Le terroriste à la bombe impliqué dans la tentative d’attaque de l’avion de ligne Amsterdam-Detroit travaillait comme informateur pour les services de renseignement saoudiens et pour la CIA
Le soi-disant « kamikaze au slip piégé » impliqué dans un complot visant à faire exploser un avion aux USA travaillait en secret comme informateur pour les services de renseignement saoudiens et pour la CIA.
Cette révélation est l’ultime retournement de situation dans cette histoire toujours plus étrange à propos d’une apparente tentative d’al-Qaïda de frapper une importante cible américaine à l’aide d’un engin sophistiqué caché dans les sous-vêtements du terroriste.
Le complot, qui d’après une déclaration de la Maison Blanche faite lundi (avant-hier) a vu la saisie par les autorités d’un slip piégé quelque part au Moyen-Orient ces 10 derniers jours, avait déclenché l’alarme partout aux USA.
Tout cela serait lié avec ce qui semble être une frappe de drone dimanche au Yémen qui a tué dimanche dernier dans leur voiture deux Yéménites membres d’al-Qaïda lors d’un tir de missile, l’un d’eux était un haut responsable [de l’organisation], Fahd Mohammed Ahmed al-Quso.
Mais l’information selon laquelle l’individu au centre de ce projet d’attentat à la bombe était en réalité un informateur des services de renseignements US ne manquera pas de soulever quantité de questions.
Citant des officiels US et yéménites, Associated Press a rapporté que cet informateur, dont l’identité n’est toujours pas rendue publique, travaillait en secret pour les Saoudiens et la CIA au moment où on lui a fourni la bombe, un engin non métallique censé passer les postes de sécurité aux aéroports sans encombre.
Ces officiels ont expliqué à l’agence de presse que l’informateur avait alors rapporté l’engin à ses superviseurs et avait quitté le Yémen. Le Los Angeles Times, qui fut le premier à diffuser la nouvelle comme quoi ce complot était une opération d’infiltration, a indiqué que cela avait aussi permis de lancer la frappe [de drone] contre Ahmed al-Quso.
Un peu plus tôt, John Brennan, le conseiller de Barack Obama pour le contre-terrorisme et ex-haut dirigeant de la CIA, a déclaré lors de l’émission Good Morning America sur ABC que les autorités « étaient confiantes sur le fait que ni l’engin explosif ni son utilisateur n’avaient représenté un quelconque danger pour nous. »
Les responsables US affirment que le complot a été détecté très tôt et qu’aucun avion américain n’avait couru de risque.
Le FBI est en train d’inspecter la bombe et cherche à savoir si celle-ci aurait pu franchir les scanners de sécurité dans les aéroports. Diane Feinstein, la sénatrice démocrate de Californie qui présidait le Comité du renseignement du Sénat, a déjà fourni quelques indications en disant qu’on lui avait donné des informations sur l’engin qu’elle a qualifié d’ « indétectable ».
Mais Associated Press cite également un officiel US qui affirme que les méthodes actuelles de détection auraient probablement identifié la forme de l’explosif à l’intérieur de l’engin.
La menace réelle posée par cette bombe reste difficile à évaluer. Certains services de sécurité ont expliqué aux agences de presse qu’il s’agissait d’un cran de plus dans la sophistication par rapport au précédent cas de slip piégé utilisé lors de la tentative avortée d’attentat contre un avion reliant Amsterdam à Detroit le jour de Noël 2009.
Cette fois-ci, l’engin utilisait un système de détonateur plus raffiné, et Brennan a admis qu’ « il représentait une menace de par sa conception. »
Quant à savoir qui aurait pu fabriquer cette bombe, les regards se tournent vers la branche d’al-Qaïda, AQAP, Al-Qaïda dans la Péninsule arabique. Matthew Levitt, un expert en contreterrorisme du Washington Institute a expliqué que le mérite de ce complot déjoué revenait aux agences de sécurité US.
Il a déclaré : « Le FBI détient la bombe, ce qui prouve qu’elle a les pieds sur terre. C’était une opération sophistiquée qui montre que nous faisons des progrès dans un milieu difficile [à infiltrer]. »
Levitt, qui faisait partie de l’équipe d’enquêteurs chevronnés dans l’enquête du FBI sur le 11-Septembre, a reconnu qu’il était normal d’être sceptique sur ces annonces liées à la sécurité faites en pleine année électorale. « Mais tout cela n’a rien à voir avec la politique, a-t-il dit, ce n’est pas venu de la Maison Blanche, et mon sentiment est que c’est un succès formidable. »
Levitt a dit que l’attention allait maintenant se concentrer encore plus sur Ibrahim Hassan al-Asiri, le chef de l’AQAP et supposé concepteur de la bombe, qui se cacherait au Yémen.
On soupçonne Al-Asiri d’avoir aussi fabriqué la bombe du vol Amsterdam-Detroit et d’autres explosifs envoyés par colis dans des cartouches d’imprimante à destination de Chicago en 2010.
Paul Harris et Ed Pilkington