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dimanche 24 août 2025

Les cadeaux de Donald Trump à la Chine et la Russie

 

Les incohérences diplomatiques et commerciales à répétition du président Donald Trump ont, depuis son retour à la Maison Blanche en janvier, favorisé la Chine ainsi que son alliée la Russie avec pour conséquence – chaque jour plus criante – de leur permettre de renforcer leur influence en Asie, une zone d’où Pékin entend bien chasser l’Amérique.

Au fur et à mesure d’une confiance qui s’étiole envers les Etats-Unis, des pays tels que l’Indonésie, la Malaisie, le Vietnam et surtout l’Inde se tournent vers la Chine qui profite de cette déshérence américaine pour enfoncer un coin dans les alliances traditionnelles qui lient l’Amérique au Japon, à la Corée du Sud, l’Australie ou les Philippines.

De plus, loin de renoncer à son alliance économique, politique et militaire avec la Russie, Pékin ne manque pas une occasion pour proclamer la solidité désormais indéfectible de ses liens avec Moscou, sans pour autant que Donald Trump ne s’en alarme. Ceci alors que la Chine ne se cache pas plus d’avoir pour alliés ou partenaires privilégiés des Etats paria ou presque tels que l’Afghanistan, l’Iran, le Vénézuéla, le Bélarus ou la Corée du Nord.

Dernier exemple en date, Donald Trump a décidé lundi 11 août de renouveler pour 90 jours la suspension de tous les tarifs douaniers sur les importations chinoises, ceci après avoir antérieurement imposé des taxes douanières allant jusqu’à 125% le 12 avril dernier et même 145% un peu plus tard.

Il est permis de s’interroger sur la logique de cette guerre commerciale puisque que l’administration Trump a, dans le même temps, imposé des tarifs douaniers de 15% à l’allié historique japonais et même 20% à Taïwan alors même que les autorités taïwanaises avaient accepté d’investir des dizaines de milliards de dollars sur le sol américain pour la production de semiconducteurs dernier cri afin, précisément, de satisfaire les exigences du 47è président américain.

Donald Trump devenu un « partenaire » bienveillant pour la Chine

Ce qui, non sans ironie, fait dire à Alex Lo, éditorialiste du quotidien anglophone de Hong Kong South China Morning Post que la guerre commerciale de Donald Trump contre la Chine ressemble plus à un « partenariat. » « Donald Trump exige sa part dans chaque accord. Cela vaut aussi bien pour la guerre en Ukraine que pour la guerre commerciale avec la Chine, » souligne-t-il le 16 août dans les colonnes de ce quotidien inféodé au Parti communiste chinois. « Trump veut vraiment que ce soit les autres qui paient pour ses réductions d’impôts destinées aux riches, » ajoute-t-il.

« La « clause d’exportation » de la Constitution américaine n’autorise aucune taxe à l’exportation sur les entreprises américaines, comme la taxe de 15 % imposée aux deux géants américains des puces. Mais qui se soucie de la Constitution dans le Washington de Trump ces jours-ci ? », continue Alex Lo qui excelle dans l’art de se moquer de Donald Trump. « Il met comme jamais auparavant la pression sur Taiwan Semiconductor Manufacturing Company (TSMC), le fleuron du secteur des puces électroniques à Taïwan, » explique-t-il encore avant d’ajouter avec un brin de fiel : « Les petites entreprises taïwanaises qui composent la chaîne d’approvisionnement de TSMC sont également exposées à ses nouveaux droits de douane. Encore plus d’extorsion ? La guerre des puces électroniques que Trump mène contre la Chine commence à ressembler davantage à un partenariat. »

Le Financial Times ne prend pas de gants pour démontrer à quel point le retour aux affaires de Donald Trump est un cadeau tombé du ciel pour la Chine. « Trump est le cadeau qui continue de faire plaisir à la Chine. Le président américain bouleverse un quart de siècle de politique américaine dans la région indopacifique, » souligne Edward Luce le 5 août dans les colonnes du quotidien des affaires britannique.

« L’année est à peine à mi-parcours, mais la Chine est déjà le grand gagnant de 2025. Avec une régularité métronomique, Donald Trump lui offre des cadeaux géants. L’admiration que voue Trump à Xi Jinping, qui ne semble que croître avec l’intransigeance de ce dernier, est telle que l’on pourrait pardonner aux observateurs de penser que Trump souhaite que la Chine continue à gagner. Dans un océan de bellicisme bipartisan, Trump est le dernier pacifiste envers la Chine à Washington, » ajoute l’éditorialiste du journal.

Ce goût de Donald Trump pour démanteler la diplomatie américaine

« Les effets géopolitiques de Trump 2.0 ne peuvent être sous-estimés. Depuis le début du siècle, les administrations américaines successives ont cherché à soutenir les voisins de la Chine. Trump est en train de démanteler cette stratégie avec une rapidité remarquable. Parmi ces pays, l’Inde est le plus surprenant, » explique encore le Financial Times.

Fin juillet, « Trump a promis des droits de douane de 25 % sur les produits indiens et accusé New Delhi de financer la guerre de la Russie contre l’Ukraine via ses importations de pétrole […] Aider à l’émergence d’une Inde forte et capable de contrebalancer la Chine a été la stratégie la plus importante des États-Unis au cours du dernier quart de siècle. Mais Trump continue de tout faire pour semer le doute sur la validité de cette stratégie, » souligne le quotidien.

« Taïwan a tout autant de raisons que l’Inde de s’inquiéter du bouleversement du monde. Trump a imposé des droits de douane de 20 % au plus grand producteur mondial de semiconducteurs et l’a accusé de voler l’Amérique. La semaine dernière, il a refusé au président taïwanais, Lai Ching-te, l’autorisation de faire escale à New York, de peur d’offenser la Chine […] Trump est capable de négocier la sécurité de Taïwan pour obtenir des concessions commerciales de la Chine. Y a-t-il une méthode géopolitique derrière la folie de Trump ? », relève le quotidien pour qui l’ « avenir du monde s’écrit en Chine. Trump en est le coauteur involontaire. »

Le 15 août, s’adressant à des journalistes à bord d’Air Force One avant sa rencontre tristement mémorable avec le président russe Vladimir Poutine en Alaska, Donald Trump n’a pas hésité à proclamer qu’il avait obtenu de son homologue chinois Xi Jinping la promesse que la Chine n’envahirait pas Taïwan pendant son mandat à la Maison Blanche.

« Je ne le ferai jamais tant que vous serez président, » aurait dit le maître de la Chine communiste, selon son homologue américain. « Je suis très patient et la Chine est très patiente, » aurait-il ajouté. C’est oublier que la Chine n’a jamais écarté l’option militaire contre Taïwan, Xi Jinping ayant maintes fois précisé que la « réunification » avec la « mère patrie » devrait nécessairement se faire pendant la génération présente.

Cette confiance envers les Etats-Unis qui s’étiole en Asie

Pour le média japonais Nikkei Asia, placer l’Asie sous la menace constante de sanctions économiques et commerciales comporte des risques pour les Etats-Unis. Si l’Amérique « souhaite que ses alliés en Indopacifique coopèrent à long terme […] pour être efficaces contre la Chine, la dissuasion doit être collective. Washington devra accepter d’offrir à ses alliés des avantages économiques en plus des sanctions. »

« L’aliénation croissante provoquée par les droits de douane imposés par l’administration Trump ne rend pas service aux Etats-Unis, alors que tous leurs alliés en Indopacifique considèrent la Chine comme leur partenaire commercial le plus important, souvent avec une marge significative, » écrit l’expert William Matthews le 18 août dans les colonnes du quotidien japonais.

Les conséquences seraient alors de deux ordres. « Premièrement, les alliés des Etats-Unis seraient incités à se tourner vers d’autres pays pour leur défense, y compris en payant de leur poche. À proprement parler, cela correspond aux objectifs de l’administration Trump qui souhaite réduire le fardeau qui pèse sur les Etats-Unis. Cependant, lorsque cette attitude s’accompagne d’un mécontentement croissant à l’égard des exigences américaines dans d’autres domaines et d’une érosion de la bonne volonté, elle réduit les incitations des alliés à coopérer, » explique-t-il.

« Deuxièmement, en cas de guerre, les alliés des Etats-Unis devraient évaluer le coût de leur implication. Pour un pays comme l’Australie, qui a longtemps navigué entre des liens économiques étroits avec la Chine et des liens de défense avec les Etats-Unis et qui, contrairement au Japon, ne serait pas directement menacé militairement par la Chine en cas de guerre autour de Taïwan, la décision d’aider Washington impliquerait de déterminer le coût d’une compromission de ses relations commerciales avec Pékin et des dommages probables pour son économie, » poursuit cet expert de la Chine à Chatham House, un institut britannique de premier plan spécialisé dans les relations internationales.

« En cas de conflit dans cinq, dix ou quinze ans, si l’équilibre des pouvoirs s’est encore déplacé en faveur de la Chine, les Etats-Unis seraient confrontés à des partenaires dont les intérêts nationaux ne seront peut-être plus servis au mieux par le maintien de l’alliance à un moment critique. De Canberra à Tokyo, les gouvernements alliés devront examiner les conséquences d’une participation à une guerre contre la Chine aux côtés des Etats-Unis et d’une défaite dans une région dominée par Pékin, » insiste-t-il.

L’Inde va-t-elle basculer dans le camp de la Chine ?

L’imprévisibilité de Trump prend un relief spectaculaire avec l’Inde qu’il a menacé de sanctions douanières de 50% en raison de ses achats d’hydrocarbures russes. Le résultat en est déjà un rapprochement saisissant et fulgurant avec la Chine qui s’esquisse avec une visite du Premier ministre Narendra Modi en Chine, la première depuis 7 ans.

Il assistera à un sommet de l’Organisation multilatérale de coopération de Shanghai (OCS, créé par la Chine en 2021) qui débutera le 31 août et rencontrera Xi Jinping. Ce sommet consacrera un dégel diplomatique et politique entre les deux puissances nucléaires autrefois ennemies. Nul doute que les pressions américaines ont joué un rôle dans ce processus après des années de fortes tensions, y compris frontalières.

Dans sa dernière livraison, The Economist explique qu’en dépit des déclarations simplistes du président américain sur la Chine, son administration n’en continue pas moins de préparer les Etats-Unis à une guerre chaude avec son rival chinois. « Avec la Chine comme nouvelle rivale, les Etats-Unis réactivent d’anciennes installations militaires dans le Pacifique, » explique l’hebdomadaire britannique pour qui « toute guerre entre les deux superpuissances serait cataclysmique [car] toutes deux possèdent désormais l’arme nucléaire. »

« Du fait de l’éloignement géographique de la Chine, l’armée de l’air [américaine] ne peut plus masser ses avions dans de grandes bases proches du théâtre des opérations, comme elle l’a fait ces dernières décennies. Elle doit planifier sa survie et ses combats dans toute la « zone de destruction » profonde de la Chine, en tirant les leçons […] des conflits plus récents, » comme l’Ukraine, explique The Economist.

En cas de conflit, « la Chine combattrait principalement dans son arrière-cour, au sein de la « première chaîne d’îles » qui s’étend du Japon à la Malaisie, avec Taïwan, à environ 160 km, en son centre. La plupart des forces américaines afflueraient depuis l’autre côté de l’océan, à des milliers de kilomètres de là. De nombreux missiles balistiques chinois ont une portée supérieure au rayon d’action habituel des avions de combat américains, » indique encore The Economist.

L’issue incertaine d’une guerre sino-américaine

Les calculs effectués pour The Economist par Timothy Walton, du groupe de réflexion américain Hudson Institute, illustrent le défi à relever. Son modèle suggère que la Chine procéderait à des bombardements massifs sur des cibles proches ou sur le sol du Japon, dont Kadena, la plus grande base militaire américaine à Okinawa. D’autres bombardements viseraient la deuxième chaîne d’îles, y compris Guam et ses bases vitales pour l’Amérique, ainsi que d’autres cibles éloignées comme Hawaï, siège du quartier général du Commandement indopacifique américain.

Les porte-avions américains, qui avaient contribué à la victoire de l’Amérique lors de la guerre du Pacifique et symbolisaient la puissance américaine, sont de plus en plus vulnérables face aux missiles chinois « tueurs de porte-avions » à longue portée, tels que le DF-26B. M. Walton précise que pour compliquer la tâche des forces armées américaines, la Chine optimise ses missiles pour cibler les gros avions tels que les ravitailleurs et les radars aéroportés.

Dissimuler ses forces militaires et se déplacer incognito complique le ciblage de la Chine, mais aussi la tâche logistique des États-Unis. Le carburant, les équipages et les pièces de rechange doivent être acheminés au bon endroit au bon moment. Les convois de ravitaillement seraient alors des cibles de choix. Les logisticiens américains réfléchissent à la manière de les acheminer par des itinéraires plus sûrs, via l’Australie. La leçon de la Seconde Guerre mondiale, note le général Kevin Schneider, chef des forces aériennes du Pacifique, est que « la logistique et le soutien sont absolument essentiels pour générer une puissance aérienne. »

Cela suffira-t-il pour gagner ? La Chine n’aura peut-être pas besoin de vaincre les Etats-Unis militairement car il lui suffirait de les tenir à distance suffisamment longtemps pour s’emparer de Taïwan. David Ochmanek, de la RAND Corporation, un autre groupe de réflexion américain, estime que la Chine dispose d’une puissance de feu suffisante pour submerger les aérodromes de la première chaîne d’îles du Pacifique aussi longtemps que nécessaire et qu’elle pourrait bientôt être en mesure de le faire dans la deuxième chaîne de ces îles du Pacifique.

Selon lui, l’armée de l’air américaine songe à utiliser massivement des drones qui, eux, n’ont pas besoin de pistes d’atterrissage et seraient plus grands que les quadricoptères portatifs omniprésents en Ukraine afin de transformer la région proche de Taïwan en « enfer » pour la Chine.

Les renoncements de Donald Trump

Mais, souligne le quotidien, il reste que malgré les vantardises de l’administration Trump sur un budget de défense de mille milliards de dollars, son « Big Beautiful Bill » n’est que cosmétique car sa proposition de budget de défense est en réalité inchangée dans les faits puisqu’en baisse après inflation. Ce qui pose question si la Chine devait, en dernier ressort, décider d’utiliser la force contre Taïwan et si, de ce fait, une guerre chaude devait éclater entre Pékin et Washington. Xi Jinping a plusieurs fois intimé l’ordre à son armée d’être prête à envahir Taïwan d’ici 2027. Les Etats-Unis, quant à eux, se préparent toujours à la guerre avec un état d’esprit en temps de paix.

Or un incident inédit en mer de Chine méridionale, au cours duquel deux navires de guerre chinois sont entrés en collision le 11 août alors qu’ils tentaient de bloquer un navire de ravitaillement des garde-côtes philippins près des récifs de Scarborough en mer de Chine méridionale, met en évidence les tensions persistantes entre les revendications de souveraineté chinoises dans la zone et les normes maritimes internationales qui sont ainsi bafouées par Pékin.

Immédiatement après cet incident – sans précédent connu -, les Etats-Unis ont dépêché sur place deux navires de guerre. Pékin a depuis affirmé que sa flotte de guerre avait chassé de la zone le USS Higgins, un destroyer lance-missiles Aegis, hors de la zone après que le navire « son entrée illégale dans les eaux territoriales chinoises au large de l’île de Huangyan » (黄岩岛, nom chinois du récif contesté de Scarborough Shoals).

La 7e flotte américaine a catégoriquement rejeté les affirmations de la Chine et répondu que le Higgins exerçait légalement ses droits de navigation en vertu de la Convention des Nations unies sur le droit de la mer (CNUDM), à laquelle les Etats-Unis ne sont d’ailleurs pas parties. Les Philippines ont à leur tour accusé les navires chinois d’avoir effectué des manœuvres dangereuses qui ont conduit à la collision. Heureusement, le destroyer chinois n’a pas heurté le Suluan, un navire des garde-côtes philippins en mission de ravitaillement, évitant ainsi ce qui aurait pu être un affrontement diplomatique majeur entre les parties.

Vers un nouveau Yalta sur le dos de l’Ukraine ?

L’attitude ouvertement bienveillante de Trump envers Vladimir Poutine qui laisse présager un nouveau Yalta où l’Ukraine serait la grande perdante est un autre sujet d’inquiétude non seulement pour l’Europe mais aussi pour l’Asie.

« La faiblesse et l’incompétence dont fait preuve Trump dans ses efforts pour mettre fin à la guerre menée par la Russie en Ukraine constituent une menace sérieuse pour la sécurité européenne. Mais les alliés et partenaires des Etats-Unis en Asie de l’Est ont également de quoi s’inquiéter, » souligne James D.J. Brown dans les colonnes du Nikkei Asia le 21 août.

« Tout d’abord, en déroulant le tapis rouge à Poutine, un homme recherché par la Cour pénale internationale pour crimes de guerre, Trump affiche son mépris pour l’ordre international fondé sur des règles. Cela revêt une importance capitale pour les pays d’Asie de l’Est, notamment le Japon, dont la sécurité et la prospérité reposent sur le principe selon lequel les grands États ne peuvent s’emparer du territoire de leurs voisins plus faibles par la force militaire, » ajoute ce professeur de sciences politiques à la Temple University au Japon.

« En mettant fin à l’isolement de Poutine, Trump a envoyé un message à tous les États révisionnistes, y compris la Chine, selon lequel l’agression militaire n’est pas taboue. Même si vous lancez une invasion non provoquée et tuez des dizaines de milliers de civils, les Etats-Unis, après une pause, vous accueilleront comme un égal, » écrit-il.

« Tous les efforts élaborés des alliés européens pour empêcher Donald Trump de se prosterner devant Vladimir Poutine ont été vains lors de leur sommet en Alaska. Flatter, dorloter et caresser le grand bébé semble avoir été vain, » relève pour sa part Sidney Blumenthal, ancien conseiller principal du président Bill Clinton, dans les colonnes du Guardian.

« Avant le sommet du 15 août, les Européens avaient persuadé Trump d’imposer de nouvelles sanctions si Poutine n’acceptait pas un cessez-le-feu, condition préalable à toute négociation. Mais Trump a délibérément jeté cette politique par la fenêtre de « la Bête », la voiture présidentielle, comme un jouet, avant d’inviter Poutine à le rejoindre pour une promenade triomphale en char, » relève-t-il dans cet article publié le 19 août. Lors de l’humiliation qu’il avait infligé au président ukrainien Volodymyr Zelensky lorsqu’il l’avait reçu le 28 février dans le Bureau Ovale à la Maison Blanche, il lui avait dit : « Vous n’avez aucune carte en main. » Or à Anchorage, c’est « Trump qui a remis ses cartes à Poutine, » explique-t-il.

L’Europe hausse le ton contre la Chine

Mais, fait relativement nouveau, les voix critiques de la Chine se multiplient en Europe. C’est ainsi qu’à l’occasion d’une visite au Japon lundi 18 août, le ministre allemand des Affaires étrangères Johann Wadephul a affirmé que la Chine menaçait de « modifier unilatéralement le statu quo et de déplacer les frontières en sa faveur », en Asie.

A l’appui de ses accusations, il cite les démonstrations de force de Pékin dans le détroit de Taïwan et en mer de Chine orientale et méridionale. « Toute escalade dans cette plaque tournante sensible du commerce international aurait de graves conséquences pour la sécurité et l’économie mondiales, » a-t-il dit après un entretien avec son homologue japonais Takeshi Iwaya.

La veille de son déplacement à Tokyo, le même ministre avait dénoncé l’agressivité chinoise dans la région. La Chine, avait-il déclaré, « affirme de plus en plus sa suprématie régionale et, ce faisant, remet également en question les principes du droit international. » « Le comportement de plus en plus agressif de la Chine […] a également des implications pour nous en Europe : les principes fondamentaux de notre coexistence mondiale sont en jeu ici, » insistait Johann Wadephul.

Le chef de la diplomatie allemande a dénoncé « le soutien de la Chine à la machine de guerre russe » en Ukraine. « Sans ce soutien, la guerre d’agression contre l’Ukraine ne serait pas possible. La Chine est le plus grand fournisseur de biens à double usage de la Russie et son meilleur client pour le pétrole et le gaz », a-t-il dit, usant de termes qui tranchent singulièrement avec la politique allemande qui a longtemps été accommodante avec la Chine.

Est-ce déjà trop tard ? L’une des conclusions qui se dégagent des gesticulations pathétiques et scandaleuses du président américain est que s’il affirme quasi quotidiennement vouloir rechercher à tout prix la paix dans le monde, ses paroles et ses actes semblent au contraire favoriser les conflits à venir, en particulier sur le théâtre de l’Asie de l’Est puisque la Chine et la Russie sortent à chaque fois renforcées par ses divagations.

Pierre-Antoine Donnet

asialyst.com