En s’alliant avec les 14 autres pays asiatiques, l’Empire du Milieu étend son emprise sur l’économie mondiale. Cet accord souligne aussi la négligence dont ont fait preuve les Etats-Unis vis-à-vis de l’Asie du Sud et de l’Est, depuis 2016.
L’accord, baptisé RCEP, a été signé à l’issue d’un sommet qui s’est tenu à Hanoï et en vidéoconférence
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Depuis 2016 et l’élection de Donald Trump, les Etats-Unis n’ont pas seulement focalisé leur attention sur la Chine et ses prétendus méfaits pour l’économie américaine. Ils ont aussi négligé le reste de l’Asie.
L’ennemi préféré de la Washington trumpienne a su en profiter. Dimanche, 15 pays d’Asie et du Pacifique ont signé un important accord commercial, promu par la Chine, à l’occasion de la clôture d’un sommet virtuel qui avait débuté jeudi. Ce pacte est considéré comme la réponse chinoise à une initiative américaine abandonnée. En janvier 2017, Donald Trump avait retiré son pays du projet concurrent, le Traité de libre-échange transpacifique (TPP), promu par son prédécesseur démocrate Barack Obama.
Ce partenariat régional économique global, baptisé RCEP, devient l’accord commercial le plus important du monde. Ses membres réalisent 30% du produit intérieur brut (PIB) mondial. De plus, il concernera plus de 2 milliards d’habitants.
«Une étape majeure»
L’accord vise à créer une zone de libre-échange entre la Chine, le Japon, la Corée du Sud, l’Australie, la Nouvelle-Zélande et les dix pays de l’Asean (Association des nations de l’Asie du Sud-Est), dont font notamment partie l’Indonésie, la Thaïlande, Singapour, les Philippines ou encore le Vietnam.
L’accord prévoit des baisses de taxes à l’importation, une harmonisation des procédures douanières et inclut également des clauses sur le respect de la propriété intellectuelle. Il exclut en revanche tout ce qui touche à la protection des travailleurs et de l’environnement.
Cela n’empêche pas les divers analystes interrogés dimanche de saluer la signature de cet accord. Ce, d’autant plus que celui-ci intervient, huit ans après les premières discussions, alors que la pandémie de Covid-19 a plongé les dix pays membres de l’Asean dans une grave crise économique. «Une étape majeure pour la libéralisation du commerce et de l’investissement», résume Rajiv Biswas, économiste en chef pour l’Asie et le Pacifique de IHS Markit, cité par l’AFP «Il solidifie les ambitions de la Chine autour des nouvelles Routes de la soie», complète Alexander Capri, professeur à la Business School de l’Université nationale de Singapour.
Quelques déceptions
Cet accord, bien qu’historique, n’est toutefois pas exempt de déceptions et de défis. D’abord, l’Inde en est la grande absente. Elle devait également rejoindre ce pacte sans précédent, mais a décidé l’an dernier de s’en retirer par crainte de voir des produits chinois à bas prix envahir son marché. New Delhi a toutefois la possibilité de le rejoindre plus tard.
Ensuite, le poids de la Chine pourrait être problématique. «le RCEP n’a jamais été dirigé ou orienté par la Chine. C’est un accord de l’Asean, souligne Deborah Elms, directrice de l’Asian Trade Centre à Singapour, cité par le Financial Times. Mais lorsqu’il entrera en vigueur, ce sera difficile pour ces pays d’en rester les leaders.» L’experte souligne également l’incapacité des pays désormais partenaires à tomber d’accord sur des règles communes concernant les données et l’e-commerce.