Des services secrets, nous ne savons que les échecs et rarement les succès. Si l'échec provoque l'anathème, l'ingratitude est fille de la victoire. Quand à la gloire, il faut l'oublier, elle est pour les autres...

jeudi 27 avril 2023

Mise en garde du SGRS: l'espionnage atteint des niveaux de la Guerre froide

 

Les activités d'espionnage et d'ingérence étrangère observées en Belgique ont atteint des niveaux qui n'avaient plus été atteints depuis la Guerre froide, affirme le "patron" du renseignement militaire, le vice-amiral Wim Robberecht, dans le premier rapport d'activités jamais publié, ce mercredi, par le Service général du Renseignement et de la Sécurité (SGRS).

"Les principales menaces qui pèsent sur la sécurité nationale sont, outre cette ingérence, l'extrémisme violent, le terrorisme et les activités cyber-malveillantes. A cela s'ajoute le retour de la guerre aux confins de l'Europe", ajoute-t-il en introduction.

Le document porte sur 2022, année de la création, au sein du SGRS, d'un "Cyber Command", précurseur d'une future 5e composante de l'armée belge, et de l'invasion russe de l'Ukraine.

"D'autres conflits plus lointains font peser un impact sur notre modèle sociétal. Force est de constater que le rythme des menaces ne fait que s'accroître; leurs effets touchent notre population, de près ou de loin. Au final, ces menaces font peser un danger direct sur notre régime démocratique", poursuit l'amiral Robberecht. Le rapport qualifie ces menaces d'"encore plus complexes, imprévisibles et multiples".

Selon son chef, la mission première du SGRS est de "protéger notre pays, nos entreprises et nos expatriés par nos renseignements", alors que son devoir envers la Belgique, la société et les citoyens est de "conseiller judicieusement les autorités".

"Nous sommes présents en appui des opérations militaires, dans la lutte contre l'espionnage et l'ingérence, la cyber-sécurité, la lutte antiterroriste, la lutte contre les extrémismes, la protection de nos ressortissants, la lutte contre la prolifération d'armes de destruction massive (ADM), la lutte contre les organisations sectaires ou criminelles ainsi que dans les domaines de la protection du potentiel économique et scientifique et des infrastructures vitales", résume encore le chef du SGRS.

Le Service général du Renseignement et de la Sécurité (SGRS)

Le SGRS, qui se dit "complémentaire" et "non concurrent" de la Sûreté de l'État (VSSE, le service de renseignement civil, compétent sur le territoire national), se concentre sur l'étranger et principalement sur les lieux où sont déployées des troupes belges.

En 2022, le service a traité 6.982 demandes d'informations venant de ses clients et partenaires, en hausse de 30,50% par rapport aux 5.350 demandes de 2021.

Les demandes d'informations envoyées vers des partenaires nationaux et internationaux ont pour leur part très sensiblement augmenté, de 60 à 320, soit une hausse de 433,33% par rapport à 2021.

Le nombre de "productions" du SGRS est quant à lui passé de 486 à 591 (+21,6%). Le rapport reste toutefois - sans surprise - muet sur les effectifs du SGRS, par crainte que des adversaires soient en mesure d'en déduire ses capacités.

Il indique que 69,7% de son personnel est militaire (et donc que 30,3% sont des civils) avec une majorité (51,6%) de francophones. En 2022, le SGRS a recruté 53 militaires et 26 civils en dépit de l'"indisponibilité criante" de profils de compétence adéquats sur le marché de l'emploi pour son Cyber Command.

Renforcer les effectifs

L'objectif de l'amiral Robberecht est de passer de "largement en dessous de mille" personnes actuellement à "largement plus de mille d'ici cinq ans" - sur des effectifs de près de 27.000 militaires et d'environ 1.610 civils actuellement employés par la Défense.

En juin 2021, dans la foulée de l'affaire Conings - du nom du caporal-chef Jurgen Conings aux idées d'extrême-droite dont la fuite avait provoqué une vaste chasse à l'homme en province de Limbourg - , le chef de la Défense (Chod), l'amiral Michel Hofman, avait lancé un appel urgent à tous les officiers et sous-officiers afin de venir renforcer rapidement les effectifs du SGRS, avec 81 fonctions ouvertes.

Le "Cyber Command" a été porté sur les fonts baptismaux le 19 octobre dernier. Il renforce les capacités de la Défense dans le cyberespace, un environnement virtuel, mais de plus en plus contesté comme le prouve la multiplication des attaques cybernétiques, notamment depuis le début de la guerre en Ukraine. Il est dirigé par le général-major Michel Van Strythem et "est appelé à grandir tout en restant dans le giron de la famille du renseignement et de la sécurité dont elle partage les missions mais aussi le cadre légal".

Le rapport explique que ce commandement "mène des opérations de sécurité et de renseignement dans le cyberespace et l'environnement électro-magnétique".

Le SGRS et la VSSE ont conclu un nouvel accord de coopération, le Plan stratégique national de Renseignement 2.0 (PSNR22).


Le logo du service est un hibou tricolore stylisé. Sa devise est "Quaero et Tego": "je demande" (j'enquête sur l'information) et "je protège" (l'information, les données).

vrt.be