Des services secrets, nous ne savons que les échecs et rarement les succès. Si l'échec provoque l'anathème, l'ingratitude est fille de la victoire. Quand à la gloire, il faut l'oublier, elle est pour les autres...

samedi 9 décembre 2017

Pilatus, le "Dassault suisse" qui n'en finit pas de monter


Spécialiste des appareils d'entraînement et des avions d'affaires à hélices, l'avionneur suisse va livrer le premier jet de son histoire, baptisé PC-24. Gros plan sur un champion aéronautique méconnu.

Le jet d’affaires PC-24 a été certifié le 7 décembre, marquant l’entrée du constructeur suisse Pilatus, spécialiste des avions à hélices, sur le segment des appareils à réaction. Un investissement à 425 millions d’euros.
PILATUS AIRCRAFT LTD


Jour de gloire pour l'industrie aéronautique suisse. L'avionneur Pilatus, basé près de Lucerne, a obtenu jeudi 7 décembre la certification de son nouveau business jet, le PC-24, un appareil d'une dizaine de places et d'une portée de 3.600km. L'événement est d'importance : le PC-24 est le premier appareil à réaction de l'histoire du constructeur suisse, spécialiste reconnu des avions d'entraînement et des avions d'affaires à hélices. La certification a été obtenue deux ans et demi après le premier vol de l'appareil, en mai 2015, et quatre ans après le lancement du programme en 2013. Le premier appareil sera livré d'ici à la fin du mois au spécialiste américain des jets en propriété partagée PlaneSense.

Qui est Pilatus ? L'avionneur de Stans (808 millions de dollars de chiffre d'affaires en 2016, 2.000 salariés) est un peu, toutes proportions gardées, le Dassault suisse. Comme le groupe de Saint-Cloud, il est présent à la fois dans le civil (avions d'affaires) et le militaire (avions d'entraînement, de transport). Comme Dassault, il est réputé pour les qualités aérodynamique de ses avions et leur facilité de pilotage. Et s'il n'est pas détenu par une famille comme le fabricant du Rafale et des Falcon, il partage avec lui le goût de l'indépendance, avec un actionnariat constitué d'investisseurs suisses. Ceux-ci avaient envisagé de l'introduire en Bourse fin 2016, selon Reuters, mais le projet n'a toujours pas été lancé.

427 millions d'euros investis

Si Pilatus investit le segment des jets, c'est qu'il estime avoir un avantage comparatif décisif. L'idée du PC-24 est de proposer à la fois la vitesse d'un avion à réaction (815 km/h), et la flexibilité d'un turbopropulseur. Ce jet, comme l'appareil à hélices PC-12, peut décoller et atterrir sur des pistes courtes, voire des terrains sommaires en herbe ou en terre. Il peut ainsi être utilisé sur 21.000 aéroports dans le monde, soit deux fois plus que ses concurrents, selon le groupe. Pilatus a investi 500 millions de francs suisses dans le programme (427 millions d'euros investis), et 150 millions de francs suisses (128 millions d'euros) supplémentaires pour de nouveaux bâtiments et de nouvelles machines sur le site de Stans.

Pilatus sait qu'il aura fort à faire face aux deux leaders de ce segment de marché, le brésilien Embraer avec son Phenom 300, et l'américain Cessna, avec son Citation CJ4. Mais le groupe a d'ores et déjà réussi le lancement commercial de son appareil : le PC-24, facturé 9 millions de dollars pièce, a récolté 84 commandes dès son lancement. Pilatus a même décidé d'arrêter la commercialisation de l'avion le temps de boucler son développement. Celle-ci devrait reprendre en 2018. Le groupe de Stans, près de Lucerne (centre de la Suisse) a déjà huit appareils en cours d'assemblage, et compte en livrer 23 sur l'année 2018.

Fournisseur de l'armée de l'air française

Pilatus est un habitué des paris osés. Crée en 1939 comme prestataire de maintenance pour l'armée suisse, le groupe s'impose peu à peu comme un des leaders mondiaux des avions d'entraînement. Il lance en 1959, le PC-6, avion légendaire qu'il produit toujours, avant une retraite prévue en 2019. En 1994, il se lance sur le segment des avions d'affaires en mettant en service le PC-12. Ce mono-turbopropulseur se révèle un carton commercial, avec plus de 1.500 avions déjà livrés.

Pilatus est également un fournisseur de l'armée de l'air française. Le groupe va fournir 17 avions d'entraînement PC-21, en tant que sous-traitant du contrat Fomedec confié au britannique Babcock. Le premier avion doit être livré aux aviateurs français en 2018. Le PC-21 est déjà un bestseller : il a déjà été vendu à l'Arabie Saoudite, au Qatar, aux Emirats Arabes Unis, en Australie, au Royaume-Uni, à Singapour, en Jordanie et en Suisse.