Des services secrets, nous ne savons que les échecs et rarement les succès. Si l'échec provoque l'anathème, l'ingratitude est fille de la victoire. Quand à la gloire, il faut l'oublier, elle est pour les autres...

dimanche 4 mai 2003

Armes spéciales du IIIème Reich

.
Armes spéciales

Tout le monde a déjà entendu parlé des « armes V » et des avions à réaction du IIIe Reich, mais les Allemands et les Japonais développèrent quantité d’autres armes secrètes, tant du point de vue terrestre que naval ou aérien. Ce sont une partie de ces armes, souvent incroyables et étonnantes, que nous vous proposons de découvrir dans les pages de cette rubrique :


Canons géants de 80 cm Gustav et Dora

Le mythe de la Ligne Maginot, réputée imprenable et indestructible, poussa les Allemands à concevoir un canon suffisamment puissant pour percer ses formidables défenses. Le résultat final fut les monstrueux canons de siège « Gustav » et « Dora » qui constituent les pièces les plus lourdes jamais conçues sur rail et dont le calibre atteignait 80 cm (voir les photos à la suite du texte). Leur histoire débute en 1935, lorsque le Heereswaffenamt (HWA) demanda à la firme Krupp quelles caractéristiques devait avoir un canon pour battre en brèche la Ligne Maginot, comme l’avaient fait les obusiers Krupp de 42 cm contre les fortifications de Liège en 1914. Les experts de Krupp proposèrent des solutions balistiques pour des canons de différents calibres (70, 80 ou 100 cm). En 1936, Hitler renouvela la question lors de sa visite aux usines Krupp et on lui soumit les mêmes propositions. Comme le Führer s’enquérait de la faisabilité d’un tel projet, on lui répondit que cela posait certes des difficultés mais que ce n’était pas impossible. Flairant une bonne affaire et connaissant le goût maladif de Hitler pour les projets titanesques et démesurés, le baron Gustav Krupp von Bohlen und Halbach fit établir aussitôt des plans techniques pour un canon de siège géant de 80 cm. Ceux-ci furent soumis au HWA en 1937 et Krupp reçut très vite commande de 3 pièces. Les travaux débutèrent dès l’été 1937, dans la perspective de livrer le premier canon dans le courant du printemps 1940. Le défi technique était de taille. Krupp conçut deux types de projectiles de 80 cm pour son canon géant :

• L’obus de rupture anti-béton, pesant 7'100 kg, qui permettait de battre en brèche n’importe quelle position fortifiée jusqu’à 38 km de distance, en utilisant une charge de 2’100 kg
• L’obus explosif de 4'800 (kg), propulsé par une charge explosive de 2'240 kg et dont la portée atteignait 47 km.

On a de la peine à imaginer l’ampleur du défi technique que cela représentait, tant les chiffres sont énormes. Pour rendre les choses plus parlantes, cela équivalait à expédier à une quarantaine de kilomètres un obus pesant le poids d’un autobus chargé de 40 passagers, en utilisant une charge propulsive équivalente au poids d’une grosse limousine Mercedes ! Rien de moins ! Cela impliquait de concevoir un canon d’une taille colossale, à côté duquel les mortiers de 42 cm utilisés durant la première guerre mondiale feraient figures de modèles réduits... Et comme si le défi n’était pas assez compliqué, il fallait que ce canon fût mobile pour pouvoir se déplacer facilement d’un point à l’autre du front, en fonction des nécessités opératives. Vu le poids et les dimensions gigantesques du canon, il était évidemment impossible de le déplacer d’une seule pièce, ni même en deux ou trois parties… L’affût à lui seul mesurait plus de 12 m de large, ce qui impliquait de le scinder en deux, à la fois verticalement et horizontalement, pour permettre son transport par voie ferrée. Il ne tenait pas sur une seule voie ferrée, si bien qu’on imagina finalement de l’installer sur deux trains de bogies disposés en tandem et immobilisés sur deux voies ferrées parallèles ! Les parties constitutives du « monstre » furent donc dessinées de façon que chacun d’elles puisse être démontée et transportée par chemin de fer, sans dépasser le tonnage maximal toléré par le matériel roulant et les ouvrages d’art. Seuls les bogies supportant la plate-forme de base, étaient tractés le long des voies ferrées. Tout le reste de la plate-forme, de l’affût et de la superstructure était démonté et acheminé séparément, de même que le berceau et le tube. Des wagons plats furent spécialement construits pour ce type de transport. Chaque canon était servi par une unité comptant 1'720 hommes, placée sous le commandement direct d’un général. A cet incroyable caravansérail s’ajoutait, pour chaque canon :

• les trains de munitions,
• les trains de voyageurs transportant les servants,
• un train transportant le magasin de pièces détachées,
• un train équipé d’une grue géante pour le montage et le démontage de la pièce,
• deux trains hérissés de canons de Flak pour la défense antiaérienne du « monstre »,
• un train transportant la compagnie d’infanterie chargée de la protection de la pièce et de la sécurisation du périmètre.


Mise en batterie du canon

L’emplacement choisi pour le tir correspondait toujours à une courbe du réseau ferroviaire, de façon à permettre le pointage en avançant ou en reculant la pièce le long de la voie ferrée. En arrivant, la première chose que faisait l’unité était d’aménager la position en installant quatre voies parallèles dans le virage : les deux voies situées le plus à l’extérieure servaient à déplacer la grue géante et étaient également utilisées pour approcher les trains de munitions et de pièces détachées. Les voies intérieures accueillaient les 2 trains de bogies destinés à supporter le canon, qui étaient acheminés séparément et immobilisés côte à côte dans la courbe. On installait ensuite la plate-forme de base qui permettait de relier les boggies et de les solidariser. Puis on procédait au montage de l’affût, du berceau et du canon, grâce à la grue géante qui permettait de lever les divers éléments, de les mettre en place et de les assembler. Une fois l’affût monté, on installait le porte tourillond, le berceau portant les tourillons, et enfin le manchon. La partie arrière du tube était ensuite insérée dans le manchon, puis on procédait à la fixation de la partie avant qui était bloquée en position par d’énormes boulons d’acier. Chacun des éléments du tube pesait plus de 100 tonnes. La dernière étape était l’assemblage des éléments de la culasse, puis l’installation du bloc de culasse. Le montage de la pièce prenait du temps et il fallait compter plusieurs semaines avant que le canon soit prêt à tirer. Une fois achevé, l’ensemble mesurait 42,97 m de long et 12 m de large, pour un poids total de 1'350 tonnes. La longueur du tube atteignait 32,48 m

Une fabrication plus compliquée que prévue

En fait, en mai-juin 1940, les 3 canons géants commandés par Hitler étaient loin d’être achevés car la firme Krupp s’était heurtée à des difficultés techniques imprévues, dues essentiellement au gigantisme du projet. Si bien que la Ligne Maginot fut contournée par les Allemands sans l’assistance qu’aurait put fournir les trois monstres de 80 cm. Selon certaines sources, Hitler aurait d’ailleurs eu des paroles très dures pour la direction de Krupp après l’achèvement de la campagne de France, ajoutant qu’il avait impérativement besoin de ces canons pour lancer l’assaut contre la forteresse britannique de Gibraltar s’il obtenait de Franco l’autorisation d’acheminer des troupes à travers l’Espagne. Le projet avait été baptisé « opération Félix » et aurait dû être appuyés par les Brandebourgeois et les Fallschirmjäger, mais le Führer n’obtint jamais la permission du Caudillo. Un premier tube fut achevé à la fin de 1940 et testé au banc de tir au début de 1941. L’affût n’ayant pas été fabriqué tant que le canon n’était pas prêt, sa fabrication requit l’essentiel de l’année 1941. Si bien que ce n’est qu’au début 1942 que le premier canon fut terminé. Baptisé « Gustav », en l’honneur du prénom du baron Krupp, il fut aussitôt acheminé vers la côte de la mer Baltique et remonté sur le polygone de Rügenwalde pour procéder aux premiers essais de tir. Hitler tint à y assister personnellement et se montra très impressionné par le gigantisme du colosse d’acier et par son énorme puissance de feu.

Gustav Krupp le présenta à Hitler en déclarant qu’il s’agissait là de sa contribution personnelle à l’effort de guerre. Un second canon géant fut achevé en 1942. Il fut baptisé « Dora », du nom de l’épouse d’Erich Müller, le dessinateur en chef de la firme Krupp. Quant au troisième, la construction des ses éléments ne faisait que débuter.

« Gustav »

Dès la fin des tirs d’essai à Rügenwalde, « Karl » fut démonté et acheminé vers le front de l’Est pour participer au siège et à l’écrasement de Sébastopol, en Crimée. Il prit position à Bakhchisary, à 16 km au nord de la place forte russe, et tira 48 projectiles sur la place assiégée. Sa réussite la plus spectaculaire fut le tir d’un obus de rupture de 7 tonnes sur un magasin à munitions de la baie de Severnaïa, qui s’enfonça profondément dans le terrain, perça la voûte de maçonnerie et provoqua l’explosion générale de la position, causant de très sévères pertes aux Soviétiques… Après la chute de Sébastopol, « Gustav » fut démonté et ramené à l’usine Krupp d’Essen pour procéder à un ré-usinage du tube. En comptant les tirs d’essai et de réglage, ainsi que les obus tirés à Sébastopol, la pièce avait tiré plus de 300 coups et était complètement usée

« Dora »

Dès son achèvement en 1942, « Dora » fut également dirigé sur le front de l’est et acheminé vers Stalingrad, où il devait contribuer à l’écrasement de la cité pour hâter sa chute. Il est impossible de reconstituer son parcours sur place et de déterminer dans quelle mesure il participa effectivement au siège, vu le caractère lacunaire et souvent contradictoire des documents. Il est toutefois certain qu’il n’y resta pas longtemps et que les Allemands le retirèrent assez vite, car il n’y était déjà plus lorsque les Armées soviétiques prirent au piège la VIe armée du général von Paulus, en novembre 1942. Il aurait été impossible de le démonter et de le déplacer dans un délai si court s’il avait encore été sur place lorsque l’Armée rouge lança l’attaque. Selon certains témoignages, « Gustav » aurait ensuite été envoyé à Leningrad à la fin 1942, pour pilonner la cité et hâter sa chute. L’un des deux canons géants aurait également été employé lors du soulèvement de Varsovie, en 1944, pour écraser les insurgés. En fait, il semblerait que les témoignages en question aient confondus les deux canons géants avec les mortiers géants autopropulsés « Karl » de 60 cm, à qui il faut probablement attribuer ces deux actions. En 1943, « Gustav » et « Dora » furent à nouveau expédiés sur le polygone de Rügenwalde, pour procéder à des tirs de réglage et d’exercice. Puis ils disparurent définitivement et on perd totalement leur trace jusqu’en mai 1945, lorsque la 3e Armée U.S. découvrit des parties de « Gustav » en Bavière. Des éléments de « Dora » furent mis au jour par la suite près de Leipzig, et des parties du troisième canon géant, qui ne fut jamais achevé, furent saisis dans l’usine Krupp d’Essen et sur le terrain d’expérimentation de Meppen, appartenant également à la firme Krupp. Ces fragments épars étaient incomplets et très insuffisants pour reconstituer un canon. On ignore ce que les parties manquantes sont devenues… Le mystère qui entoure la fin de ces canons géants demeure toujours d’actualité, et il est probable que ce voile ne sera jamais totalement levé. Du point de vue technique, ces « monstres » furent une véritable prouesse industrielle. En revanche, leur valeur en tant qu’armes est très discutable car ils furent une perte de temps, d’argent et de moyens qui auraient sans doute été plus profitables ailleurs. Chaque canon coûta la bagatelle de 7 millions de Reichsmark ! Avec cette somme, on aurait pu construire 56 chars Tiger I qui auraient sans doute causé beaucoup plus de pertes et de soucis aux Alliés...

Données techniques :

Type : canon lourd géant
Catégorie : artillerie de siège
Calibre : 80 cm
Constructeur : Krupp (Essen)
Conception : 1937
Fabrication : 1941-42
Mise en service : 1942
Poids total : 1’350 tonnes
Longueur totale : 42,97 m
Largeur totale : 12,00 m
Longueur tube : 32,48 m
Portée : 38 km avec l’obus de rupture
47 km avec l’obus explosif
Munitions : un obus de rupture anti-béton de 7'100 kg
un obus explosif de 4'800 kg.
Charge : 2'100 kg pour l’obus de rupture / 2’240 kg pour l’obus explosif.
Nombre : 3 unités, dont deux achevées (« Gustav » et « Dora »).


L'étrange épave du U-864

Le 5 décembre 1944, un U-Boot allemand de type IX appareillait discrètement de la base navale de Kiel pour un étrange voyage de plus de 10 000 km qui devait le conduire jusqu’au Japon. Il s’agissait de l’ U-864, expédié en mission ultra-secrète par la Kriegsmarine pour tenter de prolonger la guerre… Sa mission relevait de la plus haute importance pour la survie du Reich et du régime nazi. Elle avait été décidée par Hitler lui-même qui avait donné son aval depuis le bunker souterrain de la Chancellerie du Reich, à Berlin. L’ U-864 n’atteignit jamais sa destination ! Le 9 février 1945, il disparut corps et bien au large de la côte norvégienne, torpillé à bout portant par un submersible anglais posté en embuscade, le HMS « Venturer ». Il aura finalement fallut attendre 60 ans pour retrouver et localiser son épave. Elle a été repérée en octobre 2003, après la découverte par un pêcheur d’une pièce de U-Boot dans ses filets . Elle gît par 152 m de fond sous les eaux glacées de la mer du Nord, à 3,5 km de l’îlot norvégienne de Fedje, au nord de l’embouchure du fjord de Bergen où l’ U-864 avait relâché la veille de son naufrage. Soixante ans après le drame, les photos sous-marines de la carcasse engloutie du submersible témoignent toujours de la brutalité de l’affrontement et de la fin particulièrement tragique de l’U-864 : sous la violence de l’explosion, la coque de 1400 tonnes, mesurant 87 mètres de long, a littéralement été coupée en deux par la torpille qui l’a frappée de plein fouet. Les deux tronçons déchiquetés gisent épars, à 40 mètres l’un de l’autre, comme arrachés par une main géante qui aurait broyé le submersible fantôme

Un sarcophage de béton de 12 mètres

Les autorités norvégiennes projettent aujourd’hui de recouvrir l’épave de plusieurs dizaines de tonnes de sable et d’ensevelir le tout sous un sarcophage de béton de 12 mètres d’épaisseur. Ce sarcophage serait semblable à celui que les Russes ont coulé en 1986 autour du cœur en fusion de la centrale nucléaire de Tchernobyl pour stopper le rayonnement radioactif. Les travaux pourraient commencer dans le courant 2007 ou 2008. Ils nécessiteront une infrastructure très lourde et l’engagement de plusieurs engins sous-marins. Le coût de l’opération est estimé par les spécialistes à 350 millions de couronnes norvégiennes, soit près de 55 millions d’euros.

Une étrange cargaison menace la Norvège

De quel terrible danger mortel les Norvégiens cherchent-ils ainsi à se protéger ? Pourquoi une mesure si étrange et un tel affolement autour d’une vieille épave rouillée? Tout simplement parce que le sous-marin nazi abrite un mystérieux secret qui menace aujourd’hui directement la sécurité de la Norvège et que renflouer la carcasse de l’ U-864 risquerait de provoquer une formidable explosion. En effet, bien que coupée en deux, l’épave contient toujours son armement ainsi que le stock complet de torpilles qui était à bord le 9 février 1945, lorsque le sous-marin allemand a été coulé. Une opération de renflouage classique risquerait de le faire sauter à tout moment. Or les flancs déchiquetés de l’ U-864 renferment une mystérieuse et très dangereuse cargaison, demeurée secrète durant 60 ans, mais qui commence depuis 2003 à suinter de l’épave, contaminant peu à peu les eaux côtières de la Norvège et la faune marine. Le danger est tel qu’un périmètre de sécurité à été décrété autour du sous-marin fantôme et que la pêche et la baignade ont été formellement interdites dans ce secteur côtier

Le mystérieux secret de l’U-864 : l’opération « Cäsar »

En 1945, le U-864 fut en effet chargé par Hitler d’accomplir une mission ultra-secrète : l’opération « Cäsar », du nom d’un célèbre général romain. Le U-Boot avait reçu l’ordre de forcer à tous prix le blocus maritime des flottes alliées pour acheminer vers le Japon sa précieuse cargaison : il transportait en effet non seulement des parties essentielles du chasseur à réaction Messerschmitt Me-262 et de l’intercepteur fusée Me-163, mais aussi les plans détaillés de ces deux appareils révolutionnaires, ainsi que des moteurs à réaction et des moteurs fusées mis au point par les Allemands à Peenemünde. A bords se trouvaient également des scientifiques nazis et japonais… Selon certaines archives américaines, le U-Boot pourrait également avoir transporté des lingots d’or que les Nazis auraient cherché à mettre en lieu sur en prévision de l’après-guerre, notamment pour permettre la fuite et la disparition des criminels nazis par les soins des organisations clandestines Odessa et Der Spinne… Mais les flancs du U-Boot renfermaient surtout une cargaison beaucoup plus dangereuse : 1857 bouteilles métalliques contenant pas moins de 65 tonnes de mercure, stockées dans les cales ! Ce mercure était destiné à la fabrication d’armements de dernier cri, censés permettre à l’aviation japonaise de reconquérir la maîtrise des airs, notamment par l’action massive de kamikazes armés d’avions suicides à moteurs fusées (« Okha »), qui auraient harcelé et détruits les porte-avions et les grosses unités de la flotte du Pacifique. Les Etats-Unis auraient alors été contraints de dégarnir le front européen pour renforcer leurs forces dans le Pacifique, allégeant ainsi la pression qui s’exerçait sur la Wehrmacht en déroute. Cela aurait permis au Reich de souffler et de gagner du temps…C’est du moins ce que croyait le Führer qui plaçait ses derniers espoirs d’une part dans les Vergeltungswaffen (les armes de représailles), d’autre part dans ce transfert de technologie vers l’allié nippon… La route prévue du submersible devait l'emmener de la Baltique en mer du Nord, pour contourner les îles britanniques puis l'Afrique par le cap de bonne Espérance: le voyage jusqu’à Penang devait prendre plusieurs mois. L’équipage était particulièrement confiant, car l'U-864 n'avait jamais connu d'avaries

Le mauvais sort s’acharne sur l’ U-864

Les marins avaient torts car cette fois la courte croisière du U-864 fut marquée par une série d’incidents qui scellèrent le destin tragique du navire et de son équipage. A croire que le mauvais sort avait décidé de s’acharner sur le malheureux U-Boot et d’empêcher sa mission ! A peine le submersible avait-il quitté le Schleswig-Holstein par le canal de Kiel qu’il s’échoua sur un banc de sable. Cela le contraignit à interrompre sa mission et à se dérouter d’urgence sur Bergen pour procéder à des réparations de fortune au parc à U-Boot « Bruno ». C’est alors que la mission « Cäsar » fut découverte par les spécialistes du décodage britannique de Bletchey Park qui avaient percés les codes de la machine allemande Enigma, et qui réussirent à capter certains messages envoyés par le sous-marins en détresse… L'opération secrète ayant été décryptée par les alliés et les réparations tardant, un raid fut mené le 12 janvier 1945 par la Royal Air Force : 32 Lancasters britanniques équipés de bombes Tallboy ainsi qu'un bombardier Mosquito pilonnèrent le bunker « Bruno » dans l’espoir de couler le U-Boot à quai. Celui-ci ne fut pas touché gravement mais cela retarda considérablement les travaux de réparation.

Le U-864 s’échappe…

Le 8 février, les réparations étant enfin achevées, l'U-864 put enfin appareiller et reprendre sa route. Pour échapper aux Britanniques et à toute détection aérienne, il se faufila en plongée dans le chapelet d'îles du Hordaland, utilisant le chenal naturel situé entre les îles Sotra et Askøy et se terminant par la petite ile de Fedje. En désespoir de cause, les Britanniques envoyèrent d’urgence au large de Bergen le sous-marin HMS « Venturer », basé à Lerwick (Shetland), avec ordre de retrouver le submersible nazi et de l’intercepter. C’était la onzième mission du « Venturer », commandé par le Lieutenant James "Jimmy" S. Launders, une jeune officier de 25 ans. Les chances de Launders étaient en réalité très faibles car le car le sous-marin nazi avait déjà quitté Bergen et dépassé l’île de Fedje le 6 février…En fait, les Britanniques avaient virtuellement perdu la partie et toute chance de rattraper le sous-marin en fuite…Quant à le retrouver dans le vaste océan, il ne fallait guère y compter… C’est alors que le mauvais sort s’acharna à nouveau sur le submersible nazi. Le 8 février, une grave avarie au moteur tribord força l'U-864 à rebrousser chemin, après avoir prévenu de son retour au bunker « Bruno ». Les autorités allemandes de la base de Bergen signalèrent aussitôt qu'une escorte serait mise à disposition le 10 février près du phare d'Hellisøy, au sud de Fedje, pour l’accompagner jusqu’au port… Mais le sort du submersible et de l’équipage était déjà scellé : rendu inhabituellement bruyant par son avarie moteur, il faisait un bruit d’enfer et fut rapidement repéré par le HMS « Venturer »

La fin tragique du U-864

Le 9 février 1945, peu après 9 heures du matin, les hydrophones du « Venturer » embusqué près de l’île de Fedje, détectèrent un fort bruit des machines d’un U-Boot en approche. La chasse au U-864 était lancée ! Le commandant Launders avait sciemment décidé de ne pas utiliser l'ASDIC pour ne pas trahir sa propre position. Plus tard, il remarqua le périscope de l'U-864 qui ne se savait pas encore traqué. Commença alors une attente inhabituelle dans ce genre d'affrontement, car l'équipage anglais attendit 45 minutes que le sous marin adverse fasse surface pour le torpiller. Détectant alors la présence du Venturer, l'U-864 se dirigea alors vers Bergen sans attendre son escorte, en zigzaguant et en se risquant à sortir régulièrement son périscope. Avec ses 22 torpilles, il pouvait aisément prendre le dessus sur les quatre torpilles du sous-marin anglais. Launders passa ainsi trois longues heures à traquer le submersible nazi qui ne cessait de louvoyer et de changer de direction pour tenter de leurrer son poursuivant tout en l’empêchant de l’encadrer. En désespoir de cause, sentant sa proie sur le point de lui échapper, Launders décida de tenter son va-tout et de lancer coup sur coup ses 4 uniques torpilles sur l’adversaire. C’était risqué mais il n’avait pas d’autre choix. Si la manœuvre ratait, cela le laisserait totalement sans défense face au U-Boot. Celui-ci aurait alors tout loisir de le torpiller ou de lui échapper impunément pour disparaître dans les profondeurs de l’océan… En se basant sur les mouvements précédents du sous-marin, Launders calcula du mieux possible la trajectoire du U-864 et essaya de deviner son prochain changement de cap. Puis, anticipant sur le mouvement supposé de l’ennemi, il tira sa gerbe de 4 torpilles... La première fut lancée à 12h12. Les trois autres suivirent à intervalles de 17 secondes chacune, alors même que le HMS « Venturer » effectuait une brusque plongée d’urgence pour esquiver une éventuelle riposte du U-Boot. Dans le carré, tout le monde retint sa respiration et se mit anxieusement à l’écoute… La tension était à son comble ! Trente secondes s’écoulèrent…puis une minute… puis une minute et demi… Rien ! Rien que le silence lourd et pesant des fonds marins. Les projectiles mirent en effet plus de 2 minutes pour parcourir la distance séparant les 2 submersibles et le temps parut un long moment suspendu. Détectant la première torpille, l'U-864 plongea pour l'éviter et se mit lui même sur la trajectoire de la quatrième après avoir évité les deux autres. A 12h14, l’équipage du « Venturer » perçut une violente explosion sous-marine, suivie immédiatement par le grincement sinistre d’une coque qui implosait, broyée par la formidable pression au fur et à mesure qu’elle s’enfonçait dans les profondeurs. L’un des marins du bord compara ce bruit horrible au son produit par une boite d’allumette que l’on écrase. La quatrième torpille venait de percuter de plein fouet le flanc du sous-marin nazi, brisant en deux sa coque au niveau du kiosque. Ce fut la seule fois au cours de la seconde guerre mondiale où un sous-marin en coula un autre quand les deux étaient en plongée. Après la guerre le HMS « Venturer » fut offert à la marine Norvégienne et renommé KNM Utstein 3. Un fantôme surgi du passé… Soixante ans plus tard, la carcasse disloquée et broyée du U-864 gît toujours par 152 m de fond, sur le fond vaseux, tel un lointain fantôme surgi des brumes du passé. Les relevés sonars de sa sinistre silhouette montrent que la partie arrière du submersible s’est littéralement plantée dans le fond vaseux. On distingue clairement la poupe dressée, suspendue à plusieurs mètres au-dessus de la vase (voir galerie de photos). Le gouvernail et les barres de plongées sont restés bloqués en position extrême, celle d’une ultime plongée d’urgence.

Visiblement, le commandant du U-864 a tenté une dernière manœuvre désespérée pour échapper à la torpille qui fonçait sur lui. En vain… Le pont désossé, rongé par la rouille, est à moitié dévoré par la végétation marine qui a peu à peu colonisé l’épave. Quelque part dans ce cercueil d’acier tordu gît la dépouille du Seekapitän Wolfram et, avec lui, les os des 73 membres de l’équipage engloutis dans le naufrage. La carcasse renferme également les cadavres des scientifiques nazis et japonais qui accompagnaient la snistre cargaison. Une opération à très haut risque… Le seul témoin de l'époque était un jeune de Fedje, Kristoffer Karlsson, alors âgé de douze ans. Si le Venturer rentra sans encombre à Lerwick, l'identité du sous-marin coulé était incertaine. L'épave tomba dans l'oubli mais début 2003 un pêcheur de Fedje ramena dans ses filets une pièce mécanique qui ne laissait aucun doute sur son origine: un sous marin allemand. Très vite on pensa que cette épave pouvait être l'U-864, et on s'inquiéta du fait que si c'était bien celle-ci, alors elle était peut être une véritable bombe à retardement en raison de son chargement de mercure. L'épave fut localisée par le KNM Tyr au printemps 2003. Les premières images de la carcasse, lors de l'exploration menée par le navire Geobay, montrèrent un sous marin coupé en deux parties séparées de 40 mètres, avec les volets en position de plongée d'urgence. Les cylindres de mercure sont rouillés et certains fuient. La seule bouteille qui a pu être remontée a perdu jusqu'a 4mm d'épaisseur sur les 5mm d'origine. Plusieurs kilos de mercure se sont déjà répandus dans la mer depuis une vingtaine d'années (4 kilos estimés pour 2006), des traces matérielles ayant été découvertes jusqu'à 300 mètres de l'épave. Le taux de mercure dans la faune avoisinante est supérieur à ceux autorisés et le problème va en s'aggravant. Le projet d'enlever l'épave a vite été abandonné en raison du risque de briser et répandre toute sa cargaison, et de celui de faire exploser les nombreuses torpilles se trouvant encore à bord. Après trois ans d'études du problème et 6.5 millions de dollars dépensés, le gouvernement norvégien a décidé de construire un sarcophage de 100 000 mètres cube de sable et de 12 mètres d'épaisseur de béton pour isoler le sous marin sur une surface de 150 mètres de diamètre, comme cela a été fait à Tchernobyl et dans plusieurs endroits dans le monde. En 2006, sous l'impulsion de la NCA (Norwegian Coastal Administration, Kystverket) la zone fut cartographiée et de nouvelles analyses de la coque et de la faune ont eu lieu, pour un coût estimé à 31 millions de couronnes. En 2007 certaines zones polluées autour de l'épave ont été nettoyées et scellées, en attendant les opération finales, toujours en cours de discussion, qui pourraient commencer à l'été 2007. Cependant, en mars de la même année, il a été découvert qu'une partie centrale de l'épave n'a pas été retrouvée et qu'elle est probablement distante des deux autres morceaux, avec une partie de la cargaison de mercure. Certains pensent qu'elle a été volatilisée par l'explosion, tandis que d'autres avancent que les torpilles n'étaient pas assez puissantes pour faire autant de dégâts. Visiblement, l’opération risque d’être longue et délicate.

Scaramouche…