Entre 300 à 400 individus d’extrême-droite sont l’objet d’une attention particulière. Une centaine d’agents de renseignement spécialisés opèrent sur tout le territoire.
Au ministère de l’Intérieur, la police suit au sein des mêmes structures les extrémistes de gauche comme de droite. Les enquêtes sont assurées par une centaine d’agents spécialisés de la Direction centrale du renseignement intérieur (DCRI, ex-RG), rattachés à la sous-direction « subversion violente ». Une soixantaine d’agents travaillent au siège de l’agence à Levallois-Perret (Hauts-de-Seine), tandis qu’une quarantaine d’autres se répartissent sur le territoire national. On les trouve notamment à Toulouse, fief historique de l’ultra gauche, mais aussi dans l’Est et le Nord, près des frontières belges et allemandes, où évoluent des groupuscules perméables aux idées de la droite radicale.
Paris dispose, de son côté, d’une section spécialisée d’une vingtaine de policiers, ex-RG, au sein de sa Direction du renseignement de la préfecture de police. Tous alimentent et exploitent le fichier de renseignement « Cristina » sur les profils dits « inquiétants ». « On compte, selon les périodes, 300 à 400 individus identifiés comme proches de l’extrême-droite », estime un agent de la DCRI. L’agence, confiée au préfet Bernard Squarcini, révèle que des groupes ont nécessité, ces derniers temps, une surveillance particulière, sans lien avec l’homme qui vient de s’illustrer en Norvège.
« Rien ne vaut le flair des agents expérimentés »
« Le cas Anders Breivik est ce qu’il y a de pire : il s’agit d’un terroriste isolé, donc difficilement détectable, comme ces islamistes qui font leur Djihad tous seuls », confie un policier. Pour les repérer, « rien ne vaut le flair des agents expérimentés, doués d’un solide bon sens et curieux de nature », ajoute un commissaire des ex-RG. La surveillance au jour le jour des éléments à risques s’effectue par un travail classique de suivi des déplacements, à l’étranger notamment, en liaison avec les services des pays « amis ». Dès que l’un d’eux se signale quelque part, une filature et quelques questions posées lors de discrètes enquêtes de voisinage permettent de prendre la température.
« Les écoutes administratives sont diligentées dès le premier signe d’une possible volonté de passage à l’acte », explique un enquêteur. Car la police ne peut se permettre de « brancher » toute cette mouvance au quotidien. Une plateforme dédiée, à Levallois, épie les SMS et remonte les données de connexion des mobiles utilisés par ces individus, pour déterminer qui contacte qui et avec quelle fréquence.
La veille Internet moins contraingnante juridiquement
Les forums Internet, où ces extrémistes aiment à se retrouver, sont scrutés en permanence. Cette pratique policière présente l’avantage de n’être pas encadrée aussi strictement que les branchements de lignes téléphoniques, contingentés et visés par Matignon. La méthode se révèle d’autant plus payante que ces personnes sont obsédées par l’idée de laisser une trace dans l’Histoire. Ce complexe les pousse à commettre des erreurs et, dans certains cas, à signer par avance leurs forfaits. Internet reste toutefois un terrain de jeu très vaste et la multiplicité des sites rend vaines les tentatives de veille exhaustive.
« Il est certain que l’affaire norvégienne va conduire Paris à resserrer les mailles du filet autour de ces marginaux », confie un haut fonctionnaire, place Beauvau. Des opérations préventives sont à prévoir dans les jours et les semaines qui viennent, histoire de maintenir la pression sur ces milieux qui ont tendance à « recruter » en période de crise.
Jean-Marc Leclerc
le Figaro