Des services secrets, nous ne savons que les échecs et rarement les succès. Si l'échec provoque l'anathème, l'ingratitude est fille de la victoire. Quand à la gloire, il faut l'oublier, elle est pour les autres...

jeudi 14 mars 2013

Opération Memphis: la version finale‏



Il y a quelques mois et suite à une demande d’explications de la part d’une future collaboratrice qui voulait avoir des détails sur le rôle de Claude Covassi quant à sa participation dans l’opération Memphis qui fit couler beaucoup d’encre tant dans la Presse que dans les différents services concernés, Claude Covassi décida de rédiger à chaud ce qui sera la version définitive et inexpugnable de cette épisode du contre espionnage helvétique.

Il mit en copie à certains de ses contacts de part le monde.

Nous vous livrons sa version des faits n’en déplaisent à certains et comme aimait le dire Claude Covassi :

« Tout le reste n’est qu’écrans de fumée, façade et décors de théâtre pour endormir ou amuser les spectateurs. »


—– Message d’origine —–
De: Claude Covassi
Date: Sun, 29 Apr 2012 16:02:11 +0200
Sujet: United Fruit Company


Chère amie,

Puise que l’on parle du sujet cité en marge, je fais te faire, non pas des confidences, puisque je n’ai rien à cacher, mais un résumé complet (cela restera un résumé).

En premier lieu, il faut garder à l’esprit que la mission du renseignement helvétique est de « savoir et comprendre ». Tout autre objectif, comme par exemple manipuler des individus ou l’opinion publique, n’est en rien conforme avec les objectifs de nos institutions qui ont le devoir d’assurer la protection du pays et de ses habitants.

Collaborateur du SRS (Service de renseignement stratégique, DDSP – Département de la défense, protection des personnes et des sports), nous avons eu pour mandat en décembre 2003 d’effectuer des investigations sur l’organisation des Frères Musulmans, et donc leurs intérêts et objectifs en Suisse. L’organisation étant internationale, notre champ d’investigation n’était pas limité géographiquement.

Monsieur Hani Ramadan étant le petit fils du fondateur de cette organisation, Monsieur Hassan el-Banna, il devenait donc un objectif important de cette opération.

Le SRS ayant vocation à s’occuper du renseignement à l’étranger, nous avons monté une opération conjointe avec le SAP (Service d’analyse et de prévention, Fedpol, DFJP – Département fédéral de justice et police), qui s’occupait alors du renseignement intérieur – cela afin de répondre à l’ensemble des critères légaux.

Officieusement, l’opération a débuté en mars 2004. S’il y a un départ officieux c’est que, avant de mettre en route l’ensemble des procédures propre é faire valider une opération par le CF, et d’obtenir les crédits nécessaires, il faut s’assurer d’une certaine efficience. Légalement, l’opération à débuté en juin 2004 (le 13 si ma mémoire est bonne). Elle a porté le nom de « Memphis », et moi le code de « Menes ». 

Pour la crédibilité de mon personnage, il a fallu fabrique ce qu’on appelle dans le langage des services une « légende », de sorte à ce que Hani Ramadan morde à l’hameçon (il fallait bien expliquer pour quelle raison, à 33 ans, je venais à m’intéresser à! ; ! l’Islam).

Les rapports entre les deux services (SRS et SAP), on toujours été en concurrence, c’est à dire mauvais. Dans le cadre de cette opération, nous avons toujours été en désaccord (je te passe les détails de ce genre de guerre des services).

Très vite, nous avons compris – au SRS – que le SAP voulait utiliser M. Hani Ramadan comme un bouc émissaire pour des raisons politiques. Il s’agissait de l’impliquer dans un réseau de jihadistes. Le SAP avait en effet le projet de faire passer une loi afin d’obtenir plus d’aisance dans les écoutes téléphonique (qui nécessitait alors l’aval d’un juge d’instruction), entre autres.

Notre conflit ne portait pas sur ce point, mais sur la volonté du SAP de faire de Hani Ramadan un ennemi afin d’obtenir l’adhésion populaire sur la nécessité de voter en faveur d’une telle loi.
Notre relation avec le SAP s’étant dégradée au delà du réparable, nous avons mis un terme à notre collaboration – en terme d’opération conjointe – je crois au début du mois de juin 2005. Par ailleurs, Hani Ramadan nous avait livré suffisamment d’informations pour que je puisse continuer mon travail à l’étranger (Egypte, Soudan, Syrie, Yémen, Niger, Mali, Afghanistan). De sorte à trouver une légalité sur le territoire Suisse lorsque j’y étais, nous avons établi un compromis avec le Ministère public de la Confédération et ses enquêteurs.

En janvier 2006, ayant appris que le SAP n’avait pas renoncé, malgré nos mise en garde, à vouloir « piéger » Hani Ramadan, toujours pour les mêmes objectifs politiques, nous avons décidé d’en révéler la teneur dans la presse, par un premier article dans la Tribune de Genève le 23 février de cette année (voir annexe 1).

Le SAP a ensuite divulgué mon identité au Blick. A partir de là, la guerre, par médias interposés, a été totale. Notre objectif prioritaire étant désormais de faire exploser le SAP. Raison pour laquelle j’en ai rajouté plusieurs couches, en livrant des documents confidentiels, dans les journaux suisses et étrangers que tu pourras consulter sur Internet.

Au final, nous n’avons pas été trop mauvais puisque le SAP a été dissous et que l’ensemble des services ont été réorganisé sous une nouvelle entité : SRC (service de renseignements de la confédération), qui regroupe à la foi l’intérieur et l’extérieur (la Suisse et l’étranger).

Tout au long de ma collaboration avec les services de la Confédération (tout organes confondus), je n’ai jamais fait usage d’arme ni eu besoin d’user de violence, bien qu’ayant toutefois, comme on l’imagine, reçu un entrainement ad hoc.

J’ai mis officiellement un terme à cette collaboration en mars 2006. Toutefois, aucune de mes activités présentes ou futures ne pourraient être de nature à interférer dans les intérêts stratégiques de notre pays. Egalement, je garde de très bons contacts avec mes officier supérieurs et nous nous rencontrons trois fois l’an (hors crise majeure) pour prendre un café et parler de la pluie et du beau temps (j’imagine que je n’ai pas besoin de formuler la chose plus précisément pour qu’elle soit claire).

Même si je n’ai pas spécialement envie que ce sujet soit au centre de notre relation et empoisonne toutes nos discussions, je reste à ta disposition pour répondre à toutes tes questions, de préférence oralement.

+++ Claude

PS : je ne relis pas ce mail avant de te l’envoyer. Tu en pardonneras, je l’espère, la syntaxe approximative.

PPS : je profite de cette occasion pour envoyer cette mise au point à d’autres contacts