Nous sommes le 26 mars 1956, et Juan Carlos Ier, l'ancien souverain d'Espagne désormais exilé au Emirats, vit ce qui restera la journée la plus macabre de sa vie. La famille a pris quelques jours de vacances à Estoril, au Portugal, pour célébrer la Semaine sainte. Lors d'un après-midi pluvieux, Juan Carlos, alors âgé de 18 ans, décide de jouer avec son petit frère Alfonso dans l'une des pièces de la maison, pour tuer l'ennui. Quelques minutes plus tard, les parents des deux garçons entendent un bruit de tir. Une balle est partie.
Alfonso, 14 ans, décède sur le coup, tué par une arme offerte en cadeau à leur père. Dans les médias espagnols, les versions de la sombre histoire diffèrent. Certains rapportent qu'Alfonso aurait appuyé lui-même sur la détente par inadvertance, laissant un Juan Carlos impuissant face au drame. D'autres affirment que Juan Carlos aurait tué accidentellement son petit frère. "Pendant que Son Altesse Alfonso nettoyait un revolver, cette nuit-là, avec son frère, un coup de feu a été tiré, l'a frappé au front et l'a tué en quelques minutes. L'accident s'est produit à 20h30, après le retour de l'enfant du service religieux du Jeudi Saint, durant lequel il avait reçu la Sainte Communion", dira la Couronne à l'époque dans un communiqué.
Une affaire étouffée
Dans les milieux monarchiques, le sujet restera tabou. La mort du fils de Juan de Borbón et María de Borbón ne sera que très rarement abordée en public. Sa mère dira à la suite de la disparition de son site : "Ce jour-là, ma vie s'est arrêté". "Les nobles d'Espagne, monarchistes dans l'âme, ont gardé le silence sur le mystère", dira une chronique dans Monarquía Confidencial. Après le décès d'Alfonso, María de Borbón passera un long séjour dans une clinique en Allemagne pour se remettre du drame.
Marqué par cette tragédie, Juan Carlos culpabilisait d’avoir causé la mort de son frère, un jeune homme pour qui il avait beaucoup d’estime. "Il me disait que son jeune frère était le plus brillant, le plus beau, le meilleur joueur de golf, le fils préféré de ses parents", a rapporté Corinna Larsen lors du deuxième épisode de son podcast. Et d’ajouter : "Juan Carlos est très dyslexique et, bien qu'il soit gaucher, il a été obligé d'écrire de la main droite. Il a été forcé d'obéir. Il avait l'impression que son jeune frère était vraiment la lumière qui brillait dans la famille."
Évidemment, de nombreuses rumeurs et théories ont été avancées pour expliquer cet accident obscur. Malgré la confusion, Corinna Larsen (ex-maîtresse de Juan Carlos) a tenu à rappeler la version de son ex-amant. "Clairement, ils jouaient à un jeu stupide. Dans tous les cas, il a chargé l'arme. Bien sûr, il n'y a jamais eu de véritable enquête, mais je pense qu'au fond de son âme et de sa tête, il se sent très coupable", a-t-elle souligné, avant de poursuivre : "Il fait des cauchemars à ce sujet. Je pense que ce qui l'a le plus traumatisé, c'est que la première réaction de son père a été de lui dire : 'Promets-moi que tu ne l'as pas fait exprès.' Je peux imaginer ce qu'il a dû ressentir, car cela signifiait que le père pensait qu'il avait délibérément tiré sur son frère." Le traumatisme d’une vie.