pierre Brossolette, joua alors auprès du médecin du camp nazi la dernière carte qui allait leur permettre d'échapper à la mort.
Extraits : "Yeo-Thomas ? Au téléphone, Stéphane Hessel, surpris, marque d'abord un temps d'arrêt : "C'est lui qui m'a sauvé la vie à Buchenwald. Je me demande encore aujourd'hui pourquoi il m'a choisi parmi tous les autres. C'est mon drame..." Ce 8 août 1944, Forest Frederick Edward Yeo-Thomas, agent du SOE britannique, est extrait de sa cellule de la prison de Fresnes et se retrouve avec le jeune lieutenant Stéphane Hessel dans un train qui part pour Buchenwald.
Improbables odyssées
"Cela se passait quelques jours avant la libération de la capitale. Nous étions trente-sept, membres du SOE ou résistants ayant commis des actions importantes, poursuit Hessel. Nous sommes arrivés le 15 août à Buchenwald. Deux semaines après, seize membres du groupe ont été appelés et pendus dans la cave du four crématoire, puis, peu de temps après, onze autres fusillés. Entre ces deux exécutions, Yeo-Thomas, avec l'aide de deux prisonniers allemands, avait négocié avec le médecin SS du camp, lui disant que la guerre était finie pour eux et que, s'il nous aidait, nous lui ferions des certificats attestant qu'il avait facilité l'évasion d'officiers alliés. Nous avons pris la place de détenus français morts du typhus. Le médecin avait dit à Yeo-Thomas deux personnes, il en a obtenu trois, il voulait qu'on en sauve le plus possible, quitte à lui-même laisser sa place."
Séparés et ensuite envoyés dans des camps de travail, les deux hommes parviendront à s'évader, au terme d'improbables odyssées, et à regagner les lignes alliées (...) "C'était un véritable héros. Je crois qu'il se savait porteur d'une importante mission", concluait Stéphane Hessel.
(1) Dans le secret des archives britanniques, comment les Anglais voyaient la France, François Malye et Kathryn Hadley, Calmann-Lévy, 2012.
François Malye