Des services secrets, nous ne savons que les échecs et rarement les succès. Si l'échec provoque l'anathème, l'ingratitude est fille de la victoire. Quand à la gloire, il faut l'oublier, elle est pour les autres...

dimanche 16 juin 2019

Comment les forces spéciales françaises ont éliminé Yahia Abou-El-Hammam, alias Djamel Okacha


Le 21 février dernier, l’État-major des armées [EMA] annonçait que les forces françaises venait de « neutraliser » [c’est à dire éliminer] Yahia Abou-El-Hammam, alias Djamel Okacha, le chef d’al-Qaïda au Maghreb islamique [AQMI] pour le Sahara et « émir » de Tombouctou.

Le communiqué publié à cette occasion ne s’était pas attardé sur les détails de cette opération, si ce n’est que cette dernière avait combiné des « moyens motorisés et héliportés appuyés par un drone Reaper. » Lors de sa visite au 4e Régiment d’hélicoptères des forces spéciales [RHFS], à Pau, la ministre des Armées, Florence Parly, a raconté comment les forces spéciales française [Task Force Sabre] traquèrent ce chef jihadiste.

Ainsi, il était 13h13, ce jour-là, quand les hélicoptères emportant les commandos décollent. « C’est à Bou Djebeha, au Nord Mali » [à environ 200 km au nord de Tombouctou], a précisé Mme Parly.

Moins d’une heure plus tard, le pick-up à bord duquel se trouvait probablement la cible [et que l’on suppose avoir été suivi par au moins un drone MQ-9 Reaper], est répéré par les hélicoptères français. Le véhicule en rejoint deux autres. « Ce ne sont pas des seconds couteaux, c’est le convoi d’une cible majeure qui est en train de s’assembler », a commenté la ministre.

Seulement, le temps presse, les hélicoptères arrivant au bout de leur autonomie. C’est alors que s’engage une course-poursuite « épique » dans les dunes, à plus de 120 km/h.

Deux pick-up finissent toutefois par se rendre après des tirs de sommation. Les commandos sont alors mis à terre et capturent les terroristes. Quant aux hélicoptères, ils sont contraints de rentrer pour se ravitailler. Pour autant, il n’est pas question de laisser filer le troisième pickup. Et, comme l’a souligné Mme Parly, « il en faut plus pour pour arrêter les forces spéciales. »

Aussi, les commandos vont continuer la poursuite avec l’un des pickup pris à l’ennemi. « Ils le traquent assez longtemps pour donner ses coordonnées à un autre groupe commando qui finalement prend le relais et l’intercepte alors qu’il tente de se fondre dans un campement familial », a raconté la ministre.

C’est alors que la scène finale va se jouer. Se sentant pris au piège, les terroristes descendent de leur pickup et ouvrent le feu sur les commandos. Ces derniers ne leur laisseront aucune chance : ils seront « tous neutralisés ». Et parmi eux figurait donc Yahia Abou-El-Hammam.

« Les Maliens connaissaient les crimes d’Abou Yahia. Avec son groupe, il terrorisait la sous-région depuis longtemps. Nous le recherchions depuis six ans. Il était notamment le commanditaire du double attentat contre l’état-major de l’armée du Burkina Faso et contre notre ambassade à Ouagadougou en mars 2018, qui a fait près de 20 morts et plus de 80 blessés », a rappelé Mme Parly, avant de souligner que « sa neutralisation aura été une opération complexe, méticuleuse, de longue haleine ». Et, a insisté la ministre, elle a aussi été « un chef d’œuvre, en quelque sorte, d’opiniâtreté, d’audace, et de savoir-faire, qui nous vaudra l’admiration des spécialistes étrangers. »

Cela étant, les détails de la traque de chef d’AQMI resteront confidentiels. La ministre a toutefois évoqué des « opérations coup de poing, de filatures et de bien d’autres choses » qu’elle n’a pas souhaité dévoiler.

Une vingtaine de djihadistes «neutralisés»

Une opération conjointe de l'armée malienne et de la force française antidjihadiste Barkhane, dans le nord-est du Mali, a permis la «neutralisation» d'une vingtaine de djihadistes, ont annoncé samedi soir les forces armées maliennes. Les affrontements ont eu lieu à Akabar.

Un groupe de djihadistes, qui se fait appeler «Etat islamique dans le grand Sahara» (EIGS) est actif essentiellement dans la région de Ménaka, où a lieu l'opération, et de l'autre côté de la frontière avec le Niger. Il a notamment revendiqué l'attaque de Tongo Tongo, en octobre 2017 au Niger. Cette embuscade avait coûté la vie à quatre soldats américains et quatre militaires nigériens.

Le nord du Mali était tombé en mars-avril 2012 sous la coupe de groupes islamistes, en grande partie dispersés par une intervention militaire lancée en janvier 2013 à l'initiative de la France. Cette intervention se poursuit avec l'opération Barkhane, qui mobilise quelque 4500 militaires dans le Sahel.

Mais des zones entières du Mali échappent au contrôle des forces maliennes, françaises et de l'ONU, malgré la signature en 2015 d'un accord de paix censé isoler définitivement les djihadistes. Depuis 2015, les violences se sont propagées du nord vers le centre, voire parfois le sud. Elles se mêlent très souvent à des conflits intercommunautaires, un phénomène que connaissent également le Burkina Faso et le Niger voisins.