"Bonsoir Mr le sénateur, sachez qu'il n'est pas trop tard, il est encore possible de discuté (sic)... ou vous risquez de tout perdre, et la mairie et votre place au Sénat, faite moi confiance je sais de quoi je parle..." Ce texto authentique, fautes d'orthographe comprises, envoyé le 20 novembre à Serge Dassault, le sénateur UMP et ancien maire de Corbeil-Essonnes, annonce la couleur. La veille de Noël, les maîtres-chanteurs récidivent de manière explicite : "Pour vous souhaiter un bon Noël, sachez qu'une plainte sera déposée contre vous même, Riad Ramzi, JP Bechter, pour tentative d'enlèvement avec l'aide d'un État étranger, le 3 janvier. Il n'y a que vous qui puissiez arrêter l'engrenage de cette histoire qui sera votre fin."
Le 26 décembre, les corbeaux s'impatientent : "Votre avocat ne vous conseil pas au mieux de vos intérêts, sachez que nous pouvons encore tout stopper definitivement avant le 3 janvier date limite. il ne tient qu'à vous qu'une paix définitive soit faite, tout est entre vos mains il ne reste que 9 jours faites preuve d'intéligence nous sommes à votre service..."
Une signature : René
Le 3 janvier, un nouveau SMS implore l'avionneur : "Juste une discution à coeur ouvert en tete à tete comme nous le faisions par le passe. Je retirerais tout mes habits si vous le desirez. juste une paix amicale et definitive, je suis fatiguè..bien respectueusement, celui qui ne demande que d'etre votre ami". Cette fois, le message est signé : René.
Comme René Andrieux ? Cet ancien braqueur harcèle depuis deux ans Serge Dassault et Jean-Pierre Bechter, l'actuel maire de Corbeil. Il est surtout l'acolyte de Fatah Hou, à l'origine de la plainte qui vise Serge Dassault et qui est présenté comme la victime d'une tentative d'assassinat perpétrée, en février 2013, par Younès Bounouara, un proche de Serge Dassault. Ce dernier avait confié au Point qu'il avait été menacé par Fatah Hou et René Andrieux et qu'il avait dû tirer pour se défendre, blessant Fatah Hou.
Écoutes
Une information judiciaire avait été ouverte. Les magistrats chargés de l'enquête avaient refusé à René Andrieux la possibilité de se porter partie civile dans la mesure où il n'avait subi aucun préjudice.
Quoi qu'il en soit, dans ses SMS, "René" avait vu juste : c'est bien le 3 janvier que Me Marie Dosé, avocate de Fatah Hou, a déposé une plainte contre Serge Dassault, Jean-Pierre Bechter, Younès Bounouara et Riad Ramzi pour association de malfaiteurs en vue de la préparation d'un crime ou d'un délit. Selon le plaignant, les quatre hommes auraient projeté de porter atteinte à son intégrité physique. C'est à partir de l'écoute de la ligne téléphonique de Jean-Pierre Bechter, branchée dans le cadre de l'information judiciaire ouverte pour tentative d'homicide que le défenseur de Fatah Hou a décidé de déposer plainte.
Coïncidences ?
Lors de ces discussions, on apprend que le maire de Corbeil a pris l'initiative de discuter avec un diplomate marocain, Riad Ramzi, afin qu'il intervienne dans les différends qui opposent l'équipe de Serge Dassault à Fatah Hou et ses amis. Dans l'entourage de Jean-Pierre Bechter, on ne nie pas avoir eu recours à un intermédiaire, en l'occurrence un diplomate marocain, pour intervenir comme "médiateur" afin de faire cesser "le harcèlement dont les amis de Fatah Hou se rend[aient] coupables contre nous". Une méthode pour le moins étonnante s'agissant d'un citoyen français...
"Je ne suis pas au courant de l'envoi de ces SMS", plaide Me Marie Dosé au Point.fr. Cela ne concerne pas mon client." Ce serait donc un hasard si les textos demandent l'ouverture de discussions avant le dépôt de plainte. Un hasard aussi si le mystérieux expéditeur des SMS connaît les noms des personnes visées par la plainte, notamment celui du diplomate marocain...