Visiblement, les objectifs de l’offensive lancée par Kiev dans la région de Koursk, ont évolué au fil du temps. Ainsi, selon un responsable ukrainien sollicité par l’AFP quelques jours après le début de cette opération, il s’agissait initialement de détourner les forces russes de la région de Donetsk, où les troupes ukrainiennes sont en difficulté.
L’appétit venant en mangeant, il a ensuite indiqué que le but était désormais « d’étirer les positions de l’ennemi, de lui infliger des pertes maximales, de déstabiliser la situation en Russie […] et de transférer la guerre sur le territoire russe ». Voire, éventuellement, d’utiliser les territoires conquis comme monnaie d’échange lors d’éventuelles négociations de paix.
Le 14 août, le ministre ukrainien de l’Intérieur, Igor Klymenko, a expliqué que cette incursion visait à créer une « zone tampon » afin de protéger la population frontalière des bombardements russes.
« Nous continuons de progresser dans la région de Koursk. Depuis le début de la journée, nous avons parcouru entre un et deux kilomètres dans différentes zones », a précisé, peu après, le président ukrainien, Volodymyr Zelensky, via Telegram. « Nous atteignons notre objectif stratégique », s’est-il félicité.
De leur côté, les forces russes ont assuré avoir mis en échec des « tentatives » de percée de « groupes mobiles ukrainiens » en direction de cinq localités de la région de Koursk, dont celle de Levchinka, située à 35 km de la frontière. Cependant, les autorités locales ont annoncé avoir ordonné aux civils d’évacuer le district de Glouchkovsky. Depuis le débit de l’offensive ukrainienne, 120’000 personnes ont déjà été déplacées.
Par ailleurs, l’état d’urgence a été décrété dans la région voisine de Belgorod, après des frappes ukrainiennes [voire une incursion].
Quoi qu’il en soit, l’offensive ukrainienne n’a pas encore permis de faire baisser la pression exercée par les forces russes dans la région de Donetsk. Et pour cause : selon le ministre lituanien de la Défense, Laurynas Kasčiūna, Moscou a redéployé des troupes depuis l’enclave de Kaliningrad, coincée entre la Pologne et la Lituanie, vers la région de Koursk.
« Je dis au peuple lituanien : ‘Regardez comment les Ukrainiens se battent pour vous, car grâce à eux, ils [les Russes] doivent retirer leurs troupes de Kaliningrad’. Nous appelons cela la ‘démilitarisation’ de Kaliningrad et cela se produit grâce au courage de vos militaires, grâce à vos décisions », a dit M. Kasčiūna, lors d’une rencontre avec M. Zelensky, à Kiev, le 13 août.
Pour rappel, le territoire de Kaliningrad pourrait potentiellement être utilisé par la Russie pour s’assurer du contrôle du corridor de Suwalki, seul point de passage entre les États baltes et le reste de l’Otan [et de l’Union européenne].
Seulement, si la Russie a redéployé certaines de ses unités du sud de l’Ukraine vers « d’autres zones », elle maintient une force pression militaire dans le secteur de Donetsk. C’est en effet ce qu’a admis Dmytro Lykhoviy, le porte-parole de l’état-major ukrainien, ce 15 août.
Selon l’agence Reuters, un officier de la 59e Brigade motorisée ukrainienne a déclaré qu’il n’y avait « pas eu de relâchement de la pression russe » dans la région de Donetsk. « L’ennemi, malgré ce qui se passe sur son territoire, maintient toujours le gros de ses troupes dans cette direction », a-t-il ajouté.
En outre, l’état-major général ukrainien a fait état, ce 15 août, de « 58 combats » entre ses troupes et les forces russes près de la ville de Prokrovsk, soit « le plus grand nombre jamais signalé en une seule journée ce mois-ci ».
D’après l’AFP, la Russie a même revendiqué la capture du village d’Ivanivka, situé à une quinzaine de kilomètres de Prokrovsk, qui constitue un important noeud logistique pour l’armée ukrainienne.
« L’ennemi est arrivé presque jusqu’à Pokrovsk, à un peu plus de 10 kilomètres de la périphérie de la ville », a confirmé Serhiy Dobriak, le chef de l’administration militaire locale. D’où son appel aux habitants à évacuer la ville.