Des services secrets, nous ne savons que les échecs et rarement les succès. Si l'échec provoque l'anathème, l'ingratitude est fille de la victoire. Quand à la gloire, il faut l'oublier, elle est pour les autres...

dimanche 4 mai 2003

Les Panzers du Diable

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Tout au long de la seconde guerre mondiale, les Allemands n'ont cessé de perfectionner et d'améliorer leurs Panzers pour les adapter au mieux à l'évolution des combats et aux nouveaux impératifs tactiques.

Du Panzer I au Panzer VI, l'arme blindée allemande a donc évolué très vite pour intégrer au mieux les expériences faites au feu et conserver une supériorité constante sur l'adversaire, sinon numérique, du moins technique. Face au rouleau compresseur soviétique, une fois les premières illusions passées, les généraux allemands se sont vite rendu compte qu'ils n'avaient aucun espoir d'égaler en nombre les chars russes qui sortaient en masse des chaînes de production soviétiques de l'Oural. Chaque jour qui passait accroissait ce déséquilibre en défaveur de la Wehrmacht et des Panzer Divisions. À défaut de pouvoir aligner autant de blindés que les Russes, les Allemands décidèrent de disposer des meilleurs chars du moment. Chaque nouvelle génération produite devait tenir compte des expériences faites au combat et être à même de surclasser ses adversaires potentiels en matière de mobilité, de puissance de feu et de protection. Cette compétition, amorcée avec le Panzer V Panther, a généré une fuite en avant, avec pour conséquence des chars de plus en plus lourds et de plus en plus gros, dotés de blindages et d'un armement de plus en plus puissants. Le concept du Maus (baptisé originellement Mammut) est l'aboutissement final de cette démarche, poussée jusqu'à l'excès…

Panzer VII Löwe

Le « Löwe » faisait partie d’une nouvelle génération de chars destinés à remplacer à partir de 1945 toute la gamme des Panzers allemands en service durant la guerre. A cette nouvelle série de chars appartenaient également le Panther II, le Tiger II « Königstiger » de 69 tonnes, le Panzer VIII « Maus » de 189 tonnes, ainsi que le « E-100 » de 137 tonnes.

Le contexte

Tout au long de la seconde guerre mondiale, les Allemands n’ont cessé de perfectionner et d’améliorer leurs chars pour les adapter au mieux à l’évolution des combats, aux conditions prévalant sur le terrain et aux nouveaux impératifs tactiques. Du Panzer I au Tiger I, l’arme blindée allemande a donc évolué très vite pour intégrer au mieux les expériences faites au feu et pour conserver une supériorité constante sur l’adversaire, sinon numérique, du moins technique. À défaut de pouvoir aligner autant de blindés que les Russes, les Allemands se devaient de disposer des meilleurs chars du moment. Chaque nouvelle génération produite devait être à même de surclasser ses adversaires potentiels en matière de mobilité, de puissance de feu et de protection. Cette compétition a généré une fuite en avant, avec pour conséquence des chars de plus en plus lourds et de plus en plus gros, dotés de blindages et d’un armement de plus en plus puissants.

Le Panzer VII Löwe

Le « Löwe » (lion) était un projet de char lourd élaboré par la firme Krupp pour succéder au Pz.Kpfw. VI TIGER I en tant que fer de lance des Panzerdivisions. A ce titre, il aurait constitué le futur Panzerkampfwagen VII (Pz.Kpfw. VII). Le concept ne dépassa toutefois jamais le stade de la planche à dessin. Il fut abandonné dès la fin 1942 au profit des versions améliorées des Panzers V et VI, baptisées respectivement PANTHER II et TIGER II « KÖNIGSTIGER ». Deux variantes du Löwe avaient été prévues par Krupp : une version légère ( Leichter Löwe ) et une version lourde ( Schwerer Löwe ). Elles possédaient un armement et un moteur identiques, mais différaient par leurs poids respectifs, le Schwerer Löwe étant doté d’un blindage accru. La position de la tourelle variait également, bien qu’elles fussent identiques

Le Leichter Löwe

Le Leichter Löwe était équipé d’une tourelle décentrée, décalée vers l’arrière de la caisse, à l’instar du Panzer VIII « Maus ».
Poids 76 tonnes.
Blindage frontal 100 mm.
Vitesse max. 27 km/h.
Motorisation moteur de 1000 ch.
Armement 1 canon de 10,5 cm L/70 à haute vélocité + 1 mitrailleuse coaxiale.
Equipage 5 hommes.
Le Schwerer Löwe
Le Schwerer Löwe était doté d’une tourelle centrale, installée au milieu de la caisse, à l’instar du char super lourd « E-100 ».
Poids 90 tonnes.
Blindage frontal 120 mm.
Vitesse max. 23 km/h.
Motorisation moteur de 1000 ch.
Armement 1 canon de 10,5 cm L/70 à haute vélocité + 1 mitrailleuse coaxiale.
Equipage 5 hommes.

Lorsque les plans des deux versions furent soumis à Hitler pour approbation, le Führer ordonna d’abandonner le projet du Leichter Löwe et de redessiner le Schwerer Löwe de façon à l’équiper d’un canon de 15 cm, de porter le blindage frontal à 140 mm et d’augmenter sa vitesse à 30 km/h. Aucun prototype du Panzer VII ne fut jamais réalisé, mais certains éléments ou caractéristiques figurant sur les plans du Schwerer Löwe furent repris et intégrés dans la conception du Tiger II « Königstiger ».

Principale caractéristiques du Panzer VII Löwe

La conception du Panzer VII tenait compte de l’expérience acquise au feu par les Panzerdivisions et corrigeait certains défauts majeurs du Tiger I (Pz. VI).
La silhouette du char était fortement inspirée de celle du Panzer V « Panther » qui avait fait ses preuves au combat : les flancs et le blindage frontal étaient très fortement inclinés pour dévier les projectiles et les faire ricocher sans exploser. L’arrière de la caisse était fortement biseauté. Le train de roulement du « Löwe » comportait 9 galets imbriqués.
Le masque du canon était plaqué sur l’avant arrondi de la tourelle, caractéristique qui sera par la suite reprise sur la tourelle Porsche du « Königstiger ».


Le char super lourd MAUS

1. Etude et développement

Dès 1941, alors même que le Panther (Pz. V) et le Tiger I (Pz. VI) étaient en cours de développement, les Allemands commencèrent à s'intéresser à l'étude d'un char super lourd, capable de dominer à lui seul le champ de bataille et de surclasser tous les adversaires existants ou à venir...

Bientôt, deux concepts furent lancés et entrent en compétition. Le premier, baptisé E-100 était développé par la firme Alderwerke sous l'égide du Heereswaffenamt (bureau de l'armement de l'armée de terre). Le second projet remonte au 8 juin 1942, jour où le Dr. Ferdinand Porsche fut approché en vue de la construction d'un char portant un canon de 12,8 cm ou de 15 cm dans une tourelle pivotante, complété par un canon coaxial de 7,5 cm. A cette époque, le Dr. Porsche présidait la commission allemande des chars. Jouissant d'un large crédit auprès du Führer, il adjura Hitler de produire un char super-lourd. La majorité des ingénieurs et la plupart des théoriciens des blindés, dont Guderian, étaient opposés à l'utilisation de tels chars qu'ils jugeaient inaptes à se déplacer dans le terrain. Mais le projet enthousiasma tout de suite le Führer par son gigantisme et sa démesure...

Lorsque le projet élaboré par le Dr. Porsche fut finalement soumis, le concept fut d'abord baptisé Mammuth (" mammouth ") et reçut le numéro d'étude 205. La société commença l'assemblage du premier char le 1er août 1943, la firme Krupp livra la coque de la caisse à mi-septembre et le nouveau prototype, rebaptisé ironiquement Maus (" souris"), fit son premier essai chez Alkett le 23 décembre 1943. Le 10 janvier 1944, il fut envoyé sur le terrain d'essai de Böblingen, près de Stuttgart, pour y subir des tests intensifs avec une tourelle factice et sans canon, la fabrication de ces éléments n'étant pas encore achevée. Mis à part de légers ennuis mécaniques du côté de la suspension, ces essais furent jugés plus que satisfaisants. Hitler donna alors des instructions au Dr. Porsche afin que le prototype terminé, avec tourelle et canons, soit prêt en juin. Dès le 9 juin, la tourelle avait été assemblée et montée sur le char et de nouveaux essais furent entrepris. Ceux-ci furent très probants et au début octobre 1944, l'ordre fut reçu d'envoyer le Maus I au terrain d'essai militaire de Kummersdorf, près de Berlin.

Un second prototype, baptisé Maus II, put être achevé en juin 1944 et rejoignit aussitôt le premier à Kummersdorf, sans subir d'essai préalable. Contrairement à son prédécesseur qui était équipé d'un moteur à benzine donnant toute satisfaction, ce second prototype fut testé avec un moteur Diesel qui se révéla décevant car il fut la cause de beaucoup d'ennuis.
Les plans de production établis pour le Maus prévoyaient la construction en série de 150 exemplaires par les soins de la firme Krupp. Les 2 prototypes se trouvant à Kummersdorf furent détruits par les Allemands en avril 1945, juste avant l'entrée des Soviétiques dans les faubourgs de Berlin… Deux caisses supplémentaires furent fabriquées pour un total de 9 engins qui auraient été commandés comme version de pré-série mais qui ne purent être achevés avant la fin de la guerre et qui furent trouvés à divers stades de fabrication

2. Un " bunker mobile " de 189 tonnes !

L'engin développé par Porsche était un véritable monstre d'acier, dont la démesure et le gigantisme dépassaient de très loin tout ce qui avait été réalisé ou conçu jusque-là en matière de blindés. A côté de lui, même le fameux Tiger II Königstiger de 70 tonnes faisait figure de nain et de poids plume !

Monté par 6 hommes d'équipage, le Maus avait une longueur de 10,08 m, équivalente au double de celle d'un Panzer II. Il pesait pas moins de 189 tonnes, soit 90 tonnes de plus que son concurrent direct (le char super lourd E-100) et presque autant que le poids cumulé de quatre Tiger I de première génération! L'énorme tourelle pesait à elle seule près de 50 tonnes - soit à peu près le poids d'un Tiger I - et avait une largeur équivalente à celle d'un Panzer III.

Comme le projet concurrent E-100, le Maus bénéficiait des expériences acquises au combat sur les Panzers des séries V (Panther) et VI (Tiger) et recourait aux dernières innovations en matière de conception et de profilage du blindage. Il présentait une silhouette lourde et particulièrement massive, de type monobloc, avec l'avant du châssis fortement biseauté pour faire rebondir les obus. La masse pivotante de la tourelle était caractérisée par des surfaces plates et unies, sans ouverture ni saillie, avec des flancs également inclinés pour faire ricocher les projectiles. La partie frontale de la tourelle offrait pour les mêmes raisons un profil incurvé en arrondi, permettant de faire dévier les coups qui percutaient avec un angle; elle était en outre renforcée par une plaque-bouclier qui formait une surépaisseur et dans laquelle venait s'insérer le tube du canon.

Contrairement au E-100, le Maus possédait des plaques blindées de protection latérale qui descendaient très bas et qui protégeaient ainsi les chenilles et le train de roulement. Le blindage avant du char atteignait 340 mm d'épaisseur, la face frontale de la tourelle 93 mm et le fond de caisse 40 mm… De quoi résister sans broncher à l'impact à bout portant de tous les projectiles connus à l'époque! Le char avait une hauteur totale de 3,66 m, soit deux fois la taille d'un homme, et le sommet de la caisse était perché à 2,13 m. Sa garde au sol de 56 cm lui permettait de surmonter des obstacles de 0,72 m de hauteur et de franchir des coupures de terrain d'une largeur de 4,54 m. En fait, le Maus affichait des dimensions si monstrueuses que certains n'hésitèrent pas à le comparer à un " bunker mobile sur chenille "

Vu son poids, le Maus était doté d'un moteur Daimler-Benz V12 en ligne, qui fut testé en version essence et diesel, couplé à des transmissions électriques. Ce moteur, d'une puissance de 1095 ch., entraînait un générateur électrique qui alimentait à son tour deux moteurs installés dans les moyeux actionnant les chenilles. Chaque train chenillé comportait 24 galets partiellement imbriqués, montés par quatre sur six supports séparés jouant le rôle de suspension. Le barbotin d'entraînement était placé à l'arrière, contrairement à l'habitude allemande en matière de chars.

Un moteur auxiliaire de 150 ch. assurait le refroidissement par air. Le Maus avait une autonomie de 186 km et atteignait une vitesse maximale de 20 km/h sur route.

Conformément au cahier des charges spécifié, le Maus comportait, comme le E-100, un canon principal de 12,8 cm KwK L55 couplé à un canon de 7,5 cm coaxial (ou de 2,0 cm selon les variantes projetées), mais il était prévu de le doter éventuellement d'une pièce de 15 cm. Cette puissance de feu en faisait un adversaire particulièrement redoutable, capable de surclasser tous ses adversaires et de venir à bout des blindages les plus épais, même à longue distance. Le recul de la pièce, au moment du départ du coup, atteignait près de 1 mètre. Le poids des obus variait entre 56 et 70 kilos selon le type de projectile!

Le char était équipé d'un système de franchissement de coupure et d'un schnorchel qui lui permettaient de passer en immersion des cours d'eau d'un profondeur pouvant aller jusqu'à 12 mètres. Trop lourd, le Maus était en effet totalement inadapté au réseau routier existant et dépassait amplement les limites de tonnage supportées par les ponts et les viaducs de l'époque. Il fallait donc lui donner les moyens techniques de s'en affranchir. Les écoutilles étaient donc conçues pour rendre le char totalement étanche. Durant la traversée des cours d'eau, le moteur générateur principal était coupé et les moteurs des chenilles étaient alimentés par câbles à partir d'un autre char resté sur la berge. Dès que le premier Maus était parvenu de l'autre côté, on inversait les rôles pour permettre au second de traverser à son tour.

Le Maus I était si lourd que lors des premiers essais, les vibrations fissurèrent sur son passage les fondations des maisons voisines, tandis que le prototype défonçait littéralement le revêtement routier. Malgré la largeur très importante de son train de chenilles (90 cm), la pression au sol était encore trop importante (1,45 kg/cm2), et la monstrueuse " souris " s'embourbait très facilement, s'enfonçant irrémédiablement dans le terrain humide! Quant à son transport à grande distance, il ne pouvait s'effectuer que par rail et nécessitait l'utilisation de wagons spéciaux, renforcés à cet effet.

Les nécessités de la guerre et la priorité absolue donnée à la production des chars déjà opérationnels font que le programme subit un premier temps d'arrêt au printemps 1944, alors que le second prototype de châssis n'est pas encore livré aux essais. L'ordre d'arrêter définitivement le projet tombe au début 1945, au moment où le Reich agonisant, pris à la gorge et saigné par les armées alliées, commence à s'effondrer sous les coups des vagues de bombardiers martelant son tissu industriel. Les deux prototypes, sur lesquels avaient été poursuivis les travaux, seront finalement sabotés par les Allemands sur leur terrain d'essai de Meppen, juste avant de tomber aux mains des troupes soviétiques qui les firent sauter. Un troisième prototype, équipé de sa tourelle définitive de 50 tonnes, sera découvert à l'usine Porsche de Böblingen...

Si la puissance de feu et la résistance du Maus ne font aucun doute et impressionnent par leur démesure, il est douteux que la mise en œuvre de ce " mammouth " ait pu changer le sort de la guerre, à supposé qu'il ait pu être produit en masse. Son utilisation tactique dans le terrain aurait en effet posé de multiples et épineux problèmes à la Wehrmacht, tant au niveau logistique (on imagine la consommation en carburant d'une unité !) que du point de vue opérationnel, le char n'étant pas adapté à l'évolution en terrain difficile. Trop lourd, trop grand, trop massif, il aurait été handicapé par une mobilité trop lente, par un rayon d'action trop réduit et par une difficulté à se mouvoir en terrain accidenté ou urbanisé ! Sa fabrication en série et son ravitaillement auraient exigé des capacités industrielles et des ressources énergétiques que le Grand Reich ne disposait plus depuis longtemps… Le concept est d'ailleurs resté lettre-morte puisqu'il n'existe aucun équivalent moderne à ce géant sorti tout droit de l'imagination fertile de Ferdinand Porsche.

3. FICHE TECHNIQUE

Type : char d'assaut super lourd
Poids total : 189 tonnes
Pression au sol : 1,45 kg / cm2
Blindage frontal : 340 mm
Blindage de la tourelle : 93 mm
Blindage fond de caisse : 40 mm
Armement principal : 1 canon de 12,8 cm KwK L55 (ou 1 canon de 15 cm)
Armement secondaire : 1 canon coaxial de 7,5 cm L36 (ou 1 canon de 2 cm)
Equipage : 6 hommes
Vitesse sur route : 20 km/h
Motirisation : Daimler-Benz MB 509 V12 en ligne, à essence, développant 1095 Ch. à 2400 t/min
Redroidissement : à air, grâce à un moteur auxiliaire de 150 CV
Puissance massique : 5,92 ch./ tonne
Autonomie : 186 km
Longueur totale : 10,80 m
Hauteur totale : 3,63 m
Largeur totale : 3,67 m
Hauteur de la caisse : 2,13 m
Poids de la tourelle : 50 tonnes
Largeur de la tourelle : 3,00 m
Franchissement : vertical: 0,72 m, coupure franche: 4,50 m, pente: 30°
Production prévue : 150 exemplaires
Construction : 3 prototypes plus ou moins achevés en 1945
9 chars inachevés à divers stades de construction



Le char lourd E-100

Le E-100 faisait partie d’une nouvelle génération de chars destinés à remplacer à partir de 1945 toute la gamme des Panzers allemands en service durant la guerre, désormais obsolètes et ne répondant plus à l’évolution de l’armement et des blindages. A cette nouvelle série de chars appartenaient également le Panther II, le Tiger II Königstiger de 69 tonnes, le Panzer VIII Maus de 189 tonnes, ainsi que le malheureux Panzer VII «Löwe», abandonné dès 1942 au profit du «Maus».

Le contexte

Tout au long de la seconde guerre mondiale, les Allemands n’ont cessé de perfectionner et d’améliorer leurs chars pour les adapter au mieux à l’évolution des combats, aux conditions prévalant sur le terrain et aux nouveaux impératifs tactiques. Du Panzer I au Panzer VI, l’arme blindée allemande a donc évolué très vite pour intégrer au mieux les expériences faites au feu et pour conserver une supériorité constante sur l’adversaire, sinon numérique, du moins technique. À défaut de pouvoir aligner autant de blindés que les Russes, les Allemands se devaient de disposer des meilleurs chars du moment. Chaque nouvelle génération produite devait être à même de surclasser ses adversaires potentiels en matière de mobilité, de puissance de feu et de protection. Cette compétition a généré une fuite en avant, avec pour conséquence des chars de plus en plus lourds et de plus en plus gros, dotés de blindages et d’un armement de plus en plus puissants.

Un char de 137 tonnes


Dans cette logique, les ingénieurs allemands ont commencé dès 1941 à s’intéresser au développement de chars super lourds, capables de surclasser et de terrasser tous les adversaires connus, pour obtenir la suprématie absolue sur le champ de bataille. Très vite, deux concepts sortent du lot et entrent en compétition. Le premier, élaboré par le Dr. Ferdinand Porsche, est d'abord appelé « Mammut » (mammouth), puis rebaptisé « Maus » (souris). D’un poids de 189 tonnes, il devait constituer le futur Panzer VIII, suite à l’abandon du projet du Panzer VII « Löwe ».

Le second projet est celui du char E-100 (pour Entwicklung 100 Tonne), développé par la firme Alderwerke sous l’égide du Heereswaffenamt (Bureau de l’armement de l’armée allemande). Il s'agit d'un char comparativement moins lourd, mais d'une conception beaucoup plus réaliste, sachant que l’énormité du «Maus» constituait un handicap majeur qui le rendait pratiquement inutilisable dans le terrain (rares étaient alors les ouvrages d’art tolérant une pareille charge !).
Comparativement aux 189 tonnes de son concurrent direct, le E-100 ne pesait en effet que 137,8 tonnes! Cela représentait tout de même le double du fameux Tiger II Königstiger (69 tonnes), le char de bataille le plus lourd aligné durant la seconde guerre mondiale. Le défi technique était de taille car la manœuvrabilité d'un tel monstre était une véritable gageure.

Pour gagner du temps, il fut décidé d’équiper le E-100 de la même tourelle que le «Maus». En revanche, la caisse et le châssis étaient totalement différents. L’engin était propulsé par un moteur Diesel 12 cylindres Maybach HL 230 P30, développant 700 chevaux, qui permettait d’atteindre 40 km/h sur route. Il était doté d’une transmission Mekydro et d’une suspension extérieure de type Belleville Washer. L’équipage se composait de 6 hommes (chef de char, pilote, radio, mitrailleur, pointeur et chargeur). L’engin avait une autonomie de 120 km sur route. Ses performances dans le terrain sont inconnues.

Le E-100 n'atteignit jamais le stade de production. A la fin de la guerre, en mai 1945, les Alliés découvrirent l’unique prototype construit sur le terrain d'essai de Haustenbeck, près de la ville allemande de Paderborn. Il était dépourvu de tourelle, celle-ci n’ayant pas encore été livrée. Sachant que le E-100 utilisait la même tourelle que le «Maus », il est facile de reconstituer l'aspect qu'aurait eu ce blindé. La galerie de photos qui suit ce texte permet de s’en faire une excellente idée.

Du point de vue de l’aspect extérieur, le E-100 se différenciait du «Maus» par une silhouette plus classique, moins haute, mais plus large et plus trapue. La tourelle, commune aux deux monstres, était implantée au centre de la caisse du E-100, contrairement à celle du «Maus », complètement décalée vers l’arrière.

Les derniers progrès en matière de blindage

Les deux projets concurrents bénéficiaient évidemment des expériences acquises sur les derniers modèles des chars des séries V (Panther) et VI (Tiger I et II), et intégraient les dernières innovations en matière de conception et de résistance du blindage. Comme sur les chars allemands de dernière génération, les flancs de la tourelle et l’avant de la caisse étaient fortement inclinés et biseautés pour faciliter les ricochets et faire rebondir les projectiles. Les flancs du E-100 étaient également équipés de jupes incurvées, fortement blindées, permettant de dévier les obus et d’éviter qu’ils ne s’encastrent entre le train de roulement et la caisse. Ces jupes descendaient toutefois moins bas que sur le «Maus» et ne protégeaient que la partie supérieure du train de roulement, laissant apparent la majeure partie des galets. Cela conférait au E-100 un aspect moins massif que le « Maus », souvent comparé à un « bunker monté sur chenilles ». En revanche, la forme très bombée du blindage avant de la tourelle constituait un formidable piège à obus : un projectile dévié vers le bas par la courbure avait toute les chances de venir s’encastrer entre la caisse et la tourelle, au risque de déchausser celle-ci en explosant! Ce défaut majeur aurait pourtant facilement pu être corrigé par une lèvre de renvoi, comme cela fut réalisé sur le Panther Ausf. G. Il est difficile de comprendre pourquoi cette amélioration n’a pas été intégrée sur la tourelle du E-100 et du «Maus»...

Armement

La caisse du E-100 ne présentait aucune ouverture et ne comportait ni trappe, ni mitrailleuse. L’unique bloc de vision se résumait à l’épiscope fixe du conducteur, sur l’avant gauche. L’armement était entièrement concentré dans la tourelle. Le char possédait deux pièces: un canon principal de 15 cm KwK 44 L/38 et un canon coaxial de 7,5 cm KwK 44 L/36. Pour la production en série, il avait été décidé de remplacer le tube de 15 cm par une pièce de 17 cm, plus performante. Le bouclier dans lequel s’inséraient les 2 tubes était fixé sur le cuirassement frontal par sept énormes boulons. L’armement secondaire comprenait une mitrailleuse MG 34 frontale (à gauche du canon). A cela s’ajoutaient deux trappes de tir latérales permettant de battre les secteurs situés sur le côté du char.

Caractéristiques techniques du E-100

Catégorie Char de bataille super lourd.
Désignation E-100 (« Entwicklung 100 Tonne »).
Début du projet 1941.
Conception Alderwerke AG.
Production 1 prototype resté inachevé.
Poids 137,8 tonnes.
Autonomie 120 km sur route.
Vitesse max. 40 km/h sur route.
Motorisation 1 moteur Diesel 12 cylindres Maybach HL 230 P30.
Puissance 700 ch.
Blindage max. 240 mm / min. 40 mm.
Armement 1 canon principal de 15 cm KwK 44 L/38, destiné à être remplacé par un canon de 17 cm lors du lancement de la production en série
1 canon coaxial de 7,5 cm KwK 44 L/36
1 mitr. MG 34
Suspension Type Belleville Washer.
Transmission Mekydro.
Equipage 6 hommes.
Longueur 10,27 m.
Largeur 4,48 m.
Hauteur 3,32 m.


P.1000 LANDKREUZER « RATTE »

Parmi les concepts les plus fous élaborés par les Nazis figure le LANDKREUZER P.1000, un projet de croiseur de bataille terrestre de 1000 tonnes (!!!), à côté duquel même le char super-lourd MAUS et le canon géant DORA font figure de jouets miniatures ! Le P.1000 était si gigantesque que ses dimensions ressemblaient plus à celles d’un navire de guerre qu’à un char, terme que les Allemands ne lui appliquèrent d’ailleurs jamais, lui préférant celui de « Landkreuzer » (croiseur terrestre »). Il était armé d’une tourelle de marine de calibre similaire à celles embarquées à bord des navires de bataille de la classe SCHARNHORST et GNEISENAU et était hérissé d’un armement antiarien suffisant pour tenir en respect des vagues entières de chasseurs-bombardiers. Son équipage aurait comporté plusieurs dizaines d’hommes (effectif inconnu) et la surface de la tourelle principale était à elle seule si vaste qu’une section complète de Panzergrenadier aurait pu y prendre place. Ce monstre était si énorme que son train de roulement comportait 6 chenilles (3 de chaque côté du char) et que sa hauteur était équivalente à celle de certaines églises allemandes. Sa largeur était telle que l’engin aurait été dans l’impossibilité de s’aventurer en milieu urbain et qu’une tentative de manœuvrer aurait été apocalyptique, provoquant l’effondrement des bâtiments alentours. Son poids était lui-même un handicap, car il aurait littéralement défoncé le revêtement des routes et ses vibrations auraient certainement liquéfié le sol meuble en rase campagne. Quant à sa mobilité, elle aurait été à peu près nulle vu sa faible vitesse et l’impossibilité d’emprunter les ouvrages d’art

Historique et développement

L’idée de développer cette nouvelle classe de véhicule hors norme fut suggérée par le Directeur Grote et par le Dr.Hacker, chargés de la production des U-Boot au Ministère de l’Armement, pour satisfaire le désir exprimé par Hitler de produire un char super-lourd surpassant le Panzer VIII MAUS en termes de puissance de feu. Le 23 juin 1942, Grote proposa de développer un croiseur terrestre de 1000 tonnes, baptisé LANDKREUZER, qui serait doté d’un armement de type naval et dont la puissance de feu serait telle que seul un armement naval équivalent pourrait l’atteindre et lui causer des dégâts. Hitler se montra d’emblée enthousiasmé par le projet, dont le gigantisme flattait son goût atavique pour la démesure et les constructions pharaoniques. La conception et la réalisation du prototype, baptisé P.1000, fut confiée à KRUPP vu que cette firme avait déjà une certaine expérience en matière de canons automoteurs géants. En 1939, KRUPP avait en effet étudié plusieurs projets similaires de canons lourds automoteurs pour la défense côtière, à la demande de la Kriegsmarine. Cette série comprenait 14 types de plateformes différentes, désignées R1 à R14, armées de pièces de marine de calibre compris entre 15 et 38 cm. Chaque canon était monté sur une plateforme orientable reposant elle-même sur un châssis chenillé. L’un de ces projets, baptisé R2, était justement un canon autopropulsé de 28 cm. La série ne dépassa jamais le stade des plans. Le LANDKREUZER projeté mesurait 35 mètres de long (10 m pour le Maus), 14 mètres de large (3,67 m pour le Maus) et 11 mètres de haut (3,63 m pour le Maus). L’engin devait peser environ 1000 tonnes à vide, soit autant qu’un destroyer et plus de cinq fois le poids du MAUS, le char le plus lourd jamais construit ! A cela s’ajoutait l’équipage, le matériel, ainsi que les munitions pour l’artillerie lourdes et pour l’armement secondaire. Soit un poids en ordre de bataille estimé à environ 1800 tonnes qui aurait probablement lourdement handicapé l’engin, tout en réduisant fortement sa mobilité et la durée de vie des moteurs et de la transmission. En décembre 1942, Hitler décida de le baptiser « RATTE » (rat).

Motorisation

Pour propulser un tel monstre, on songea à l’équiper de 2 diesels de marine MAN V12Z32/44 à 24 cylindres, développant chacun 8500 CV, similaires à ceux qui équipaient les U-Boot. Une autre solution envisagée prévoyait de le doter de 8 diesels de marine Daimler-Benz MB501 à 20 cylindres. développant 2000 CV chacun, identiques à ceux propulsant les Schnellboote (S-Boot) de la Kriegsmarine. La puissance obtenue était de 16 000 à 17 000 CV selon le type de motorisation retenue, soit 16à 17 CV par tonne à déplacer. Selon les calculs, cela lui aurait permis d’atteindre une vitesse théorique de 44km/h (vraisemblablement plus faible dans le terrain).

Train de roulement

Pour supporter les 1000 tonnes, le train de roulement avait une largeur de 3,60 mètres, soit à peu près l’équivalent de la largeur totale du char super-lourd Maus (3.67 m). Vu l’impossibilité technique de fabriquer une chenille aussi énorme, celle-ci était constituée, de chaque côté, par 3 jeux de chenilles de 120 cm disposées côte à côtes, du même type que celles utilisées sur les foreuses dans les mines. On obtenait ainsi une surface totale de roulement de 7,2 m de largeur, qui permettait de répartir le poids du monstre pour ne pas exercer une pression trop grande au sol, sous peine de voir celui-ci se liquéfier littéralement sous les vibrations. L’impossibilité matérielle de franchir les ponts était compensée par la grande hauteur de la caisse et une garde au sol d’environ 2.00 m, qui permettait au LANDKREUZER de s’affranchir des ouvrages d’art et de traverser sans difficulté la plupart des fleuves européens.

Armement principal

L’armement principal du LANDKREUZER comprenait 2 canons de marine de 28 cm SK C/34 L/54,5 du même type que ceux équipant les tourelles triples des navires de guerre de la classe SCHARNHORST et GNEISENAU. Ces canons étaient montés dans une tourelle de croiseur similaire, placée sur l’avant de la caisse du char, mais dont le troisième tube central avait été supprimé pour alléger le mécanisme de chargement. Cette tourelle pesait, à elle-seule, plus de 600 tonnes. Les pièces de 28 cm, conçues pour le combat maritime à grande distance, avaient une portée de 42,5 kilomètres à hausse maximale (40°). Elles étaient capables de perforer une épaisseur de blindage de 45 cm à 5 kilomètres, correspondant à la distance d’engagement maximal en trajectoire tendue contre un but mobile. Les deux tubes étaient approvisionnés à 100 coups chacun. Les projectiles utilisés étaient le lange Panzersprenggranate de calibre 12,60 cm, développé pour la Kriegsmarine et pesant 330 kg pièce. L’équipage avait le choix entre des obus perforants anti-cuirassement et deux autres types de projectiles explosifs à haut pouvoir brisant, prévus initialement pour les duels en haute-mer. Cette formidable puissance de feu ne laissait aucune chance aux blindés ennemis qui pouvaient être engagés par le LANDKREUZER bien avant qu’ils ne soient eux-mêmes parvenus à portée de tir. Cet avantage décisif faisait du P.1000 « RATTE » un véritable croiseur de supériorité terrestre, capable de tenir en respect ses ennemis par la seule puissance de sa formidable artillerie de bord, de façon à faire le vide autour de lui dès son apparition sur le champ de bataille. En revanche, ce « vaisseau chenillé » aurait été bien incapable d’engager des cibles isolées à courte distance, vu l’impossibilité pour son artillerie lourde de tirer en dépression. Cela impliquait de l’équiper d’une artillerie secondaire et de le faire escorter par une « flotte » des blindés plus petits, en l’occurrence des chars super-lourds du type Panzer VIII Maus et E-100, respectivement de 189 et 100 tonnes, accompagnés de Königstiger et de Panther II (nouvelle version améliorée du Panther, en développement).

Armement secondaire

Il était prévu de doter le Landkreuzer d’une importante artillerie secondaire pour lui conférer une puissance de feu digne d’un véritable croiseur. Cet armement d’appoint comprenait un canon de 12,8 cm KwK 44/L55 (celui là même qui équipait le Maus et le Jagdtiger), 2 mitrailleuses lourdes MG 151/15 de 15 mm et 8 pièces de 2 cm FlaK 38, dont au moins 4 installées sous tourelles cuirassées. La localisation du canon de 12,8 cm pose difficulté et constitue un point d’achoppement entre les historiens, vus que les documents parvenus jusqu’à nous demeurent flous sur ce point de détail. Certains pensent qu’il aurait été monté dans la tourelle principale, probablement au centre de la partie frontale (entre les deux tubes de marine de 28 cm), pour pouvoir faire feu dans toutes les directions contre des cibles mineures (blindés isolés ou trop rapprochés). Cela aurait été l’une des raisons de la suppression du troisième tube de 28 cm de la tourelle. D’autres estiment qu’il aurait été placé dans une tourelle secondaire, plus petite, installée sur la plage arrière de la caisse du char. Certains suggèrent même qu’il aurait pu s’agir d’une tourelle complète de « MAUS ». L’hypothèse d’une seconde tourelle arrière paraît plus logique du point de vue logistique, mais la large surface occupée par les prises d’air et les échappements des énormes moteurs du « Ratte » parait contradictoire avec cette disposition. Une troisième solution aurait été de monter directement à l’avant de la caisse du Landkreuzer une version casematée du KwK 12,8 cm, similaire à celle équipant le Jagdtiger. Cette configuration frontale aurait permis de battre des cibles rapprochées situées face au char, impossibles à atteindre avec l’armement principal. Ce canon, muni d’une rotule, aurait été installé en partie basse du châssis, comme le montrent certaines reconstitutions. L’armement lourd était complété par 8 pièces de 2 cm FlaK 38, destinées principalement à assurer la défense antiaérienne du LANKDREUZER qui constituait une cible de choix vu sa taille gigantesque et sa faible mobilité. Ces pièces pouvaient également été engagées contre des cibles terrestres à courte et moyenne portée, de façon à tisser une véritable muraille de feu autour du monstre, notamment contre l’infanterie et les blindés légers. L’une des variantes projetées prévoyait l’installation de 2 tourelles Zwillinge aux angles arrière du croiseur, armées chacune de 2 canons de 2 cm Flak 38, capables de pivoter tous azimuts et ayant un grand débattement vertical. Les 4 autres tubes de 2 cm auraient été installés dans 4 petites coupoles blindées plus petites, disposées de part et d’autre de la plage moteur arrière, le long des flancs du véhicule. Quant aux 2 mitrailleuses lourdes MG 151/15 de 15 mm, il est possible qu’elles aient été intégrées dans la caisse du char, à l’avant et à l’arrière, comme armes de défense rapprochée contre l’infanterie.

Speer met fin au projet

Le développement du P.1000 fut brutalement stoppé au début 1943 par Albert Speer, ministre de l’armement du Reich, qui décommanda le projet, jugeant le concept irréaliste, inutile et ruineux. Le motif invoqué était le gigantisme de l’engin, inapte aux déplacements et surtout trop gourmand en matières premières stratégiques. A titre de comparaison, un seul P 1000 était équivalent à 80 chars Panther en terme de surface au sol ! Mieux valait recentrer les capacités de production sur des engins chenillés plus petits mais plus efficaces, comme le Tiger II Königstiger, le E-100 ou le futur Panther II, version améliorée du célèbre Panzer V. La tourelle de marine du prototype du P.1000 étant déjà construite, il fallut lui trouver une nouvelle affectation : selon certaines sources, les Allemands l’auraient installée près de Trondheim, en Norvège, pour servir de batterie côtière (Batterie Oerlander). Il est dommage pour le monde libre que le projet ait été abandonné si précocement, mais la décision de Speer était parfaitement censée. S’il avait atteint le stade de la pré-production, le P.1000 aurait englouti des quantités inimaginables de matériaux stratégiques et littéralement ruiné l’économie de guerre allemande. Le P.1000 était si monstrueux que la fabrication et le montage d’un seul LANDKREUZER aurait sans doute mobilisé durant de long mois une grande partie des capacités des chantiers navals et accaparé la main d’œuvre qualifiée normalement affectée à la construction des U-Boot. Chaque engin construit aurait pris la place d’environ 50 à 100 chars Panther et diminué d’autant le potentiel offensif des Panzerdivisions, ce qui aurait sans doute accéléré la ruine de la Wehrmacht et précipité la chute du IIIe Reich

Un bilan en demi-teinte

L’utilisation du Ratte sur le champ de bataille aurait présenté certains avantages. L’infanterie et les véhicules d’accompagnement bénéficiaient d’une meilleure protection qu’avec le MAUS, vu la puissance de feu du monstre et la possibilité de retourner son armement Flak contre les cibles terrestres (véhicules, blindés léger ou infanterie). La plage arrière constituait également une formidable plateforme de transport pour les Panzergrenadier, vu ses vastes dimensions. Quant au véhicule lui-même, il aurait formé, en tant que croiseur de supériorité terrestre, la pierre angulaire du dispositif allemand et le pivot central des unités blindées ou motorisées, jouant le rôle d’un véritable môle défensif au sein de la bataille et des colonnes en mouvement. Son artillerie lourde et son armement antiaérien auraient sans nul doute fortement contribué à tenir à distance respectable les unités au sol, les chasseurs bombardiers et les blindés alliés. Son principal atout était son blindage qui lui assurait une excellente protection, y compris contre l’artillerie terrestre et les blindés adverses qui faisaient figures de simples jouets, comparés à ce mammouth. Peut-être les Alliés auraient-ils réussi à endommager son armement antiaériens, le matériel optique ou les antennes radio, mais ils auraient été bien en peine de réduire au silence sa puissante tourelle principale, capable de pilonner le terrain très loin en avant et dans toutes les directions. La combinaison de plusieurs LANDKREUZER progressant à plusieurs dizaines de kilomètre l’un de l’autre sur le front d’attaque aurait considérablement accru le potentiel offensif allemand et posé de graves problèmes aux unités adverses au sol. L’irruption à courte distance d’un tel monstre sur le champ de bataille aurait immédiatement provoqué un mouvement de panique parmi les troupes adverses et sans doute entraîné un replis précipité. Sa seule présence dans un secteur d’attaque aurait eu une répercussion psychologique sur les troupes. L’effet aurait été démoralisateur pour l’adversaire, sachant que ses armes étaient totalement inopérantes contre ce géant d’acier. A l’inverse, elle aurait sans doute galvanisé le moral des troupes allemandes et renforcé leur ardeur combattive, déjà réputée supérieure à celle des Alliés. Dans un cadre strictement défensif, l’engagement d’un seul de ces monstres pouvait, à lui seul, bloquer une offensive et rétablir l’équilibre sur un front d’attaque. En revanche, son utilisation sur le champ de bataille aurait posé quelques problèmes aux Allemands. Vu sa masse et ses dimensions prodigieuses, le P1000 était en effet condamné à progresser en rase campagne et en terrain ouvert. Il ne pouvait manœuvrer qu’en milieu dégagé, non boisé. Tout changement de direction aurait nécessité un grand rayon de braquage, sans obstacle majeur ni coupure du terrain importante. Il ne pouvait s’aventurer à l’intérieur des agglomérations, sous peine de faire écrouler les édifices sous l’effet de ses vibrations, ni emprunter les axes routiers dont le revêtement aurait été labouré et littéralement déchiqueté par les énormes chenilles. Les ouvrages d’art, dont il dépassait de loin le tonnage, lui étaient également interdits, ce qui impliquait de traverser les fleuves en des points judicieusement choisis pour leurs rives pas trop escarpées, ce qui aurait nécessité de longues et fastidieuses missions de reconnaissances. Sa taille colossale le rendait impossible à dissimuler ou même à camoufler, si bien qu’il aurait été facile à repérer. Il aurait constitué une cible de choix pour l’aviation alliée qui l’aurait harcelé sans relâche. La formidable muraille de feu tissée par ses canons antiaériens aurait sans doute réussi à tenir à l’écart les essaims de chasseurs bombardiers, mais elle aurait été inopérante contre les vagues de bombardiers opérant à haute altitude. Dès leur apparition sur le théâtre d’opération, ces monstres d’acier auraient été pris pour cible par l’aviation stratégique et rapidement détruits ou paralysés par des bombes de gros tonnages (Tallboy). Le concept était donc illusoire, n’en déplaise à Hitler

Caractéristiques du P.1000 (avec la comparaison avec le Maus)

Désignation : P.1000 « RATTE » (rat)
Catégorie : prototype
Type : croiseur terrestre (char super-lourd)
Idée originale : suggestion du Dir. Grote et du Dr. Hacker (Ministère de l’armement)
Constructeur : Krupp
Début du développement : 23 juin 1942
Interruption du projet : début 1943
Equipage : plusieurs dizaines d’hommes (effectif exact inconnu)
Poids à vide : 1000 tonnes (Maus 18,80 tonnes)
Poids au combat : 1800 tonnes environ
Longueur : 35.00 m (Maus 10.00 m)
Largeur : 14.00 m (Maus 3.67 m)
Hauteur : 11.00 m (Maus 3.63 m)
Armement principal : 2 canons de 28 cm SK C/34 L/54,5 sous tourelle cuirassée de marine
Tourelle principale : plus de 600 tonnes
Portée max. (28 cm SK) : 42,5 km
Munitions (28 cm SK) : obus perforant anti-cuirassement ou obus explosifs
Réserve de munitions : 200 obus de marine de 2,8 cm (100 par tube)
Armement secondaire : 1 x canon de 12,8 cm KwK 44/L55
Armement d’appoint : 8 x canons 2 cm FlaK 38 (dont au moins 4 en tourelles)
2 x mitrailleuses MG 151/15 de 15 mm
Motorisation (variante A) : 8 x moteurs diesel de marine Daimler-Benz MB 501 (20 cylindres)
Motorisation (variante B) : 2 X moteur diesel de marine MAN V12 Z32/44 (24 cylindres)
Puissance : 16 000 CV (8 x 2000 CV) pour la variante Daimler-Benz
17 000 CV (2 x 8 500 CV) pour la variante MAN
Puissance massique : 16 à 17 CV / tonne
Vitesse sur route : max. 44 km/h (Maus 13 à 20 km/h)
Vitesse hors route : inconnue
Autonomie : inconnue
Blindage avant de la tourelle : 360 mm
Blindage flancs de la tourelle : 250 mm
Blindage arrière de la tourelle : 250 mm
Blindage toit de la tourelle : 150 mm
Blindage avant de la caisse : 360 mm
Blindage flancs de la caisse : 220 mm
Blindage arrière de la caisse : 200 mm
Blindage haut de la caisse : 150 mm

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