Des services secrets, nous ne savons que les échecs et rarement les succès. Si l'échec provoque l'anathème, l'ingratitude est fille de la victoire. Quand à la gloire, il faut l'oublier, elle est pour les autres...

mardi 3 novembre 2020

Projet d'attentat contre Emmanuel Macron : l'ultradroite dans le viseur de la DGSI

 

Alors que les services de renseignements sont mobilisés contre la menace terroriste islamiste, la Direction générale de la sécurité intérieure (DGSI) garde un œil sur les figures de l'ultradroite française. Les derniers attentats de Nice et de Conflans-Sainte-Honorine ont poussé le milieu du renseignement à resserrer ses dispositifs de surveillance autour de personnalités déjà connues, soupçonnées de vouloir s'en prendre à la communauté musulmane.

C'est dans ce contexte de très forte tension que la DGSI, saisie par un juge d'instruction dans le cadre d'une commission rogatoire, a procédé à une nouvelle interpellation dans le dossier dit des « Barjols », ce groupuscule démantelé en 2018 après avoir fomenté un coup d'État. Delphine T., aide-soignante à la retraite, a été sortie de son lit, mardi 3 novembre, par une escouade de fonctionnaires de police cagoulés. Elle a été dénoncée, lors d'un interrogatoire, par un homme qui avait déjà été interpellé dans le cadre de cette affaire. Ce dernier la désigne comme l'instigatrice de leurs projets.

Un profil Facebook vindicatif

Sur son profil Facebook, l'égérie du complotisme annonce la couleur. Un zoom sur ses yeux bleus en surimpression surmonte un cœur formé d'armes à feu : des revolvers, des pistolets, un ou deux fusils et une grenade. Delphine T. se présente comme une ancienne élève de Saint-Cyr Coëtquidan puis passée par l'Ensoa de Saint-Maixent, l'école des sous-officiers d'active de l'armée de terre, située dans les Deux-Sèvres.

Très présente sur le réseau social depuis au moins 2017, elle appelle régulièrement à « l'action » contre Emmanuel Macron et son gouvernement. Le chef de l'État est vilipendé, présenté comme le « poudré », réputé « faible avec les migrants et l'islam », mais qui tape « fort contre les Gilets jaunes ».

Pour Delphine T., les Gilets jaunes sont pusillanimes et leurs actions ne servent pas à grand-chose. « Tous ces pseudo-représentants des Gilets jaunes vous appelant à manifester, pour rien, ne visent qu'une place de député européen ou autre fonction bien au chaud et à vos détriments », écrivait-elle en décembre 2018. La retraitée les accuse de « gémir pour 22 centimes de plus sur les carburants et 30 euros de moins sur les salaires », et d'oublier que « la véritable précarité, vous la trouverez le soir à chercher à manger dans les poubelles ». « À vous de réagir, ou de mourir », concluait-elle.

Un projet flou

Quatre personnes, dont Jean-Pierre B., avaient été interpellées et mises en examen dans le cadre de l'affaire des « Barjols » en 2018. Deux autres personnes avaient été écrouées un an plus tard, en novembre 2019. Selon la DGSI, Delphine T. serait la onzième personne mise en cause dans ce dossier. Très actifs sur les réseaux sociaux, les Barjols avaient pris l'habitude d'organiser des week-ends sur le thème de la self-défense et des armes à feu, à l'occasion desquels ils étalaient leur haine des politiques, du « système », des migrants et des mosquées, des riches ou encore des francs-maçons.

Jusqu'à projeter une action violente contre le président de la République lui-même, en déplacement à Morhange, en Moselle, ce qui avait poussé la DGSI à agir. « T'es chaud le 5 pour choper la pute, il vient à Morange, là, je bous », avait ainsi lancé Michaëk I. à un de ses comparses, selon Europe 1. À l'aune des investigations menées depuis deux ans, leurs projets, révélés par Le Républicain lorrain, apparaissent cependant flous et décousus, et portés par des personnes dont certaines souffrent de problèmes psychiatriques. « J'ai fait le malin », avaient-ils dit devant le juge. « Ce ne sont que des paroles. »

lepoint.fr