Des services secrets, nous ne savons que les échecs et rarement les succès. Si l'échec provoque l'anathème, l'ingratitude est fille de la victoire. Quand à la gloire, il faut l'oublier, elle est pour les autres...

samedi 17 octobre 2009

Le Ion Tiger, un drone à hydrogène, vole durant près de 24 heures

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Le record de durée de vol d’un avion sans pilote vient sans doute d’être battu par un appareil à hélice tirant son énergie – électrique – d’une pile à combustible. Purement militaire, cet engin affiche des performances de bon augure pour des applications civiles et est même représentatif d’une idée folle : l’avion électrique.

L’avion a décollé d’Aberdeen (Maryland, Etats-Unis) le 9 octobre et s’y est posé le lendemain après un vol de 23 heures et 17 minutes, établissant probablement un record. Il est cependant difficile d’en être sûr car ce genre de performances reste en général confidentiel. Le Ion Tiger, en effet, est un drone, ou UAV (Unmanned Air Vehicle), étudié, comme la plupart de ses congénères, au profit de l’armée, en l’occurrence le Naval Research Laboratory (NRL).

Les informations précises sur l’appareil, d’ailleurs, manquent. On ne dispose que de quelques communiqués, des photos et une vidéo. L’intérêt du Ion Tiger est qu’il fonctionne à l’énergie électrique, fournie par une pile à combustible, une technique prometteuse aussi dans le domaine civil, en aviation mais aussi dans bien d’autres secteurs. Ce record mérite donc une certaine attention.

Dans une pile à combustible, de l’hydrogène provenant d’un réservoir est combiné, à travers un électrolyte, à de l’oxygène prélevé dans l’air ambiant. Le résultat est une production d’électricité et d’eau, unique polluant direct. De nombreux modèles existent, faisant varier la nature de l’électrolyte (solide, liquide membrane échangeuse d’ions...) et la source d’hydrogène. On peut utiliser de l’hydrogène liquide ou gazeux et compressé voire du méthanol, une molécule qui fournira les ions H+ mais avec production de gaz carbonique.

Quel choix a fait le NRL ? On ne le sait pas... Le laboratoire a utilisé une pile fournie par Protonex, une firme américaine qui propose à son catalogue des piles à méthanol mais qui travaille également sur des piles à combustible à oxyde solide SOFC (Solid Oxide Fuel Cell).

En revanche, les performances indiquées montrent les possibilités de ce genre de formule. La puissance disponible serait de 550 watts, soit, nous dit-on, quatre fois mieux qu’un classique moteur à pistons de taille comparable et sept fois plus qu’une batterie de même poids.

Une nouvelle ère de pionniers

Le résultat est un appareil silencieux, non polluant (mais il faut avoir fabriqué l’hydrogène bien sûr), doté d’une grande autonomie et d’une bonne capacité d’emport. Sur la vidéo, on devine que le Ion Tiger mesure à peu près 1,7 mètre de longueur pour une envergure d’environ 2,5 mètres. Il peut embarquer 2,5 kilogrammes de charge utile. Ces performances témoignent d’un solide travail sur l’engin lui-même (en fibres de carbone) et sur la pile à combustible. « Notre premier objectif était le poids, explique Karen Swider-Lyons, de la NRL, qui a travaillé sur le sujet. Notre deuxième était le poids et le troisième, le poids. »

Ce n’est pas la première fois que s’envole un avion électrique à pile à combustible. Un modèle réduit, le HyFish, a volé en 2007, construit par une équipe suisse et allemande. En 2008, Boeing a fait voler un appareil piloté (un monomoteur à hélice de type Dimona, conçu en Autriche) motorisé électriquement et alimenté par une pile à combustible.

En France, l’aviation électrique existe déjà. L’Apame (Association de Promotion des Aéronefs à Motorisation Electrique) a fait voler le petit Electra en décembre 2007 et depuis, plusieurs modèles, notamment des motoplaneurs (planeurs équipés d’un petit moteur), ont vu le jour. Une entreprise, Electravia, s’est même spécialisée sur ce créneau.

Mais ces engins puisent pour l’instant leur énergie d’une batterie (lithium-ion en général). Pour cette aviation de pionniers, qui naît sous nos yeux un siècle après la première vague, les innovations en matière de piles à combustible apporteront sans doute pas mal d’opportunités...
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Jean-Luc Goudet