Les talibans ont revendiqué jeudi soir une attaque meurtrière contre le consulat allemand de Mazâr-e Charîf, dans le nord de l'Afghanistan, « en représailles » après la mort de civils dans une frappe de l'Otan la semaine dernière à Kunduz. L'attaque au camion-suicide, apparemment de très forte puissance, a fait au moins 2 morts et 84 blessés, dont 10 enfants, répartis dans deux hôpitaux, selon un bilan fourni dans la nuit par le responsable de l'hôpital régional, le Dr Noor Mohammad Fayez. Le responsable de la police locale, Sayed Kamal Sadat, a indiqué à l'Agence France-Presse avoir envoyé des renforts sur place pour obtenir davantage d'informations sur l'opération, tandis que les ambulances se précipitaient sur place toute sirènes hurlantes.
Les responsables allemands à Mazâr-e Charîf, où la Bundeswehr était déployée jusqu'en 2014, et Kaboul n'avaient pu être joints dans l'immédiat. Mais une source diplomatique à Berlin a annoncé que le ministre allemand des Affaires étrangères, Frank-Walter Steinmeier, avait convoqué une réunion de crise à son cabinet à 21 h 30 GMT. Le porte-parole taliban Zabihullah Mujahid, qui a revendiqué « l'opération martyre » dans un communiqué, a également affirmé que des « assaillants » avaient pénétré dans l'enceinte du bâtiment pour y poursuivre l'attaque, mais ceci n'a pas été confirmé de sources indépendantes, même si des habitants voisins du consulat, installé dans un ancien hôtel, l'Hôtel Mazar, ont fait état d'échanges de tirs sur les réseaux sociaux.
Victimes civiles
La zone était entièrement ceinturée par les forces de l'ordre envoyées en renforts et des hélicoptères survolaient le centre-ville et le quartier abritant le consulat, a constaté le correspondant de l'Agence France-Presse, qui a également entendu quelques tirs. Selon lui, le souffle de l'explosion, par sa violence, a brisé toutes les vitres « dans un rayon de plusieurs kilomètres » et réveillé les habitants qu'il a entendu pleurer et hurler de frayeur. La plupart des blessés l'ont d'ailleurs été par des éclats de vitres brisées, selon le Dr Fayez. Certains habitants ont également rapporté avoir entendu une seconde explosion, mais celle-ci a été démentie par les autorités.
Les insurgés ont expliqué que l'attentat a été conduit « en représailles » aux frappes aériennes américaines le 3 novembre sur Kunduz (Nord-Est), qui ont fait au moins 32 tués et 19 blessés parmi les civils, dont de nombreux femmes et enfants, et détruit 22 maisons, selon l'ONU. Cette nouvelle bavure des forces américaines déployées sous mandat de l'Otan dans le cadre de l'opération Resolute Support a provoqué des manifestations de colère parmi la population. L'armée américaine a reconnu que ses frappes avaient « très probablement » fait des victimes civiles et exprimé « ses regrets », mais la Mission des Nations unies en Afghanistan (Manua) a annoncé qu'elle avait lancé sa propre enquête.
Mazâr-e Charîf est considérée comme l'une des grandes villes les plus paisibles du pays en proie aux offensives répétées des talibans. Mais elle abrite également l'une des trois principales bases des forces aériennes afghanes en cours de reconstitution avec l'aide de l'Otan. Les forces aériennes, américaines et afghanes sont régulièrement sollicitées pour appuyer les opérations des forces afghanes au sol contre les insurgés talibans et ceux du groupe État islamique dans l'est. Mais l'ONU a récemment dénoncé la très forte augmentation (+ 72 % en un an) des victimes collatérales de ces frappes.
AFP