Téhéran teste son nouvel arsenal, notamment des missiles capables d’atteindre Israël. Dans le même temps, le pays indique qu’il répondra à toute menace de manière « destructrice », notamment sur son programme nucléaire.
A quoi jouent les dirigeants iraniens ? Les Gardiens de la révolution, l’armée idéologique du régime islamique iranien, ont tiré ce lundi, dans le cadre d’exercices militaires visant à « améliorer » les capacités de dissuasion du pays, deux missiles de longue portée capables d’atteindre des cibles situées à 2.000 km. De quoi irriter une nouvelle fois la communauté internationale et inquiéter Israël, leur ennemi juré, qui se trouve à 1.000 km des frontières iraniennes. Durant le week-end, Téhéran avait déjà pratiqué deux séries d’essai de missiles, de courte et de moyenne portée cette fois.
Commentant cet exercice militaire, le commandant des forces aériennes des Gardiens de la révolution, Hossein Salami, a affirmé que le principal objectif des manoeuvres, baptisées « Grand prophète 4 », était « d’évaluer les progrès techniques récemment réalisés dans les missiles sol-sol ». L’un des deux missiles tirés aujourd’hui, le Sejil, est une arme de « nouvelle génération », aux « capacités extraordinaires », avait déjà assuré l’an dernier l’ancien ministre de la Défense iranien lors d’un premier test. Un deuxième tir avait été mené en mai.
Téhéran tente de rassurer sur sa deuxième usine nucléaire
L’Iran effectue régulièrement de telles manoeuvres dans les eaux stratégiques du Golfe. Mais celles-ci interviennent à un moment d’intenses tensions avec l’Occident sur le programme nucléaire de la République islamique. « Face aux menaces contre l’existence, l’indépendance, la liberté et les valeurs du régime [islamique], notre réponse sera directe, ferme et destructrice », a ajouté le commandant Hossein Salami, ajoutant que cette réponse ferait « regretter » à l’ennemi ses menaces. « Toutes les cibles dans la région, où qu’elles se trouvent, peuvent être atteintes », a-t-il lancé.
Ce discours très ferme tranche cependant avec une certaine volonté d’appaisement manifestée dans le même temps sur le dossier nucléaire. Sommée de s’expliquer sur l’existence d’un second site d’enrichissement d’uranium, l’Iran a une nouvelle fois assuré lundi que ce site serait placé sous la supervision de l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA). La révélation vendredi de l’existence de ce site situé à une centaine de kilomètres de Téhéran avait accentué la pression internationale sur le pays.
Cette nouvelle usine en construction près de Qom « ne viole aucune loi internationale. Les pays occidentaux se livrent à des commentaires qui ne sont pas réalistes », a déclaré lundi à la presse le porte-parole du ministère des Affaires étrangères Hassan Ghashghavi. « Les allégations [...], le battage médiatique, sont sans fondement », a-t-il poursuivi. Le président Ahmadinejad avait affirmé depuis New York que le site était « parfaitement légal »et conforme aux règles de l’AIEA.
Obama n’écarte pas un recours à la force militaire
Les Occidentaux somment l’Iran de faire toute la lumière sur ses activités nucléaires à la réunion du 1er octobre avec le groupe 5+1 (Etats-Unis, Russie, Chine, France, Grande-Bretagne et l’Allemagne), faute de quoi il ne pourra plus échapper à de nouvelles sanctions. Les Etats-Unis, la France et la Grande-Bretagne accusent l’Iran d’avoir dissimulé pendant des années la construction de cette deuxième usine d’enrichissement d’uranium, la technologie produisant le combustible pour les centrales civiles mais pouvant aussi fournir la matière à l’arme nucléaire. La Russie et la Chine ont aussi appelé l’Iran à la coopération.
Pour les Occidentaux, non seulement la construction d’une seconde usine à cet effet aurait dû être déclarée dès sa construction aux organismes internationaux, mais ses caractéristiques ne sont pas cohérentes avec une finalité civile. Le président américain Barack Obama a refusé d’écarter un recours à la force militaire contre l’Iran et a ensuite appelé Téhéran à « prouver ses intentions pacifiques ».
La situation « est en train de s’éclaircir et je ne crois pas » qu’elle dégénérera, a commenté lundi matin le ministre des Affaires étrangères, Bernard Kouchner. Selon lui, « il n’y a pas vraiment eu de dialogue » avec l’Iran jusqu’à présent. « On les rencontre tout le temps, mais le fond du problème n’est pas abordé. J’espère que ce sera à partir du 1er octobre à l’ordre du jour, avec des réponses fournies à l’AEIA », a-t-il poursuivi.
Paris a toutefois demandé lundi à l’Iran de « cesser immédiatement » ses « activités profondément déstabilisantes ». « La France exprime sa vive préoccupation après les annonces iraniennes selon lesquelles l’Iran aurait procédé à des tirs de missiles balistiques, dont un missile de type Shahab 3 et un missile de type Sejil », a indiqué le Quai d’Orsay dans un communiqué.
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Le Figaro