Le chef présumé d'Al-Qaïda en Afrique de l'est, le Comorien Fazul Abdullah Muhammad, a été tué en début de semaine lors d'une fusillade à Mogadiscio. Il était un des acteurs-clé des attentats anti-américains de 1998 à Nairobi et Dar es-Salaam.
Ce décès a été salué par les Etats-Unis. En visite en Tanzanie, la secrétaire d'Etat Hillary Clinton a estimé qu'il portait un «coup significatif» à Al-Qaïda. «La mort de Fazoul supprime l'un des chefs opérationnels les plus expérimentés d'Afrique de l'Est», a renchéri un haut responsable américain à Washington.
Le chef de la police kényane Mathew Iteere et une source au sein des services de renseignements somaliens, le NSA, ont également confirmé des informations d'un haut responsable des insurgés islamistes somaliens shebab.
Fusillade à un barrage routier
Selon les services de sécurité somaliens, Fazoul Abdullah Mohamedet un autre «terroriste» - un Kényan - ont été tués vers 02h00 mercredi mercredi en périphérie nord de Mogadiscio lors d'un simple accrochage à un barrage routier.
Les deux individus circulaient à bord d'un pick-up chargés notamment de médicaments et d'ordinateurs portables et se seraient égarés en zone gouvernementale alors qu'ils tentaient de rejoindre les lignes shebab, selon une source sécuritaire régionale.
«Nos forces ont tiré sur les deux hommes qui ont refusé de stopper à un barrage. Ils ont tenté de se défendre alors qu'ils étaient cernés», a expliqué à l'AFP un commandant des forces du gouvernement de transition somalien (TFG), Abdikarim Yusuf.
Faux passeport
L'homme était en possession de 40'000 dollars en liquide, d'un faux passeport sud-africain et de nombreux téléphones portables. Il venait apparemment de Lower Juba (sud de la Somalie), où il dirigeait un groupe de combattants étrangers sous le nom de guerre «d'Abu-Abdirahman le Canadien», a précisé la même source.
Contrairement à l'usage dans ce genre d'incidents, relativement banal à Mogadiscio, les deux corps ont été récupérés par le NSA et mis à disposition des services américains qui ont procédé à des tests ADN.
Des photos prises peu après l'incident montrent le corps ensanglanté, gisant sur le dos, ainsi que le 4X4 au pare-brise - visiblement blindé - criblé d'impacts de balles. Le visage montre des ressemblances avec l'avis de recherche diffusés sur internet par le FBI américain.
Expert en déguisement
Leader présumé d'Al-Qaïda en Afrique de l'est, Fazul Abdullah Muhammad, 38 ans, échappait depuis une dizaine d'années aux Américains, qui avaient mis sa tête à prix pour cinq millions de dollars.
Il était l'un des acteurs-clé des attentats contre les ambassades américaines à Nairobi et Dar es-Salaam, qui ont fait 224 morts au total en août 1998. Il était également accusé d'avoir planifié les attentats anti-israéliens de Mombasa (sud-est), qui ont fait 15 morts le 28 novembre 2002. Cette même année 2002, il s'était vu confier la direction des opérations d'al-Qaïda pour toute l'Afrique de l'est, selon les services de sécurité américain.
Polyglotte, utilisant au moins une douzaine de pseudonymes, le fugitif était expert dans l'art du déguisement. «Il avait subi une opération esthétique au visage pour paraître plus jeune, et voyageait régulièrement dans de nombreux pays africains», a précisé samedi une source shebab.
Il combattait depuis plusieurs années dans les rangs des shebab somaliens, qui ont fait allégeance au réseau Al-Qaïda, et était plus particulièrement en charge des volontaires étrangers.
J. Peter Pham, membre du groupe de réflexion de Washington Atlantic Council et spécialiste de la région, a jugé que sa mort n'aurait que peu d'impact sur l'insurrection islamiste menée par les shebab.
«Même les combattants étrangers présents en Somalie sont sous le contrôle des shebab, plutôt que sous l'égide d'Al Qaïda en Afrique de l'Est», a-t-il dit. «De même, les shebab ont leurs propres liens avec la branche d'Al Qaïda la plus efficace à proximité, Al Qaïda dans la péninsule Arabique.»
ATS