Des services secrets, nous ne savons que les échecs et rarement les succès. Si l'échec provoque l'anathème, l'ingratitude est fille de la victoire. Quand à la gloire, il faut l'oublier, elle est pour les autres...

samedi 7 février 2015

Al-Wahichi, le stratège du mal


Son organisation a revendiqué l’attentat contre "Charlie Hebdo". L'un des frères Kouachi se serait entraîné dans ses camps. Aujourd'hui, le chef opérationnel d'Aqpa exhorte tous ses adeptes à assassiner les Occidentaux.

(Prime de 10 millions de dollars)

Nasser Al-Wahichi, en avril 2012. (STR/AFP)
Date de naissance: 1 octobre 1976
Nationalité: Yemen
Alias: Abu Basir Nasir al-Wahishi, Naser Abdel Karim al-Wahishi, Nasir Abd al-Karim al-Wuhayshi, Abu Basir Nasir al-Wuhayshi, Abu Basir Nasser al-Wuhishi, Nasser Abdul-Karim Abdullah al-Wouhichi, Abu Baseer al-Wehaishi



Au cours de l’été 2013, les services de renseignement américains interceptaient une inquiétante conférence par internet de tout l’état-major des affidés d’Al-Qaida. Dans ce conseil d’administration du terrorisme, les hommes les plus recherchés de la planète communiquent entre eux : les dirigeants d’Aqmi, au Maghreb, les talibans pakistanais, les membres de l’organisation dans le Sinaï en passant par les leaders de Boko Haram.

Pendant cette réunion au sommet, Ayman al-Zawahiri, le successeur de Ben Laden, nomme le chef d’Al-Qaida dans la Péninsule arabique (Aqpa), un certain Nasser al-Wahichi, Ma’sul al-Amm, directeur général des opérations d’Al-Qaida. C’est-à-dire numéro deux de l’internationale terroriste. A la suite de cette conférence, le département d’Etat américain juge la menace assez sérieuse pour fermer une vingtaine de ses ambassades et consulats dans la région. Et révise complètement son analyse qui avait un peu vite enterré le groupe terroriste de Ben Laden…

Informations permettant de mener en justice Nasir al-Wahishi 

Nasir al-Wahishi s'est proclamé comme le leader d'al-Qaida dans la péninsule arabique (AQAP) en janvier 2009. Le communiqué de presse dans lequel al-Wahishi a annoncé la ré-émergence de l'AQAP a également noté que les militants saoudiens du groupe avaient fait allégeance à Al-Wahishi comme leur nouveau chef. Depuis lors, al-Wahishi a apporté un soutien important pour les opérations terroristes de l’AQAP et a travaillé avec des agents de l’AQAP pour l’organisation d’attaques. En tant que leader de l'AQAP, al-Wahishi est responsable de l'approbation des objectifs, du recrutement de nouveaux membres, de l'allocation de ressources à la formation et à la planification d'attaque ainsi que de l’attribution d’autres tâches confiées à diverses personnes pour mener à bien des attaques.

En 2013, al-Wahishi a été désigné par le chef d'Al-Qaïda Ayman al-Zawahiri comme son adjoint.

Le Département d'Etat américain a désigné Nasir al-Wahishi comme terroriste mondial spécialement désigné en vertu du décret 13224 en janvier 2010.

Pour le renseignement militaire américain, Daesh est encore loin d’éclipser al-Qaïda

Malgré une certaine proximité idéologique, l’État islamique (EI ou Daesh) et al-Qaïda (au sens large, c’est à dire en prenant en compte ses différentes branches) sont des organisations concurrentes qui ne partagent pas les mêmes objectifs.

Ainsi, l’une de leurs différences est que Daesh cherche à contrôler un territoire (d’où l’instauration d’un califat) alors que ce n’est pas forcément le cas d’al-Qaïda.

« Cette dernière n’a jamais voulu gérer de territoires : elle a été ‘accueillie’ par les taliban ou le réseau Haqqani [ndlr, organisation active dans l'est de l'Afghanistan et implantée dans le Nord-Waziristan, au Pakistan]. AQPA [ndlr, al-Qaïda dans la péninsule arabique] et AQMI [al-Qaïda au Maghreb islamique] gèrent des territoires mouvants en fonction des interventions militaires occidentales ou locales mais l’idée demeure de frapper les Occidentaux », a confié Yves Trotignon, analyste sénior chez Risk&Co, au mensuel DSI.

Dans la nébuleuse d’al-Qaïda, l’on compte également le Front al-Nosra, sa branche syrienne. Or, pendant que l’attention se focalise sur l’État islamique, ce dernier a gagné du terrain au cours de ces derniers mois. Telle est, en tout cas, l’estimation faite par le lieutenant-général Vincent R. Stewart, récemment nommé à la tête de la  Defense Intelligence Agency (DIA), l’agence de renseignement du Pentagone, et dont les propos ont été rapportés par The Long War Journal.

Et cette tendance devrait se poursuivre cette année. D’où la préoccupation du DIA de voir le Front al-Nosra, qui, en outre, étend ses opérations au Liban, avoir toute la latitude nécessaire pour permettre à ses combattants de « planifier des attaques contre l’Occident ». D’ailleurs, la branche syrienne d’al-Qaïda compte le groupe « Khorasan », dont l’ambition est justement de frapper les intérêts occidentaux.

Cette entité a d’ailleurs été visée par les forces américaines en septembre dernier. Mais selon le lieutenant-général Stewart, si les frappes ont « probablement tué un certain nombre de responsables d’al-Nosrah et du groupe Khorasan, ce dernier a certainement maintenu sa capacité à planifier des attaques contre les intérêts occidentaux ».

Par ailleurs, en Afghanistan, et en raison de leurs faiblesses structurelles, le DIA ne voit pas les forces de sécurité afghanes prendre le dessus sur le mouvement taleb et ses alliés. Certes, elles devraient garder le contrôle des centres urbains et des grands axes de communication mais elles ne pourront pas contrer l’influence de ces derniers dans les zones rurales.

Mais « les taliban, al-Qaïda et leurs alliés extrémistes vont probablement chercher à exploiter le retrait de la coalition [ndlr, de la Force internationale d'assistance à la sécurité, de l'Otan] dans les zones rurales, à mener des attaques très médiatisées dans les grands centres urbains et à étendre leurs refuges », a averti le lieutenant-général Stewart. Cela dit, c’est déjà le cas…

Quoi qu’il en soit, le DIA redoute qu’al-Qaïda reconstitue ses sanctuaires afghans, comme avant l’intervention occidentale d’octobre 2001. En outre, même si l’État islamique tente de s’implanter dans cette région, il ne parvient pas, du moins pour le moment, à éclipser l’organisation fondée par Oussama Ben Laden. Plus généralement, cette dernière garde la mainmise sur ses « affiliés », comme par exemple au Yémen, où la situation politique risque de compliquer les opérations anti-terroristes. Et les ralliements à l’EI de quelques commandants taliban (qu’ils soient pakistanais ou afghans) restent pour l’instant marginaux.

Cela étant, le lieutenant-général Stewart a relevé que le réseau international de l’EI tend à s’étoffer et représente une menace croissante, comme en Libye et dans le Sinaï (Égypte).

TF121