jeudi 8 décembre 2016
La part des militaires parmi les personnels de la DGSE ne cesse de se réduire
Au cours de la période 2008-2013, la DGSE (Direction générale de la sécurité extérieure) avait vu ses effectifs augmenter de 616 personnels. Et cette tendance sera accentuée dans le cadre de Loi de programmation militaire (LPM) en cours puisque, d’ici 2019, le Boulevard Mortier gagnera, au total, 797 postes supplémentaires (+281 en LPM initiale, +140 en LPM actualisée, +185 après les attentats de janvier 2015 et +191 en avril 2016).
Depuis 2008, la structure du personnel de la DGSE a donc subi de grandes évolutions. Hormis le service action, la « Piscine » comptait ainsi, au 30 juin 2016, 25,1% de militaire et 74,9 de personnel civils (dont 48,1% de fonctionnaires et 26,7 de contractuels).
Dans le détail, le nombre de postes occupés par des officiers ou bien des fonctionnaires de catégorie A (ou assimiliés) a augmenté de 42,4% entre 2008 et 2016. Même chose pour les sous-officiers et les fonctionnaires de catégorie B, mais dans une proportion nettement moindre (+14,3%). Dans le même temps, les effectifs des militaires du rang et du personnel de niveau C ont diminué de 9,9%.
Désormais, la DGSE compte 43% d’officiers et de fonctionnaires de catégorie A, la part des militaires du rang et des fonctionnaires de niveau B étant passée en deçà des 25%.
Cela « traduit bien l’évolution des profils d’emplois au sein du service et notamment l’évolution vers l’emploi de personnels plus qualifiés et plus diversifiés que les statuts de la fonction publique ou de la fonction militaire ne permettent pas de recruter, sans compter l’effet des réductions d’emplois au sein des armées qui ont réduit ces dernières années les capacités de mobilité des personnels militaires », ont commenté les André Trillard et Jeanny Lorgeoux, auteurs d’un rapport budgétaire intitulé « Défense : environnement et prospective de la politique de défense. »
Et c’est ce qui explique le recours toujours plus important aux contractuels, leur part dans les effectifs de la DGSE étant passée de 17,5% à 26,7% en 8 ans. Ces derniers interviennent surtout dans les domaines liés aux langues rares, à l’informatique et aux mathématiques.
« Cette évolution est pour une large partie le corollaire de la diversification des profils recherchés qui ne s’intègrent pas dans les différents cadres de la fonction publique, mais également de la souplesse nécessaire pour rémunérer certains spécialistes pour lesquels les niveaux de rémunération servis dans le secteur privé sont sans commune mesure avec ceux susceptibles d’être appliqués au titre des grilles indiciaires de la fonction publique », ont expliqué les deux rapporteurs.
Seulement, cette tendance fait que, toujours si l’en excepte le Service action, la DGSE est en train de se « démilitariser » progressivement. Ainsi, le rapport note que la part des militaires parmi le personnel de la DGSE est passée de 29,3% en 2008 à 25,1% en 2016. « Si l’on s’en tient aux projections établies conformément à la trajectoire de la LPM, la proportion de personnel militaire devrait atteindre 24,5 % en 2019 mais si l’on prolonge la tendance observée depuis plusieurs années, cette proportion pourrait être plus proche de 20% », font observer les deux sénateurs.
Le recours de plus en plus important aux contractuels ayant des compétences rares explique en partie cette évolution. Mais pas seulement.
« La politique de déflation mise en oeuvre dans les armées au cours des dernières années, et avant d’être récemment stoppée, s’est traduite par une raréfaction de cette ressource [militaire, ndlr] au moment où les besoins de spécialistes techniques et scientifiques, mais également du renseignement, était en forte croissance. De facto, les armées rencontrent de plus en plus de difficultés à honorer leurs contrats d’objectifs », font valoir MM. Trillard et Lorgeoux.
Alors que le DGSE est attachée à sa mixité « civilo-militaire », cette érosion, avancent les sénateurs, « risque de se poursuivre dans les prochaines années en raison de la sociologie des nouveaux recrutements, mais également de la difficulté des Armées à pourvoir les postes de spécialistes auprès d’employeurs multiples ». Et cela d’autant plus que le Boulevard Mortier « fait également face à un taux d’attrition plus fort, lié à la volatilité de la ressource spécialisée recrutée. » Aussi cette évolution risque d’affecter son identité alors qu’il relève du ministère de la Défense.