Des services secrets, nous ne savons que les échecs et rarement les succès. Si l'échec provoque l'anathème, l'ingratitude est fille de la victoire. Quand à la gloire, il faut l'oublier, elle est pour les autres...

samedi 25 mai 2013

Les 50 propositions d'Hassan al-Banna, fondateur des Frères musulmans


Interdire tout contact gestuel entre hommes et femmes, éduquer les jeunes à la ferveur de la guerre sainte... Le programme des Frères musulmans datant de 1936 n'a jamais été remis en cause par la confrérie.

L'Égyptien Amr Elshourabi, docteur en sciences politiques de la Sorbonne et auteur des Frères musulmans des origines à nos jours, explique que la confrérie a construit deux niveaux de conception à l'intérieur de leur système doctrinal. Le premier est pacifique, et en harmonie avec la perception réaliste du quotidien. Le second "oeuvre à préparer les militants du mouvement pour le moment de l'affrontement futur dans le but de construire une nation islamique et d'appliquer la charia" (1).

Le chercheur insiste sur les faces "cachées" des Frères musulmans, et notamment sur la formation de militants "rigoureux et violents", appartenant à "l'organisation secrète", également appelée "appareil militaire". En 1936, le fondateur égyptien, Hassan al-Banna, publie 50 demandes de programme. Ces 50 demandes, qui font froid dans le dos, n'ont jamais été remises en cause par les Frères musulmans. Dans son article 2, il s'agit de "réformer les lois pour qu'elles se conforment à la législation islamique et notamment les infractions et les sentences pénales"...

Confisquer les romans d'excitation 

"Tous vouent une véritable admiration pour Hassan al-Banna et ils ne remettent nullement en question le moindre des enseignements consignés en particulier dans L'ensemble des épitres, dont certains fragments ont d'ailleurs été traduits en français", souligne Haoues Seniguer, docteur en sciences politiques et enseignant à l'IEP de Lyon. Il déclare qu'il faut poursuivre "toute personne dont il est prouvé qu'elle n'a pas respecté les enseignements de l'islam comme ne pas jeûner pendant le mois du ramadan, etc."


On y apprend qu'il faut "contrôler le comportement personnel des fonctionnaires sans distinguer l'aspect privé de la responsabilité publique", qu'il faut "interdire la mixité entre étudiants et étudiantes", "fermer les dancings, les lieux libertins et interdire la danse et tout contact gestuel entre homme et femme". Non seulement il faut "confisquer les romans d'excitation [sensuelle], ainsi que les livres qui sèment le doute [sur la foi]", mais aussi "mettre fin à l'esprit étranger [modèle occidental] dans les foyers". Cette traduction est donnée par la revue Islam de France.

Les mêmes vêtements pour tous les musulmans

"Ces principes semblent dessiner les contours d'une société totalitaire où l'islam contrôle tout. Il préconise, entre autres mesures coercitives, d'"interdire les partis et orienter les forces de la nation vers la constitution d'un front unique", constate Xavier Ternisien, journaliste au Monde, et auteur des Frères musulmans (2). Le problème, c'est que personne en Europe ne se reconnaît Frère musulman, ni l'Union des organisations islamiques de France (UOIF), pourtant liée à la confrérie en Égypte.

Ni même les frères Ramadan ! C'est pourtant leur père, Saïd Ramadan (gendre d'Hassan al-Banna), qui a créé au début des années 60 à Genève le premier Centre islamique d'Europe. Dans son ouvrage consacré à son grand-père, Aux sources du renouveau musulman. D'al-Afghânî à Hassan al-Banna, un siècle de réformisme islamique, de 459 pages, Tariq Ramadan oublie de mentionner les 50 demandes du programme des Frères musulmans (3).

Plus étonnant encore, le prédicateur suisse occulte les termes qui trahissent le caractère militaire et violent du mouvement des Frères musulmans, afin de le faire "passer pour un mouvement politique pacifique", dénonce Mohammed-Chérif Ferjani, professeur à l'université Lyon-II. Cet ancien prisonnier politique en Tunisie constate que Tariq Ramadan traduit par exemple "jundî", qui signifie "soldat", par "militant", et "katîba", qui veut dire "phalange", par "cercle" (4).

Retenons enfin qu'Hassan al-Banna prévoyait "d'unifier progressivement les uniformes vestimentaires dans toute la Oumma". En clair, les émirs du Golfe devraient s'habiller comme les prolétaires du Yémen ou du Mali...

(1) Khartala, 2009.

(2) Fayard, 2005.

(3) Tawhid, 2002.

(4) Fayard, Le politique et le religieux dans le champ islamique, 2005.

Ian Hamel