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vendredi 11 avril 2025

Le DRSD pointe le rôle de groupuscules radicaux dans des affaires de sabotage

 

Le 10 avril, les députés et les sénateurs réunis en commission mixte paritaire [CMP] se sont mis d’accord sur la version finale d’une proposition de loi visant à combattre plus efficacement le narcotrafic en créant un parquet national anticriminalité organisée, en mettant en place des quartiers de prisons sécurisés pour les narcotrafiquants et en renforçant certaines techniques d’enquête. Cela étant, ce texte ne concerne pas la seule sécurité intérieure.

La veille, lors d’une audition à l’Assemblée nationale, le ministre des Armées, Sébastien Lecornu, a justement évoqué la question de la criminalité organisée.

« Plus on avance avec les services de renseignement sur le narcotrafic, plus on voit l’adhérence à d’autres réseaux, soit étatiques, soit terroristes. Vous voyez bien comme un service étranger peut stimuler des déstabilisations. On peut toujours avoir un système de défense qui guette le char voulant entrer sur le territoire national mais si, pendant ce temps, vous avez une manipulation massive d’un certain nombre de réseaux, évidemment, la question ne va pas dans le bon sens », a affirmé M. Lecornu.

Lors du dernier point presse du ministère des Armées, le directeur du renseignement et de la sécurité de la défense [DRSD, contre-espionnage militaire], le général Philippe Susnjara, a dit « ne pas avoir constaté, aujourd’hui, de groupes criminels qui des sous-traitants de la Russie, par exemple. Ce qui, a-t-il continué, n’est pas le cas de « certains groupes cybercriminels », dont les liens avec des officines étatiques ont pu être établis.

Plus généralement, l’espace cyber constitue un point d’attention pour la DRSD dans la mesure où il exacerbe, en quelque sorte, les menaces auxquelles elle doit faire face. Émanant des États, celles-ci vont de l’espionnage à l’ingénierie sociale, en passant par les attaques informatiques et la lutte informationnelle à des fins de déstabilisation ou de subversion.

Cependant, la réalité de l’espace cyber n’est pas la même du monde « physique ». Ainsi, s’agissant de l’espionnage, le général Susnjara a évoqué des actions « classiques » et de « bas du spectre » [survols de drones, vols d’ordinateurs et de téléphone, intrusions]. Ce risque s’est accru depuis le début de la guerre en Ukraine, la Russie s’intéressant de près aux formations délivrées aux soldats ukrainiens et aux exercices de l’Otan. Souvent, elle a recourt à des « agents peu qualifiés », a-t-il dit.

Mais au-delà de la compétition entre les États, marquée par une « désinhibition générale » de ces derniers pour agir au nom de leurs intérêts, le patron de la DRSD a pointé une autre menace : celle de la radicalisation de la société, « avec des groupuscules de plus en plus violents ». Radicalisation susceptible d’être instrumentalisée par des puissances étrangères.

« Historiquement, cette menace était liée à l’islam radical […]. Désormais, tous les mouvements idéologiques, religieux et politiques sont touchés par cette tendance de radicalisation : ultra-droite, ultra-gauche, verts radicaux, complotistes, etc. », a développé le général Susnjara.

Aussi, a-t-il continué, « aujourd’hui, notre point d’attention est la convergence des luttes entre différents types de groupuscules, à l’image de ce qui s’est passé récemment entre les groupuscules antimilitaristes et les mouvements pro-palestinens, qui ont par exemple ciblé un certain nombre d’entreprises de notre Base industrielle et technologique de défense ».

Ces mouvements radicaux se livrent à des activités subversives. « Ce que l’on constate » dans le domaine de la subversion, c’est qu’on a quelques actions de ces mouvances plutôt antimilitaristes, d’ultra-gauche ou pro-palestiniennes qui s’attaquent à la réputation et qui mènent des actions symboliques [tags sur les murs, tractage] », a détaillé le DRSD. Évidemment, de tels actes sont susceptibles de faire le jeu d’une puissance hostile à la France.

Mais, comme cela a pu être déjà observé au Royaume-Uni, où, par exemple, une usine de Teledyne CML Composites, qui produit des composants pour le chasseur-bombardier F-35, a été vandalisée par des militants de « Palestine Action » en octobre dernier, certains activistes se livrent aussi à des actions de sabotage.

Sur ce point, le général Susnjara a affirmé que, à ce jour, « il n’y a pas eu d’action étatique caractérisée ». En revanche, il a évoqué « certaines actions récentes, liées notamment à l’ultra-gauche, puisqu’elles ont été revendiquées sur un certain nombre de sites de cette mouvance », qui ont ciblé la BITD.

« La question que nous nous posons aussi, même si ça reste assez réduit, c’est la possible instrumentalisation, consciente ou non, de ces groupuscules par des acteurs étatiques qui y auraient un intérêt. C’est extrêmement complexe à caractériser. Mais c’est un point d’attention pour nous », a conclu le directeur du contre-espionnage militaire.

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