Des conseillers d'Etat et aux Etats, des députés cantonaux et nationaux, des élus locaux et collaborateurs d'administrations, des représentants des divers services de secours... Tout le gratin était réuni ce vendredi à Morges pour assister à une conférence sur la protection de la population. Parmi les invités, il en était un qui ne se montre que rarement en public. Et pour cause, il s'agissait du big boss de l'espionnage suisse.
Christian Dussey a commencé par expliquer, à sa manière, le travail du Service de renseignement de la Confédération (SRC). «La vision qu'a la population de l'espionnage est influencée par les séries et les films. Elle est donc très romancée. Mais il y en a une qui se rapproche vraiment de la réalité: Le Bureau des légendes. Que ce soient les techniques utilisées ou les défis à relever, elle est très juste. La principale différence avec la réalité, c'est que ce qui se passe en une heure à la télé représente six mois de travail et le job fait par une personne correspond en réalité à celui de quinze collaborateurs.»
La démocratie serait un obstacle et une faiblesse
Parmi les difficultés de son quotidien, le chef des espions souligne par exemple qu'avant de pouvoir pénétrer des systèmes informatiques étrangers, il lui faut l'autorisation de trois conseillers fédéraux. Ou encore des dilemmes moraux: «Si on attrape un poseur de bombe, mais qu'on ne sait pas où la bombe se trouve, doit-on le torturer pour sauver des centaines de vie? C'est le problème avec la démocratie. Elle entraîne des obstacles dont ne s'embarrassent pas nos adversaires.» Le directeur du SRC a aussi rappelé que pour 30 collaborateurs de son service, il y a un fonctionnaire dont le travail est de les surveiller.
En tout, le SRC compte 450 espions. Certains bossent sur le terrain et d'autres devant un ordinateur. Mais c'est surtout 32 fois moins que l'Allemagne, par exemple, dont la population est environ 9 fois supérieure. «J'adorerais pouvoir vous dire que cela suffit. Mais nous en sommes au stade où nous devons refuser des collaborations internationales, par manque de moyens» a conclu, Christian Dussey.
«Les réseaux ont bouleversé le monde»
«Avant, les gens s'informaient surtout en regardant le journal télévisé. Mais désormais, chaque personne voit sa réalité à travers son téléphone portable. Avec la multiplication des réseaux sociaux, nous vivons tous dans des réalités alternatives. Les réseaux ont bouleversé le monde et, un jour, on va le payer», analyse Christian Dussey. En lien avec l'émergence des réseaux sociaux, la radicalisation «exceptionnelle» de nombreux jeunes, âgés de 15 à 17 ans, l'inquiète au plus haut point.
Xavier Fernandez