Après les révélations faites par l’ancien consultant de la National Security Agency (NSA) Edward Snowden, selon lesquelles les services de renseignement américains ont l’oreille indiscrète sous couvert de lutte contre le terrorisme, les responsables de l’Union européenne ont vivement réagi.
“Au nom du parlement européen, j’exige tous les éclaircissements et demande aux autorités américaines de fournir rapidement un complément d’informations concernant ces accusations”, a ainsi affirmé Martin Schulz, le président allemand du Parlement européen, pour ne citer que lui.
En France, où l’on appris que l’ambassade à Washington et la représentation diplomatique auprès des Nations unies à New York faisaient l’objet d’une attention toute particulière des grandes oreilles américaines, via les programmes “Wabash” et “Blackfoot”, les réactions des responsables politiques sont tout aussi indignées.
C’est un “acte d’hostilité inqualifiable” pour Christine Taubira, ministre de la Justice. Des activités d’espionnage “inacceptables” pour Laurent Fabius, le chef du Quai d’Orsay. Et cette affaire aura eu le mérite de mettre d’accord des personnalités venues d’horizons politiques opposés.
Il faut “dénoncer tous les accords” de l’UE avec les Etats-Unis, pour le député européen Daniel Cohn-Bendit. Au Front national, Marine Le Pen demande l’arrêt des négocations sur le projet de libre-échange ainsi que l’octroi de l’asile politique à Edward Snowden, l’homme par qui le scandale est arrivé. Idem pour Jean-Luc Mélenchon du Front de gauche et les écologistes.
D’autres responsables ont eu des réactions nettement plus mesurées, comme Mme le ministre de l’Economie numérique, Fleur Pellerin, qui a relativisé l’affaire en affirmant que “ce n’est pas vraiment la première fois que cela arrive” et que “ce même type d’évènement” s’est produit “pendant la guerre d’Irak.” Député socialiste et spécialiste des question de cybersécurité, Eduardo Rihan Cypel a probablement eu le ton le plus juste en affirmant que “la France et l’Europe doivent se doter d’armes, se donner les moyens techniques pour parer aux tentatives de pénétrations et d’espionnage informatique qui sont en premier lieu le fait des Etats-Unis”, notamment dans le domaine commercial.
En vérité, ignorer – ou feindre de le faire – que les Etats-Unis cherchent à intercepter les communications des uns et des autres, et cela depuis au moins 1947, année du lancement du programme Echelon, relève soit de la plus grande naïveté, soit de la plus basse hypocrisie. Car tout le monde écoute tout le monde. La seule différence, mais elle est de taille, est que Washington y met plus de moyens que les autres.
Le Royaume-Uni, via le Government Communications Headquarters (GCHQ), spécialisé en la matière, ne se prive pas pour le faire. Et selon The Guardian, citant Edward Snowden, les Britanniques “seraient pires que les Américains”. Ainsi, ils ont espionné sans vergogne les délégations étrangères du sommet du G-20 de Londres, en 2009, en surveillant les appels téléphoniques émis et reçus ou en plaçant des mouchards dans les ordinateurs afin d’intercepter les e-mails.
Mieux encore, le GCHQ aurait même accès aux câbles transatlantiques à fibres optiques qui permettent le trafic internet et les appels téléphoniques, grâce à des accords secrets avec des entreprises privées. Les données recueillies seraient ensuite “partagées” avec la NSA.
Quoi qu’il en soit, le gouvernement allemand a demandé des explications à son homologue britannique au sujet de ces révélations. Mais Berlin n’est pas le mieux placé pour donner des leçons. Selon Der Spiegel, le principal service de renseignement d’outre-Rhin, le BND, détournerait, à des fins de “surveillance”, près de 5% du trafic Internet du Deutscher Commercial Internet Exchange de Francfort, l’un des points d’échange parmi les plus importants en Europe. Là, ce sont potentiellement 50 pays qui pourraient être visés. Et encore, il est question d’étendre davantage ce programme, en allouant 100 millions d’euros supplémentaires dans les 5 prochaines années.
Et la France dans tout ça? Eh bien elle n’est pas en reste. Fort heureusement serait-on tenté d’écrire. Car elle a payé pour apprendre. C’est d’ailleurs la raison pour laquelle le Secrétariat général de la défense et de la sécurité nationale a demandé à Thales de développer le Teorem (Téléphone cryptographique pour réseau étatique et militaire) afin d’éviter les oreilles indiscrètes.
La France ne manque pas de moyens pour écouter les autres. Passons sur le navire Dupuy de Lôme, de la Direction du renseignement militaire (DRM) dont la vocation est plus axée sur les informations à caractère opérationnel. La Direction générale de la sécurité extérieure (DGSE) dispose par exemple de sa base de Domme (Dordogne) dont les antennes n’ont pas été installées pour égayer la campagne périgourdine. Et, comme ses homologues britanniques et américains, elle peut aussi avoir accès aux câbles sous-marins à fibre optique. C’est d’ailleurs bien pour cette raison que Paris entend “sécuriser” une entreprise comme Alcatel Submarine Newtworks.
Le 14 janvier 2013, dans les colonnes du quotidien Les Echos, Fleur Pellerin expliquait que le savoir-faire de cette entreprise était “unique”. “Il couvre la production, l’installation et la maintenance des câbles sous-marins. C’est une activité stratégique pour connecter l’outre-Mer et tout le continent africain au haut-débit”, avait-elle avancé. Et de livrer sans nul doute le plus important : “Il y a un enjeu lié à la cybersurveillance et à la sécurité du territoire. Nous sommes favorables à une solution qui maintienne l’intégrité d’ASN dans son ancrage national.” Et pour cause…
Quant à l’espionnage entre Français et Américains, il ne date pas d’aujourd’hui. Dans les années 1960, alors que le général de Gaulle était à l’Elysée, la CIA, qui se doutait que dernier ne serait pas un allié commode et s’inquiétait de sa politique à l’égard de l’Otan, avait placé une “taupe” au Quai d’Orsay, laquelle la renseignait le plus régulièrement possible. En mars 2006, l’on apprenait, grâce à des documents déclassifiés, que les Etats-Unis s’intéressaient de près au développement de la bombe nucléaire française, et cela dès la fin des années 1950 jusqu’au milieu des années 1970. Sans doute que cette surveillance s’est poursuivie par la suite… Le tout, avec l’aide de la Nouvelle-Zélande afin d’espionner les installations de Mururoa.
Autre affaire : celle de l’expulsion de France, décidée par le ministre de l’Intérieur de l’époque, Charles Pasqua, du chef d’antenne de la CIA à Paris, pour une histoire d’espionnage économique. De leur côté, les services français ne se privaient pas pour surveiller les hommes d’affaires américains de passage sur le territoire…
Enfin, plus récemment, l’hebdomadaire L’Express a révélé que des intrusions dans les systèmes informatiques de l’Elysée avaient une origine américaine. Un espionnage à sens unique? Sans doute pas… Dans un rapport du National Intelligence Estimate ayant fait l’objet de fuites dans la presse d’outre-Atlantique, l’on apprenait que, outre la Chine, la Russie, Israël et… la France faisaient partie des pays les plus actifs en matière de cyberespionnage pour récupérer des informations sensibles aux Etats-Unis.
En mai 2010, l’amiral Dennis C. Blair démissionna de ses fonctions de directeur national du renseignement. La raison? Il souhaitait signer un pacte avec la France pour mettre fin aux opérations d’espionnage des deux côtés de l’Atlantique. Ce que l’administration Obama refusa. Aussi, l’on ne peut pas dire, surtout en France, que l’on n’était pas prévenu!
La France ne manque pas de moyens pour écouter les autres. Passons sur le navire Dupuy de Lôme, de la Direction du renseignement militaire (DRM) dont la vocation est plus axée sur les informations à caractère opérationnel. La Direction générale de la sécurité extérieure (DGSE) dispose par exemple de sa base de Domme (Dordogne) dont les antennes n’ont pas été installées pour égayer la campagne périgourdine. Et, comme ses homologues britanniques et américains, elle peut aussi avoir accès aux câbles sous-marins à fibre optique. C’est d’ailleurs bien pour cette raison que Paris entend “sécuriser” une entreprise comme Alcatel Submarine Newtworks.
Le 14 janvier 2013, dans les colonnes du quotidien Les Echos, Fleur Pellerin expliquait que le savoir-faire de cette entreprise était “unique”. “Il couvre la production, l’installation et la maintenance des câbles sous-marins. C’est une activité stratégique pour connecter l’outre-Mer et tout le continent africain au haut-débit”, avait-elle avancé. Et de livrer sans nul doute le plus important : “Il y a un enjeu lié à la cybersurveillance et à la sécurité du territoire. Nous sommes favorables à une solution qui maintienne l’intégrité d’ASN dans son ancrage national.” Et pour cause…
Quant à l’espionnage entre Français et Américains, il ne date pas d’aujourd’hui. Dans les années 1960, alors que le général de Gaulle était à l’Elysée, la CIA, qui se doutait que dernier ne serait pas un allié commode et s’inquiétait de sa politique à l’égard de l’Otan, avait placé une “taupe” au Quai d’Orsay, laquelle la renseignait le plus régulièrement possible. En mars 2006, l’on apprenait, grâce à des documents déclassifiés, que les Etats-Unis s’intéressaient de près au développement de la bombe nucléaire française, et cela dès la fin des années 1950 jusqu’au milieu des années 1970. Sans doute que cette surveillance s’est poursuivie par la suite… Le tout, avec l’aide de la Nouvelle-Zélande afin d’espionner les installations de Mururoa.
Autre affaire : celle de l’expulsion de France, décidée par le ministre de l’Intérieur de l’époque, Charles Pasqua, du chef d’antenne de la CIA à Paris, pour une histoire d’espionnage économique. De leur côté, les services français ne se privaient pas pour surveiller les hommes d’affaires américains de passage sur le territoire…
Enfin, plus récemment, l’hebdomadaire L’Express a révélé que des intrusions dans les systèmes informatiques de l’Elysée avaient une origine américaine. Un espionnage à sens unique? Sans doute pas… Dans un rapport du National Intelligence Estimate ayant fait l’objet de fuites dans la presse d’outre-Atlantique, l’on apprenait que, outre la Chine, la Russie, Israël et… la France faisaient partie des pays les plus actifs en matière de cyberespionnage pour récupérer des informations sensibles aux Etats-Unis.
En mai 2010, l’amiral Dennis C. Blair démissionna de ses fonctions de directeur national du renseignement. La raison? Il souhaitait signer un pacte avec la France pour mettre fin aux opérations d’espionnage des deux côtés de l’Atlantique. Ce que l’administration Obama refusa. Aussi, l’on ne peut pas dire, surtout en France, que l’on n’était pas prévenu!