Des services secrets, nous ne savons que les échecs et rarement les succès. Si l'échec provoque l'anathème, l'ingratitude est fille de la victoire. Quand à la gloire, il faut l'oublier, elle est pour les autres...

lundi 7 septembre 2009

Les guerriers de la République - Forces spéciales et services secrets français 1970-2009

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L’histoire de la politique étrangère de la France produit immanquablement son lot de fantasmes, de personnages mythiques, de mystères. En choisissant d’étudier les forces spéciales et services secrets, c’est précisément au coeur des dessous de la République que Pascal Le Pautremat nous invite. Biafra, Rwanda, Côte d’Ivoire, Afghanistan, Colombie, ex-Yougoslavie... Tous les théâtres d’opération français sont passés en revue. Grâce à une enquête et des entretiens approfondis, l’auteur nous éclaire aussi bien sur les actions menées sur le terrain par les forces spéciales que sur les rouages décisionnels qui en sont à l’origine. Il nous restitue ces éléments en historien, en analyste discret et respectueux des impératifs du secret-défense.

Les guerres à l’étranger sont largement médiatisées au moment de l’action. Puis elles tombent aussitôt dans l’oubli. Les hommes qui les mènent restent dans l’ombre, humblement, et sont inconnus du grand public. C’est tout le mérite de l’ouvrage Les Guerriers de la République que de remplir ce double rôle de rappel de la vérité historique, ainsi que d’hommage à une communauté d’hommes d’exception.

Pascal Le Pautremat est docteur en histoire, spécialiste des crises et conflits contemporains. Il a été chargé de mission au Centre d’études d’histoire de la Défense (CEHD) de 1999 à 2002. Chargé de cours dans l’enseignement supérieur, consultant pour les médias, il a été directeur de séminaires de Géopolitique au Collège Interarmées de Défense (CID – École de Guerre) et à Saint-Cyr-Coëtquidan. Il est par ailleurs membre du comité de rédaction de Défense (IHEDN) et collabore régulièrement au magazine Raids. Il a publié La politique musulmane de la France au xxe siècle (Maisonneuve, 2003) et a coordonné l’ouvrage collectif Forces spéciales, nouveaux conflits, nouveaux guerriers (Editions Autrement, 2002).

Pour contacter l’auteur :
email : p.lepautremat @ orange.fr
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Ils sont les yeux et le bras armé de l’État français. Ils agissent dans l’ombre, avec dévouement, discipline et humilité. Préparés aux situations les plus extrêmes, ils peuvent intervenir à tout moment n’importe où dans le monde. Les forces spéciales et les services secrets sont de véritables guerriers modernes, au service de la République.

De l’Afrique postcoloniale, où la France concentre de nombreux intérêts, à l’Afghanistan, en passant par les Balkans et le Moyen-Orient, les conflits se multiplient. En parallèle, la liste des nouvelles menaces (terrorisme, guérillas, piraterie, prolifération, attaques nucléaires et chimiques…) ne cesse de s’allonger. La France doit plus que jamais adapter ses moyens technologiques et humains pour maintenir son influence militaire, économique et stratégique.

Renseignement, infiltrations, exfiltrations, libération d’otages, c’est sur ordre des politiques que ces hommes sont dépêchés sur le terrain. Cet ouvrage revient sur quarante ans de politique étrangère française, ses personnages-clés, ses affaires retentissantes (Rainbow Warrior, génocide rwandais, pirates du Ponant, etc.) et fait la lumière sur des zones grises de notre histoire.

Pascal Le Pautremat nous plonge au coeur du secret-défense, et révèle les dessous des interventions de la République, que la diplomatie tait et que les médias ignorent. Plus qu’un ouvrage d’histoire, ce livre est aussi un vibrant hommage à une communauté d’hommes d’exception.

Opérer contre l’adversaire, le harceler ou l’annihiler, puiser des renseignements de premier ordre et stratégiques de préférence avec notamment les expertises initiales de terrain préalables aux actions d’envergure : autant d’impératifs confiés à des hommes exceptionnels capables de mener une guerre de l’ombre, en collaboration avec les services secrets.

L’outil militaire le plus aiguisé est inopérant si l’information préalable est inexistante ou insuffisante. Avant toute prise de décision, les autorités politiques et militaires doivent en effet disposer de tous les renseignements nécessaires.

Le recours aux forces spéciales n’est pas forcément synonyme d’opérations coups de poing, d’anéantissement de l’adversaire, de prise de contrôle ou de destruction infrastructures. Il peut en effet s’inscrire dans une démarche de promotion ou de maintien de l’ordre et de la paix.


Lecture

Les affaires militaires de la France des années 1970 à 2008 peuvent se résumer, selon l’expression choisie par l’auteur, par un jeu politique et stratégique oscillant entre « ombre et lumière ». De la Guerre froide au monde multipolaire contemporain, l’Etat français a su développer des outils technologiques et humains d’intervention et d’information précieux pour sa politique étrangère. Opérations spéciales, secrètes ou clandestines, ce livre propose une rétrospective de quelques unes de ces opérations, en se focalisant sur le rôle des forces spéciales et services secrets dans le cadre de ces actions menées par la France depuis la fin de la décolonisation en Afrique.

L’auteur présente tout d’abord l’évolution historique, politique et humaine des forces spéciales (COS, 1er RPIMa, 13ème RDP, commandos de marine, GIGN) et des services secrets (SDECE devenue DGSE). Conciliant l’approche théorique et pratique avec des événements historiques, l’auteur nous montre combien les actions de l’ombre se superposent bien souvent aux rouages diplomatiques et anticipent les opérations dites conventionnelles de durée assez longue. Le service action de la DGSE puise ainsi en partie dans le vivier des forces spéciales, comme l’illustrent la libération des otages dans la grotte d’Ouvéa en Nouvelle-Calédonie(1988) ou le sabotage du Rainbow Warrior dans le port d’Auckland, l’Elysée allant même jusqu’à recruter des acteurs privés et des mercenaires dans les affaires politiques et militaires clandestines, à l’instar du coup d’Etat fomenté par Robert Denard aux Comores. Quant au renseignement, il est devenu, à partir des années 2000, l’axe de développement de la stratégie de défense française dans la lutte contre le terrorisme.

L’ouvrage nous plonge ensuite dans l’Afrique postcoloniale, où Paris cherche à consolider son influence et ses intérêts. Sur ce terrain, elle rivalise avec l’URSS et Cuba d’une part, les Américains et les Anglais d’autre part, pour l’exploitation de matières premières. Selon ses intérêts, la France contribue au maintien de régimes autoritaires (d’Omar Bongo au Gabon à Mobutu en RDC) et à la déstabilisation d’autres régimes inconvenants (chute de Bokassa dans les années 1980…), ou s’implique dans des guerres civiles meurtrières en armant, en cofinançant partiellement, et formant la résistance au pouvoir en place (Angola, Biafra). Du soutien au président tchadien Idriss Déby au procès de « l’Angola Gate », en passant par l’opération Licorne en Côte d’Ivoire, cette politique peu scrupuleuse qui conjugue pragmatisme stratégique et économique, que certains nomment la « françafrique », trouve encore aujourd’hui une actualité.

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Mais au-delà du continent africain, les intérêts de la France et l’évolution de la situation géopolitique entraînent les hommes de l’ombre sur d’autres théâtres d’actions. Face aux éclatements régionaux et à l’émergence de nouvelles menaces, la France doit repenser les forces spéciales et services secrets pour maintenir son influence stratégique au niveau des grandes puissances mondiales. Des Balkans au Moyen-Orient, des prises d’otages aux actes terroristes du début du xxie siècle, l’émergence de « zones grises » où règne un chaos politique, économique et social et du djihadisme transcontinental obligent les puissances occidentales à s’associer au sein des institutions internationales (OTAN, ONU) ou régionales pour renforcer la prévention des risques. Ces interventions coordonnées servent aussi bien à sécuriser des zones contre la piraterie maritime (comme le Ponant au large de la Somalie en 2008) qu’à reconstruire des pays en guerre grâce à des opérations civilo-militaires.

Dès 2001 en Afghanistan, la France contribue à l’effort international dans la lutte contre le terrorisme des talibans et d’Al Qaida. En tant que « nation cadre », elle conduit des missions spéciales de l’OTAN. L’auteur nous rappelle la douloureuse expérience du 18 août 2008 où 10 soldats français sont tués dans une embuscade dans la vallée d’Uzbeen. Ce drame met en évidence des carences d’équipements, de coordination et de renseignements, incitant le haut commandement militaire français à modifier son dispositif. Cet épisode tragique coïncide avec la publication en 2008 du Livre blanc sur la défense qui souligne le renforcement nécessaire des moyens de renseignement.

Conscient du caractère sensible d’un livre sur les guerres secrètes de la France, Pascal Le Pautremat a volontairement axé son propos sur les événements majeurs de la politique étrangère française, et pour lesquels on peut aujourd’hui apporter des conclusions plus « officielles » et avérées. Face au secret des actions spéciales et à la protection de ses hommes, le recueil de témoignages s’est révélé délicat tant les acteurs sont d’abord réticents à relater leurs expériences, par conscience professionnelle, pudeur ou à cause d’un traumatisme personnel.
Des anecdotes et des précisions inédites animent le récit et permettent à l’auteur d’éviter les raccourcis et les approximations, notamment sur les opérations clandestines. Pascal Le Pautremat s’attache également à expliquer le jargon du milieu de la défense et à rendre accessible les notions et les termes techniques tels que « zones grises », « honorables correspondants », « françafrique », « secret défense »…

La profondeur historique, politique et humaine du propos, ainsi que la vertu pédagogique de l’ouvrage nous donnent un aperçu précis, ciblé et objectif des guerres secrètes de la France, rendant la lecture intéressante pour tous les curieux de la politique étrangère de notre pays et les amateurs d’histoire. En présentant les forces et les actions engagées par l’État français dans ses guerres de l’ombre, Pascal Le Pautremat nous entraîne dans un univers opaque et secret.

Son fonctionnement suscite des interrogations et des critiques sur le manque de coordination, la gestion humaine des unités face à une crise du recrutement, la protection juridique des opérateurs et l’omnipotence du commandement parisien.

Ces hommes qui opèrent dans des environnements particulièrement hostiles ne ressemblent pas au commun des mortels.


Extraits

Le Biafra au coeur des antagonismes franco-britanniques La guerre du Biafra (mai 1967-janvier 1970), liée à la sécession de cette province orientale du Nigeria, pays aux 250 ethnies, est née de l’opposition entre le gouvernement central et les Ibos, sécessionnistes de l’est du territoire. (…)

La France du général de Gaulle, ravie de pouvoir gêner l’in¬fluence britannique sur le gouverne¬ment central du Nigeria, soutient dis¬crètement les Ibos. (…)

Le soutien français à la cause biafraise, portée par le gouvernement du Chukwuemeka dumegwu Ojukwu combine alors action humanitaire et livraison d’armes, à partir de novembre 1967.
Le marasme humanitaire, avec des Ibos harcelés par les troupes fédérales et subissant une famine orchestrée par le pouvoir, incite des médecins de la Croix-Rouge française, dont Bernard Kouchner, à intervenir. Cette démarche contribue à l’émergence du droit d’ingérence pour des raisons humanitaires. Au milieu des cargaisons de vivres et de médicaments, on dissimule armes et munitions destinées à la rébellion. La guerre provoqua la mort d’1 à 2 millions de personnes selon les sources, sur fond de trafics d’armes et d’actions des services spé¬ciaux provoquant une prolongation certaine de ce conflit meurtrier.

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Lutte contre la piraterie maritime au large de la Somalie L’attaque du voilier de luxe, le Ponant, a lieu le vendredi 4 avril. Dès le lendemain, dans le cadre de l’opération Thalatine, les commandos marine sont sur zone, notamment 18 d’entre eux, parachutés en mer (opération appelée communément Tarpon), en dépit de la présence de nombreux requins dans ces eaux chaudes. Ce sont les nageurs de combat du commando Hubert qui sont engagés. Ils inspectent d’abord la coque du Ponant. Ils disposent de deux propulseurs sous-marins (PSM), tout à fait opportuns pour se déplacer jusque-là, contre les forts courants que pro¬voque à cet endroit la rencontre entre mer Rouge et océan Indien. Ils n’ont pas eu recours aux ventouses pour se fixer sur la paroi. Outre les nageurs de combat, on note l’intervention, dans la nuit du 6 au 7 avril, d’éléments du GIGN dont Denis Favier, encore colonel à ce moment. Toute l’opération fut placée sous la houlette de l’amiral Marin Gillier. Le 11 avril 2008, les commandos marine interviennent pour la récupération de l’équipage du yacht de croisière, composé de trente personnes dont 22 Français et commandé par Patrick Marchesseau. Tous étaient retenus en otages par des pirates somaliens qui, bien que non-djihadistes, commettaient bien un acte illégal et irrecevable, avec la complicité de leurs proches, sinon de leur village. L’action des forces spéciales est menée sans effusion de sang, après des repérages soigneux, des prises de photos et des observations nocturnes réalisées grâce aux caméras embarquées sur des aéronefs. La libération est négociée par le GIGN, la rançon est versée. Elle est suivie de l’arrestation de six des preneurs d’otages par une action héliportée, alors que les malfrats se déplaçaient en 4x4 en territoire somalien en milieu de journée.


Talibans et Al-Qaïda : une redoutable guérilla

La relative fragilité du dispositif français, jusqu’en 2008, tient ainsi au manque d’équipements lourds et de moyens pour mener à bien les mis sions dans des conditions optimales. Et sur le plan individuel, il n’était pas exceptionnel, ces dernières années, que des soldats achètent, à leurs propres frais, des équipements destinés à améliorer leur quotidien sur le terrain (gamelles et réchaud, couverts, parka véritablement imperméable), mais aussi les équipements pour leur propre sécurité, par l’acquisition de gilets pare-balles voire même de casques plus résistants que les fournitures standardisées de l’institution.

Il fallut l’embuscade meurtrière dans la vallée d’Uzbeen, le lundi 18 août 2008, non loin du village de Sper Kunday (Sabira Kanda), à un peu plus de deux heures de Kaboul, contre un convoi d’infanterie mécanisée du 8eRPIMa de Castres, pour provoquer un véritable électrochoc.

La conjonction de différents facteurs, en plus de l’instrumentalisation émotionnelle et médiatique, a conduit à quelques rectifications dans les attributions de moyens supplémentaires à partir de l’automne 2008 : envoi d’hélicoptères de transport de type Caracals, de véhicules blindés et enfin de drones propices au renseignement aérien. L’embuscade d’Uzbeen nécessita l’intervention de secours et l’engagement de moyens importants, français au sol, américains dans les airs (A10 Thunderbolt, AC-130 Gunship du Special Operations Command). Les hélicoptères Caracal français, qui auraient pu intervenir dès l’annonce de l’embuscade, étaient maintenus en alerte pour Hamid Karzaï qui était alors en pleine cérémonie officielle célébrant la fête nationale. Les Caracals devaient en effet pouvoir procéder à son extraction si nécessaire. Les aéronefs français ne reçurent finalement l’autorisation de rejoindre la zone de l’embuscade qu’en fin de journée, vers 18 h 00. Sur place, le dispositif qui ne cessait de s’accroître fut appuyé par des forces spéciales norvégiennes et américaines qui contribuèrent à sécuriser progressivement la zone avant de se lancer sur les traces des talibans. Il fallut combattre et progresser lentement pour que, peu après 4 h 00, le site soit sécurisé, en ce 19 août 2008 dans une fin de nuit au goût amer.

Cette main-d’oeuvre hautement spécialisée n’est pas illimitée ; au contraire, elle connaît même une crise de recrutement.


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