Le conclave pour l’élection du nouveau pape débutera le 7 mai, comme l’ont décidé les cardinaux lundi. C'est à partir de cette date qu'un nouveau pape sera élu.
Les cardinaux de l’Eglise catholique ont pu fixer, lundi, la date de début du conclave pour élire le successeur du pape François. Ils se sont réunis à Rome pour une nouvelle congrégation générale, une assemblée préparatoire. Le conclave des cardinaux électeurs devait se tenir entre 15 et 20 jours après le décès du pape, soit entre le 5 et le 10 mai.
Jusqu'au 4 mai, la période de deuil traditionnelle de neuf jours, la «Novendiale», est en vigueur. Le pape François a été enterré samedi dans l’église Santa Maria Maggiore à Rome. Le chef de l’Eglise catholique est décédé le lundi de Pâques à l’âge de 88 ans. L’élection du pape, qui se déroulera dans la chapelle Sixtine, sera tenue dans le plus grand secret.
Ces deux cardinaux de l'aile la plus conservatrice de la curie romaine seraient l'anti pape François
Le cardinal Sarah est considéré comme le chef de file des conservateurs
Le Cardinal Peter Erdo est la figure de proue de l'église catholique hongrois
Ils n’ont pas été créés cardinal par le pape François. Ils ne font donc pas partie des 108 cardinaux (sur 135 en âge de voter) qui ont été choisis par le chef défunt de l’Eglise catholique romaine. Le cardinal guinéen Robert Sarah, 79 ans, est depuis des années le chef de file du clan conservateur au sein de la Curie, le gouvernement du Vatican. Le cardinal Hongrois Péter Erdo, 72 ans, est un spécialiste du droit canon, réputé bien plus intransigeant que François sur des questions sociétales, telles l’homosexualité.
Robert Sarah et Péter Erdo ont tous les deux une solide carte à jouer durant le conclave, la réunion des cardinaux qui désigneront le nouveau pape, qui s’ouvrira à Rome le 5 mai. Le premier, souvent cité comme l’un des favoris parmi les «papabile» (les cardinaux les plus susceptibles d’accéder au trône de Saint-Pierre), serait le premier pape africain de l’histoire.
Popularité africaine
Il semble toutefois devancé, en termes de popularité sur son continent, par le cardinal archevêque de Kinshasa, Fridolin Ambongo Besungu. Robert Sarah, archevêque de Conakry de 1979 à 2001, créé cardinal par le pape Benoît XVI en 2010, connaît en revanche toutes les arcanes politiques du Saint-Siège. Et il peut compter sur le soutien de certains médias conservateurs, comme l’a montré en 2022 sa présence controversée à la une de «Paris Match», l’hebdomadaire désormais détenu par le milliardaire breton très catholique Vincent Bolloré.
Péter Erdo a ressuscité, dans l’histoire de la Hongrie, une figure révérée: celle du Cardinal Tamys Bakocz qui, au XVIe siècle, s’opposa en vain à la main mise de la famille Médicis sur la papauté. Ce dernier fut aussi un prélat engagé dans une croisade contre les Turcs. Ajoutez à cet arrière-plan historique l’actualité politique hongroise, avec la proximité connue entre le Premier ministre Viktor Orbán (converti au protestantisme) et le président russe Vladimir Poutine et l’on voit que son élection donnerait lieu à une interprétation très politique.
Issu du joug communiste
Le cardinal Péter Erdo, nommé par le pape polonais Jean-Paul II, est l’archétype du prélat issu du joug communiste, et donc peu enclin à faire preuve de sympathie envers les prêtres de gauche d’Amérique latine, d’Afrique ou d’Asie. Son programme pourrait bien être celui d’une contre-révolution catholique.
Robert Sarah et Péter Erdo disposent chacun de réseaux puissants. On dit qu’ils ont le soutien de l’Opus Dei, l’ordre ultraconservateur de l’Eglise catholique.
Ils sont en revanche en butte à l’hostilité des cardinaux plus modérés, et de l’aile progressiste du conclave incarnée par le cardinal Matteo Maria Zuppi, archevêque de Bologne et aumônier de la communauté Sant’Egiddio, connue pour son travail diplomatique au service de la paix et pour ses œuvres sociales. Alors que le Pape François vient d’être inhumé dans la basilique Sainte-Marie-Majeure à Rome, c’est cette aile progressiste, incarnée aussi par le cardinal Phlilippin Luis Antonio Tagle, qui semble avoir le vent en poupe.
Contre le mariage des prêtres
Signe de sa stratégie à venir durant le conclave? Le cardinal Robert Sarah a publié un livre consacré au silence. Il avait aussi coécrit un essai avec le pape Benoît XVI, dont il était l’un des plus proches collaborateurs. Leur credo commun? Ne rien céder aux modes: «Les vagues du relativisme submergent la barque de l’Eglise. Les apôtres ont eu peur. Leur foi s’est attiédie. L’Eglise aussi semble parfois vaciller. Au cœur de la tempête, la confiance des apôtres en la puissance de Jésus était ébranlée. Nous vivons ce même mystère.»
Et de se prononcer vigoureusement contre le mariage des prêtres: «Notre célibat est une proclamation de foi. Il est un témoignage, car il nous fait entrer dans une vie qui n’a de sens qu’à partir de Dieu. Notre célibat est témoignage, c’est-à-dire martyre.»
La force du Hongrois Péter Erdo, longtemps plus jeune membre du sacré collège, est d’avoir présidé la coordination des conférences épiscopales d’Europe. Il connaît sur le bout des doigts les églises du Vieux Continent. Il a aussi la main sur les finances du Vatican, ce sujet si tabou, comme membre du collège des six cardinaux chargés du budget, appointés par le pape François. Mais dans l’Eglise, que vaut la clef du coffre-fort face à l’esprit Saint?
Richard Werly