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jeudi 26 novembre 2020

La Suisse aura un accès aux images prises par les satellites militaires d’observation français

 

En novembre 2018, la France et la Suisse ont renforcé leurs liens en matière de défense en signant un nouvel accord relatif « à la coopération bilatérale en matière d’instruction militaire ». Le texte tel qu’il a été rendu public ne donne pas beaucoup de détails sur les nouveaux champs de coopération entre les deux pays, si ce n’est qu’il évoque la lutte NRBC [nucléaire, radiologique, biologique et chimique], la cyberdéfense et l’espace.

Le projet de loi devant permettre de ratifier cet accord a été examiné puis adopté par la commission sénatoriale des Affaires étrangères et de la Défense en juillet dernier, l’Assemblée nationale ne s’étant pas encore prononcée. En tout cas, le rapport pour avis [.pdf] publié par le sénateur Édouard Courtial a permis d’en savoir plus au sujet des attentes de Berne dans le domaine spatial.

« La Suisse a […] souhaité collaborer dans le domaine du spatial militaire en manifestant son intérêt pour l’accès à des images satellite de haute qualité via une participation au nouveau système français de satellites d’observation militaire, dénommé ‘CSO’ [composante spatiale optique], élaboré à des fins de renseignements », indique ainsi M. Courtial.

Pour rappel, développée dans le cadre du programme MUSIS [Multinational Space-based Imaging System for Surveillance, reconnaissance and observation], la constellation CSO doit compter trois satellites.

En décembre 2018, CSO-1 a été mis en orbite, 800 km d’altitude par un lanceur Soyouz, depuis le Centre spatial guyanais [CSG]. Ce satellite de 3,5 tonnes, dit « manoeuvrant », permet d’obtenir des images à très haute résolution dans les domaines visible et infrarouge. CSO-2 aurait dû rejoindre son orbite à 480 km d’altitude en mai dernier, afin de fournir des images d’une « extrême haute résolution qui permettront d’atteindre des niveaux de détails jusque-là accessibles uniquement aux capteurs aéroporté. » Mais, faute de lanceur et en raison de la suspension des vols à Kourou, au printemps dernier, son lancement sera en retard par rapport au calendrier prévu. Enfin, conçu grâce à une participation financière de l’Allemagne, CSO-3 doit être mis sur orbite par une fusée Ariane 6 en 2021.

Actuellement, l’Allemagne [qui donnera un accès à la France à son satellite radar SARAH], la Belgique et la Suède [via un accès à la station polaire de Kiruna pour la réception des données] font partie de la « communauté CSO ». Et, pays non membre de l’UE, la Suisse va donc en faire partie.

Le 25 novembre, le Conseil fédéral [le gouvernement, ndlr] a en effet transmis au Parlement suisse un projet de loi visant à entériner le renforcement de la coopération avec la France, et donc à permettre à Berne d’avoir un accès aux satellites CSO.

Pour cela, une enveloppe de 82 millions de francs suisses a été demandée afin de financer les droits de programmation et l’installation d’une station de réception sur le territoire de la Confédération. Une contribution « assez modeste en comparaison du coût total du projet », fait valoir le Conseil fédéral.

« La Suisse se voit attribuer un droit de participation à la programmation des satellites. Ses commandes d’images et de données peuvent avoir une influence sur le programme, notamment sur les prises de vue des satellites CSO. Elle bénéficie aussi d’un accès à 2% des images prises quotidiennement ainsi qu’aux archives d’images du système, gérées par la France. En outre, un groupe de travail franco-suisse examinera quelles sont les options pour approfondir la collaboration sur les plans scientifiques et technologiques », précise le Conseil fédéral.

Cet accès au programme CSO permettra donc à la Suisse de disposer d’images « plus pertinentes et d’une meilleure résolution », ce qui, souligne le Conseil fédéral, renforcera son autonomie « pour ce qui touche à l’évaluation et à la prise de décision dans le domaine sécuritaire, ce qui est nécessaire vu la situation globale, en constante mutation. » En outre, poursuit-il, « ces données peuvent aussi s’avérer très utiles pour la promotion de la paix, l’aide en cas de catastrophe et les interventions humanitaires. »

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