Des services secrets, nous ne savons que les échecs et rarement les succès. Si l'échec provoque l'anathème, l'ingratitude est fille de la victoire. Quand à la gloire, il faut l'oublier, elle est pour les autres...

lundi 28 avril 2025

Marrakech en images : destinées d’une cité touristique

 

Riche d’un grand patrimoine, Marrakech est mondialement connue pour son emblématique place Jemaa el-Fna
© Shutterstock/Matej Kastelic


Née d’une oasis, Marrakech est fondée dans le dernier quart du XIe siècle par les Almoravides (1040-1147). Au fil des siècles, la cité connaît des épisodes glorieux et tient plusieurs fois rang de capitale, mais son rôle politique est neutralisé avec son immersion dans la modernité globalisée. Affectée par les effets du séisme meurtrier et destructeur qui l’a touchée en septembre 2023, et dont les stigmates sont visibles dans le paysage, Marrakech reste une valeur sûre du secteur touristique, vital pour le Maroc.

Le 7 septembre 1912, les troupes françaises entrent dans la ville. Le projet de transformation du Maroc par le protectorat fait de Rabat la capitale du pays, et de Marrakech… une cité agréable. La teinte remarquée des remparts est imposée comme couleur par antonomase de Marrakech, devenue la « ville ocre », aussi bien dans sa partie ancienne que dans les extensions des XXe et XXIe siècles, une servitude de couleur étant imposée aux constructions. Au début des années 1930, la Société chérifienne d’hivernage présente le plan de développement d’un quartier résidentiel et de loisirs, situé entre la médina, le quartier de Guéliz et le chemin vers la Ménara, qui prend le nom évocateur d’Hivernage, en lien avec l’arrivée en 1928 de la nouvelle ligne de chemin de fer qui lance la destination de Marrakech.

La couleur du désir colonial 

L’iconographie donne la prévalence aux sites ouverts plutôt qu’aux monuments. Ce choix trouve en la place Jemaa el-Fna un espace intra-muros historique. Le premier Guide bleu du Maroc paraît en 1921, et le premier palace de Marrakech, La Mamounia, est inauguré en 1923. Le discours colonial révèle une ville de villégiature, avec certes des éléments patrimoniaux préexistants, mais surtout dotée d’un cadre magnifique, d’un climat idéal et pourvue des infrastructures et des services pour un séjour optimal. Une narration est en place, qui marquera la ville et son image jusqu’à nos jours. Elle est encore la base de la production visuelle et textuelle institutionnelle, notamment celle de l’Office marocain du tourisme, où Marrakech advient comme « éternelle » ; elle est aussi fondamentale dans les guides et les itinéraires contemporains. La ville bénéficie d’un nouvel atout : elle est une proche escapade depuis l’Europe, particulièrement depuis la France, à laquelle elle est reliée par de nombreuses lignes aériennes.

C’est le pouvoir colonial qui a fait de la ville un espace de villégiature, par des discours, des décisions et des gestes créateurs. Néanmoins, avant cette phase, Marrakech, site de pèlerinage, était déjà une cité d’accueil. Ces deux formes d’hospitalité sont restées indifférentes l’une à l’autre. Sa dimension pèlerine, même si non caduque, s’est en partie invisibilisée dans sa dimension touristique mondialisée prégnante. Les saints de Marrakech sont devenus fantomatiques ; on ne retient en général plus que Sidi Bel Abbès (1129-1204), patron de la ville et dont la zaouïa demeure un pôle.

La trame iconographique de Marrakech découle des décisions coloniales de la vocation et du développement de la ville en station climatique. Ses aspects fondamentaux composent un dispositif conjuguant la couleur, le climat et l’histoire de la cité. Cette fabrique, lisible à travers un corpus de cartes postales éditées de la fin du XIXe siècle à nos jours, reste constante dans le temps, tout en témoignant d’une prévalence de clichés ciblant la place Jemaa el-Fna. La ville est représentée par une iconographie établie, participant à la construction d’un mythe de Marrakech. Si la partie intra-muros est détentrice d’un patrimoine considérable, force est de constater qu’il ne semble pas être à même de justifier sa renommée. En revanche, une caractéristique exceptionnelle de la cité est son aura, qui la distingue d’autres sites du Maroc et du pourtour méditerranéen. En d’autres termes, l’imaginaire lié à Marrakech ne peut être compris seulement à l’aune de son héritage historique et architectural, quand bien même sa médina est inscrite sur la liste du Patrimoine mondial en 1985. De même, aucun artefact tangible ne s’est imposé comme unique identificateur. Cela ne signifie point qu’elle en soit dépourvue, mais au contraire qu’elle en possède plusieurs, de diverses natures, dont son contexte citadin, ses atmosphère et ambiance, ses odeurs et saveurs, un ensemble de qualités supposément présentes dans la médina.

L’iconographie touristique de la ville, passée et actuelle, reflète cette orientation initiale. La ville est arrimée à deux cadres de trames paysagères (proche palmeraie, contreforts et sommets plus lointains de l’Atlas), des espaces urbains (place Jemaa el-Fna, médina, souks), plusieurs objets construits (remparts, minaret de la mosquée Koutoubia, pavillon de la Ménara, mausolées). Sa traduction en vues est incarnée par ces éléments associables, pour certains superposables ; aucun n’est exclusif, ni n’éclipse les autres, ils forment en s’associant de multiples combinaisons.

Depuis les toits de Marrakech, on peut observer la chaîne de l’Atlas 
qui sépare la ville du sud-est du Maroc et les routes vers le désert
© Shutterstock/Maurizio De Mattei


À cela, on peut ajouter un objet… Que ramener de Marrakech ? La question n’est pas futile et se confond avec une autre : que faire à Marrakech ? Le shopping en ses souks est un motif majeur de fréquentation de la ville, réputée pour la diversité de sa production artisanale. On en ramène des souvenirs, particulièrement des babouches, artefacts maghrébins communs devenus objets typiquement marocains sous le protectorat, qui en réglemente la fabrique et le style et les protège de la concurrence.

Un écho international

Après l’indépendance du Maroc en 1956, commence une nouvelle ère pour la ville, qui entre dans la géographie du monde configuré par les personnages huppés qui la fréquentent. Un petit nombre de personnes fortunées et médiatisées trouve dans le climax de Marrakech, avec sa belle météorologie et son ambiance sociale, une raison de la préférer. Dans les années 1960, des gens célèbres et influents s’y installent, tels le couturier français Yves Saint Laurent (1936-2008) ou l’architecte américain Bill Willis (1937-2009). Liés au monde de la culture, de la mode et de l’esthétique, ils invitent la ville dans un imaginaire associé. Leur histoire personnelle sera dès lors liée à celle de la cité, et nombre de lieux témoignent de cette relation, comme le musée Yves-Saint-Laurent, inauguré en 2017, tandis que le Jardin Majorelle, qui fut la propriété du créateur, est le site payant le plus visité de Marrakech. Le lien avec la mode ne s’est pas démenti, comme en témoignent les shootings de marques européennes de prêt-à-porter ou la tenue d’événements de la haute couture (Dior en 2019). En parallèle, la cité s’est imposée comme référence d’une inspiration esthétique particulière en matière de style architectural, de décoration intérieure, de design, d’objets artisanaux. Cette dimension se manifeste à travers des publications récurrentes dans les rubriques de nombreux magazines ou revues ; elle est aussi à l’œuvre dans le décor et la promotion des grands hôtels, la ville abritant 51 établissements classés cinq étoiles.

Connu pour sa couleur bleue et pour avoir appartenu à Yves Saint Laurent, le Jardin Majorelle 
est l’un des sites les plus visités de Marrakech
© Shutterstock/dhvstockphoto


L’effet people est loin d’être anecdotique ; l’attractivité de Marrakech vis-à-vis de cette population référente est ancienne et constante. Ses effets ont opéré positivement de manière continue sur l’image de la ville, sur sa reconnaissance mondialisée. Innombrables sont les images de situations ordinaires ou particulières (festives ou événementielles) entretenant le rayonnement de la cité et sa séduction, agissant comme autant d’appâts miroitants. Multiples également sont les diffusions d’images de célébrités (de registre, d’intensité et de rayonnement variables) saisies à Marrakech en des lieux publics ou privés (avec une préférence pour les riads et les bords de piscines) tout aussi divers. En 2018, Madonna la choisit pour célébrer son 60e anniversaire. La star visite le musée Yves-Saint-Laurent et la médina, flâne place Jemaa el-Fna. Les images de la chanteuse parée de bijoux locaux en argent et vêtue en « reine berbère » seront partagées sur les réseaux sociaux. Marrakech fait le buzz et entretient un certain tapage médiatique. Ces bourdonnements permanents lui permettent d’être une ville en veille, réactivée épisodiquement à l’occasion d’une manifestation orchestrée, nationale ou internationale, cyclique ou ponctuelle ou, de façon plus aléatoire mais selon un régime soutenu, par les passages des people, dont les allées et venues tissent une topographie des lieux en vue du monde, à laquelle Marrakech est ancrée.

Par ailleurs, elle est pointée comme lieu central de liens et complaisances réciproques entre dirigeants français et marocains du monde des affaires et de la politique. Marrakech est une alcôve où se jouent des intérêts et des alliances. De même, les largesses royales offrent gîte et agapes aux importants et célèbres. Les batifolages des notoriétés, relayés dans des magazines ou des vidéos, sont autant de publireportages pour la ville et d’échos tapageurs pour sa renommée festive. Elle se prête à toutes les célébrations : anniversaire, soirée, inauguration, réveillon, enterrement de vie de jeune fille ou de garçon, mariage, lune de miel, etc. Dans le domaine événementiel, le calendrier est également dense : Festival international du film lancé en 2001 ; Marrakech du rire créé en 2011 ; Miss Arabic Beauty depuis 2016, sans compter les événements artistiques et sportifs.

L’image de la ville est kaléidoscopique, associée à celle d’une farandole de visages connus, émanant de multiples sphères (politiques, artistiques, culturelles) médiatisées et mondialisées. Cette donnée contribue à orienter nombre de touristes « ordinaires » vers cette destination prisée. Marrakech peut être l’objet d’un court séjour à coût modéré, et pourtant son image n’est pas celle d’une destination bas de gamme du tourisme de masse. Bien que d’accès facile en ce sens, elle n’apparaît ni galvaudée ni dépréciée, mais s’offre comme une expérience valorisée et valorisante. Le Maroc use à des fins de marketing de cette représentation : « Voyagez pour de vrai » était le slogan d’une campagne promotionnelle (2011), déclinée en particulier depuis l’« appât » Marrakech. Proche de l’Europe, sa source principale de visiteurs, le Maroc cible singularité de voisinage et authenticité, s’affirme comme voyage et non séjour commun du pourtour méditerranéen. L’« expérience » de Marrakech a, dans cette perspective, valeur d’argument. Marrakech est même déclinée en « prêt-à-offrir » dans des coffrets.

Néanmoins, en parallèle, au Maroc, une représentation sulfureuse de la cité s’est forgée. Le film Much Loved, de Nabil Ayouch, fiction sur le milieu de la prostitution, présenté à Cannes en 2015, a été interdit dans le royaume au motif de constituer un « outrage grave aux valeurs morales et à la femme marocaine, et une atteinte flagrante à l’image du royaume ». Les rumeurs et allusions en ce sens sont courantes, mais elles ont été affichées par les déclarations de l’ancien ministre de la Justice et des Libertés, entre 2012 et 2017, Mustapha Ramid (islamiste), en visite dans la cité en 2012 : « Des touristes originaires de plusieurs continents [y] viennent pour passer beaucoup de temps à commettre des péchés et s’éloigner d’Allah ». Maire de Marrakech depuis 2009, Fatima Zahra Mansouri, proche du pouvoir royal, rétorquait en jugeant ces propos « blessants pour la ville et ses habitants et indignes d’un responsable gouvernemental ». Cette polémique se situait dans le contexte de l’après-attentat du 28 avril 2011 contre le café Argana, place Jemaa el-Fna, perpétré, selon les autorités, par Al-Qaïda. Marrakech est, à l’évidence, une scène de la politique internationale du Maroc, comme en témoignent également les conséquences de l’attaque fomentée par des djihadistes contre l’hôtel Atlas Asni le 24 août 1994. C’est à la suite de cet événement que le Maroc, soupçonnant les services secrets algériens d’y être impliqués, ferme ses frontières avec l’Algérie.

Les riads : de maisons autochtones en lieux d’expériences

À la suite de celui de personnalités de la jet-set ayant acquis, dès les années 1960, un pied-à-terre dans la cité, l’engouement de populations exogènes pour la ville va connaître un tournant dans la décennie 1990. Un nombre croissant d’étrangers (Européens pour la plupart, Français en particulier) va y investir en acquérant des maisons de la médina. Désormais, il s’agit de valoriser ces biens en les transformant en maisons d’hôtes. La diffusion sur la chaîne M6 en 1999 d’une émission de la série « Capital » sur les riads et leur prix abordable semble avoir amplifié le phénomène. À présent, selon l’Association des maisons d’hôtes de Marrakech, la cité compte plus de 1 200 riads hôteliers, soit un quart de l’offre d’hébergement.

Si l’on trouve des riads dans d’autres villes marocaines, c’est à Marrakech qu’ils sont les plus nombreux et que ce choix de logement prévaut, et c’est cette même cité, première destination nationale en termes de nuitées touristiques, qui en a lancé la formule. La topographie de la médina est ponctuée de riads, lesquels colonisent nombre de derbs, ruelles et impasses à fonction résidentielle où, autrefois, il n’y avait pas d’activités économiques et où les visiteurs étaient rares. Cette situation se rend visible en certains quartiers, notamment celui de Bab Doukkala. Dans ce périmètre, où la présence des riads transformés est déjà ancienne, le processus est toujours vivace. Plus aucun derb qui ne compte des riads aux nouvelles affectations (hôtels, restaurants, hammams, lieux culturels ou résidences secondaires), chaque ruelle révélant des chantiers à divers stades d’avancement. La clientèle touristique internationale est friande des riads, suggérés comme de véritables expériences culturelles singulières à référent spatial, des situations de découverte combinant la révélation d’un pays à éthos prononcé (le Maroc), d’une cité historique (Marrakech), d’un espace emblématique (la médina), d’un habitat traditionnel (le riad). « Faire l’expérience de la vie en médina », c’est cette notion magistrale de la « vie locale », accessible dans le riad qui est la valeur ajoutée de ces formules.

La médina de Marrakech est au cœur de l’économie touristique de la ville
© Shutterstock/Elzbieta Sekowska

De plus, le riad est un objet permettant d’accentuer la dimension féérique et orientale de la cité et d’invoquer la référence convenue aux Mille et Une Nuits. L’appellation « riad » est utilisée de manière générique, en vertu de son caractère valorisant et de sa connotation typique, par nombre d’hôtels qui ne sont pas des riads au sens littéral, l’étymologie du terme renvoyant à des habitations construites autour d’un patio-jardin central. Résultant d’une fabrique allogène visant principalement une clientèle exogène, ces propositions atypiques d’hébergement typiques font partie intégrante de l’image de la destination Marrakech. Considérés de plus comme éléments avérés de son patrimoine, les riads sont positionnés dans le dispositif des ressources de la ville et participent de son attractivité. Ainsi, le terme de « riad » est désormais un vocable entériné du glossaire touristique mondial.

© Shutterstock/Alexey Pevnev


Néanmoins, au Maroc, le phénomène tenu par des étrangers est parfois disproportionnellement médiatisé au regard de son importance quantitative, peut-être du fait de ces incidences et de leur signification symbolique. Autre interprétation subjective, celle du jeu de la mise en visibilité réciproque induite par leurs aménagements, notamment ceux effectués sur les terrasses (solariums, jacuzzis, piscines et espaces de détente), qui ne sont pas toujours du goût des Marrakchis voisins, dont la vie intime peut, de plus, être observée depuis là. Le chassé-croisé des regards est problématique. Ne pas être vu chez soi, et ne pas être en mesure de voir ce qui ne doit pas être vu, participe des codes du respect mutuel et est un souhait verbalisé par l’intermédiaire de plaintes abondant en ce sens.

La mythique place Jemaa el-Fna, hypnose urbaine

Destin singulier que celui de ce site composite qui fut une sorte de no man’s land entre plusieurs espaces de la médina et devint l’icône de l’urbanité de la ville. Noyau de l’imaginaire de l’intra-muros, la place Jemaa el-Fna en est le symbole. Elle polarise la fréquentation des touristes, en tant que seuil de la médina, de ses ressources, de ses traditionnels souks et, in fine, en tant qu’espace-objet situé à la croisée des processus conjugués de patrimonialisation matérielle et immatérielle, qu’elle condense en un paysage de synthèse. Là, les touristes viennent voir Marrakech au prisme de la place, les réalités augmentées de cette dernière, et les Marrakchis présents, qui eux-mêmes viennent les observer, profitent de la place, des spectacles, des musiciens, conteurs et charmeurs de serpents. Les lieux de prédilection pour saisir une vue panoramique de la place déployée et de ses animations sont les étages des cafés la bordant, qui permettent de l’appréhender comme un spectacle et de l’observer de manière conforme à ses images dominantes et récurrentes, celles des cartes postales, généralement des vues à vol d’oiseau. Depuis la période coloniale, l’itinéraire touristique classique de la cité s’amorce et s’achève… place Jemaa el-Fna.

Elle est une mise en abîme perpétuelle, un espace en construction et déconstruction permanentes ; les installations des gargotes et étals, numérotés, sont montées et démontées chaque jour, le paysage et les ambiances évoluent sans cesse. S’y conjuguent au fil des saisons, au rythme du jour et de la nuit, le vide et le plein, l’instable et le mobile, l’animation et l’accalmie. Figure métonymique, la place, « lieu le plus photographié du Maroc » selon la vulgate, contenant et contenu, devient la matrice de la ville, le culbuto du paysage urbain. Elle n’est pas un monument, non plus qu’un construit, mais une figure plastique dont la forme évolue, se reconfigure, mais qui reste le cœur incarné de la cité, sa représentation première et ultime, en images et en mots. Elle est le territoire de la halqa, terme englobant toutes les formes de spectacles ouverts qui s’y tiennent (théâtre de rue où acteurs, conteurs, musiciens, saltimbanques et spectateurs interagissent) et où les scènes et situations urbaines et artistiques sont poreuses. L’« espace culturel de la place Jemaa el-Fna » figure sur la liste du patrimoine immatériel de l’UNESCO depuis 2008.

La place fait office d’aimant. Elle est le point de repère premier et la mire de la topographie touristique, dressée par la cartographie et les circuits des guides, révélée par la signalétique directionnelle en place dans la médina, ou dans la géolocalisation des hébergements intra-muros, les riads notamment, lesquels se positionnent en fonction de la distance qui les sépare de ladite place, et mettent en exergue, le cas échéant, les images de leurs terrasses avec vue, plus ou moins proche, sur Jemaa el-Fna.

Marque architecturale de la ville, les riads ont été transformés en maisons d’hôtes
© Shutterstock/kudla


La « ville ocre » d’un Orient de proximité, doublement labellisée : les diverses narrations de Marrakech apparaissent jusqu’à nos jours syncrétiques, en syntonie avec les désirs pluriels de ses visiteurs. Son intérêt touristique et patrimonial est de nature cumulative et systémique. Ainsi, l’image-reflet de la palmeraie de Marrakech est encore résiliente, alors que les terres de palmiers stricto sensu se sont réduites. Il semblerait qu’ici, la fabrique contemporaine de l’image touristique globalisée d’un ailleurs exotique se nourrisse, jusqu’à en être saturée et de ce fait sursignifiante, d’accumulation et de démultiplication de figurations de singularités polymorphes. Incontestablement, Marrakech est paysage ; elle dispose d’identifiants « touristico-patrimondialisés », bénéficie d’un répertoire à la riche palette de mots, d’images, d’objets, de lieux, d’odeurs, de goûts et même d’une couleur, qui la signifient. 

Anna Madoeuf

areion24.news