L'auteur de l'assassinat de l'opposant de gauche tunisien Chokri Belaïd a été identifié et est activement recherché, a déclaré mardi le Premier ministre désigné, Ali Larayedh.
Il a confirmé que quatre salafistes avaient été interpellés dans le cadre de l'enquête. "Nous avons désormais identifié l'assassin de Belaïd et il est en fuite. La police le recherche", a-t-il dit lors d'une conférence de presse.
De source proche des services de sécurité, on rapportait lundi qu'un salafiste avait été arrêté en relation avec le meurtre. La station de radio Express FM a annoncé pour sa part que la police avait arrêté trois salafistes dont un agent de police, citant un responsable de la sécurité.
L'un des suspects accompagnait l'homme qui a tiré sur Belaïd devant chez lui avant de s'échapper à moto, a précisé Ali Larayedh, ajoutant que le groupe montait la garde depuis des jours devant son domicile et une place située à proximité.
Ali Larayedh, qui demeure ministre de l'Intérieur jusqu'à la formation d'un gouvernement, n'a pas précisé si l'un des suspects était un agent de police, comme le dit Express FM.
"L'identification des assassins de Belaïd renforce la confiance dans la justice et dans la neutralité des (forces) de sécurité", a-t-il dit.
Interrogée sur Europe 1, sa veuve Basma Belaïd a fait part de son insatisfaction. "C'est beau de savoir qui a exécuté. Mais il faut savoir qui a ordonné", a-t-elle estimé. "Nous voulons savoir qui a commandé cet assassinat. C'est un crime très organisé", a-t-elle ajouté.
"CRIME HAINEUX"
L'assassinat de l'opposant, le 6 février, n'a pas été revendiqué. Il a donné lieu en Tunisie à une crise politique sans précédent depuis la "révolution de jasmin" il y a deux ans.
Les mouvements laïques accusent les islamistes d'Ennahda aux affaires de complaisance à l'égard des extrémistes salafistes qui s'en sont pris récemment à des cinémas, des théâtres, des bars ou des particuliers.
Mardi, le chef d'Ennahda, Rached Ghannouchi, a une nouvelle fois rejeté ces accusations dans un communiqué qui demande de sévères sanctions contre les auteurs de "ce crime haineux qui (...) a mis en danger la paix civile et la coexistence entre Tunisiens".
Le communiqué d'Ennahda invite les jeunes Tunisiens à se détourner du salafisme en les appelant à "préférer la pensée modérée qui exclut le takfir (le fait d'accuser d'apostasie un autre musulman, NDLR) et la violence".
La vague de protestation soulevée par l'assassinat de Chokri Belaïd a entraîné la démission du gouvernement d'Hamadi Jebali. Le Premier ministre issu d'Ennahda a renoncé à ses fonctions faute d'avoir pu former un gouvernement apolitique chargé de préparer de nouvelles élections pour ramener le calme.
Le président Moncef Marzouki a invité vendredi Ali Larayed à former un nouvel exécutif.
Tarek Amara; Jean-Philippe Lefief, Pascal Liétout et Hélène Duvigneau pour le service français, édité par Gilles Trequesser