Les catastrophes survenues au Japon ont paralysé le pays. Mais à long terme, les défis à relever se traduisent par des opportunités d’investissement.
Trois mois après le séisme et le tsunami géants qui ont provoqué une crise nucléaire majeure au Japon, le coût de la catastrophe est estimé à 250 milliards d’euros.
Pour ce qui est des dégâts provoqués par le tremblement de terre et le tsunami, il faut procéder à de lourds investissements de reconstruction de logements, mais également d’infrastructures de transport, d’énergie et de communication. Depuis 1995, le nombre de mises en chantier n’avait fait que baisser pour atteindre 800’000 unités, contre le double au début des années 1990.
Avant la catastrophe, l’investissement résidentiel ne représentait plus que 2% environ du PIB du pays, soit un niveau historiquement faible. En outre, les dépenses publiques s’étaient réduites, notamment en raison des contraintes budgétaires. Par conséquent, la reconstruction des zones ravagées va produire ses effets et créer de la croissance économique.
Selon Arnaud Bauduin, gérant actions à OFI Asset Management, les entreprises japonaises devraient naturellement en profiter. Ce sera le cas pour les sociétés présentes dans la construction (Kajima, Taisei), dans l’entretien d’infrastructure (Sho-Bond), dans les matériaux comme le ciment (Taiheiyo Cement, Sumitomo Osaka Cement), l’acier (Nippon Steel) ou encore le verre (Nippon Sheet Glass).
«Jusqu’à présent, ces groupes étaient plutôt dans une logique de réduction de leurs capacités. Or, la reconstruction apparaît désormais comme une réelle opportunité que le marché a très rapidement prise en compte, indique Arnaud Bauduin. Et si l’on considère l’impact au-delà du Japon, les producteurs de matières premières devraient également profiter de cette demande supplémentaire puisque le pays est importateur de ressources naturelles.»
Une nouvelle ère énergétique plus verte?
Depuis la catastrophe japonaise, les titres liés aux énergies renouvelables ont flambé en Bourse (Solarworld, Sunpower, First Solar). Pour Marie de Mestier, gérante du fonds IT Funds Clean World, il ne s’agit pas d’un rebond passager mais bien d’un renouveau de la filière: «Sans conteste, la remise en question de la sûreté du nucléaire va avoir des répercussions sur les sources d’énergies renouvelables.»
Si le nucléaire a longtemps étéi considéré comme une des sources de production d’électricité les moins chères (4-10 centimes de dollar/kWh), la prise en compte des coûts de démantèlement, de traitement des déchets, des intérêts ainsi que des coûts de révision (plus de 400 millions d’euros par réacteur en France) le rend finalement moins compétitif que l’éolien (5-10 centimes de dollar/kWh).
Et si l’on s’intéresse au solaire, dont les technologies deviennent matures et dont les coûts de production diminuent de façon constante, le Gigawatt produit sera bientôt inférieur au Gigawatt issu du nucléaire. La parité réseau se rapproche d’ailleurs à grands pas.
En Californie, par exemple, le coût de l’électricité traditionnelle est équivalent à celui du solaire. Les grands bénéficiaires seront donc les acteurs de la filière renouvelable qui profitent non seulement d’un regain d’intérêt de l’opinion publique mais aussi des gouvernements qui revoient leur programme de financement. Par exemple, l’Allemagne a pour ambition de débloquer près d’un milliard d’euros contre 300 millions l’an dernier.
Une analyse que ne partagent pas forcément tous les experts, notamment Régis Yancovici, directeur général d’Efigest Asset Management. Pour ce dernier, l’accident nucléaire japonais ne va pas nécessairement amener les Etats à accentuer leurs efforts financiers vers les énergies renouvelables. Les niveaux d’endettement de la plupart des pays développés sont en effet très élevés. Parfois trop.
«Certes, les valeurs solaires ont rebondi ponctuellement d’environ 15 à 20%, mais il s’agit d’un secteur très volatil qui n’était absolument pas dans une tendance haussière avant la catastrophe. Il était même en chute de presque 20% jusque-là, note Régis Yancovici. Les évènements récents sont favorables aux énergies alternatives, notamment solaires, mais plutôt de façon marginale. Je n’envisage donc pas de tendance haussière à long terme sur ce secteur, mais plutôt un gel du développement du nucléaire, qui ne représente encore que 16% de la production d’électricité mondiale.»
Nicolas Sandanassamy