Le directeur du SRC, le mauvais élève
Un sondage du personnel donne une mauvaise note au directeur sortant du Service de renseignement de la Confédération (SRC), Christian Dussey, rapportent les journaux de Tamedia. Le SRC a perdu en termes de confiance par rapport à un sondage réalisé en 2023, selon les médias alémaniques qui ont consulté l'évaluation interne. Le dernier sondage a été réalisé l'année dernière. La proportion de ceux qui sont satisfaits de leur situation professionnelle a baissé en un an de 56% à 49%. Seuls 17% des collaborateurs estiment que les décisions importantes sont prises à temps au SRC.
Le Département de la défense, un empire au bord de l’implosion
La séquence dramatique que traverse le gros Département fédéral de la défense – 12 000 employés et 30 milliards de budget sur quatre ans – semble ne plus avoir de fin. Comme des dominos qui s’écroulent, les démissions de la ministre Viola Amherd, puis du commandant des Forces aériennes suisses, Peter Merz, et désormais du chef de l’armée, Thomas Süssli, et de celui du Service de renseignement, Christian Dussey, donnent une impression de chaos total, rarissime dans la Berne fédérale.
Le rapport du Contrôle fédéral des finances vient de dresser un bilan accablant de la gestion de Ruag MRO, entreprise d’armement en mains publiques, entre escroquerie, corruption et manque de transparence crasse. Des doutes toujours plus sérieux concernent certains achats, des drones israéliens jusqu’aux avions de combat F-35. Plus personne ne semble croire que les Américains livreront ces appareils aux conditions contractuelles, plus de 6 milliards pour 36 avions. Beaucoup pensent même qu’ils ne trouveront jamais le chemin de la Suisse. Tout cela et pléthore d’autres problèmes touchent directement à la sécurité du pays, quand l’avenir de l’OTAN est soudain incertain. Voilà pour le bilan effrayant du moment.
Acteurs peu bavards, contrôleurs peu curieux
Estourbis, les parlementaires cherchent des excuses ou des coupables, selon leur bord politique. Nombre d’entre eux pourtant, membres des Commissions de gestion et de politique de sécurité, avaient accès à des informations qui auraient dû les alerter. Idem avec les collègues de Viola Amherd. Les chefs successifs du Département des finances notamment, qui représente avec le DDPS les intérêts de la Confédération auprès de Ruag. Ou les chefs du DFAE et de Justice et Police, qui composent avec la Valaisanne la délégation de sécurité du Conseil fédéral. Beaucoup de possibilités de contrôler, de recadrer, mais très peu de questions. Vissée dans le XXe siècle, l’armée a surtout gardé un goût immodéré pour le mutisme, le manque de transparence, le déficit de communication. Une révolution culturelle est encore à mener.
Pourtant, le contexte international ne s’accommode plus du rythme helvétique. La Suisse doit pouvoir compter sur une armée forte et un Service de renseignement à la pointe. Les milliards que le parlement octroie à la défense du pays obligent. Il faut désormais un leadership fort et clair à la tête du DDPS, tout comme aux postes clés de la sécurité. Un leadership stratégique qui impose, quand le paquebot prend l’eau, que les responsables restent aux commandes.
Une "opportunité" pour le successeur de Viola Amherd
Jean-Daniel Ruch souhaite bon courage au successeur de Viola Amherd à la tête de DDPS, dont le nom sera connu – Markus Ritter ou Martin Pfister – le 12 mars prochain. "Je trouve en tout cas que c'est un défi formidable, parce qu'on a vraiment l'occasion d'un renouveau maintenant qu'on a fait table rase", déclare-t-il au micro de La Matinale, rappelant aussi les départs annoncés du chef de l'armée de l'air et du chef des processus d'acquisition des moyens aériens dans Armasuisse.
Il voit une opportunité de remodeler un système plus efficace et performant. "Cela passe avant tout par une réorientation stratégique", souligne-t-il, estimant qu’il était nécessaire de revenir sur les décisions prises ces dernières années visant à rapprocher la Suisse de l’Otan à toute vitesse.
Il insiste sur l’importance de l’allocation des ressources, un enjeu majeur selon lui, notamment dans l’utilisation des 30 milliards prévus. "Notre priorité devrait être d’encourager une production indigène, en particulier dans les technologies de pointe où nous disposons déjà de niches", insiste-t-il, ajoutant que la Suisse sait produire des drones civils. "Alors pourquoi ne pas développer des drones militaires?", interroge-t-il.
Par ailleurs, il estime qu’il est dans l’intérêt politique et stratégique du pays de renforcer sa coopération avec ses voisins sans nécessairement passer par l’Otan. Selon lui, des évolutions significatives sont en cours dans l’industrie de la défense, et la Suisse aurait tout à gagner à s’intégrer dans la dynamique européenne. "Cela représenterait un bénéfice non seulement en matière d’armement, mais aussi sur les plans industriel, technologique et politique", conclut-il.
Nicole Lamon