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dimanche 15 juin 2025

Les États-Unis sont-ils impliqués dans les frappes israéliennes contre l’Iran ?

 

Dans la nuit du 12 au 13 juin 2025, Israël a lancé l’opération « Lion dressé », une série de frappes aériennes massives contre des cibles nucléaires et militaires en Iran, visant les sites d’enrichissement d’uranium de Natanz et Fordow, ainsi que des bases des Gardiens de la révolution. Ces raids, qui ont tué des commandants iraniens comme Hossein Salami et Mohammad Bagheri, ainsi que des scientifiques nucléaires, ont provoqué une riposte immédiate de l’Iran, avec des drones lancés vers Israël. Le président américain Donald Trump a admis avoir été informé à l’avance des frappes, tout en affirmant que les États-Unis n’étaient pas impliqués militairement. Cependant, des rapports indiquent que Washington a fourni des moyens logistiques à Israël ces derniers mois, notamment des bombes perforantes (« bunker busters ») essentielles pour atteindre des installations nucléaires enfouies. Ces livraisons, soumises à des autorisations américaines strictes, suggèrent une implication indirecte, remettant en question la non-implication revendiquée. Dans un contexte de négociations nucléaires fragiles, cet article examine en détail le rôle des États-Unis, les contradictions de leur position et les implications régionales de cette escalade.

Contexte des frappes et déclarations officielles

L’opération israélienne du 13 juin 2025 a mobilisé plus de 200 avions de combat, dont des F-35 furtifs, larguant 330 munitions sur une centaine de cibles à Téhéran, Tabriz, Kermanshah, Qom, Isfahan, Piranshahr, Borujerd, Islamshahr, Arak, Urmia, Maragheh, Ahvaz et Qasr-e Shirin. Les sites nucléaires de Natanz et Fordow, cruciaux pour le programme iranien, ont été durement touchés, bien que l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA) ait signalé l’absence de contamination radioactive. Des bases militaires, comme celle de Najaf à Kermanshah, et des résidences de hauts commandants, notamment à Shahrak-e Mahallati et Farahzad, ont été visées. Le Premier ministre israélien Benyamin Netanyahou a qualifié l’opération de « succès », visant à « écarter la menace existentielle » d’un Iran nucléaire, affirmant que Téhéran était à « quelques jours » d’une capacité militaire nucléaire. L’Iran a dénoncé une « violation flagrante » de l’article 2, paragraphe 4, de la Charte des Nations unies, promettant une « punition sévère » et lançant des drones vers Israël, tandis que des combats aériens ont été signalés dans son espace aérien.

Donald Trump, dans une interview à Fox News le 13 juin à 07:52 BST, a confirmé avoir été informé à l’avance des frappes, déclarant qu’il n’y avait « pas de surprises ». Il a insisté sur l’absence d’implication militaire directe des États-Unis, espérant que l’Iran « reviendra à la table des négociations » pour un accord nucléaire. Le secrétaire d’État Marco Rubio a renforcé cette position, qualifiant les frappes d’« action unilatérale » d’Israël pour sa « légitime défense » et avertissant l’Iran de ne pas cibler les intérêts américains. Le président a convoqué une réunion du Conseil de sécurité nationale à 11h00 le 13 juin pour discuter de la crise. Cependant, l’Iran, par la voix de son ministère des Affaires étrangères, a accusé les États-Unis d’avoir « coordonné et autorisé » l’attaque, les tenant responsables des conséquences. Le Guide suprême Ali Khamenei, indemne, a promis une réponse « dévastatrice », tandis que les Gardiens de la révolution et l’état-major iranien préparent une riposte militaire.

Fourniture de matériel militaire américain : une implication logistique

Des rapports récents confirment que les États-Unis ont fourni à Israël des moyens logistiques significatifs au cours des derniers mois, renforçant sa capacité à mener des frappes contre des cibles iraniennes fortifiées. Selon des sources, neuf avions de transport militaires américains ont livré des centaines de bombes, dont des bombes perforantes MK84 de 30 000 livres, à la base aérienne israélienne de Nevatim dans les 24 heures précédant les frappes du 13 juin. Ces munitions, conçues pour pénétrer des installations souterraines comme Fordow, enfouie sous une montagne, sont essentielles pour attaquer des sites nucléaires. De plus, des livraisons de missiles intercepteurs pour le système THAAD ont renforcé les défenses antimissiles israéliennes, cruciales face à une riposte iranienne, comme celle anticipée après le lancement de drones iraniens.

La fourniture de telles armes est strictement réglementée par le Congrès américain et le Département de la Défense. Les bombes perforantes, absentes de l’arsenal israélien, nécessitent un feu vert explicite de Washington, conformément à la législation sur les exportations d’armes (Arms Export Control Act). En février 2025, des discussions entre Netanyahou et Trump ont porté sur un soutien logistique américain, incluant un ravitaillement en vol et des munitions spécifiques pour une attaque contre l’Iran. Bien que Trump ait rejeté une opération conjointe en avril, préférant la voie diplomatique, les livraisons de munitions juste avant les frappes suggèrent une coordination tacite. Des sources indiquent que les États-Unis ont également partagé des renseignements, notamment des observations de mouvements militaires iraniens et des interceptions de communications, permettant à Israël de cibler avec précision des scientifiques nucléaires comme Fereydoun Abbasi et Mohammad Mehdi Tehranchi, ainsi que des commandants des Gardiens de la révolution.

Le Pentagone a ordonné un retrait partiel de son personnel diplomatique et militaire d’Irak par crainte de représailles iraniennes contre les bases américaines au Qatar et à Bahreïn, qui abritent respectivement 8 000 et 9 000 militaires. Cette précaution reflète une anticipation des conséquences des frappes israéliennes, facilitées par le soutien logistique américain. La coopération entre les deux pays inclut également des exercices conjoints menés en 2024, comme l’exercice Juniper Oak, qui a simulé des frappes à longue distance contre des cibles fortifiées, renforçant la capacité d’Israël à opérer en Iran.

Contradictions dans la position américaine

La déclaration de Trump selon laquelle les États-Unis ne sont pas impliqués militairement repose sur une distinction technique : l’absence de forces américaines directement engagées dans les frappes. Cependant, la fourniture de bombes perforantes, de missiles THAAD et de renseignements constitue une implication indirecte significative. Ces livraisons, autorisées par Washington, ont permis à Israël de surmonter ses limites opérationnelles, notamment l’absence de bombardiers lourds capables de transporter des munitions massives. En avril 2025, Trump avait bloqué un plan israélien de frappes, insistant sur des négociations nucléaires menées via Oman. Pourtant, les livraisons de munitions en juin suggèrent un changement de posture ou une acceptation implicite de l’action israélienne.

Des sources américaines révèlent que l’administration Trump a intensifié la collecte de renseignements depuis avril 2025 pour anticiper une frappe israélienne, partageant des données sur les sites nucléaires iraniens avec le Mossad. Cette coordination, combinée à l’information préalable de Trump sur l’opération du 13 juin, contredit l’idée d’une non-implication totale. L’Iran perçoit ce soutien comme une complicité, accusant les États-Unis d’avoir rendu l’attaque possible. La présence de bases américaines dans la région, essentielles pour toute opération d’envergure, renforce cette perception, d’autant que Téhéran a menacé de cibler ces bases en cas de représailles.

Contexte diplomatique et négociations nucléaires

Les frappes israéliennes interviennent dans un contexte de pourparlers nucléaires fragiles. Depuis avril 2025, les États-Unis négocient un nouvel accord avec l’Iran via des discussions indirectes à Mascate, visant à limiter l’enrichissement d’uranium à 3,67 %, contre 60 % en 2025, proche du seuil militaire. Une sixième session de négociations était prévue le 15 juin, mais les frappes, survenues à la veille, risquent de faire dérailler ces efforts. L’assassinat d’Ali Shamkhani, conseiller clé du Guide suprême et figure centrale de la diplomatie nucléaire iranienne, a été perçu par Téhéran comme une tentative israélienne de saboter les négociations, renforçant les accusations de complicité américaine.

Trump, qui a retiré les États-Unis de l’accord nucléaire (JCPOA) en 2018, cherche à conclure un nouvel accord pour empêcher l’Iran d’acquérir une arme nucléaire. En février 2025, il a averti Netanyahou que des frappes pendant les négociations nuiraient à cet objectif. Cependant, la fourniture de munitions et de renseignements suggère que Washington a anticipé, voire facilité, l’action israélienne, tout en maintenant une posture publique de neutralité. Cette ambiguïté reflète la volonté de Trump de soutenir Israël tout en évitant un conflit direct avec l’Iran, qui pourrait menacer les intérêts américains dans la région.

Potentiel militaire et implications régionales

Capacités militaires d’Israël

Israël dispose d’une armée technologiquement avancée, avec un budget de défense de 24 milliards de dollars en 2025. Son armée de l’air, pivot de l’opération du 13 juin, compte 350 avions de combat, dont 50 F-35 furtifs, capables de pénétrer les défenses iraniennes. Les frappes, mobilisant 200 appareils et 330 munitions, ont démontré une capacité de projection à longue distance. Le système antimissile multicouche (Arrow 3, David’s Sling, Iron Dome), renforcé par les missiles THAAD américains, a intercepté la plupart des 200 missiles iraniens d’octobre 2024. Avec 170 000 soldats actifs et 465 000 réservistes, mobilisés le 13 juin, Israël maintient une force robuste. Son arsenal nucléaire non déclaré (80-200 ogives) reste une option de dernier recours. Cependant, la dépendance aux munitions américaines, comme les bombes perforantes, limite son autonomie pour des frappes contre des sites fortifiés.

Capacités militaires de l’Iran

L’Iran, avec un budget de 12 milliards de dollars, privilégie une stratégie asymétrique. Ses 610 000 soldats actifs et 150 000 Gardiens de la révolution contrôlent plus de 3 000 missiles balistiques, comme le Shahab-3, et des drones, comme ceux lancés le 13 juin. Les frappes israéliennes d’octobre 2024 et de juin 2025 ont affaibli ses défenses aériennes, mais l’Iran conserve une capacité de riposte massive. Son programme nucléaire, retardé par les attaques sur Natanz et Fordow, reste une menace, avec un stock d’uranium enrichi à 60 %. La perte de commandants clés limite la coordination, mais le vaste territoire iranien et ses 88 millions d’habitants offrent une résilience stratégique.

Implications régionales

Les frappes ont intensifié les tensions régionales. L’Arabie saoudite et Oman ont condamné l’opération, la qualifiant de violation de la souveraineté iranienne, tandis que la Jordanie a fermé son espace aérien par crainte de représailles. Une guerre ouverte pourrait perturber les marchés pétroliers, l’Iran étant un acteur clé de l’OPEP, entraînant une flambée des prix mondiaux. Les bases américaines au Qatar et à Bahreïn, vulnérables aux missiles iraniens, risquent d’être ciblées, malgré les mises en garde de Rubio. L’ONU, par la voix d’António Guterres, a appelé à une « retenue maximale » pour éviter un conflit régional.

Perspectives : une implication ambiguë dans un contexte explosif

La fourniture par les États-Unis de bombes perforantes, de missiles THAAD et de renseignements à Israël constitue une implication logistique et stratégique significative, contredisant les affirmations de non-implication militaire. Cette assistance, soumise à des autorisations strictes, a permis à Israël de surmonter ses limites opérationnelles, notamment pour frapper des sites nucléaires fortifiés. L’information préalable de Trump et la coordination des renseignements renforcent l’idée d’une complicité tacite, malgré la rhétorique diplomatique de Washington.

Les frappes menacent les négociations nucléaires, cruciales pour éviter une militarisation du programme iranien. L’Iran, humilié par les pertes subies, pourrait intensifier sa riposte, ciblant des bases américaines ou poursuivant son enrichissement d’uranium. Les prochains jours, marqués par les drones iraniens et la mobilisation israélienne, détermineront si la diplomatie peut encore contenir l’escalade ou si la région basculera dans un conflit plus large, avec des conséquences économiques et géopolitiques majeures.

libnanews.com