La volonté politique de détruire les groupes terroristes bute sur l'absence de drones armés.
La France tente actuellement de mettre en place une opération militaire exceptionnelle dans le nord du Mali, du jamais vu dans l'histoire récente de notre pays. Mais, malgré le déploiement important de moyens, elle rencontre de sérieuses difficultés à cause de l'immensité du territoire et de l'absence de drones armés dans notre arsenal.
Il s'agit de casser AQMI, au sens propre du terme, c'est-à-dire d'en détruire les capacités et d'en tuer le maximum de membres. Dans l'entourage du ministre de la Défense, on ne s'embarasse plus de précautions de langage : "Nous sommes en guerre et on va casser le plus possible de ces connards".
Schématiquement, il s'agirait de faire ce que les Américains font au Pakistan, au Yemen ou ailleurs : on repère des cibles de haute valeur (responsables terroristes, centre de commandement ou dépôts logistiques) et on les "tape" depuis le ciel avec des munitions de précision. Pour ce faire, l'arme idéale est le drone Male armé, type Reaper. Mais contrairement aux Etats-Unis, la France n'en possède pas. Ou pas encore...
Faute de drones armés, les militaires font avec les moyens du bord. Ils ne sont pas négligeables. Pour la surveillance et le recueil du renseignement (optique et électronique), la France a déployé pas moins de cinq Atlantique 2, deux Mirage F1CR, deux drones Harfang et, sans doute, des moyens aériens spécifiques du COS, voire de la DGSE. Très polyvalents, les Rafale peuvent également être utilisés pour ce type de mission reco. Américains et Britanniques fournissent également une aide en matière de recueil du renseignement.
Mais il y a deux problèmes : l'immensité du territoire à surveiller (plus grand que la France) et les élongations : pour qu'une patrouille de Rafale, venant de N'Djaména, reste 2 à 3 heures au dessus de cet immense zone, il faut mobiliser deux ravitailleurs en vol ! Idem pour les drones Harfang qui passe la moitié de leur temps de vol en transit.
La situation est donc la suivante : il est difficile de tout surveiller et lorsque qu'une cible est repérée, il faut pouvoir la traiter, c'est-à-dire avoir à proximité un bombardier capable de délivrer une munition. Cela fait beaucoup de conditions qui limitent pour l'instant l'ampleur des frappes contre Aqmi. Mais la volonté, politique et militaire, est bien là.
Jean-Dominique Merchet